« C'est toi ou moi, l'un de nous est de trop! »

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 Sydney Adams ♠ Sans ambition, il n'y a pas de talent. [Terminée]

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MessageSujet: Sydney Adams ♠ Sans ambition, il n'y a pas de talent. [Terminée]   Sydney Adams ♠ Sans ambition, il n'y a pas de talent. [Terminée] EmptyMar 29 Oct 2013 - 10:11


Sydney Adams

INFORMATIONS
NOM: Adams
PRÉNOM: Sydney
SURNOM: Syd - mais très peu l'appellent comme ça. Il déteste ce diminutif.
PSEUDONYME(S):
♠ Visage du Régime par le peuple.
♠  Scars ; vient de l'habitude qu'il a de laissé des cicatrices sur ceux qui ressortent vivants d'entre ses mains. Certains font aussi référence à la cicatrice barrant son oeil droit, en le nommant sous ce pseudonyme.

ÂGE: 54 ans
DATE DE NAISSANCE: 6 octobre.
SEXE: Masculin
GROUPE: Régime
RÔLE: Général Politique
MÉTIER/ÉTUDES: Syd a fait des études supérieures dans le domaine littéraire et les sciences politique. Il s'est beaucoup intéressé aussi à la psychologie humaine. Il a ensuite bifurqué vers une carrière militaire, qui l'a amené à Enola. Il est enfin devenu l'un des gros actifs pour le Régime.
ORIGINE:  Américano-Enolien. Son père était Américain et sa mère Enolienne.

PHYSIQUE

COULEUR DE PEAU: Caramel
CARACTÉRISTIQUES DES CHEVEUX: Ses cheveux sont d'un gris tirant sur le blancs, assez longs et duveteux.
CARACTÉRISTIQUES DES YEUX: Ils sont de couleur grise plus ou moins sombre, et assez petits, toujours plissés, de manière à ce que vous ne puissiez pas lire quelles émotions y trouvent racine.
DESCRIPTION DE LA SILHOUETTE: Sydney est un homme qui a derrière lui une carrière militaire et cela se voit : grand et musclé, il n'a pas perdu sa silhouette d'antan, cheveux grisonnant en plus. Il a un certain charisme, qui fait que vous le remarquez immédiatement dans une foule et que vous ne pouvez vous empêcher de l'admirer - ou de le craindre. Il n'est ni beau ni spécialement laid, mais il possède cette carrure des hommes faits pour le pouvoir.
PARTICULARITÉ: Il porte des lunettes, mais malgré son visage ridé, il a toujours aux lèvres un sourire inquiétant. Comment savoir ce que cet homme pense ? Impossible. Il y a dans ses yeux, dans sa façon d'être, de se mouvoir, une angoisse, un malaise naissant chez autrui. Son charisme est teinté de crainte, et il en joue.

CARACTÈRE

PERSONNALITÉ:

Sydney n'est pas un homme facile à vivre, ni facile à cerner, d'ailleurs. Doté d'un caractère mystérieux, il en dit très peu sur lui ou sur ses véritables émotions. Bien qu'il n'hésite pas à donner ses avis souvent très tranchés sur divers sujets, avec son intelligence bien à lui, acérée comme une lame, il est secret et renfermé, surtout quand les sujets abordés sont jugés futiles par l'homme - les relations amoureuses, l'amour, ce genre d'inepties. Il est extrêmement cultivé, ayant réussi dans sa longue vie à s'intéresser à de nombreux domaines. Il a une intelligence très vive, et une très très bonne mémoire qui lui permets de retenir quasiment tout ce qu'il lit. Cela lui donne un côté théorique sur beaucoup de choses, que ce soit dans la mécanique, dans le domaine militaire que dans les domaines psychologiques. Sydney est un homme curieux, qui s'intéresse naturellement à ce qu'il ne connaît pas, et il n'est pas rare de le voir en train d'apprendre une langue, une technique dans un domaine. Il a cependant tendance à s'énerver très facilement et ses colères sont spectaculaires par leur violence et leur force. Mieux vaut ne pas être sur son chemin, car il sait où ça fait mal. Il n'hésitera pas à frapper, à faire mal mentalement et physiquement. Il connait les manières de torturer une personne en jetant au visage des mots qui blessent, et ne sous-estimez pas sa force à cause de son grand âge, ou bien vous risquez de vous retrouver au sol, assomé par un coup de poing. Il déteste qu'on le sous-estime ou qu'on remette en cause quelque chose ayant rapport avec lui. Il n'accepte pas les faibles et les erreurs : il est extrêmement perfectionniste, et aime le travail bien fait. Ceux qui désobéissent ne méritent aucun pardon, et la loyauté se récompense chez lui par une minuscule part d'affection illusoire.

Car oui, Sydney connait bien l'âme humaine, il connait bien les ficelles de l'art relationnel, et sait comment manipuler les gens, que ce soit pour leur faire croire qu'une idée vient d'eux et les pousser à la mettre en action, ou pour mentir, pour convaincre les gens. C'est cette particularité qui a fait de lui un homme politique très bon : il sait embobiner les gens sans qu'ils s'en rendent compte, faisant naître chez eux un respect totalement faux. Sydney ne fait confiance qu'à lui, et n'attend rien d'autre de la vie que le pouvoir. L'amour, la famille, l'amitié, tout cela ne sont plus que des mots pour lui. Il a laissé tomber tout cela, pour mettre la mainsur l'île. Il peut paraître froid, anguleux, très sec comme un rocher, et sous ces airs dédeigneux se cache un homme distant et cruel, qui ne cherche qu'à réussir là où ses ambitions le mènent.

GOÛTS & DÉGOÛTS: Sydney est un homme aux goûts rafinnés, qui n'aime que les choses classes, les meilleurs nourritures et alcools. Il a des goûts de luxe, oui, mais il a également les moyens, alors pourquoi se priver ? Sinon Sydney adore lire, il a pour la connaissance en général un intérêt gigantesque, et il a tendance à respecter les gens savants, amis ou ennemis. Ce qu'il déteste le plus, ce sont les gens faibles, les gens qui sont contrôlés par leurs émotions. Les personnes qui font passer l'amour ou leur famille avant eux mêmes ne méritent pas de vivre selon lui ; la nature ne doit appartenir qu'aux plus forts. Sinon, il déteste les choses sucrées et les transports en commun - il a une aversion pour ces dernier qui penche vers la haine pure et dure. Il déteste également la gente féminine - faiblesse incarnée, porteuse de la vie et incapable de tenir tête aux hommes. Il les sous-estime et les ignore la plupart du temps, quand il ne s'en prend pas à elles verbalement.
ASPIRATIONS & PEURS: Sydney n'a peur que d'une chose : la mort. La sienne. Celle des autres l'indiffère, et il aime parfois prendre la vie des gens. Mais sa propre mort lui cause bien du tracas. Il ne souhaite en aucun cas mourir, et il sera prêt à tout pour y échapper.
ALLÉGEANCES: Régime.

HISTOIRE

On m'a dit, durant ma vie, que l'on a que ce que l'on mérite. Je suis à la fois d'accord avec cette phrase, ce dicton, et en même temps, je suppose qu'il n'est pas tout à fait vrai. Le karma a t-il quelque chose à voir là-dedans ? Tout ce qui n'est pas tangible est pour moi futile. Emotions, croyances ... Tout cela encombre l'homme comme autant de jouets cassés empilés dans un grenier poussiéreux. Je pense que certaines choses ne sont dues à rien d'autre qu'aux autres.Que des gens subissent la cruauté et la méchanceté, sans autre raison que d'être trop faible pour se défendre. J'ai appris cela à mes dépens, et ce dès mon plus jeune âge ...

Lorsque je naquis, l'île d'Enola était sujette à une forte tempête. Les cris de ma mère furent couverts par le vent qui soufflait au-dehors tel un fantôme drappé de pluie, de neige fondue, de grésil. Je naquis en pleine nuit, un 6octobre. Quelques semaines à l'avance. Déjà pressé, déjà impatient de voir le monde, ne pouvant attendre. Si j'avais su, peut-être aurais-je pris mon temps. Rouge, ridé du visage aux fesses, on me noma Sydney, comme cette ville en Australie. Sydney, le quatrième enfant, sur lequel mes parents fondaient bien des espoirs. J'avais trois autres frères : deux jumeaux de huit ans, nommés Yvain et James, et un autre frère, prénomé lui Franck, qui avait cinq ans. Tous plus âgés, et tous prenant ma venue au monde comme un insulte à leur propre existence - ils n'en étaient sûrement pas conscient. Cela n'excuse en rien leur comportement. Pour reposer ma mère, mon père n'hésitait pas à confier ma garde à mes frères, qui s'amusaient à me tendre mon biberon quand j'avais faim, sans pour autant me permettre d'y téter. Je pleurais, assez fort pour m'écorcher la gorge, et cela faisait si mal que je n'en pleurais que plus fort. Mes cris faisaient mal au crâne délicat de ma mère, femme faible à la santé plutôt fragile, et cela énervait mon géniteur, qui commença à prendre mes hurlements pour une rébellion quant à leur calme et leur tranquillité.

