Renaissances II ; Les Ombres. [OS]

Série d'OS - Renaissances :

Les Ombres.
Ft. Jackson Weber, PDV Mina & Jazz, 1er avril 2015 au crépuscule.

« Es-tu bien sûre, Judith?
- Aucun doute possible. S'il y en avait, je ne serais pas en train de te l'annoncer, papa, & encore moins avec tant de certitudes.
- Je sais bien, mais.. C'est tout de même un sacré retournement de situation.
- On est d'accord, j'ai moi-même encore du mal à y croire.. Que doit-on faire maintenant? Tu sais où la trouver?
- Oui, elle va toujours au même endroit. Tu as moyen de le contacter?
- On a gardé contact, en effet.
- Alors fais-le. Dis-lui que ton père, Jake, a recueilli un Galvaran blessé & qu'il aurait besoin de l'avis d'un spécialiste. Mène-le sur le port de Zazambes pour 19 heures, je vous rejoindrai là-bas.
- Je m'en occupe. »

L'appel de Sylvia en fin de matinée m'a surpris, j'en conviens, & sa requête encore plus. Depuis quelques mois que nous nous connaissons, nous n'avons jamais réellement parlé famille ; entre autres parce que je n'ai nulle mémoire de la mienne, & que pleine de précautions louables, elle n'a donc jamais vraiment évoqué la sienne. Ainsi ce n'est qu'aujourd'hui, avec cet appel inattendu, que j'ai appris son lien de sang avec Jake, Éleveur de renom & spécialiste des pokémons de type Normal avant tout, mais tout de même amplement capable de se débrouiller avec tous les autres ainsi qu'il a su le démontrer lors de sa carrière. Des faits dont elle ne m'a guère parlé mais que je connaissais déjà, puisque par habitude j'ai fait le tour des Éleveurs 'importants' de l'île en arrivant celui-ci en particulier avait attiré mon attention & une promesse à moi-même de le rencontrer un jour, son expérience & son influence ayant beaucoup fait parler de lui par le passé. Alors apprendre qu'il souhaitait me rencontrer, & même qu'il avait besoin de mon expertise pour soigner un pokémon tel que Galvaran ; qui même s'il touche à ma spécialité électrique, n'en est pas moins un pokémon de sa propre spécialité.. J'ai en effet été surpris, grandement, & je dois avouer qu'un certain scepticisme m'a également saisi, particulièrement en apprenant que l'homme souhaitait que je le rejoigne au port de Zazambes plutôt que directement à sa Pension ; étrange, n'est-ce pas? Pour autant, je n'ai pas manqué de me rendre au rendez-vous, guidé par la jeune Ranger, d'autant plus que je dois beaucoup à celle-ci qui m'a rendu une mince part de mon passé. Si je peux aider son père, c'est bien la moindre des choses, n'est-ce pas?

J'avoue n'avoir été nullement déçu en tout cas en rencontrant l'Éleveur. Il semblait entièrement tel que je l'avais imaginé ; fier & droit malgré l'infirmité qui l'oblige à s'appuyer sur une cane, la seule attitude de la magnifique Kangourex l'accompagnant témoignait de ses talents toujours présents. Respectable par sa seule prestance, visiblement honnête & attentif ; le genre de personne qui réfléchit avant d'agir, qui est honnête également avec soi-même & qui sait quand sont ses limites, quand il a besoin d'aide.. & surtout qui n'appelle pas à l'aide pour rien. Le saluant chaleureusement & acceptant la poignée de main qu'il m'avait tendue avec le sourire, je lui accordais une part de ma confiance & décidais de garder pour moi mon scepticisme. D'une part après tout, concernant le problème à traiter, talentueux ne signifie pas sans faille, & il est parfaitement respectable que de savoir reconnaître ses faiblesses. Mais d'autre part, la plus importante des deux au passage.. Je ne comprenais toujours pas pourquoi il tenait tant à me rencontrer ici, plutôt que chez lui. Que je sache même si son fils a repris la Pension, il y vit toujours.. & j'aurais su m'y rendre sans y être guidé, ainsi que je l'ai dit à Sylvia avant qu'elle insiste pour garder ce point de rendez-vous fixé par son père. Enfin, si cela me posait déjà question.. Le chemin emprunté par l'homme pour aller vers le nord-ouest de la ville, là où se situe sa demeure, n'a rien arrangé à mes interrogations. Pourquoi passer par la plage pour nous rendre en un autre lieu de la ville, situé en bordure également mais parfaitement à l'opposé du point de départ? Pourquoi pareil détour, ou contour même, puisque le trajet le plus simple serait de traverser directement la cité? Je ne saurais le dire ; ou plutôt je ne suis pas certain que l'explication donnée par Jake, avec une assurance absolue sur le ton de l'évidence, me soit crédible. Juste pour éviter le monde fou du centre & aller plus vite autant que plus sereinement ; mais depuis le temps, il doit connaître bien assez la ville pour maîtriser des chemins de traverse plus simples & plus courts, n'est-ce pas? Quel intérêt alors de choisir plutôt un passage par les plages les plus désertées en cette heure crépusculaire?

