Always trying to be better |John|

ALWAYS TRYINGto be better

«VAS TE FAIRE FOUTRE CARLA! J’VEUX PLUS VOIR TA SALE TRONCHE DE TOUTE MA VIE!»

Bonjour. Je m’appelle Charlotte, mais je vous en prie, appelez-moi Charlie. Je vis une existence assez confortable et paisible, quoique ponctuée de conflits. Ma grande sœur et moi nous entendons comme chat et chien depuis toujours, et ce n’est pas en lui hurlant dessus de la sorte et en sortant en claquant la porte une belle journée de la fin avril que j’y changerai quelque chose. Le bruit explosif de ma colère contre les joncs de la porte me rassure cependant, tout autant que l’absence de Carla dans mon champ de vision. D’un geste furieux, je me détourne de la maison, gravis les marches de l’entrée et me propulse à travers l’herbe fraîche qui borde la demeure, avant de chercher du réconfort sous le couvert des arbres de la réserve. Oui, on peut me nommer «fille sauvage qui vit dans une putain de forêt» car c’est en partie vrai. Ma sœur aînée (qui est aussi ma tutrice légale) travaille ici et nous y habitons toutes les deux dans une petite cabane modeste. Dans ma traînée frustrée se tient Akemi, ma Galifeu, qui tente de me calmer un peu. Eryn la Mascaïman la suit pas à pas, les autres ont réintégré leurs Poké Ball depuis longtemps pour fuir cette énième prise de bec. La raison? Mes études. Encore et toujours mes foutues études. Mon aînée semble oublier que je n’ai aucun intérêt à les poursuivre au-delà de cette année et que ma véritable destinée se trouve dans le dressage des Pokémon.

Parfois, je la déteste, mais ce matin alors que je m’éloigne en direction de la grange où dort encore Agatha, je regrette déjà mes paroles. Carla s’est fâché parce que j’ai obtenu une note désastreuse à mon contrôle de mathématiques et elle a bien raison. Je n’ai fourni aucun effort. La seule chose à laquelle j’arrive à penser ces derniers temps c’est l’été, et ces temps formidables que je passe à l’Arène de Zazambes à apprendre auprès de Sky. J’aimerais qu’elle comprenne que mes journées à l’école m’étouffent. Alors que je réveille la Corboss, elle m’offre un petit sourire doux. Il s’agit du Pokémon de Carla, mais elle m’aime comme une fille. Elle accepte aussitôt la petite balade que je lui propose, sans se douter que je tente par le fait même de fuir mon aînée. Ses grandes ailes se déploient, Akemi et Eryn grimpent à leur tour en s’accrochant à moi, et elle s’envole dans le ciel d’un bleu limpide de cette journée magnifique. Le contact de l’air frais contre ma chevelure me calme aussitôt et je soupire longuement en indiquant à Agatha le chemin à suivre vers mon sanctuaire : les montagnes du Sud d’Enola. J’y trouve régulièrement la paix, car ce lieu est peu prisé par les hommes, et adoré des Pokémon de mes types préférés d’entre tous : Sol et Combat. La Corboss descend doucement en direction de cette chaîne de montagnes, à un endroit qu’elle connaît bien.

Nous nous posons près de l’entrée d’une grotte et cette fois, mon amie ailée décide de ne pas me suivre. Ces cavités de roc la rendent très nerveuse. Je lui caresse la tête et lui offre un gros bisou avant de prendre le chemin de la grotte. L’obscurité m’enveloppe, mais la Galifeu fait apparaître une faible flamme au bout de ses doigts qui éclaire notre chemin. L’endroit est vide, comme d’habitude. De drôle d’échos se font entendre ici et là quand des Pokémon sauvages, enfouis dans ce labyrinthe de pierre, se livrent des combats invisibles. Eryn soupire de contentement alors que nous nous avançons dans ce lieu qu’elle aime particulièrement. La marche m’aide à y voir plus clair dans mes idées, mais aussi à chasser le souvenir désagréable des examens à venir et de la pression constante ressentie de la part de Carla. Au bout d’une heure d’errance entre copines, je propose de nous arrêter dans une grotte plus près de la surface. Un trou énorme dans son plafond de roc laisse passer une lumière vive, et un petit ruisseau souterrain courre entre les rochers. La Mascaïman court s’y désaltérer, mais Akemi reste près de moi, prenant ma main avec douceur pour me signifier une fois de plus sa présence.

«Merci vous deux. Je déteste crier mais je ne peux pas m’en empêcher. Merde, Carla est vraiment énervante parfois…»

Devant mes plates excuses, mes alliées font mine de n’avoir rien entendu. Elles se redressent toutefois d’un bond quand des pas se font entendre dans un couloir de pierre non loin.

«Euh… qui va la?»

Moi qui voulais être tranquille. C’est raté.

(c)Golden

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feat. Antoine

Mes pas se font de plus en plus lents. À mesure que je m’avance, je regrette de plus en plus. Sur mes talons, Edwin s’avance, enjoué comme à son habitude. Il observe de droite à gauche, commentant tout ce qu’il voit d’une voix sereine. L’entendre ainsi me fend le cœur. Le pauvre n’a aucune idée de ce que je m’apprête à faire. À la fois honteux et déterminé, je me contente d’avancer, faisant mon possible pour ne pas craquer. Je n’ose pas le regarder. Après tout, chaque regard me rendra la tâche encore plus difficile. Nos pas nous mènent vers l’entrée de la caverne, dans laquelle nous pénétrons en silence. Sans même prendre la peine de faire une pause, je continue à m’avancer dans le tunnel rocailleux, le Hariyama toujours sur les talons. Je finis par m’arrêter après une courte marche, dans un endroit qui me semble convenable. N’ayant pas remarqué mon arrêt, le Pokémon de type combat me fonce dedans, me faisant trébucher, mais il me rattrape à la dernière seconde avant de s’élancer dans une escalade d’excuses. Le regard baissé, je ne l’écoute pas. Autre chose envahi mes pensées. J’ai un trouble bien plus grand qu’un simple accident maladroit.