« Ferme-là ! Arrêter de brailler, putain ! Arrête de brailler ! Ferma ta gueule, putain de bébé ! J'aurais jamais dû te laisser naître, putain de merde ! »

Ses cris se heurtaient aux miens, jusqu'à ce qu'il me retourne comme une crêpe et ne claque mes petites fesses. Peut-être que le fait d'être déjà frappé à cet âge là n'était qu'un prologue, une entrée en matière pour me montrer ce qu'allait être ma vie plus tard. En tout cas, voir mon père se fâcher ainsi sur son enfant poussa ma mère à me donner le sein et à s'occuper un peu plus de moi. Elle me berçait un peu, me chantonnait des comptines. Elle était contente d'avoir un nouvel enfant, mais elle se lassait vite quand ses garçons devenaient grands et turbulents. Elle aurait aimé avoir une fille, et cela se sentait dans ses humeurs. Elle pleurait parfois, en me tenant contre elle.

« Pourquoi tu n'es pas une fille ? J'aurais voulu t'habiller de jolies robes. J'aurais voulu ne pas être la seule fille de la famille. »

Ses larmes tâchaient mon bavoir, humidifiaient mon pyjama de coton. Elle m'appelait parfois d'un autre nom, faible d'esprit, faible tout court. Elle se laissait aller à ses émotions, pauvre femme apeurée par la violence de son mari envers son petit dernier, mais trop incapable pour oser se mettre entre eux deux. Elle finit par se faire une raison, alors que je grandissais et atteignais ma première année. J'étais intelligent, déjà, et je savais déjà marcher. Dès que je n'eus plus besoin ni de ses mains comme tuteurs pour m'avancer ni de ses seins pour me nourrir, ce fut comme si mon avancée coupait le cordon pour moi. Je perdis le peu d'intérêt qu'elle avait envers moi, et je fus offert vivant à la garde de mes frères. J'étais encore trop petit pour qu'ils fussent violents avec moi, mais je sentais déjà la froideur et la colère dans leurs mots et leurs gestes. Quand je réclamais, à coups de babillements déjà intelligibles pour mon âge, des jouets ou un peu d'attention, je me prenais une taloche sur mon crâne couvert de cheveux fins et blonds. On me lançait les jouets de bois, et j'étais souvent couverts de bleus, à force d'être frappé, de tomber ou d'être poussé. Je ne comprenais pas, et prenais cela pour argent compant. C'était naturel, que je sois violenté par mes frères, et je pense que cet indifférence, cette acceptation quant à leur comportement énervait d'autant plus mes frères. Mon père continuait de me crier dessus, pour diverses raisons, et à cause de cela, l'animosité de mes frères était comme justifiée. Comme si le fait que mon père ne m'appécie pas donnait le feu vert à leur agressivité.

« Maman aurait voulu une fille, et papa trouve que t'es juste un gros bébé. On t'aime pas. T'as rien à faire avec nous, en fait. On ferait peut-être bien de t'emmener dans un fossé et de te laisser là. Si t'as de la chance, quelqu'un t'adoptera. »

Yvain et James étaient cruels. Ils jouaient avec des mots que je ne comprenais pas, mais mon empathie faisait que, globalement, je dicernais ce qu'ils voulaient dire. J'étais jaloux du lien qu'ils avaient, ensemble. Les deux jumeaux avaient tendance à se combler l'un l'autre, à finir la phrase de l'autre, et parfois se comprenaient sans avoir besoin de dire un mot. Mon autre frère, Franck, ne partageait pas cela, mais il respectait ses aînés et ne voulait qu'une chose, être accepté. Il était prêt à tout, même à violenter son jeune frère. Et moi, je ne désirais qu'une chose : jouer avec eux, faire des câlins à ma mère et que mon père me lise des livres, à moi aussi. Mais rien de tout cela ne se passait. Et quand j'entrais à l'école, je compris que ce n'était absolument pas naturel. Cette situation était inhabituelle, sur l'île, et j'appris rapidement à me taire quand à ma famille, quand un professeur passa pour prendre de mes nouvelles, après que j'eus trop parlé des violences que je subissais. Peut-être s'inquiétait-il aussi de mes bleus, de mes moments d'absence. J'avais de bonnes notes, et il n'avait pas exactement de raisons de se plaindre de quoi que ce soit. Il prétendit faire une visite de courtoisie, mais mon père comprit rapidement.

« Oseriez-vous remettre en cause ma façon d'élever mes enfants ? Sydney est un garçon faiblard, et il tombe souvent, maladroit comme il est. Je vous prie, monsieur, de sortir d'ici immédiatement. Ne remettez pas les pieds ici, je vous l'interdis. Et ne faites plus jamais de remarque sur mes enfants, vous êtes mal placés pour me donner des conseils, voyez-vous ? Savez vous qui je suis ? Je suis le dirigeant de BSA Entreprises ! Je ne suis pas n'importe qui. Il me suffirait de souffler deux trois mots ici et là, et je pourrais vous faire virer. J'ai le bras long, je n'hésiterais pas. Partez, avant que je ne vous mette dehors de force. »

Cinglant, froid et violent. Comme une tempête. Voilà ce qu'était mon père. Une tempête capable de vous emporter. L'homme, bien que gentil et juste, ne voulait pas perdre son emploi. Je me souviens de son regard, alors qu'il se levait pour partir. Deux yeux aux iris pâles, d'un bleu transparent comme de l'eau, et cette émotion qui me fit frissonner. De la pitié. Il avait pitié de moi, pitié que je sois né dans une telle famille. Il ne pouvait rien pour moi, et je l'avais compris depuis longtemps. Personne ne pouvait rien pour moi - sauf moi-même. Il n'y avait que moi qui pouvait changer ce que je subissais. Le lendemain, je changeais d'école, pour entrer dans une école privée. La colère de mon père sembla couver, et ateignit son apogée quelques jours après l'incident. C'était la première fois que mon père osait lever la main sur moi depuis ma toute jeunesse. Nous étions dans le salon et mes frères me volaient mes saucisses, mes carottes, vidant mon verre pour m'embêter. Mère mangeait sans rien dire, et père riait de leur comportement, disant que cela forgeait le caractère que de se faire chamailler par ses frères.

« Mais j'ai faim, moi. »

A peine franchis mes lèvres, je savais que c'était les mots de trop. Le silence grandit, aussi étouffant qu'une chape de plomb. La colère éclata alors. Mon père bondit sur ses pieds, et je n'eus pas le temps de fuir. Je pense que si j'avais fait le moindre mouvement, j'aurais été frappé bien plus fort. Père m'attrapa par le col de ma chemise, m'éleva au-dessus de la table alors que mes frères rompaient le silence de hululements d'encouragement. Mère nous lançait un regard de chien battu, larmoyant. Je lui lançais un regard, lui demandant silencieusement de m'aider. De se lever, de calmer son mari - de protéger son enfant. Mais je n'eus plus le temps de penser à elle : le poing dur et nerveux de père heurta ma machoîre, et un goût de sang envahit ma bouche alors que mes lèvres éclataient et que je me mordais la langue. Il me lâcha, me laissant retomber lourdement au sol. Je renversais ma chaise, tirais la nappe en faisant tomber mon assiette. Quelques carottes roulèrent au sol, tâchant le tapis, et les yeux de mon père flamboyèrent d'autant plus, comme si mon geste maladroit était une bonne raison d'attiser sa colère.