La souffrance reste la même. Année après année, elle ne change pas d'un pouce. Vive & intolérable, plus présente & plus puissante à cette date en particulier. Cette date maudite entre toutes, celle qui nous apportait de la joie en un temps si lointain à présent, & qui aujourd'hui ne m'apporte plus que tourments éternels & douleur lancinante. C'était notre anniversaire, à mon identique & moi-même. Désormais, c'est celui de son meurtre. De l'incendie qui a ravagé ma vie. De la perte inacceptable de mes enfants. Du dernier souffle de l'Amour de ma vie. J'ai trente-quatre ans, aujourd'hui. Elle ne passera jamais les vingt-neuf. Car cela fait cinq ans, jour pour jour, que le Drame s'est produit. Cette catastrophe, ce véritable tsunami qui a renversé à jamais nos existences. Je n'ai désormais plus que mon fils aîné & quatre de mes pokémons, de ce passé lointain & presque utopique. & des souvenirs merveilleux, mi doux mi amers tant le manque les étreint. Tout le reste.. Est parti en fumée. Sans crier gare, mes jambes cessent de me supporter, & je m'effondre les genoux dans quelques centimètres d'eau salée ; le bord de la mer au Sud d'Enola, où je me suis enfuie ce matin comme chaque année depuis que je réside sur cette île. Oh cette chute ne me surprend guère ; je n'ai pas de force en ce jour, après tout. Jamais. Cette chute, elle ne fait que crisper mes doigts sur la petite coupelle que je tiens entre mes doigts gantés depuis mon arrivée ce matin, dans l'attente silencieuse d'allumer la mèche pour regarder cette petite flamme s'éloigner sur les flots. Le seul hommage que je puisse leur rendre, ma sœur reposant de l'autre côté des mers & les autres n'ayant même pas eu le droit d'être enterrés puisqu'ils sont partis en cendres en même temps que notre demeure. Une larme glisse sur ma joue pâle, tranchante & douloureuse, alors que dans mon dos le soleil disparait sous l'horizon.

Mes réflexions & interrogations muettes sont interrompues après quelques dix minutes de marche silencieuse dans le sable, au côté de l'ancien Hôte de Pension qui ne semble pas chercher à troubler mes songes ; encore un point surprenant, auquel je ne m'arrête cette fois-ci pas, faute d'avoir eu réellement le temps de m'en étonner ou du moins de m'y arrêter, avant ladite interruption. Non pas la venue de quelqu'un, ou quoi que ce soit qui vienne physiquement troubler mes pensées. Non, cette interruption prend la forme toute simple d'une silhouette obscure attirant mon regard vers le bord de l'eau, tel un aimant intrigant. Une silhouette familière qui fait aussitôt écho en moi, ombre mystérieuse couverte d'une lourde cape noire, agenouillée devant la mer pour poser sur les flots une coupelle dans laquelle repose une simple bougie. Je ne vois pas son visage, pas même une seule parcelle de sa peau puisque des gants noirs couvrent ses doigts, mais elle a d'ores & déjà attiré toute mon attention, me faisant oublier tout le reste autour ; Jake, le pokémon à soigner, la plage, l'illogisme de passer par là.. Rien ne subsiste hormis l'Ombre, vers laquelle mes pas se sont détournés sans que je ne m'en rende vraiment compte. Comme hypnotisé, voilà qui me décrirait bien, attiré tel un aimant par cette mystérieuse femme qui ne m'a jamais semblé si réelle qu'à cet instant, alors qu'elle n'a jamais été autre chose qu'une illusion hantant mes pas & mes nuits depuis que je me suis éveillé sans souvenirs. Elle semble presque palpable, alors que ses mains fines déposent tel un trésor la petite bougie allumée dans les vagues, pour la regarder s'éloigner doucement dans l'obscurité crépusculaire.. Ma main se tend d'elle-même, hésitante, vers Elle qui paraît d'un coup si réelle. Comme craignant de la voir s'évaporer de la même manière que tous les rêves qui m'ont porté son image depuis cinq ans désormais. Alors s'élève un son frêle & brisé, qui suspend immédiatement mon geste incertain.