Prenant une grande respiration, je me retourne vers le gros Pokémon, qui m’offre un regard inquiet, craignant de m’avoir blessé. Je cherche mes mots, mais en vain. Comment lui annoncer? Comment ne pas le blesser? Cette tâche me semble impossible, et pourtant incontournable. Nous ne pouvons pas continuer ainsi. Il mérite tant. Tant de choses que je n’arrive pas à lui offrir. Il mérite une vie pleine d’aventure, pleine de rebonds. Pleine de succès comme d’échecs. Peu importe, il mérite mieux que ce qu’il a avec moi. Je ne peux pas me résoudre à le garder confiner à une Pokéball toute la journée. Combien de fois a-t-il eu l’occasion de sortir, depuis sa capture? Deux, trois fois? Peu importe, c’est trop peu, et je ne peux pas continuer ainsi. Edwin a beau sourire et ne pas se plaindre, je sais qu’au fond, cette situation ne lui plait pas. Il a tant de potentiel. Tant de force qui n’est pas exploitée. Tant d’énergie qu’il n’a pas l’occasion de dépenser. J’ai été ingrat de le capturer. J’aurais dû le laisser vivre sereinement dans sa caverne, j’aurais dû lui laisser la chance de rencontrer un dresseur qui aurait su exploiter ses capacités pleinement. J’aurais dû, et pourtant je ne l’ai pas fait. Alors aujourd’hui, nous sommes ici pour réparer les torts causés. Les lames aux yeux, je lève le regard vers le Hariyama, qui m’offre un sourire affectueux.

-Ed… C’est ici qu’on se quitte.

Un phrase si simple, et pourtant, il ne la comprend pas. Un peu surpris, il continue à sourire, attendant la suite. Mais il n’y a pas de suite. Ma phrase s’arrête là. Adieu. Il n’y a rien à rajouter. Edwin doit partir faire sa vie. Vivre pleinement. Je lui rends sa liberté, il n’y a rien d’autre à rajouter. Je pose une main contre son ventre, sans toutefois le quitter du regard. Petit à petit, son sourire s’efface. Il comprend, lentement. Même s’il le refuse, il commence à comprendre. Il recule de quelques pas, secouant la tête. Il ne veut pas comprendre, et pourtant… Je sens mon cœur se fendre. Non, ne rends pas la tâche plus difficile, Ed… Il secoue la tête de plus bel. Il ne veut pas. Il ne veut pas, et pourtant, il n’a pas le choix. Je m’approche de lui, cherchant son contact, mais il s’éloigne de nouveau. Il ne veut pas. Il refuse ce dernier contact. Il refuse de me laisser partir. Mais je n’ai pas le choix.

-Ed, non, ne le prends pas comme ça, s’il-te-plait…

Je tente une nouvelle fois de m’approcher de lui, mais à mesure que j’avance, lui recule. Je ne partirai pas sans une dernière accolade. Déterminé, je fais un nouveau pas, mais une voix me fige sur place. Surpris, je sursaute avant de me tourner vers la source du bruit. Nos pas nous ont conduit jusqu’à un petit chemin éclairé par une ouverture dans le plafond. Au milieu se tient une jeune femme et ses Pokémon. Tous trois nous observent, probablement surpris de nous voir entrer dans leur terrain de jeu. J’échappe un petit soupir, malgré moi. Merde, je vais tout de même pas faire ça en public! Je ne peux pas humilier Edwin ainsi, devant ces trois-là…

-On voulait pas vous déranger, pardon, on va aller plus loin.

J’offre un petit sourire discret à l’adolescente avant de faire signe à Edwin de me suivre. Le regard bas, le Pokémon combat m’emboite le pas, retenant des larmes. D’un pas las, il me suit, sentant son heure arriver.

(c)Golden

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C’est drôle comment mon coeur bat à la chamade. Non pas parce que je suis effrayée, je n’ai jamais peur. Surtout pas ici, dans mon royaume, mon sanctuaire, le réceptacle de mes doutes et de mes plus grandes angoisses. Seule la vision de ses pierres au-dessus de ma tête suffit à me rassurer, malgré les dangers que renferment ces galeries. L’assurance de me trouver seule dans ce lieu sacré est probablement responsable de mon bien-être. Ici on ne peut m’atteindre, on ne peut me faire du mal et voilà tout ce qui m’importe. L’idée qu’on puisse venir m’y déranger affole mon organe sanguin et je considère le couloir d’un air inquiet et un peu irrité. Ce moment qui m’appartenait vient de m’être arraché par un inconnu inconscient de venir gâcher ce moment d’intimité et de réflexion en compagnie de mon équipe. Arceus seul sait à quel point je peux apprécier ces quelques minutes de paix avec eux, loin de la routine et de cette vie qu’on tente de m’imposer. Avec eux je suis moi-même, un être à part entière un peu décalé de la réalité et des attentes sociétales, avec ses forces et ses faiblesses grandes comme des paquebots. Je resserre ma prise sur le bras d’Akemi, ma chère amie, laissant par le fait même un léger grognement s’échapper de ma gorge. Toujours aussi douce, la Galifeu se contente de sourire, laissant le jeune homme intrus venir à nous.

Je ne porte aucun regard à l’humain sitôt l’immense Hariyama parvenu dans mon champ de vision. Aussitôt, mes yeux s’écarquillent avant de se parsemer d’étoiles brillantes. Je n’ai jamais vu d’aussi beau représentant que cette espèce. Imposant, bien nourri et fier comme un paon, je remarque aussitôt quelques détails qui viennent assombrir le portrait cependant. Le regard du fier sumo a perdu son éclat pour se teinter de larmes et ses larmes épaules se sont affaissées. Aussitôt, je m’approche en sa direction, comme obnubilée par son charme irrésistible, attraction impossible que produisent tous les Pokémon de mes types de prédilection lorsque je les rencontre pour la première fois. Enjouée et joueuse comme à son habitude, Eryn m’emboîte le pas. Je marche avec énergie, d’une démarche presque brutale qui attirera certainement son attention. Avant qu’il n’aille pu franchir l’ouverture du couloir, je pose une main assurée sur l’épaule de l’Hariyama comme pour le retenir. Ce dernier, surpris, se retourne en ma direction. Je lui lance un regard grave, scrutateur, alors que je tente de déchiffrer sa peine, qui immense, me submerge moi-même. Fronçant les sourcils, peinée, je tente de le rassurer d’une caresse au bras, mais bientôt l’effet de la colère s’ingère dans mon abdomen à une vitesse fulgurante.

