Relique et découvertes
Évolution d'Alastair
Mauvaise humeur. Comme à chaque année que vient le 13 avril, journée d'anniversaire des jumeaux et tout aussi détestée par l'un que l'autre, Clive n'a pas envie qu'on le dérange. Il fait comme si tout allait bien en affichant son habituelle poker face que peu savent décoder, comme si il ne remarquait pas les regards inquiets de ses petits frères et de sa mère, comme si c'était un jour comme les autres et que son esprit n'était pas en permanence occupé par un certain quelqu'un dont la seule pensée lui pourrissait sa journée. Alors oui, il a maintenant vingt-cinq ans et se rapproche dorénavant techniquement plus de la trentaine que de ses vingt ans (bien que l'idée lui semble toujours surréelle), mais il préfère se concentrer sur un autre détail.
Quand sa mère lui avait parlé de cette cavité secrète qu'elle avait trouvé dans la cave il y a peu, Clive avait cru à une blague. C'est vrai, quoi, ce genre de trucs n'existait généralement que dans les films, ou chez les autres : il lui était difficile de concevoir que la maison qui l'avait vu grandir abritait cela. Toutefois, maintenant qu'il se trouvait dans ladite cave et voyait clairement la serrure, bien dissimulée auparavant sous de la tapisserie et un mur un peu plus creusé que ce qu'on aurait pu croire, il ne pouvait pas l'ignorer plus longtemps. Décidé à savoir ce qui se trouvait derrière cela, il avait décidé d'employer les grands moyens et de crocheter la serrure, remerciant par ailleurs le fait d'avoir pris le temps d'apprendre certaines techniques au cours de son entraînement militaire. La finesse et la délicatesse étaient parfois plus utiles que de taper dans le tas, surtout qu'il ne savait pas ce qui se trouvait derrière cette ouverture et que c'était peut-être fragile. Alastair, qui l'accompagnait, était assez curieux même si il restait un peu à l'écart, jetant des coups d’œil de temps à autre vers ce que faisait son dresseur.
Quelques minutes d'efforts plus tard, et la serrure finissait par céder. Clive poussa un soupir de satisfaction alors qu'il faisait glisser la porte carrée sur les côtés ; celle-ci disparut dans la partie du mur qui était creuse. La cavité était poussiéreuse, sombre, et le hérisson grimaça de dégoût en sentant ses mains toucher des toiles d'araignées, délogeant au passage une madame à six pattes qui trainassait là. Sa main finit alors par toucher ce qui semblait être une sorte de vieille boîte en métal assez rudimentaire et rouillée, et il la sortit sans plus attendre.
Avec un peu d'angoisse, il l'ouvrit, se demandant ce qu'il allait bien pouvoir trouver à l'intérieur. À sa grande surprise, il y trouva cinq enveloppes, portant chacune le nom d'un des membres de leur famille dans l'ordre suivant ; Kagami, Faust, Clive, Felix, Elliot. L'écriture de son père était clairement reconnaissable : il avait cette sorte d'élégance dans les mots qui le distinguait complètement de l'écriture hachée et irrégulière de Kagami, par exemple. Et juste au dessus desdites lettres, une sorte de petit badge, un symbole argenté en forme de lion à trois têtes. Clive plissa les yeux, ne l'ayant jamais vu auparavant, ou du moins il n'en avait aucun souvenir. Il nota dans son esprit de poser des questions à sa mère un jour sur ce truc, et le rangea précieusement dans la poche de sa veste.
Son regard se posa alors sur les cinq lettres, et il hésita. Il était clair et net qu'elles venaient de son père, mais sachant qu'il n'avait aucune idée de ce qui se trouvait là-dedans... Peut-être étaient-ce juste des messages, peut-être autre chose. Et il n'était pas vraiment sûr de vouloir apprendre la moindre mauvaise nouvelle, surtout que le sujet de son père était encore très sensible pour Clive ; il lui en voulait sûrement toujours un peu, même si il faisait de son mieux pour dépasser cet état d'esprit. Impossible toutefois ; des années difficiles à voir sa famille partir en morceaux avaient fait naître en lui une rancœur ineffaçable.
Il regarda celle qui portait son prénom, et se mordit les lèvres. Après quelques secondes d'hésitation, il décida finalement de refermer la boîte et de l'emporter avec lui : il les distribuerait en temps et en heure. Mais pour l'instant, il allait rester loin, très loin de ces souvenirs douloureux. Si il tentait d'éviter le souvenir de son jumeau comme la peste, il n'allait très certainement pas laisser celui de son père le déranger non plus.
« Me demande si il y a quelque chose d'autre dans ces murs... » murmura-t-il à lui-même d'un ton curieux en se relevant
Quelques secondes à peine après avoir dit cela, un gros 'boum' suivi d'un 'crac' se firent entendre. Clive se retourna brusquement et écarquilla les yeux avant de hurler de panique. L'Osselait venait de donner un grand coup d'os sur le mur, formant une grande fissure. Agacé de ne pas avoir réussi, il resta immobile quelques secondes avant de se changer peu à peu en Ossatueur ; Clive, trop ébahi, ne réagit pas tout de suite. Le troisième coup fut bien plus violent que les précédents et un nuage de poussière se mit à voleter en l'air tandis que l'officier fixait la faille béante.
« NON ALASTAIR, ON NE CASSE. PAS. LES MURS ! »Alors qu'il geignait d'avance en imaginant la facture pour son pauvre portefeuille en entendant Kagami descendre les escaliers en urgence, alertée par les sons inquiétants qui résonnaient, la main de Clive vint toucher le petit symbole dans sa poche, par réflexe. Oui, il avait quelques questions qui demanderaient des réponses. Mais les lettres qu'il gardait précieusement contre lui lui faisaient se dire qu'il avait peut-être trouvé son cadeau d'anniversaire : un peu en retard, certes, mais tout de même.