- J'espère qu'au moins, les anges s'occupent bien de vous..

Cette voix.. Milliers d'échos dans mon esprit. Milliers de souvenirs revenant soudain, sans crier gare. Si familière, & si lointaine à la fois. D'où la connais-je, d'où la connais-je si bien, alors que dans aucun de mes songes l'Ombre n'a jamais parlé? Cette voix féminine aux accents magnifiques, que j'entends chanter mille mélodies, que j'entends m'appeler, que j'entends murmurer avec douceur. Cette voix qui me réchauffe le cœur d'être seulement parvenue à mes oreilles. Je ne remarque même pas que Thor s'est écarté de moi pour contourner l'Ombre il y a plusieurs instants déjà. Je ne vois pas le sourire énigmatique de Jake, nullement surpris de nos réactions. Je suis juste tout à cette voix écho du passé, aux souvenirs multiples qu'elle me rappelle, comme la clef de ma mémoire enfin retrouvée. Sans même que je le réalise, mes genoux ont ployé & je me suis trouvé à terre, juste derrière elle qui s'est retournée dans un sursaut à ce son inattendu. & mon souffle se coupe, alors que je la vois, que je croise son regard nocturne dans lequel je me suis tant & tant de fois noyé, du temps où rien ne nous séparait. Elle n'a pas changé, pas même un peu. Mon Ombre, mon Ange, est comme toujours identique à elle-même, & il ne m'a suffit que d'un regard pour la reconnaître sans la moindre hésitation. Simplement en croisant ses yeux brillants d'incompréhension.

- .. Que..

Mon murmure se brise & s'effrite avant même de s'être formulé, oubliant tout ce que je m'apprêtais à dire, toute protestation acide à ce dérangement, à l'instant précis où je le vois. Fantôme inespéré. Mirage fou. Est-ce un nouveau pas dans cette folie qui me guette si souvent? Viendrais-je même de mourir subitement, foudroyée sans raison, pour Le voir alors que je suis éveillée? La légère brûlure sur ma joue gauche, exposée à un ultime rayon de soleil lorsque je me suis tournée vers cette vision improbable, semble pourtant indiquer que je respire encore. Espoir, trouble, surprise, bonheur, incompréhension, amour, égarement, souffrance, désarroi.. Tant & tant de sentiments tournoient en mon cœur affolé, tourbillon infernal.

- Mina..

Sa voix seule me coupe le souffle, provoque un bond prodigieux de mon cœur dans ma poitrine de ce simple murmure. Il tend la main vers moi, hésitant & livide. L'air au moins aussi perdu que moi, des larmes troublant ses yeux d'émeraude. Les miens sont probablement dans le même état. Oh mon amour, es-tu réel? Est-ce bien toi, mais comment peux-tu être là? Mes paupières se ferment d'elles-mêmes alors que le dos de sa main effleure ma joue, savourant ce contact chaud & volatile qui m'a tant, tant manqué. Ses mains si douces, si tendres. Une caresse légère, comme n'osant pas y croire de crainte d'être encore déçu, encore brisé, comme pour se prouver, nous prouver, qu'il ne s'agit pas d'une illusion. Un état d'esprit semblable au mien. Mais ça semble bien réel, si réel. C'est sa voix, son visage, ses yeux, son odeur, sa peau.. C'est tout ce qui fait qu'il est lui. C'est un contact si vrai, provoquant telle vague d'émotions identique au passé, que ce ne peut qu'être vrai. Une illusion n'a jamais su être si réaliste, même les mieux réussies. Un rêve ne saurait être si net. Serait-ce possible que, par un quelconque miracle, il en soit réchappé? Il souffle encore mon nom, presque inaudible tant ce murmure-ci est brisé de larmes. & c'est soudain comme un électrochoc. J'éclate en sanglots incontrôlés, ces mêmes pleurs que je retiens si souvent à en exploser. Parcourant vivement le peu de distance qui nous sépare, je me blottis contre lui, me raccroche à lui comme de crainte encore de le voir disparaître, alors même que je suis enfin convaincue qu'il est bel & bien là. Le cœur en miettes & réparé tout à la fois ; étrange sensation.