« Comment oses-tu te plaindre ? Tu as un toit, une famille. Tu ne meurs pas de faim, ni de froid, ni de soif. Et tu vas te plaindre, à tes professeurs. A qui d'autre vas-tu te plaindre, bébé ? Pour quoi je passes, moi après ? »

Il leva son pied, et il heurta mon corps. Je me roulais en boule, subissant les coups qui pleuvaient. Je crois qu'à un moment, il laissa la main à mes frères. Moins de force dans les coups, moins de cruauté mais plus de vice. On me tirait les oreilles, on les pincait, on arrachait mes cheveux, on me griffait. Mais toute brute finit par se lasser, et ils allèrent rejoindre père devant la télé en me laissant là, allongé sur le flanc comme un animal sur le tapis tâché. J'entendis mère se lever, et j'espérais un instant qu'elle vienne me voir, qu'elle me soigne. Je vis sa silhouette s'éloigner vers son fauteuil, au travers de mes paupières gonflées et de mes larmes qui piquaient sur mes blessures. Je toussais, crachais un mélange de sang et de salive, de bile et de vomi. Je me redressais, tremblant, et serrais les dents. Du bout des doigts, je vérifiais qu'aucune ne bougeait. Je ne voulais pas déjà perdre mes dents. Je me relevais enfin, me campais sur mes pieds, et comme personne ne faisait plus attention à moi, je sortis dehors sous la pluie glacée. Chaque goutte qui explosait en fines perles aqueuses sur ma peau me faisait mal, et j'allais me planquer au fond de notre grand jardin. Belle maison, beau jardin, belle pelouse. Tout était beau chez nous ; père aimait en mettre plein la vue quand ses clients venaient à la maison pour des dîners. Quand ils venaient pour parler affaires, au sujet de l'entreprise de père - une entreprise en rapport avec la technologie, voilà tout ce que je savais, tout ce que j'avais le droit de savoir - mère et père les emmenaient dans le grand salon, endroit luxueux fait pour montrer notre aisance financière et le bon goût de mère. Mes frères et moi mangions dans la cuisine, plus tard, des restes. Nous devions nous battre pour les meilleurs morceaux, tells des bêtes. Ce n'était pas une vie. J'allais m'abriter sous l'énorme chêne que j'adorais, et y grimpais avec agilité. J'étais devenu un vrai petit singe, durant ces étés où, seul, je devais jouer avec moi-même. Je me perchais sur une grosse branche principale, et écoutais la pluie tomber. L'orage grondait au loin, et le vent violent giflait mon visage déjà humide, des feuilles venaient se coller à moi. Je m'allongeais pour donner moins de prise au vent, et malgré le hurlement de la tempête j'entendis distinctement un bruit. Un piaillement, plus précisément. Je regardais autour de moi, mais la pluie floutais ma vue, et je dûs descendre de mon perchoir pour aller à la recherche de l'origine du bruit. Je dicernais une ombre sous les autes arbres, et en m'approchant, je vis ce qui paillait. Un cornèbre, dont la pluie avait alourdit les plumes et qui était incapable de redécoller.

En me voyant venir vers lui, il sautilla sur place, embourbé dans la terre humide. Il fit aller ses ailes, essayant de me gifler de ses plumes humides, et son regard flamboyait, son bec menaçant allant de droite à gauche.

« Je ne te veux pas de mal. Tu as été surpris par la pluie ? Mais là, les arbres ne font pas assez de couverture, tu vas quand même être mouillé. Je peux te mettre à l'abri, moi, dans les arbres. Tu me laisses te toucher ? »

J'avançais ma main, et son bec se planta dans ma chair. Je retins un gémissement en le sentant m'arracher un morceau de peau. Du sang coula, rendu plus fluide par la pluie qui tembourinnait sur nous. Puis, sans plus demander son avis à l'oiseau, je le saisis sous le ventre et le dégageais de sa tourbe boueuse. Il me fouetta de ses ailes, et je me mis à courir pour revenir vers le chêne après l'avoir glissé sous mon bras. Il picorait mes côtes, mais mon gros pull l'empêchait de me faire vraiment mal. Je grimpais les branches, plus lentement à cause de ma main tenant le cornèbre, et enfin, je me retrouvais sur la même branche, et posait l'oiseau devant moi. Il tourna la tête dans tous les sens, puis s'ébroua soudain, ses plumes gonflant soudain. Je clignais des yeux, stupidement, et tamponait ma main sanglante avec ma manche de pull.

« Ici, tu vas pouvoir te sécher un peu. Quand la tempête sera passée, tu pourras repartir. »

J'avais toujours été jaloux des pokémons de mes camarades de classe. Malgré notre aisance financière, nous n'avions pas de pokémons à la maison. Bien que personne n'ait rien contre cela, père jugeait mère trop faible de santé pour pouvoir supporter des pokémons. Il les jugeait incapables de rester en place. Alors, mes frères avaient déjà prévus des plans pour plus tard. Et père leur avait promis de leur acheter ce qu'ils voulaient pour leur majorité. Mais moi, je savais que je n'aurais pas le droit à ce cadeau. Cela ne m'empêchait pas d'en vouloir un pour moi.

« Tu veux que je te chante une comptine ? Maman en chantait avant, pour moi, quand j'étais bébé. »

Le cornèbre ne bougeait pas, et je pris ça pour un consentement. Alors, je me mis à chanter un peu. Tout bas, mais l'oiseau se mit bientôt à chanter à son tour. Enfin, il ne chantait pas avec des mots, mais il suivait le rythme, en sifflant, en piaillant. On continua un moment, je m'amusais à changer les rythmes, à changer les chansons. Soudain, je m'arrêtais. Autour de nous, nous entendions les Nirondelles chantonner au loin. La pluie s'était arrêté, et la nuit était tombée, calme et douce, comme un tissu tombant sur la ville. Les lampadaires de la rue nous éclairaient, et le cornèbre sembla se faire la même réflexion que moi. Il s'ébroua de nouveau, son plumage noir luisant, et il s'envola deux branches au-dessus de ma tête. Je lui offris un petit sourire triste.

« Tu t'en vas ? Tu ne veux pas plutôt rester avec moi, dis ? »

Oubliée, la douleur de mon corps tout entier, oubliée ma tristesse, ma famille. J'avais espéré qu'il ne se laisse tenter, qu'il accepte, mais comment aurions-nous fait ? Jamais ma famille ne m'aurait laissé avoir de pokémon. Alors, quand il piailla une dernière fois et s'envola pour disparaître dans les ténèbre, je fus triste, mais en même temps soulagé. Je regardais mes mains posées sur l'écorce de l'arbre. Et les gouttes salées qui traversèrent mes joues, coulant sur mon menton et qui tombèrent sur ma peau, n'étaient que de la pluie. Oui, juste de la pluie.