Je me retourne vers lui, son dresseur, un éclat violent dans le regard. Le résultat de ma petite analyse le désigne comme étant le responsable du désarroi de cette magnifique créature. Je ne peux laisser un jeune homme comme lui s’en prendre à un Pokémon, et encore moins un Pokémon comme cet Hariyama. Je pose mes deux mains sur mes hanches et le fusille du regard.

«T’as pas HONTE de faire de la peine à ton ami?»

Ma voix est basse, tranchante comme une lame de rasoir. Akemi me rejoint et observe l’inconnu avec un peu moins de méchanceté, croyant probablement qu’il n’y est pour rien comme à son habitude et qu’il existe une autre explication plausible à la peine du grand combattant. Mais je n’en crois rien. Si mes yeux pouvaient tuer, il serait mort depuis un moment déjà.

«Hariyama est un Pokémon fort et noble. Il mérite le respect. Traite-le avec considération ou je te refais la figure, capiche?»

Avec ma ceinture noire de karaté, rien ne serait plus facile, malgré la bonne tête qu’il a de plus que moi. Me retournant avec frustration, je me retourne vers le Pokémon à qui j’affiche un regard compatissant.

«Il ne t’a pas fait mal, j’espère?»

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feat. Antoine

Le regard fixé vers la pénombre se dessinant au loin dans le tunnel de roc, je m’avance d’un pas assuré, mon gros Pokémon sur les talons. J’aurais préféré faire ceci à la lumière du jour, mais comme les lieux sont déjà pris, nous devrons nous contenter d’un éclairage artificiel. J’avance à bonne allure, mais un silence soudain me freine dans mon élan. Les pas lourds du Pokémon de type combat se sont arrêtés, me signalant que celui-ci ne me suit plus. Surpris, je me retourne pour apercevoir Edwin aux côtés de cette jeune fille, qui semble le fixer avec admiration. Avec l’intention de ramener mon ami à nos besognes, je m’approche d’eux, mais alors que je m’apprête à poser une main sur l’épaule du Hariyama, un ouragan de colère s’abat sur moi. Sur un ton qui ne lui va pas très bien, l’adolescente se met à m’adresser des reproches avant de me sermonner comme ma mère avait l’habitude de le faire. Aussitôt, j’adopte une position de défense, un air sombre au visage. Nah mais elle se prend pour qui, celle-là!

-D’abord tu connais rien à l’histoire, alors ne te lances pas dans les grandes conclusions, champignon! Tu ne connais rien de nous, alors mêles-toi donc de ce qui te regarde! Nah mais je rêve!

Furieux, je la quitte du regard pour me tourner vers mon Pokémon, qui a de nouveau baissé le regard entre temps. Avec un grand soupir, il se remet en marche, prenant les devants, s’avançant dans la caverne qui s’assombrit un peu plus à chaque nouveau pas. J’ai beau ne pas apprécier l’attitude de la demoiselle, au fond, elle n’a pas totalement tord. Si Edwin se retrouve peiné, c’est entièrement de ma faute. Même si je tente de le nier, je lui ai fait du mal. Depuis sa capture, je lui fais mal. Je lui ai pris sa liberté, et tout ça simplement pour le laisser dans une balle. J’ai blessé Edwin, et à présent, je veux me rattraper. J’ai peut-être fait une erreur en m’emparant de lui en premier lieu, mais je ne laisserai pas cette petite effrontée me retirer ma chance de réparer cette erreur. Aujourd’hui je fais les choses comme il se doit, et personne ne me retirera ce moment. Edwin le mérite. Il mérite un adieu digne de lui, pas un simple petit goodbye dans la pénombre. Je cesse ma trajectoire, posant une main sur le dos de mon Hariyama afin de l’intimer à faire comme moi. Il n’est pas question qu’elle nous confine à la pénombre simplement parce qu’elle a une petite envie de se faire bronzer dans sa caverne. Un air assuré au visage, je me retourne vers la jeune fille. Je m’approche d’elle, déterminer à me faire écouter.

-Écoute, je veux déranger personne, mais on a un truc à faire tous les deux. Si tu veux bien respecter ça et nous laisser un moment, on te serait vraiment reconnaissant.

Je me tiens devant elle, sur de moi. Je ne veux pas la guerre, mais je veux donner à mon Pokémon ce qu’il mérite.

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Je déteste les mauvais dresseurs plus que tout dans cet univers. Je peux supporter qu’on s’en prenne à moi, mais les Pokémon constituent mon existence. Ils agissent en tant que protecteurs autant que de meilleurs amis, de confidents et de partenaires. Ceux qui s’en prennent à eux provoquent ma colère et ma haine profonde. En tant qu’apprentie de Sky, je ne peux laisser ce genre de comportement couler comme si de rien n’était. Pourtant, je prends mon mal en patience, en tentant de me raisonner un peu malgré toutes ces émotions négatives qui s’agitent en moi. Je n’ai aucune preuve de ce que j’avance, mais le manque de considération de l’inconnu me glace le sang. Je n’ai qu’à jeter un coup d’œil vers le colosse pour reconnaître une envie complètement irrésistible de le prendre dans mes bras pour le consoler. Celui-ci a un cœur sensible, je peux le déchiffrer dans son visage ravagé par la tristesse et l’incompréhension. Peu importe la raison qui a poussé ses émotions négatives à l’envahir de la sorte, je ne supporte pas de le voir ainsi et il me faut trouver un coupable à ce désarroi au plus vite. Aussitôt, j’entends le jeune homme s’indigner devant mes accusations et je me retourne en sa direction pour lui adresser un regard menaçant en me mordant la lèvre inférieure. Je sens mes poings se refermer avec une envie irrépressible de s’abattre sur son petit visage parfait.