S'arrachant au contact hésitant de ma main sur la peau pâle de son visage, elle se jette soudain dans mes bras en fondant en larmes. & si je reste un instant figé, interdit, je ne tarde pas à l'enlacer, serrant de toutes mes forces son corps qui a toujours été si frêle & si solide à la fois. Fermant les yeux, j'enfouis mon visage dans ses cheveux de ténèbres, pleurant moi aussi toutes les larmes qui me restaient encore. Vivante, vivante, vivante.. & bien réelle. Oh joie inespérée. Le reste du monde a définitivement disparu à cet instant, je ne pense même pas une seconde à l'autre homme présent quelques pas plus loin sur la plage, ni à nos évolitions qui doivent se retrouver avec autant d'émotion ; il n'y a qu'Elle, seulement Elle, uniquement Elle. Sans relâche, d'une voix déchirée & faible, je souffle son nom en la serrant contre moi comme si elle allait s'évaporer subitement, ainsi que le faisaient chacune de ses apparitions dans mes rêves depuis quatre ans & demi.. Oh Arceus, si longtemps.. Si longtemps sans elle. Sans même son souvenir. Mais aurais-je tenu si j'avais eu le souvenir précis de ce qui me manquait tant? Cette moitié de mon cœur qu'elle a toujours possédé..

- Tu es vivant.. Oh bon sang, tu es vivant.. Tu es vivant..

Ces larmes que je retenais jalousement pour ne jamais les exposer, ou le plus rarement possible & en tout cas pas à n'importe qui, ne semblent plus vouloir cesser de couler désormais. Cascades ininterrompues sur mes joues glacées, mais pour une fois au moins, cela ne me gêne absolument pas. Oh, Jackson a déjà vu mes pleurs, il est mon frère après tout ; mais même lui ne sait pas tout. Alors que Jasper.. Il est le seul pour qui je n'ai jamais eu le moindre secret. Jamais. Le seul face à qui je n'ai jamais tenté de contenir même un peu mes émotions. De toute manière, il a toujours lu en moi comme en un livre ouvert.. & même presque cinq ans de séparation ne sauront y changer quoique ce soit. Ces trois mots, répétés plusieurs fois comme pour imprimer leur réalité, ne font que resserrer l'étreinte dans laquelle il m'a enfermée, que je suis venue chercher ; réaction muette mais indéniable, aveu à elle seule de la raison pour laquelle il est resté absent. Il m'a fallut plusieurs longues secondes pour retrouver un filet de voix pour les formuler, il ne me suffit que d'un instant ensuite pour comprendre qu'il en croyait autant de moi, qu'il me pensait passée de l'autre côté du voile. Alors c'est comme je l'ai toujours fait que je parviens enfin à maîtriser mes pleurs ; en me concentrant sur quelqu'un important bien plus que moi. En m'écartant légèrement pour essuyer ses larmes à lui d'un geste doux, avant de passer mes bras autour de son cou pour rapprocher nos visages, poser mes lèvres sur les siennes avec tout l'amour que j'ai à son égard. Depuis toujours.

Tout est comme si rien ne nous avait jamais séparés. Nos gestes sont des plus naturels, nos attitudes l'un envers l'autre inchangées, notre compréhension mutuelle parfaite, notre amour toujours intact. Je sais qu'elle comprend, qu'elle devine quelle pensée m'a effleuré suite à son murmure répété, qu'elle sait que je pensais moi aussi l'avoir perdue.. Que là est la raison pour laquelle je ne l'ai pas cherchée, ou du moins pas trouvée puisque je ne pouvais courir qu'après une Ombre de ma mémoire perdue suite au choc de la nouvelle de sa mort après avoir déjà perdu tout le reste. Je sais que si elle ne peut deviner cette amnésie d'un claquement de doigts, le simple fait de la serrer plus fort contre moi lui aura fait comprendre sans paroles que j'en pense autant qu'elle. Elle est vivante, & c'est inespéré, comme un miracle, un petit cadeau de cette vie qui nous a déjà tant brisés l'un comme l'autre. La connaissant ainsi que je la connais, je ne suis pas surpris qu'elle s'écarte quelques secondes plus tard, les joues toujours humides mais ne pleurant plus, pour venir effacer mes pleurs d'un geste tendre, puis sceller nos lèvres doucement. Un baiser au goût de promesse, d'amour à l'état pur. Tous nos serments jamais oubliés, renouvelés tout de même, & sans la moindre hésitation. Il n'en faut pas plus à mon cœur pour exploser, comme au premier jour, comme tous les suivants. Glissant une main dans ses cheveux & l'autre dans son dos, je l'attire plus près contre moi, plus près, autant que possible, pourvu qu'on ne puisse plus jamais nous séparer. Comment y survivrai-je une seconde fois, quand ce ne fut que par chance que j'ai tenu le coup la première fois?