Je fus de nouveau puni pour être sorti sans avoir prévenu. Mais quand on me frappa de nouveau, je montrais les dents. Je m'emparais du pied de père, et tentais de le mordre. J'avais trouvé en moi une nouvelle rage, qui ne m'apporta que de nouveaux ennuis. Mais bizarrement, c'était comme si cette pluie sous le chêne avait lavé mon innocence, m'avait délesté de mes illusions. Père et mes frères devaient voir que je ne me laisserais pas faire. Car je ne voulais plus subir bêtement. Et même si, du haut de mes cinq ans, je ne pouvais pas faire grand chose, au moins, je leur montrais que je n'étais pas faible. Qu'il ne serait plus aussi facile de me donner de bonnes corrections ou de se moquer de moi. Je me mis à ressentir des émotions que je n'avais jamais ressenti auparavant. Haine envers mes frères, mon père. Mais surtout, surtout ... Envers ma mère. Toutes les femmes étaient-elles aussi faibles, aussi transparentes ? Elle n'était même pas humaine, pour moi. Elle n'était qu'un sac de viande, incapable de réfléchir. Elle n'était même pas intelligente. Elle était juste jolie, une belle coquille vide. Je me mis à la détester encore plus fort que les autres : au moins, mon père et mes frères essayaient d'asseoir leur autorité, ou de passer leurs nerfs. Et cette haine pour ma mère se mit à déborder sur toute la gente féminine. Chaque femme que je croisais n'était qu'une simple humaine sans caractère. Certaines avaient, certes, des ambitions ou une certaine intelligence, et même si je m'intéressais à leur savoir, je continuais de les haïr. Parce qu'elles étaient toutes, au fond, comme ma mère. Faibles face aux hommes. Elles ne faisaient pas le poids devant la violence, devant la cruauté. Leurs émotions jouaient une place trop importante.
Moi, en attendant, j'engrangeais un savoir incroyable. Ma mémoire jeune et malléable me permettait d'apprendre avec beaucoup de facilité, d'autant plus que mon intérêt envers la connaissance était accru. Je voulais faire quelque chose de ma vie. Je désirais réussir, de façon bien différente de mon père. Je lisais déjà beaucoup, et mes lectures stupéfiaient mes professeurs : je lisais déjà, à l'âge de huit ans, des romans psychologiques, ou bien des manuels de mathématiques complexes. Je m'intéresses à l'astronomie, à l'astrologie, au psychisme, à la mécanique, mais surtout à la littérature, qu'elle soit étrangère ou non. J'aimais lire, tout et n'importe quoi, et mon esprit analytique adorait tourner dans tous les sens chaque phrase, chaque sens. J'aimais aller lire dans mon jardin, pendant que mes frères allaient s'ébattre sur un terrain de sport. Plus le temps passait, et moins je me laissais faire. Cela les gênait, et malgré leur rage, leurs coups me faisaient moins mal. Je m'étais endurci, véritable petite teigne à présent. J'avais moi aussi un noyau de colère, que je laissais exploser quand ils me frappaient. Je leur rendais coup pour coup, et même si je ne leur faisais pas aussi mal, j'étais fier de ne plus être soumis comme autrefois. Je me trouvais idiot, quand je repensais à ces moments où je subissais sans réagir comme une marionnette. Raconter les années de mon adolescence serait inintéressant. J'allais à l'école, et j'y restais autant que possible. J'allais me terrer dans la bibliothèque, et je lisais autant que possible. Etonnamment, j'étais aussi bon dans toutes les matières, qu'elles soient sportives ou intellectuelles. J'avais compris que faire travailler son cerveau n'était pas tout dans la vie, et que pour réussir à résister aux êtres comme mes frères ou mon père, je devais également être fort. Alors, je me mis tranquillement à m'intéresser au domaine physique. Pompes, abdos, course, escalade, équitation. Tout cela, je le faisais de moi-même, avec l'argent que père versait sur nos comptes à moi et mes frères chaque semaine. Peut-être avait-il oublié qu'il m'en donnait aussi, sinon il aurait arrêté ces versements. En attendant, j'en profitais. Non pas bêtement, mais intelligemment, en dépensant pour me développer. Pour développer mes sens, ma force, mon esprit. Et je finis par être tranquille. Père et mes frères ne purent plus me battre sans recevoir autant de coups douloureux. Les heures que je passais à m'entraîner, à renforcer mes muscles, servaient enfin. Ils abandonnèrent donc leurs griefs, sans pour autant m'aimer plus.

L'été de mes quatorze ans, j'avais acquis une certaine stature, et ce n'était que le commencement. J'étais encore en pleine croissance, et je savais que chaque jour, je prenais des centimètres. Les jumeaux étaient déjà grands, mais j'espérais les dépasser un jour. Quant à Franck, j'étais certain de le dépasser car il n'avait jamais été très grand. J'étais sorti sur la terasse, avec un bol de céréales. Il était encore tôt, et ma famille dormait encore, mis à part mon père qui était déjà parti travailler. Le soleil se levait, orbe enflammé qui embrasait de ses rayons les arbres du jardin. Je vis passer deux fouinettes, et les observais avec curiosité. Mes frères avaient reçu leurs pokémons, depuis quelques années pour les jumeaux, et Franck l'avait eu l'an dernier. Ils avaient eu l'objet de leurs désirs. Un Malosse, un Chacripan, et un Polarhume. J'étais jaloux, j'exsudais la jalousie par tous les pores quand je les voyais tous avec leurs pokémons. Mais je m'étais fait à l'idée : il suffisait que j'attende encore un peu, quelques années, et je pourrais me prendre mes propres pokémons. Un bruit me fit lever la tête, me sortant de mes pensées. Un cornèbre se posa, suivit de trois autres, et ils se mirent à piquer dans la terre. Cela me ramena à mes souvenirs, à l'oiseau sous l'orage. Je me demandais comme il allait. L'un d'eux, s'approcha, et sautillant sur mon genou, vint piquer ma main où je portais une cicatrice, marque du coup de bec. Si j'avais douté, ce n'était plus possible à présent. J'approchais ma main du rapace, et frottais son crâne emplumé de noir. Il avait gagné du poids, des cicatrices lui aussi, et son bec portait une petite déformation, comme un creux dur. Il avait vécu, lui aussi.

« Toi aussi tu as bien changé. »

Les autres cornèbres s'envolèrent soudain, et celui sur mes genoux hésita, avant d'aller se percher sur mon épaule. Franck se tenait debout dans l'embrasure de la baie vitrée, en caleçon, frottant ses yeux encore engourdis par le sommeil. Il m'observa, et grimaça quand le cornèbre piailla dans sa direction, l'air mauvais.

« Tu fous quoi avec un Cornèbre ? Laisse le partir, papa ne veux pas que tu aies de pokémons. »
« Je ne le retiens pas. Il est là de son plein gré. Et si toi ou papa, ou les jumeaux, espéraient que je me sépare de lui, vous pouvez rêver. Tant qu'il voudra bien être avec moi, j'accepterai sa présence. »


Rébellion. Voilà ce que je lisais dans les yeux de mon frère. Où était passé le petit bébé rouge et fripé, l'enfant idiot qui se laissait frapper sans même réagir ? Il était mort, étouffé par ma haine. Et j'étais né de ses cendres, moi, le Sydney violent et colérique, le Sydney intelligent, et qui haïssait la faiblesse plus que tout. Je restais là, pendant que mon frère se tenait immobile. Je le sentais tiraillé entre l'envie d'aller tout raconter à mes frères, et l'idée de me donner une bonne correction. Néanmoins, je n'étais pas aussi bien nourri que lui, ni aussi vautré dans le luxe. Je prenais soin de moi, comparé à mes frères, qui avaient pris de l'embonpoint et n'étaient plus aussi musclés qu'autrefois. Je pouvais leur tenir tête, et ils en étaient parfaitement conscient. Il rentra finalement, et me laissa seul avec l'oiseau. Le cornèbre avait l'air d'être à l'aise sur mon épaule, et avec délicatesse, je lui racontais un peu ce qu'avait été ma vie depuis que je l'avais rencontré. J'avais l'impression que c'était grâce à lui, grâce à notre orage que j'étais passé de l'enfance naïve à un jeune homme décidé. Et tant qu'il voudrait être à mes côtés, je le garderais avec moi.

Mère et père apprécièrent très peu que j'eus un oiseau, et père tenta bien de le mettre dehors, mais cornèbre ne se laissa pas faire, et lui laissa quelques cicatrices sanguinolentes. Ils abandonnèrent enfin, et je pus garder le pokémon. Je n'avais pas d'amis, je n'en avais pas besoin. Mais la présence de cornèbre me faisait du bien. Il chantonnait parfois, mais je ne mêlais plus ma voix à la sienne. Cependant, son ton, ses rythmes étaient les nôtres. Ceux d'autrefois. Et cela me calmait, quand ma rage atteignait son paroxysme. Il m'empêcha bien des fois de comettre des meurtres. Je continuais d'aller à l'école, et quand on me demandait ce que je voulais faire, je ne savais pas quoi répondre. Je n'avais pas d'idée d'avenir. Je voulais apprendre, encore et toujours. J'avais pensé faire de longues études, et pourquoi pas, me lancer dans la politique ? Car, avec ce que j'avais appris dans les lires, je commençais à comprendre la nature humaine, et à savoir tirer les ficelles. Je m'entraînais sur mes frères, les embrouillais, leur mentais éperdument, leur jouais la comédie. Et tout se faisait comme je l'imaginais. Père fut le suivant que j'embobinais. Ce fut simple, car malgré ses ambitions, il n'avait jamais été intelligent. Et ainsi, quand j'eus finis mes études, il me versa une pension pour que je vive loin d'eux. Je lui avais fait croire que l'idée venait de lui,qu'il en avait marre de m'avoir à ses côtés et que me payer un appartement permettrait de moins me voir. Tout était parti de moi, bien entendu. Et cela servait mes besoins.
J'avais donc, à présent, dix huit ans. Je venais de finir mes études générales, avec un diplôme et la meilleure mention. J'avais un appartement en ville, à Enola, à Vanawi, et j'avais mon ami Cornèbre avec moi. Ce temps-là fut un temps de doute, de questions, où je cherchais ce que je voulais faire. Je surnommais cornèbre Hannibal, après avoir lu les romans sur cet homme génial et cruel. Je flânais le soir, j'allais boire dans les bars, je m'offrais des dîners somptueux, dans le but de découvrir cet univers. Durant deux ans, je ne fis rien de ma vie, rien de spécial je veux dire. Je restais chez moi, ou j'allais à la grande bibliothèque, et je lisais. Puis, je tombais sur le livre d'un homme politique. Je ne m'y étais jamais intéressé, mais quand je lus ce livre là, ce fut une révélation. Comme si je comprenais que j'étais né pour ça. Pour m'intéresser à la politique. Cet univers où mentir et jouer la comédie étaient essentiels, c'était le mien. Mon univers. Alors, je m'inscrivis à l'université, dans un cursus de sciences politiques. Je passais trois ans dans cette licence, et en même temps que je commençais le master de sciences politiques, comptant achever ces études en cinq ans, je débutais un autre master en parallèle, de littérature cette fois. Car mon goût pour les livres était resté intact, et que je voulais voir comme le gouvernement voyait cela. C'était intéressant. Je ne manquais aucun cours, que je sois malade ou non. Je restais à l'écart, et fûs rapidement étiquetté comme la grosse tête de la promo. Les professeurs étaient étonnés par mon savoir, par ma compréhension des choses. Quand on repoussait les émotions, les choses futiles de la vie, cela laissait beaucoup plus de place aux neurones. Il y avait des femmes, dans mes licences, mais la plupart se révélaient aussi creuses et inintéressantes que ma mère. Je fréquentais certaines personnes pour leurs connaissances, je leur pompais leur savoir, et une fois appris ce que je désirais, je les jetais. Néanmoins, comme ma curiosité n'avait d'égale que mon intelligence, je me mis à faire des expériences sur l'âme humaine. A la manière d'Hannibal.