«Hey l’bonhomme! Je me mêlerai de mes affaires quand ça me plaira, t’entends? Moi les gens qui abusent de leurs Pokémon ça me soûle, même que je trouve ça carrément dégueulasse alors si tu penses que je vais fermer ma gueule alors que ton Hariyama est triste comme ça, tu te trompes gravement mon cher! Pis j’suis PAS un champignon!»

Voilà que je recommence à m’emporter. Malgré les mains douces d’Akemi contre mes bras, je tremble de rage. Personne ne me dira de me mêler de mes affaires lorsqu’il s’agit d’une histoire pour tous. Les abus concernent non seulement les victimes, mais aussi tous leurs proches, tous les témoins, toute la société même! Le respect des Pokémon fait partie de mes valeurs et je ne laisserai jamais personne me dire que je suis dans le tort en tentant de défendre un innocent. Il s’agit de qui je suis, au plus profond de moi. Une défenseuse des droits de ces créatures bien plus intelligentes que nous les humains, qui ne connaissent que la violence et la destruction. Un peu comme moi à l’instant qui ferait de la charpie avec ce bougre qui se croit tout permis. À présent il se retourne vers le Pokémon et il soupire alors que l’Hariyama poursuit son chemin. Passant rapidement de la colère pure au regret, je tends une main vers lui qui est déjà loin dans la cavité, parti pour une raison qui m’échappe. Peut-être lui ai-je fait peur avec mes cris?

Finalement, le jeune homme arrête son allié et m’explique qu’il doit faire quelque chose avec son Pokémon et qu’il apprécierait ma discrétion. Je reste un instant bouche bée à le regarder, incertaine de quoi répondre, avant de réaliser ce qui se passe ici. Le dresseur veut rendre sa liberté à l’Hariyama. Mais celui-ci refuse d’être laissé de côté. Aussitôt, je recule d’un pas, une main sur le cœur. Akemi m’observe avec désarroi; elle aussi a compris ce qui se trame ici. Je n’abandonnerais jamais un des miens. Je les aime trop, beaucoup trop profondément. J’ai besoin de chacun d’entre eux et ils ont besoin de moi. Sans eux je ne serais plus qu’une ombre perdue dans un flot de souvenirs et de cauchemars. Leur présence s’avère nécessaire non seulement pour leur aide, mais surtout pour l’amitié qu’ils m’offrent tous les jours. Comment… peut-il… simplement l’envisager? Le cœur en miettes, je me recule à nouveau, me butant sur Eryn qui couine car je lui ai écrasé la queue. Je la récupère dans mes bras et lève un regard bien malgré moi vers l’inconnu.

«Tu ne vas pas… l’abandonner si?»

Ma voix a perdu toute violence. À peine audible dans la cavité aux mille échos, elle semble prête à se briser à tout moment.

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Je peine à maintenir mon regard plongé dans le sien sans vaciller. Je dois y mettre toute mon énergie, mais en fin de compte, je finis par plier et détourner les yeux. Fixer la paroi rocailleuse me semble bien plus facile. Au moins, lui ne me juge pas. Mais malgré tout, elle a raison de me juger ainsi. Elle a le droit, et je ne dirai pas le contraire. Je m’en veux probablement bien plus qu’elle ne m’en veut. Parce qu’elle ne connait pas toute l’histoire, mais moi si. Moi je connais le moindre détail. Moi je connais. Je sais tout, et c’est pour ça que ce choix a été si difficile. Moi je connais Edwin comme personne. Je sais de quoi il est capable. Je connais sa gentillesse, je connais ses goûts, ses craintes, ses joies comme ses peines. J’ai beau ne pas toujours avoir fait les bons choix quant vient temps de dresser mes compagnons, mais tout ceci ne change pas le fait que ce Hariyama est mon ami. Et il le sera toujours. Dans une balle, dans une caverne ou dans la poche d’un autre dresseur, il sera toujours dans mon cœur. Il aura toujours une place spéciale au plus profond de moi. Toujours. Voilà pourquoi c’est si difficile. Lui dire au revoir, aujourd’hui, me déchire le cœur comme cette adolescente ne peut même pas l’imaginer. Elle peut bien penser ce qu’elle veut de moi, je n’ai pas décidé ceci à la légère. À vrai dire, j’ai dû peser le pour et le contre pendant plusieurs jours avant de finalement arriver à cette décision qui ne me plait probablement pas plus qu’à Ed.

Je ne dois pas être bien subtil, car bientôt, la jeune fille prononce ces paroles qui résonnent en moi comme un écho. La situation était déjà plutôt délicate, mais les mots ne peuvent qu’empirer les choses. Il y a véritablement un monde entre les pensées et les paroles. Ses mots me frappent comme un mur. Je baisse aussitôt le regard. Un mélange indéchiffrable d’émotions se mêle en moi. Tristesse, honte, déception… Tout y est. C’est donc ce que je suis venu faire? L’abandonner? Regardons les choses en faces. Ce que moi j’appelle la liberté, lui le voit sans doute comme l’abandon. Me suis-je réellement arrêté sur ce que lui en pense, ou me suis-je simplement contenté de voir ce que moi je voulais voir? Jamais je ne m’étais penché sur ce que mon Hariyama pouvait réellement ressentir quant à ma décision. Mais il finira bien par comprendre, pas vrai? Il s’en remettra. Il oubliera, et repartira à zéro. Peut-être fera-t-il son chemin seul, ou alors il croisera un de ces jours un dresseur apte à lui fournir ce dont je n’ai pas été en mesure de lui donner.

-Il sera mieux comme ça. Je sais que ça peut paraitre étrange, mais je le fais parce que je l’aime. Je l’aime, je l’adore… Et parce que je l’aime tant, je veux lui donner ce que je lui ai enlevé.

Je marque une pause, le temps de me racler la gorge. Je sens l’émotion venir, mais je continue, cette fois en me tournant vers le concerné.