Je ne saurai dire s'il s'écoule une heure ou trois secondes avant que ce baiser ne doive prendre fin, nous laissant simplement front contre front, serrés dans les bras l'un de l'autre, les yeux clos & un fin sourire d'espoir aux lèvres, perdus dans un silence précieux qu'aucune de nos nombreuses questions ne vient troubler ; nous aurons tout le temps plus tard, désormais, tout le temps de nous expliquer l'un à l'autre ces longues années douloureuses, d'apprendre les raisons précises de ce qui nous a convaincus l'un & l'autre qu'il ne restait aucune chance de nous retrouver. Une ultime larme a glissé sur ma joue, perle solitaire, témoin du bonheur pur d'avoir enfin retrouvé ma place à ses côtés, de l'avoir retrouvé lui alors que je le croyais perdu à jamais, alors que je le pleurais sans relâche. Revu avant l'au-delà, par miracle.. Plus jamais, plus jamais je ne veux être séparée de lui d'aucune manière que ce soit.. Il est déjà incroyable que je lui ai survécu une fois, je n'y suis parvenue que par la promesse faite à ma Tina le même jour ; jamais je ne pourrais y parvenir à nouveau. Pas sans lui.. Jamais plus sans lui.
Je ne saurai dire combien de temps nous passons ainsi, blottis l'un contre l'autre à ne pouvoir trouver le courage de nous éloigner un peu après tant de temps de séparation, ni après combien de temps nous nous retrouvons face à Jackson qui s'est assis dans le sable à quelques pas de nous & faisait jusque là mine de ne pas nous voir, pour nous laisser en paix, nous laisser le temps précieux & nécessaire de nos retrouvailles. Respectueux, comme à son habitude, en somme. Quand enfin nous allons d'un même mouvement vers lui, il nous accueille juste d'un sourire paisible & heureux, heureux pour nous, sans dire un mot dans un premier temps, tranquille & patient. Se contentant de soutenir le regard de Jasper avec calme ; non pas un regard agressif loin de là, juste un regard mitigé entre gratitude & interrogations. Cherchant à comprendre qui est l'ex Hôte de Pension, plus précisément. Plusieurs secondes s'écoulent, avant que ne s'enfuie enfin le silence.

- Vous saviez qui j'étais, n'est-ce pas? Dès le départ. C'est pour cela que vous teniez tant au port.
- Sylvia est ma fille. Mina est ma sœur. Oui, je savais qui tu étais, Jasper Black.

Tout s'explique ainsi, les raisons réelles de son appel, l'insistance sur le point de rencontre de sa part autant que de celle de sa fille qui devait me contacter.. La relation de mon épouse à sa fratrie a toujours été très forte, ceux qui lui sont frère ou sœur sont parmi les plus importants de sa vie, & c'est rare qu'elle leur garde grand nombre de secrets ; il en reste toujours, bien évidemment.. Mais pour qu'elle ait réussi à briser le silence d'un deuil douloureux sur notre famille & notre histoire, il fallait que son interlocuteur soit quelqu'un d'extrêmement proche, en qui elle ait grande confiance ou se sache capable de croire aveuglément ; qui de mieux placé qu'un frère, même "seulement" de cœur, pour cela? Je la connais assez, & sais assez bien qu'elle n'a pas changé d'un iota sur le fond, pour savoir qu'elle n'aurait pas parlé de ça en premier à n'importe qui, bien au contraire! Un lien fraternel était donc de loin l'hypothèse la plus probable pour expliquer l'attitude posée de cet homme & son respect de nos retrouvailles avec Mina avant même qu'elle n'apparaisse, pour expliquer le fait qu'il semblait me connaître ; & cette hypothèse s'est révélée être l'exacte. Un mince sourire aux lèvres, je lui tends finalement une main avenante qu'il serre aussitôt en souriant bien plus franchement, sans once d'hésitation.

- Cela fait donc de toi mon beau-frère, alors..?
- On dirait bien. Jackson Weber, ravi de pouvoir finalement te rencontrer.

fiche by Nighty Jaegan, alias Rayquaza.

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