Cachoteries

Être ami avec Faust Donovan est parfois chiant, extrêmement même quand il est de mauvaise humeur ou bien qu'il est juste dans une de ces journées où l'expression 'pile vivante' ne suffirait pas à le définir correctement. Alors en tant que meilleur ami, Isaac a parfois le droit au pire du pire, et le jour de l'anniversaire du hérisson fait partie de ce pire. Non pas qu'entre les fois où il croyait que démarrer une bataille d’œufs dans le salon 'parce que ces saletés ne méritent que ça' était une bonne idée ou les autres où il était si intelligent qu'il lui prenait par exemple l'idée de vérifier si le poivre faisait bien éternuer en s'en mettant dans le nez. Mais ça, il y était habitué : il était en quelque sorte la nounou de son meilleur pote depuis près de vingt-deux ans, alors bon, il ne s'en plaignait plus tant que ça, se trouvant plutôt dans un état où il acceptait en grommelant ce que l'autre abruti faisait.
L'un de ces gros désavantages, c'était de le gérer le jour de son anniversaire. Si durant son enfance et son adolescence la difficulté était de supporter le fait qu'il était cent fois plus énergique que d'ordinaire (ce qui était en soi tout bonnement effrayant vu la dose de vitalité qu'avait Faust en étant plus jeune et qu'il avait toujours, d'ailleurs), avec aussi bien trop souvent les crises de colère passagères des jumeaux qui ne pouvaient tout simplement pas passer une journée sans se prendre la tête. C'était tout simplement mathématique, et Isaac avait toujours joué les diplomates entre eux pour les calmer, avec plus ou moins de réussite à chaque fois ; même si cela l'agaçait, disons qu'il se disait que les revoir de bonne humeur en valait le coût. Bien que cela lui valait de temps en temps de devenir leur victime puisque dans ces deux-là se réconciliaient, il était généralement la première cible de leurs idées tordues. Il se souvenait encore de la fois où il lui avait collé des bandes de cire sur le torse pour lui arracher des poils afin de faire le motif d'un poulet. Mais ça, c'était une autre histoire.

Depuis le fiasco de l'année dernière, soit le léger fait que Clive avait enlevé un gamin de seize ans pour forcer Faust à cesser sa méthode de gestion des conflits très mature, soit de l'autruchage (et oui c'était un mot, maintenant), Isaac s'était promis de le surveiller encore plus que d'ordinaire à cette période. Qu'il n'aime pas son anniversaire, mais soit. Mais il n'allait pas le laisser aller se soûler dans une chambre d'hôtel quelconque pour oublier ce détail de sa vie qui le tuait un peu tous les jours. Pour l'occasion, il avait été obligé de laisser Thalie, sa Gardevoir, avec lui depuis trois jours, à le surveiller constamment, pour l'empêcher de disparaître à l'autre bout de l'île. Mais avec Alice maintenant, cette possibilité avait fortement diminué. Alors que l'aîné de la fratrie Donovan le fixait d'un regard noir, Isaac leva les yeux au ciel. Alice avait tellement insisté pour faire une petite fête d'anniversaire que même son père n'avait pas pu protester, bien que le suédois savait que intérieurement, le hérisson geignait et aurait bien aimé disparaître six pieds sous terre.

« Vais chercher un carton de jus d'orange, y'en a plus. »

Il prit alors le chemin du garage où étaient entreposés les produits de ce genre qu'ils gardaient de côté, et plissa les yeux en remarquant que l'étagère de droite était légèrement déplacée. Par sécurité, Isaac alla verrouiller les portes de la pièce avant de sortir une clé de son trousseau pour l'insérer dans la serrure qui se trouvait derrière ladite étagère.
Le petit secret de cette pièce était bien l'escalier secret que l'on y trouvait et que seul lui et Faust, de par leur implication dans la résistance, savaient où trouver. C'était également une sorte de petit bunker, si jamais quelque chose de dramatique venait à arriver et qu'ils étaient découverts, qui permettrait de se mettre à l'abri. Mais ce intriguait vraiment Isaac, c'était que Faust ne lui ait pas au moins mentionné le fait d'être venu il y a peu, et ça, c'était inhabituel. Noctis ne faisait rien sans alerter Psychic après tout, c'était dans l'ordre naturel des choses ; normal donc qu'Isaac s'inquiète au moins un peu.

Une fois descendu, il constata que les armes étaient toujours en place, que le matériel était toujours là, et que visiblement, rien n'avait changé. Néanmoins, sa méfiance ne diminuait pas et ce ne fut qu'après une inspection minutieuse qu'il finit par trouver une feuille de papier dissimulée entre deux ou trois téléphones jetables, puisqu'ils en gardaient toujours au moins quelques uns de côté. Il la sortit avec délicatesse, veillant à bien mémoriser la disposition de ce qu'il dérangeait pour tout remettre en place comme si il n'était pas passé quand il partirait, et fronça les sourcils en découvrant ce qui était inscrit sur la feuille qu'il avait trouvé.
Faust, bordel, qu'est-ce que tu prépares... ?