-Edwin, je peux pas te priver de ta liberté plus longtemps. Je n’ai pas ce que tu recherche. Je sais que tu le trouveras, ici, quelque part. Il faut que tu comprennes… Je veux pas qu’on se quitte comme ça. Tu dois comprendre. Je veux que tu saches que je le fais par amour.

Ces paroles, je ne sais pas si je les ai prononcé pour eux, ou pour moi. Peut-être rendront-elles la tâche plus facile? Oh, j’en doute. À peine ais-je terminé mon discours que je sens une larme solitaire me glisser le long de la joue. Moi qui m’étais juré de ne pas pleurer…

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Eryn vient de comprendre ce qui se passe et ne jette un regard complètement perdu. Voilà que l’idée la percute elle aussi, qu’elle ne sait quoi faire d’une telle révélation choc. Même si l’inconnu n’a pas encore confirmé ce que j’ai avancé un instant plus tôt d’une voix incertaine, nous savons qu’il s’agit d’une réalité qui existe. Des dresseurs qui abandonnent leurs alliés, mais aussi des Pokémon qui fuient leurs maîtres. Dans cette situation, l’Hariyama semble dévasté à l’idée de se retrouver seul dans la nature. Il n’a pas envie de se défaire du jeune homme, qui, mal à l’aise, laisse choir ses épaules dans un geste défaitiste. Son attitude défensive s’est envolée pour laisser place à un être totalement perdu par sa décision. Pour ma part, je me tiens non loin de lui, en silence, serrant ma petite crocodile contre moi pour me rassurer moi-même. Rien ne m’apparaît plus cruel que ce à quoi j’ai failli assister et pourtant, je n’arrive plus à en vouloir au garçon. Tout en lui suggère qu’il n’en est pas venu à cette décision pour rien, qu’il l’a longuement envisagé et qu’elle continue de le torturer. Finalement, il s’explique, fuyant mon regard. Il veut lui rendre sa liberté qu’il lui a prise, et voilà une raison noble de se départir de son Pokémon. Simplement, le désarroi du grand colosse continue de me rendre mal à l’aise.

Je reste silencieuse pour une fois, les lèvres closes sur une tête en ébullition. Je tente quelque part de trouver une solution à ce tableau qui me fend le cœur, sans y parvenir. Aucune de mes pensées ne fait de sens, et je m’embrouille plutôt dans une myriade d’émotions contradictoires qui m’emporte loin au-delà de ce que je vis présentement. J’essaie de me figurer ce que Sky ferait à ma place, et j’en viens à la conclusion qu’il tenterait de calmer le jeu entre ces deux-là. Il ne jugerait pas les autres comme je l’ai fait trop précipitamment. Baissant la tête, je le laisse s’adresser à son cher Hariyama sans interférer. Je sens que ces explications sont aussi en quelque sorte dirigées vers moi, de sorte que je puisse abandonner mon idée qu’il agit pour lui au lieu de pour son Pokémon. Je soupire alors qu’il termine son discours, m’approchant le rouge aux joues sous l’effet de la honte qui me ronge un peu plus à chaque minute. N’y tenant plus, je m’incline légèrement devant lui, les paupières closes avec fermeté pour éviter de le regarder.

«Je suis désolée monsieur. J’ai réagi trop vite et je vous ai jugé… Je regrette à présent et je vous demande de me pardonner.»

Je me redresse finalement, un peu plus pâle, sans toutefois oser croiser son regard. Je serre un peu Eryn contre ma poitrine, avant de m’expliquer.

«Voyez-vous, je suis l’apprentie du Champion Sky Vassily de l’Arène de Zazambes et j’ai comme devoir de redresser les mauvais dresseurs. J’ai cru que vous lui aviez fait de la peine, ce que je n’aurais pu supporter… Mais je réalise à présent que vous agissez ainsi pour son propre bien et qu’au contraire, vous désirez honorer ses qualités exceptionnelles en lui permettant de vivre une vie meilleure dans la vie sauvage ou auprès d’un autre dresseur qui le comprendra mieux que vous ou qui pourra lui apporter du bonheur…»

Je me retourne cette fois vers l’Hariyama en faisant mine de ne pas avoir remarqué la larme qui coule sur la joue de l’inconnu à présent. Je pose une main douce sur le bras du redoutable guerrier en lui offrant un petit sourire.

«Edwin c’est ça? Écoute, je sais que ce n’est pas facile, mais ton dresseur a les meilleures intentions du monde. Ne va pas penser que tu n’es pas le guerrier extraordinaire au grand cœur que tu es. Le jeune homme ici présent te rend la liberté pour que tu trouves ton bonheur.»

Je me retourne vers ce dernier avec un léger soupir.

«Encore une fois, je suis désolée. Je me retire si vous le souhaitez.»

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Je ne porte plus aucune attention à la jeune adolescente qui assiste à la scène en silence. Ses réactions m’importent peu, à présent. Tout ce qui compte à mes yeux, c’est qu’Edwin comprenne ma décision. Je ne veux pas le voir triste. Je ne veux pas qu’il pense que je l’abandonne. Je ne veux pas qu’il s’en veuille. Je veux qu’il sache que j’ai toujours apprécié sa puissance, sa douceur, et sa présence à mes côtés. Je ne veux pas qu’il pense être dans le tort, aujourd’hui. Parce qu’il n’a jamais rien fait de mal. Jamais. Il a toujours été un Pokémon exemplaire, et c’est bien pour cette raison que nous sommes ici. Je ne peux simplement pas le laisser penser autrement. Et je ne partirai pas de cette caverne tant que le Hariyama ne l’aura pas compris, peu importe les réactions de l’adolescente. Elle peut bien ne pas être d’accord, elle peut bien penser ce qu’elle veut, je ne la laisserai pas gâcher notre moment. Edwin le mérite.