Je fréquentais quelques cercles d'intellectuels, et je mettais mes graines de doute, de corruption. Je voyais germer des fleurs, des plants, ou bien au contraire, je voyais le gel de la culpabilité, de l'amour tuer mes graines. C'était incroyable de voir ce que l'homme était capable de faire comme idioties, et comme parfois le simple amour ou l'amitié donnait une témérité à un être faible. Je rejetais tous ces sentiments, pour ne m'intéresser qu'au savoir brut. J'en vins même à voir en mes professeurs de parfaits idiots quand je voyais leurs connaissances être erronées. Je me dépêchais donc de finir mes études. Je n'avais aucune nouvelle de ma famille, et cela valait mieux. Mon père continuait de me donner de l'argent, et tant que ma pension était versée, cela me convenait parfaitement. Je sortis en tête de ma promo, sans surprise. Mais une fois mes diplômes en poche, je ne savais toujours pas quoi faire. Je pensais avoir passé assez de temps à l'université, et je voulais changer un peu. Je voulais développer mon corps, cette fois, pour allier à mon intelligence tranchante un corps en parfaite santé. Je n'étais pas influençable, mais je me laissais tenter lorsqu'un tract passa chez moi. L'armée d'Enola recrutait des piétons, des fantassins de base, et l'idée me plaisait. C'est donc sur un coup de tête que j'entrais dans l'armée. J'avais 30 ans depuis peu.

Le jour de mon entrée, je dûs observer l'entraînement des hommes. Cela ne me semblait pas bien sorcier, puis j'assistais à un mot du général. Il était accompagné d'une femme superbe, je devais bien l'avouer, et sa blouse l'indiquait comme une scientifique. Elle avait des cheveux noirs et bouclés, des lunettes et l'air décidé de celle qui sait qu'elle a face à elle des hommes brutaux sans intelligence. Je dois avouer que c'était bien la première fois qu'une femme me faisait bonne impression, et quand elle prit la parole, je me surpris à tendre l'oreille  pour écouter ce qu'elle allait dire.

« Vous êtes entrés dans l'armée d'Enola. Vous n'êtes plus des hommes, à présent, mais les bras de notre gouvernement. Nous n'attendons pas de vous que vous réfléchissiez par vous-même, mais que vous obéissiez à nos ordres et que vous suiviez votre entraînement à la lettre. Vous devez développer un instinct de survie, vos sens, vos muscles. Je suis Karina Malenkov, et je suis la scientifique en chef de ce camp. Je n'aurais plus à voir vos têtes, encore heureux. »

Son ironie mordante en faisait une femme intéressante. Je haussais les sourcils face à sa franchise, et durant une seconde, je me dis que j'aurais aimé avoir une mère comme elle. J'avais enfin trouvé mon égale ! Ce jour-là, alors que j'entrais dans l'armée, Karina devint mon obsession. Je suivais les entraînements scrupuleusement, mais je faisais peuve également d'une intelligence hors norme, que ce soit en génie tactique ou en réflexion humaine. Ainsi, j'attirais son attention. Tout d'abord dubitative, elle dût reconnaître que j'avais l'esprit étonnant. Et nous commençâmes donc à nous voir, le soir, pour parler génétique et politique. Elle avait une vision des choses extraordinaire, et son avis sur tout était toujours tranché, de sorte qu'il nous arrivais de nous disputer sur des sujets sur lesquels nous n'étions pas d'accord. Je rêvais d'elle, de son regard scrutateur, de ses mains féminines qui tenaient avec fermeté ses éprouvettes. Je la cherchais, quand je voyais les chefs passer, et je ne pouvais m'empêcher de penser à elle. Elle était devenue une obsession, et sur bien des côté, j'étais trop idiot pour comprendre que je l'aimais. Moi qui avais toujours refusé les émotions, j'étais la proie de mes sentiments. Je perdais le sommeil et l'appétit, je cherchais à attirer son attention, encore et toujours. A me démarquer des autres, et c'était tellement facile quand je voyais le ramassis de brutees épaisses que je côtoyais ! Pourtant, il était loin le temps où le petit Sydney se faisait frapper. Mon corps était devenu musclé, et j'avais une carrure grande et épaisse. Le camp militaire me faisait du bien, et la présence de Karina m'empêchait de faire cramer mes neurones d'inactivité. Au fil du temps, je me mis à la désirer. A désirer Karina, d'une manière humaine et mâle. Je la touchais quand nous éclations de rire, je frôlais ses doigts, sa cuisse. Nos regards se croisaient, et j'aimais ses prunelles brunes, chocolat ou noisette selon la lumière. Ses cheveux étaient aussi sombres que le plumage d'Hannibal. Elle était belle, mais surtout elle était différente de toutes celles que je connaissais. Hélas, moi qui connaissais la pensée humaine, qui avait exploré les tréfonds de l'âme, je ne savais comment me comporter. Je ne connaissais pas les habitudes sociales quand on faisait la cour. Offrir des fleurs, des chocolats ? Tout cela me semblait bien trop ordinaire. Alors, j'eus une idée, un soir. Je lui donnais rendez-vous à minuit sur le terrain d'entraînement.

« Sydney ? Pourquoi m'avoir donné rendez-vous ici ? Il est tard et ... Je ... »

Sa jolie voix se tut, alors que je me mettais à déclamer un poème. Baudelaire, puis Shakespeare, Prudhomme, Belleau, Hugo ... De ma voix grave et basse, je récitais avec passion tout ce que je connaissais. Habillée de sa blouse dont les pans voletaient derrière elle, elle avait mit les mains dans ses poches, et avait le regard baissé. Je m'arrêtai enfin, curieux de voir sa réaction. Rougissante, elle soupira et retira ses lunettes pour les essuyer.

« C'est idiot ce que tu fais là, Sydney. »


Un simple murmure. Je ne lui laissais pas le temps de continuer. J'avais trop attendu. Tous ces jours, toutes ces semaines, ces mois où sa présence avait attisé en moi des choses inconnues. Je pris son visage entre mes grosses mains, et le relevant, je vins embrasser ses lèvres. Mon premier baiser, notre premier baiser à nous deux. Il n'y avait qu'elle, elle et elle seule. Je me souviens de cette nuit. Fébriles, tatônnant, nous nous glissâmes dans sa tente où elle vivait en tant que scientifique. Nous ne cessions de nous embrasser, de caresser nos cheveux. Nous n'avions pas besoin de mots. Nos regards, nos touchers servaient de poèmes à tout l'amour qui nous unissait. Notre union, ce soir là, fût complète et parfaite. Je ne sais si elle était pure et innocente, mais moi je l'étais. Ce qu'elle m'offrit, je le lui pris avec plus de délicatesse que je n'étais capable. Je m'unis à elle, charnellement, mentalement. Je l'aimais comme jamais je n'avais aimé. Sa peau, son odeur, ses cheveux, ses yeux, ses cils qui formaient des ombres sur sa carnation, ses oreilles délicates dont elle avait retiré les boucles d'oreilles et qui formaient deux petits trous, ses doigts fins. Son corps entier, je le dévorais du regard, explorant mes sens avec elle. Nous ne dormîmes pas, trop occupés à apprendre à nous connaître. Et quand le matin m'obligea à partir delà, je la quittais, endormie, nue sous son drap, frémissante encore de nos plaisirs. Je la regardais un instant, attendri, et je vins déposer un baiser léger sur ses lèvres.