Je m’apprête à demander à la jeune fille de nous laisser, quand celle-ci s’incline sans prévenir, me présentant ses excuses. Surpris par sa réaction, je ne sais d’abord pas trop comment réagir. Elle que me semblait si colérique quelques instants plus tôt, la voilà à présent compréhensive, indulgente. Je reste silencieux devant sa réaction, tenant de comprendre ce qui vient de se passer. Elle m’explique sa réaction, et moi, je l’écoute. Je l’écoute sans rien dire, tout comme elle a écouté les paroles qui étaient destinées à mon compagnon. Lui aussi l’écoute, s’assurant de ne pas manquer un seul détail de ses mots. Je peux voir briller en lui une lueur d’admiration face à la jeune fille. Le simple fait qu’elle prononce le nom du champion de Zazambes réveille en lui une émotion qu’il n’a jamais connu à mes côtés. De l’excitation, peut-être? Je ne saurais dire, mais une chose est certaine, les dires de la jeune fille l’intéressent grandement. Et lorsque celle-ci s’adresse finalement directement à lui, je le sens se détendre. Elle accomplit avec lui exactement ce que j’ai tenté d’accomplir en venant ici. Elle le rassure, elle rehausse sa confiance. Elle lui fait comprendre ce que je n’ai pas réussi à lui expliquer. Mais comment fait-elle? Comment parvient-elle à obtenir ce lien avec lui, alors qu’elle ne le connait pas? Comment peut-elle faire quelque chose avec mon Pokémon alors que je n’y parviens pas moi-même? Je reste muet devant la scène, tenant de comprendre ce qui se passe. La jeune femme finit par me proposer de s’éloigner, pour nous laisser de l’intimité, mais à la dernière seconde, alors que celle-ci s’apprête à s’éloigner, je la retiens d’un mouvement involontaire.

-Attends.

Alors que je réalise mon geste, il est déjà trop tard. Je ne sais pas trop ce qui m’a pris, mais quelque chose en moi ne veut pas la voir disparaître. C’est étrange, vu les réactions initiales de la jeune femme, mais elle m’inspire confiance. Elle… Elle me fait penser à la dresseuse déterminée, proche de ses Pokémon. Elle me fait penser au dresseur que je souhaite pour mon ami. En à peine quelques secondes, elle l’a ciblé, elle l’a compris. Et lui, lui a tout de suite ressenti quelque chose. Je peux le voir dans sa manière de la regarder. Dans sa manière de boire ses paroles. C’est quelque chose que lui et moi n’avons malheureusement jamais partagé. Je pose d’abord mon regard sur le Hariyama, cherchant son approbation. Il ne lui faut pas bien longtemps à comprendre mon intention, et il me répond par un sourire timide. Suite à son accord, je me retourne vers l’adolescente, appréhendant la suite.

-Je sais pas trop comment formuler ça…

Je marque une pause, le temps de chercher mes mots. Je ne sais pas comment lui demander une telle chose. Après tout, ce n’est pas parce que la jeune fille a agit en protectrice que celle-ci serait prête à le prendre sous son aile. Mais malgré tout, je dois tenter le coup. Je le dois, pour Ed. C’est ma chance d’être là pour lui, de prendre mes responsabilités en main et tenter de l’aider.

-Je ne tournerai pas autour du pot plus longtemps… Est-ce que… Est-ce que tu accepterais de le prendre?

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Au final, cette journée m’aura rendu profondément triste. Je garderai toujours le souvenir de cette paire à qui la vie a refusé la construction d’un lien significatif, malgré leur amitié. Je penserai à Pokémon tout triste, un peu humilié aussi à l’idée d’être relâché, et son maître qui le fait pour son propre bien, pour lui offrir un avenir meilleur. Je crois que je me sens ainsi car j’essaie de me figurer ce que ces deux-là peuvent ressentir à cet instant fatidique et je préfère vivement ne pas assister à la conclusion de tout ceci. Je respecte aussi le fait que ce dresseur prenne du temps pour lui faire ses adieux. Peut-être qu’ils se remémoreront de bons souvenirs tous les deux, peut-être qu’ils rigoleront et se quitteront moins amers. Je le souhaite vivement pour eux. Akemi, près de moi, n’en mène pas bien plus large que moi, profondément touchée par leur histoire qui se conclue de façon si tragique. Au final, Edwin va bien, il sera dans un milieu naturel confortable. Il aura de quoi se nourrir, toutes sortes de cachettes à découvrir, des adversaires à la tonne aussi. Au moins, le jeune homme a su choisir un milieu parfait pour son type et ses différents besoins. Je me demande s’il a effectué une recherche au préalable ou s’il a seulement de l’instinct. Peu importe. Je devrais arrêter de me poser tant que questions alors que notre rencontre s’arrête ici.

Ou peut-être pas. Alors je pense que tout a été dit et que je m’apprête à les quitter pour de bon, un cri retentit non loin de moi, me figeant sur place. C’est moi ou le garçon vient de gueuler «attends»? Je me retourne vers lui, visiblement surprise, tout comme mes deux alliés qui le considèrent en silence. Je jette un coup d’œil vers l’Hariyama, dont le visage s’est soudainement illuminé. J’ai dit quelque chose qui a provoqué tout ceci ou…? Non décidément, je ne comprends pas du tout ce qui se passe. Le dresseur se bute un peu sur ses mots et rallonge mon attente. Une fébrilité inexplicable m’a saisie. Puis le verdict tombe. Il me demande de devenir la dresseuse d’Edwin. Mon sang ne fait qu’un tour et Eryn se met à sautiller dans mes bras. Pendant un long moment, je ne fais que fixer le jeune homme, les yeux ronds comme des billes, complètement bouche bée. Il est sérieux? Ou je rêve? Je dois rêver. Oui, voilà, je vais me réveiller de ce rêve trop beau pour être vrai d’un instant à l’autre. Ma bouche s’ouvre finalement pour ne former rien de très intelligible, un tout incohérent qui doit ressembler à :

«Shefounshneeee?»

Je sens une patte griffue se poser sur mon épaule. Il s’agit de la Galifeu qui fait signe de regarder en direction de l’Hariyama. Celui-ci m’observe avec espoir, un espoir assez univoque sur ses intentions. Il aimerait véritablement être avec moi. Aussi insolite et inattendue que soit cette demande de la part de son dresseur, elle est bien réelle et partagée avec le Pokémon. Tremblant à présent comme une feuille, je cherche ma voix et me passe une main dans le visage.

«C’est… c’est sérieux? Je… Je ne sais pas… je ne sais pas quoi dire… Je suis… Je suis vraiment honorée…»

Pour ne pas me mettre à pleurer devant lui je me retourne vers l’Hariyama. Je m’approche de lui pour le considérer d’un air tendre, les mains tremblantes d’excitation. J’ai toujours rêvé d’avoir un représentant de son espèce, mais en plus celui-là est carrément dans une classe à part. Puissant et sensible tout à la fois. Il m’a l’air de posséder un cœur doux et courageux.

«Edwin… Je suis Charlie Laurens. Je serais vraiment honorée d’être ta dresseuse si c’est ce que tu souhaites.»

Derrière moi, Akemi encourage le colosse d’un regard doux tandis que dans mes bras, Eryn s’agite toujours autant, ne sachant pas très bien canaliser toute son énergie.

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Always trying to be better

feat. Antoine

Je ne réalise qu’à ce moment l’ampleur de ma demande. Je me sens rougir légèrement, craignant de la voir refuser. Peut-être ais-je fais une gaffe. Comment réagira Edwin si la jeune femme refuse mon offre? Le pauvre se sentira encore plus abandonné. Peut-être aurais-je dû y réfléchir un peu plus avant de me lancer ainsi, tête baissée, et proposer au premier venu d’élever mon Pokémon à ma place. Il ne se passe que quelques secondes avant que l’adolescente ne réagisse, et pourtant, j’ai plutôt l’impression qu’il s’écoule des heures. Elle lâche quelques mots incompréhensibles, probablement suite à la surprise. J’imagine que ce n’est pas tous les jours que des étrangers lui proposent de telles choses. Je pose une main sur l’épaule de mon Pokémon, le temps de laisser la jeune femme reprendre ses sens. L’Hariyama la regarde avec espoir, et l’imaginer se faire briser le cœur une nouvelle fois me fait peur. Il semble Réellement désirer suivre cette dresseuse…

Après ce qui semble une attente interminable, elle finit par parler de nouveau, mais cette fois avec de vrais mots. Elle hésite un instant, cherchant ses mots, mais finit par les trouver, à mon grand soulagement. Est-elle en train d’accepter? C’est bien ce que ses paroles me laissent penser. Je ne saute toutefois pas encore de joie. L’échange n’a toujours pas encore eu lieu, après tout. J’ose toutefois adresser un sourire à mon Pokémon, qui me le rend aussitôt. Il retourne ensuite son regard vers celle qui se présente à lui sous le nom de Charlie Laurens. Je sens une petite larme solitaire couler contre ma joue. Alors, c’est fait? Ais-je véritablement trouvé à Ed une vraie dresseuse qui saura l’aimer et le chérir comme il se devrait? À en juger par l’émotion qu’exprime l’adolescente, je suis convaincu. Ils sont faits pour aller ensemble, il n’y a aucun doute. C’est elle qui aurait dû le capturer, et non moi. Mais aujourd’hui, leur destin les rattrape. Touché par la scène se déroulant devant mes yeux, je peine à ne pas partir en larmes. Mais je ne dois pas pleurer. Pas encore. M’essuyant les yeux, je décroche de ma ceinture la balle d’Edwin, et garde quelques instants mon regard plongé dans le rouge de la capsule. L’imaginer loin de moi crée en moi une sensation étrange. Je peine à imaginer mon Hariyama entre les mains d’une autre. Et pourtant, je sais que c’est ce qu’il y a de mieux pour nous tous. Je sais qu’avec eux, il sera heureux. Je prends donc mon courage à deux mains, et tends à Charlie la balle bicolore, évitant de croiser son regard.

-Tiens, prends-là, c’est sa balle…

Il me faut quelques secondes avant de relâcher la Pokéball aux mains de la jeune fille. Il n’y a plus de retours en arrière. Il est à elle, à présent. Edwin pourra enfin être heureux. Et pourtant, je sens une boule se former en moi. L’idée de ne jamais le revoir me peine plus que je ne l’aurais imaginé. Je lève mon regard vers Charlie, retenant ma peine.

-Je t’en pris, prends bien soin de lui. Il le mérite.

Les yeux pleins d’eau, je me retourne vers le colosse. Le moment tant redouté est arrivé. Il est temps de se dire au revoir…

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ALWAYS TRYINGto be better

J'ignore ce qui pousse ce colosse impressionnant à me désigner telle sa dresseuse aujourd'hui. Peut-être est-il impressionné par mon titre, qui honore son type. Peut-être a-t-il simplement besoin qu'on s'occupe de lui, qu'on croit en lui comme je le fais depuis que je l'ai vu se dessiner dans la cavité rocheuse. Peut-être a-t-il reconnu en moi certaines qualités dont j'ignore la nature. Peu importe. J'ai compris le message et loin de moi l'idée de le laisser tomber à présent, surtout après ce qu'il vient de vivre. La joie qui s'est peinte sur son visage grave me comble moi-même de bonheur et je sens quelques papillons s'élever au creux de mon estomac. Drôle comment une simple balade dans mon sanctuaire préféré s'est changée en véritable aventure. Moi qui cherchais du réconfort auprès de cette cachette profondément enfouie dans la montagne, j'y ai trouvé un nouvel allié, allié inespéré dans mon équipe qui n'aspire qu'à grandir et à accueillir des nouveaux membres. C'est avec une joie immense que je le prend sous mon aile. Pas par pitié ou par obligation, mais parce que j'en ai réellement envie et que je vois déjà se tisser entre nous une formidable relation qui durera longtemps j'en suis certaine. J'ai déjà hâte de le présenter aux autres, et à Carla aussi... Que je devrai affronter à mon retour à la maison. L'idée que Edwin m'y accompagnera me fait presque oublier le souvenir de ma soeur aînée et de notre prise de bec.