« Je t'aime. »

Je ne sais qui le dit. Moi, elle ? Cela n'a pas d'importance. Car, la nuit suivante, et toutes les nuits ensuite, nous nous retrouvions. Elle me faisait oublier mes courbatures, l'impression d'être entouré d'idiots. Et moi, moi, j'étais pour elle son trésor. Elle appréciait mon intelligence. Elle aimait mon esprit affuté, et elle me désirait, moi, si grand, si fort. Je me sentais comme un héros, je me sentais accepté. Et c'était bon. Tout simplement bon. Je la demandais en mariage un an exactement après mon entrée dans l'armée. Je décidais, en même temps, que j'en avais marre de rester un simple soldat. Je décidais donc d'aller voir le général, et sous la pression de Karina ainsi que quelques tests physiques et mentaux, ils arrivèrent à la conclusion que j'étais effectivement bien meilleur que la plétore de fantassins. Je pris donc le grade de capitaine, et avec ce rang, une illusion de liberté me fut offerte. J'avais le droit d'avoir une maison, un endroit à moi, et comme j'étais à présent marié à Karina, le général m'offrit un peu de vacances.

« Vous allez en avoir besoin, de toute façon, non ? »

Il avait dit cela avec un petit sourire. Je ne comprenais pas. Je rejoignis avec bonheur ma femme dans notre maison. Avec l'argent gagné, et celui aloué par mon père pendant des années et que je n'avais pas entièrement dépensé, j'avais pû acheter une petite maison à l'écart du centre ville. Karina était tombée amoureuse de la barrière blanche, de la facade de pierres grises, du grenier, du jardin. Je passais mes journées au camp, et Karina travaillait à la maison. Nous ne cessions de donner du fil à retordre à nos esprits, en nous donnant des colles, des énigmes, des questions rhétoriques. J'aimais cette  femme. J'étais capable de tout pour elle.

« Tu as déjà pensé à avoir des enfants ? »

Nous buvions tranquillement notre café sur la terrasse, dans notre balancelle. Je toussais, m'étranglais. Mon enfance avait été telle que l'idée d'avoir des enfants ne m'avait jamais effleuré. Et pourtant, quand je la voyais assise à côté de moi, le soleil faisant briller sa crinière noire, m'observant avec un petit sourire, ça ne me paraissait plus une idée si saugrenue.

« Tu veux vraiment avoir des enfants avec moi ? »
« Avec qui d'autre, bêta ? »

Et elle m'embrassa sur le bout du nez. Je souris, gêné. Mais je peux vous promettre que nous avons mis tout notre coeur à faire un enfant. Moi qui avais toujours dénigré les rapports sociaux, j'en redemandais. Elle était douce, et chaude, et si désirable. Et quand, après quelques mois, nul bébé n'était arrivé à l'horizon, nous n'abandonnâmes pas. Karina ne perdait pas espoir. Les mois devinrent un an, puis deux. Nous fîmes des tests : nous étions tous les deux fertiles. Alors pourquoi n'arrivions-nous pas à faire ce bébé ? Mais je me montrais patient. Après tout nous étions encore jeunes. Nous avions le temps. Mais je me mis à fuir la maison, comme si je fuyais mon échec. Je m'en voulais de ne pas réussir à la mettre enceinte. J'étais en train de travailler sur un rapport quand je reçus un appel de Karina.

« Mon amour, je suis tombée et je me suis foulé la cheville. Je suis à l'hôpital, tu veux bien venir me chercher ? »

Je laissais tout tomber, toujours, tout pour elle. J'aurais donné ma vie pour elle. La savoir blessée me fendait le coeur, et je roulais à tombeau ouvert pour aller la rejoindre. J'arrivais en courant aux urgences, et je suivis les conseils d'une infirmière pour débouler dans sa chambre, couvert de sueur, mes cheveux noirs empêtrés de sueur. Je me jetais littéralement sur elle et aggripais ses mains, inquiet. Elle me sourit, et remit ses lunettes en place.

« Bonsoir ! Je suis votre médecin, Arnold Lipson. Alors voyons voir ... Madame Adams, je dois vous avouer que vous nous avez fait une frayeur. Vous n'avez qu'une cheville foulée, mais vous auriez pu mettre en danger votre bébé, en tombant comme ça. »


Nous accueillîme la nouvelle avec un silence pesant. Puis, je sentis sur ma main quelque chose d'humide. Karina pleurait. Je vins cueillir ses larmes, et éclatais d'un rire tonitruant, qui fit sursauter notre médecin, une jeune d'une vingtaine d'années. Il se gratta la joue, alors qu'on riait aux éclats avec Karina. Il finit par nous laisser, peut-être comprit-il que la nouvelle était à la base de notre épanchement. Enfin ! Enfin, nous avions un bébé. Un petit bébé ! Nous avions attendu tellement longtemp ! Je soulevais sa chemise blanche d'hôpital, et posais ma paume rugueuse sur la peau de son ventre. Ainsi, il y allait avoir le fruit de notre union qui allait grandir, juste sous cette peau, dans son ventre. J'allais avoir un enfant avec Karina. Je posais mon front contre son épaule, et soupirais. Pourtant, au fond de moi, j'avais peur. Une peur soudaine, irréelle, comme une toile d'araignée ; allais-je être un bon père ? Je n'avais jamais pensé à cela avant de connaître Karina. Mais, semblant comprendre mon inquiétude, elle caressa mon front, délicatement, repoussa une mèche de cheveux, douce et rassurante.

« Tout ira bien mon amour. Nous allons enfin avoir un enfant. Mon chéri, notre enfant. Notre bébé à nous. »


Dire que j'ai pris soin d'elle pendant la grossesse serait un euphémisme. Je déménageais notre chambre au rez-de-chaussée, pour éviter qu'elle n'ait à monter les escaliers. Je lui cédais tout ses caprices, allant chercher des fraises et du chocolat à deux heures du matin, ou lui offrant de l'encens à la pomme ou des robes de grossesse. Voir son ventre s'arrondir au fur et à mesure du temps était une joie, un bonheur. Je lui massais les pieds, le dos, les seins, quand elle avait mal. J'offrais tout ce qu'elle voulait, rien n'était trop beau pour la mère de mon enfant. Elle était rayonnante, magnifique. Je l'aimais, aussi ronde qu'un ballon, moelleuse et douce, énervée, échevelée. Tout, j'aimais tout d'elle. Vers les derniers mois, elle était devenue irritable, mais même cela me mettait dans un état d'euphorie incroyable. J'avais toujours cru que le savoir était la chose la plus importante du monde, mais je voyais les choses différemment. Ma femme et mon enfant étaient mes trésors.

« SYDNEY ! DEPÊCHE TOI ! AAAAAH ! »

La douce voix de ma femme m'ordonnait de l'emmener à l'hôpital. Ce que je fis sans discuter, car elle venait de perdre les eaux. Les contractions commençaient, doucement mais sûrement. Nous allions avoir un fils ! Le travail sur la table d'accouchement fut des plus difficile : mon enfant était bien nourri, gros et bien portant ; ma femme hurlait des insultes aux sage-femmes, et cela me faisait rire, alors que je tenais sa main, alors qu'elle broyait la mienne. Elle mit cinq heures pour accoucher, et alors qu'elle reposait sa tête sur l'oreiller, couverte de sueur, tremblante, je pris dans mes mains le linge qui contenait mon enfant. Mon fils. Mon fils !

« Karina, je t'aime si fort ... Il est superbe ! Il est magnifique ... Il a mes yeux et ton teint rouge ... »

Elle grimaça un sourire, et je me penchais pour poser notre fils dans ses bras, avant de les encercler tous deux de mes gros bras. Je me donnais l'impression d'être en bois, et mon fils en porcelaine. Je devais faire attention si attention. J'embrassais Karina sur le front, essuyais la sueur qui couvrait sa peau. Elle avait fait du bon travail. Elle soupira, se frotta les yeux, et serra plus fort notre fils.

« J'aime beaucoup le prénom Tristan. »

Karina était du genre buté. J'étais adossé à la fenêtre de sa chambre, et notre fils dormait dans son landeau. Il avait bu au sein de ma femme, creusant de profonds sillons dans son sein. Je venais de la masser un peu pour la détendre, et j'avais hâte qu'elle revienne à la maison pour que l'on puisse de nouveau s'unir, et pourquoi pas se mettre à l'ouvrage pour un autre enfant ? Même si, à mon avis, elle allait avoir besoin d'un peu de temps pour se reposer.

« Tristan ? Bof. Je préfère Gaston. »
« Mon chéri, Gaston c'est démodé. Pourquoi pas Ezekiel ? C'est joli. »


Je grimaçais, et nous nous mîmes à nous chamailler. Voulant avoir raison, je pris le formulaire, et après avoir raturé le prénom Ezekiel qu'elle venait de marquer, je notais Gaston. Voilà. Quand je le remis, l'infirmière plissa les yeux, entra le formulaire dans son ordinateur, et me donna un petit bracelet après avoir marqué le nom dessus. Je retournais à la chambre, et alors que je m'asseyais sur le fauteuil, Karina toussota.

« Pourquoi notre fils s'appelle Gadriel, chéri ? »


Quelle cruche, cette infirmière ! Incapable de lire correctement ! D'accord, avec les ratures, ce n'était pas évident ... Mais ... Gadriel, hein ? Ce n'était pas mal du tout. Karina semblait penser la même chose, et devant notre côté borné à tous les deux, nous éclatâmes de rire. Je l'aimais, cette idiot butée. Je l'observais avec douceur, indulgence : sa peau était distendue, elle allait devoir prendre un peu de repos. Des cernes noires ornaient ses yeux sombres, et ses cheveux étaient ternes. Pourtant, elle était pour moi la femme la plus belle du monde.

« Chéri, pourquoi m'offres-tu ce pokémon ? »
« Je veux que quelqu'un puisse te protéger si je ne suis pas là. Je ne veux pas qu'il t'arrive quelque chose, à toi ou à Gadriel. D'accord ? »


Karina jeta un coup d'oeil à l'insécateur femelle qui se tenait devant elle. Hannibal se posa sur mon épaule, croassant, jaloux de l'attention qu'avait Gadriel. Pourtant le bébé n'était ps embêtant : il était calme, ne pleurait pas beaucoup, adorait qu'on chante pour lui ou qu'on lui lise des histoires. J'avais même surpris le cornèbre en train de chantonner nos vieilles comptines pour mon enfant. Je posais ma main sur le pokémon insecte qui tourna sa tête aux traits acérés vers moi.

« Bien. Insécateur, vas-tu m'obéir ? Nous protégeras-tu, moi et mon fils ? »
« Inséééé cateur ! Insé insé ! »

Elle était intelligente, cette femelle là. Ce n'était pas pour rien que j'avais été la capturer. Elle pillait régulièrement le camp, et faisait du dégât, et ne s'était encore jamais fait avoir. Alors, je l'avais observé, je l'avais étudiée, et finalement je l'avais capturé il y avait peu. J'avais conclu un marché avec elle : elle serait nourrie, aimée, logée, elle n'aurait besoin de rien, si elle m'obéissait, et qu'elle protégeait ma famille.

« Elle vous protégera ma chérie, je te le promets. »

Avec ses bras armés de faux, elle avait de quoi faire peur, mais elle se révéla un pokémon maternel envers Gadriel. Néanmoins, elle n'oubliait pas que c'était moi qui donnait les ordres, et elle suivait mes ordres à moi. Lorsque je partais pour le camp, je sentais que tout irait bien, que rien ne pouvait arriver de mal. Et pourtant, c'est à terre que je trouvais Karina en rentrant, un soir. Insécateur s'occupait de Gadriel, dehors. Je me penchais vers ma femme, inquiet, et je la vis pâle. Elle avait perdu du poids, et son front était brûlant de fièvre. Je pris Gadriel dans son harnais pour le porter, et j'amenais Karina à l'hôpital. J'attendis avec mes pokémons, inquiet, durant ses examens. Elle n'avait pas repris conscience dans la voiture, et j'étais rongé de peur. Je me rongeais les ongles, et Hannibal frotta son bec contre moi pour m'apaiser, en vain.

Gadriel s'était endormi, après avoir pleuré comme un damné pendant des heures. Insécateur et Cornèbre s'étaient posés dans un coin pour ne pas gêner. Soudain, je vis ce médecin qui était venu nous annoncer que Karina était enceinte. Arnold quelque chose. Je bondis sur mes pieds, et il m'observa, inquiet. Ma haute carrure et mon regard fou le firent reculer d'un pas, mais je l'en empêchais, sentant mon coeur douloureux à l'idée que ma femme puisse être quelque part sans moi pour la soutenir.

« Karina Adams. Où est-elle ?!  » avais-je rugi, postillonnant à son visage.
« Monsieur Adams ? Je ... Elle est ... Elle est en examens ... J'ai ... J'ai quelque chose à vous annoncer, et ce n'est pas une bonne nouvelle. »


Je me tendis, mes muscles bandés. Il parla. Non. Non. Je n'écoutais pas. Si je n'entendais pas, ça n'existait pas. Si je ne voyais rien, ce n'était pas possible. Je pense que me voir flancher, moi, immense montagne, fit peur au médecin. Il appela des infirmiers, mais même à trois, ils ne réussirent pas à me soulever. Je les repoussais, rugissant, criant. J'ai un vague souvenir de tout cela, un voile rouge sur les yeux, colère et peur explosant en moi.

« Non ! SOIGNEZ LA ! JE VOUS DONNERAIS TOUT CE QUE J'AI MAI SOIGNEZ LA ! Elle est tout ce que j'ai ... Soignez-la ... Ou je vous tue. »


J'avais attrapé un homme par le col, et menaçais tout le monde. J'étais prêt à tout pour que Karina soit soignée. Une ... Une leucémie ? Un cancer du sang ? Non, non, impossible. Elle était encore très bien, ce matin. Un peu fatiguée, un peu nauséeuse, mais quoi de plus normal ? Mais était-ce normal alors que Gadriel allait presque avoir un an ? Aurais-je dû me méfier, était-ce ma faute ? Je m'effondrais de nouveau. Je savais ce que ce genre de maladie faisait. J'entendis Gadriel pleurer, plus loin, et j'eus envie de le frapper. Mon fils ! C'était sûrement sa faute ! Avant qu'il ne naisse tout allait bien ! C'était sa faute à lui ! Un médecin approcha, planta une seringue dans mon bras. Je ne réagis pas, ne fis aucun geste. J'étais paralysé de peur. De la peur de la perdre. Karina, ma douce Karina. La mort ne pouvait-elle pas prendre quelqu'un d'autre ? Elle était belle, intelligente, elle n'avait pas le droit de mourir. Je fermais les yeux, et me laissais happer par l'inconscience.

Je me réveillais à l'hôpital. Insécateur et Cornèbre s'occupaient de Gadriel à côté de moi. Je soupirais, et sonnais avec le bouton pour appeler une infirmière. Je grognais sur elle, lui ordonnant de me donner des nouvelles de ma femme. Elle prit peur, appela son supérieur qui se révéla être Arnold. L'homme se gratta la joue où un chaume sombre s'était installé. Il repoussa une mèche de cheveux.

« Nous allons faire faire une chimio à votre femme. Elle a de grands taux de chances. Il se peut qu'il n'y ait pas de rechutes. Mais s'il y en a ... Plus il y aura de rechutes, moins elle aura de chances de survivre, monsieur Adams. »

Comment pourrais-je vivre sans elle, moi ? Je rejoignis la maison, avec mon fils et mes pokémons. Karina devait rester à l'hôpital. Je pris mes congés, et restais toutes les journées à tourner dans la maison, à donner à manger à mon fils, à manger. Je ne sentais rien, ni le goût, ni l'odeur, ni la douleur. Rien. J'allais la voir quand j'avais le droit, et même quand je ne l'avais pas. La chimio l'épuisait. Et moi, je vivais dans ses yeux la douleur qu'elle ressent ait. Elle penait courageusement ce qui arrivait. Elle me demandait d'ammener Gadriel, mais je refusais, prétextant qu'il allait la fatiguer encore plus. Elle toussais du sang, elle avait mal à la tête, et elle perdait sa concentration. Elle perdait la tête. Où était la femme que j'aimais, qui ne pouvait s'empêcher de réagir quand je la taquinais sur son sujet de prédilection, la biophysique ? Elle avait disparue, engloutie par la maladie. Il ne restait qu'une femme pâle, faible, et malade. Et pourtant, malgré mon horreur de la faiblesse, je l'aimais. Je lui rappelais nos souvenirs, quand elle ne se rappelait pas. J'essuyais son menton quand elle oublait de manger et qu'elle bavait. Je l'aimais, encore et toujours.