Finalement, le jeune homme me présente la balle de son Hariyama qui officialise ce don. Le regard luisant d'étoiles sincères, je m'en empare avec délicatesse, comme si je tenais un objet hautement fragile entre mes mains. Finalement, je la serre près de mon visage, scrutant la réaction du Pokémon combat maintenant que tout ceci est fait. Il me sourit et se rapproche de moi, comme pour me rassurer à son sujet. Il est bel et bien mon Pokémon à présent et non celui de l'inconnu. Je relève le regard vers le brun qui semble avoir du mal à garder contenance sur ses émotions, probablement très vives à présent. Peut-être se retient-il même de pleurer, ce qui m'arrange bien parce qu'un garçon qui pleure, en plus d'être très moche, me fait toujours réagir d'avantage. Il doit aussi se montrer courageux pour Edwin et ne pas lui donner l'espoir de regretter son choix, sinon le doute s'insinuera en lui aussi. Pour le reste, il me dit de bien m'en occuper, car il le mérite. À cette mention, un léger sourire doux et un peu amusé s'esquisse sur mes lèvres et je pose une main décontractée contre ma hanche pour comme le rassurer. J'ai perdu toute forme de gêne pour être simplement moi-même, calme et détendue.

«Sincèrement, tu n'as pas à t'inquiéter de ceci. Je prendrai soin d'Edwin comme je le fais avec chacun de mes alliés. Il fera partie de notre famille au même titre que les autres.»

À cette mention, Akemi s'avance d'un pas et sourit au jeune dresseur comme pour appuyer mes dires. Mes Pokémon ne sont pas pour moi des objets. Ce sont des amis, des partenaires d'entraînement et de combats. Ma famille. Je me retourne vers l'Hariyama avec un sourire éclatant. Il me répond un peu timidement, mais de façon sincère. Je reporte ensuite mon attention sur le jeune homme.

«Ne pense pas que c'est fini. Tu pourras toujours passer à l'Arène pour venir le voir. Tu n'auras qu'à demander pour Charlie et ils sauront me trouver. Je suis certaine qu'Edwin serait ravi de te revoir.»

À cette mention, Edwin hoche la tête, visiblement heureux de cette idée. Finalement, j'effectue un pas en arrière.

«Je vous laisse vous dire au revoir. Je serai au fond du couloir Edwin. Au revoir monsieur, s'il vous plaît, reviens nous voir.»

Je m'éloigne dans l'obscurité, leur laissant leur moment d'intimité. Quand Edwin revient, nous partons en direction de l'entrée. Agatha nous y attend et elle a l'air surprise en voyant s'approcher le colosse. Je le rappelle à sa Poké Ball et nous nous envolons en direction de la maison. J'y entre en courant quelques minutes après être atterrie.

«CARLA, CARLA, CARLAAAAA! VIENS VOIIIIIR!»

J'imagine que nous avons fait la paix parce qu'elle accourt avec empressement.

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feat. Antoine

Il ne s’est jamais débattu. Je m’en souviens encore, comme si c’était hier. Le petit Makuhita s’était placé devant moi, tout rond, amical. Jamais il n’a levé les poings. Sans doute se cherchait-il un dresseur depuis un petit moment, déjà. Sans doute a-t-il cru que je ferais l’affaire. Que j’étais le bon. Il s’était laissé capturer sans même me quémander un combat pour voir de quoi j’étais capable. Il a tout de suite placé sa confiance en moi. Je revis ce moment avec une clarté déconcertante. Je revois l’émotion dans son visage, la première fois qu’il s’est retrouvé à mes côtés, à Baguin. Je me souviens la joie lorsqu’il a mit KO le Givrali du champion glace. Et la détermination dont il a fait preuve devant de Lokhlass, même s’il n’avait aucune chance. Jamais il n’a baissé les bras. Jamais je n’oublierai cette fierté qu’il a pu ressentir, lorsqu’il a évolué, après cette balade dans ces mêmes cavernes où nous nous trouvons à présent. Comment pourrais-je oublier tout ceci? C’est impossible. Peu importe la distance nous séparant, jamais je n’oublierai. Edwin est et restera toujours cet ami avec qui j’ai partagé trop peu de moments. Aujourd’hui, nos chemins nous séparent, mais je sais qu’au fond, nous restons liés par cette rencontre d’il y a quelques mois. Qu’il reparte avec moi ou avec cette adolescente, rien n’y changera.

Je me retourne, l’air étonné, vers Charlie lorsque celle-ci m’assure qu’il me sera toujours possible de le revoir. Est-elle sérieuse? Ses paroles me touchent. Elle respecte ce qu’Edwin et moi avons pu partager, même si elle est à présent la nouvelle dresseuse du Pokémon de type combat. Rien ne l’y oblige, et pourtant, elle l’offre sans hésitation. Je lui offre un sourire sincère, touché par son geste.

-Merci, Charlie.

La jeune fille s’éloigne, m’offrant de l’intimité pour dire au revoir à mon ami. Je la laisse disparaître dans la pénombre de la caverne avant de me retourner vers le Hariyama, qui m’observe à présent d’un air tendre. Une pointe de tristesse persiste, mais je peux constater chez lui un sentiment de profond bonheur. Je sais qu’il s’ennuiera de nous, mais je sais aussi qu’il sera heureux. Je me contente de lui offrir un sourire. Je ne veux pas pleurer. Je ne veux pas qu’il se mette à culpabiliser. Je dois être fort pour lui, malgré l’émotion qui monte en moi. Je glisse une main contre son bras et l’attire vers moi dans une accolade amicale. Je lui glisse quelques paroles à l’oreille avant de le relâcher et m’éloigner de quelques pas. L’Hariyama fait à son tour quelques pas vers l’arrière, lançant quelques coups d’œil vers l’arrière, où à disparût sa nouvelle dresseuse. Il veut aller la rejoindre. Je lui offre un petit clin d’œil avant de lui faire signe d’aller la rejoindre. L’Hariyama hésite quelques secondes, mais finit par s’éloigner, un sourire timide au visage.

-Bonne chance, Ed...

Je lui envoie la main une dernière fois avant de me retourner, et retourner vers la lumière de l’entrée.
Aller, la vie continuer.

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