Après un an et demi de traitement, où mon fils apprit à parler et à marcher, et où il se révéla intelligent et gentil, Karina revint à la maison. Elle était en voie de guérison, et même si elle avait du mal à se déplacer, j'étais heureux qu'elle revienne. J'avais prit un poste de professeur à Amanil, car l'ambiance au camp militaire avait dégénéré depuis que des hommes avaient insulté Karina et que je leur avais cassé la figure violemment. Je l'installais dans notre chambre, et je pris soin d'elle. Je lui faisais prendre ses médicaments, je la faisais sortir quand le temps était doux. Insécateur était devenue la nounou de Gadriel, et notre fils venait parfois dormir avec nous. Sa mère lui avait manqué aussi cruellement qu'à moi, et maintenant qu'elle était de retour, je prenais sa présence comme un cadeau du ciel. Voir notre enfant donnait le courage à Karina de combattre sa maladie, sa faiblesse. Elle recommença à lire, à écrire des lettres à sa famille. Elle sortait dehos, tricotait. J'étais heureux, j'étais fier qu'elle eut vaincu la maladie.

Jusqu'à ce qu'elle revienne, plus forte que jamais, et frappant aux points faibles. Toux tâchées de sang, malaises à répétition. Je ne compe plus les rechutes qu'elle eut après ses chimiothérapies. A chaque fois, l'espoir revenait pour être abbatu à bout portant par la désillusion. Et j'avais l'impressions qu'à chaque rechute, ma femme s'en allait un peu plus, semblait me filer entre les doigts comme du sable. J'étais malheureux comme les pierres, et les questions de mon fils n'arrangeaient rien. Mais je ne le frappais pas. Karina était là. Elle n'aurait pas apprécié. Et puis, Gadriel était un bon petit. Il apprenait vite, et il avait une intelligence déjà vive. Il aimait juste faire du bruit, et cela dérangeait ma femme. Je ne savais plus quoi faire pour l'aider : je lui apportais des fleurs, des livres, des chocolats, je cuisinais même ses plats préférés. Je massais ses pieds, son dos, j'achetais toutes les crèmes, tous les médicaments, toutes les herbes médicinales pour la soigner. Mais rien ne marchait, rien ne la faisait revenir vers moi. Je dormais avec elle, serrée contre moi. Elle appréciait ma chaleur, et je crois qu'elle se souvenait de mon odeur. Elle semblait s'apaiser à mon contact. Et moi, je la serrais tendrement, affectueusement, en priant tous les dieux pour qu'on ne me l'arrache pas. Pour que tout cela soit un mauvais cauchemar, que je puisse me réveiller, et la voir me sourire, en train de lire ses livres, prête à aller au camp. Mais non. Aucun dieu ne m'entendit, ou bien personne n'eut pitié de moi. Et elle continuait de partir. Encore et toujours.

Jusqu'à ce qu'elle parte pour de bon, emportée par une rechute plus violente que les autres. Ce jour-là, je me suis battu plus violemment que jamais, véritable lion sauvage. Les urgences se sont retrouvées remplies de policiers, pour réussir à contenir ma rage. Je fus enfermé deux jours en cellule, pour me calmer, et ces deux nuits, ces deux jours passés là-bas, je les passais à pleurer toutes les larmes de mon corps. Karina, ma douce et chère Karina, plus jamais elle ne me serrerait dans ses bras, plus jamais je ne pourrais embrasser son épaule chaude, sentir sous ma bouche sa jugulaire. Je ne pourrais plus la taquiner, je n'entendrais plus sa voix m'appeler par mon nom. Je ne pourrais plus jamais lui dire combien je l'aimais. J'avais un goût amer dans la bouche, un goût de bile, de sang. De terre. Je sortis de là, calme en apparence. Mais en rentrant, je trouvais Gadriel en train de manger des bonbons devant la télé. Il ne savait pas. J'allais le lui apprendre. L'envoyant valser par terre, je me mis à le rouer de coup.

« Ta faute, petit monstre ! Ta faute ! Ta mère est morte, et sans toi, ça ne serait jamais arrivé ! Je te hais, je te déteste ! Tu n'es pas mon fils ! Tu ne devrais jamais avoir existé ! Ramène moi ta mère ! RENDS MOI MA FEMME !  »


La douleur était si forte que je suffoquais. Karina était morte. Et avec elle mon coeur. Jamais plus je n'aimerais, si c'était pour souffrir comme cela. Je n'aurais plus jamais de larmes en moi. J'étais mieux autrefois, quand je n'avais aucun sentiments. Aucune émotion. Ce jour-là, alors que je frappais mon fils pour faire partir ma douleur, le temps s'est arrêté. Mon coeur était mort en même temps que ma femme. J'espérais qu'elle en prendrais soin, de là où elle était. Moi, je ne m'inquiéterais pour personne d'autre que moi, à présent. Mon fils ne méritait rien de moi : sans sa naissance, j'étais certain que ma femme n'aurait pas été malade. Je me fermais, et la présence du petit se mit à m'indifférer. Insécateur continuait de s'occuper de lui, mais moi, jamais. Je ne le touchais plus que pour le frapper. Je me fichais de ce qu'il pouvait devenir. J'avais mes cours à préparer pour ma classe d'université à Vanawi. Je me plongeais dans ce poste, dans les connaissances de nouveau pour réparer mon coeur béant. Mais je n'étais pas satisfait. Alors, quand j'entendis parler d'un groupe qui fomentait de prendre le pouvoir, quand je vis que j'avais le même point de vue qu'eux, je les rejoignis. Ils n'étaient pas encore au pouvoir à ce moment-là, et de simple soldat, je passais rapidement les échelons grâce à mon intelligence vive et mon don pour le contact avec les gens. J'avais repris mon habitude de mentir, de calculer, de manipuler, et cela fonctionnait très bien avec les gens du peuple. Je ne mis pas longtemps avant d'être nommé Général Politique. Ce poste me convenait si bien ! J'envoyais mon fils en pension, pour ne plus avoir à m'occuper de lui. J'avais donc tout mon temps pour moi. Je me retrouvais enfin. C'était agréable. Et quand j'aidais ce qui allait devenir le régime à prendre le pouvoir, manipulant par ici et par-là, je ressentis une curieuse émotion.
J'avais à présent un certain pouvoir sur l'île, et c'était bon de penser cela. Moi qui avais commencé dans la vie comme un bébé triste et faible, j'étais à présent l'une des têtes du régime. N'était-ce pas ironique ? Je décidais de garder l'insécateur de Karina, et de la baptiser. Elle m'obéissait toujours, et même si j'imaginais que le fait que Gadriel ne soit plus avec moi la peine, je restais son chef, son mentor.

« J'aurais besoin de ta rapidité et de ta capacité à trancher. Je refuse que l'on remette en question mon autorité. Toi et Hannibal, vous devrez m'aider à asseoir mon autorité. D'accord ? Bien. Ton nom sera Bathory. »


Dernière édition par Sydney Adams le Mar 29 Oct 2013 - 19:42, édité 6 fois
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MessageSujet: Re: Sydney Adams ♠ Sans ambition, il n'y a pas de talent. [Terminée]   Sydney Adams ♠ Sans ambition, il n'y a pas de talent. [Terminée] EmptyMar 29 Oct 2013 - 10:25

Insécateur, Cornèbre. Ils étaient mes seuls amis, tous les deux, si le mot ami pouvait les désigner. Jamais je ne devais m'attacher à quiconque. Mes subalternes n'étaient que des pions que je devais jouer avec intelligence sur un immense échiquier. Et la résistance, en face, n'avait aucune chance face à mon génie. J'étais bien décidé à garder le pouvoir que j'avais acquis, et à même en prendre plus. Le peuple se laissait embobinner presque volontairement ; nos agissements étaient souvent cachés, et je mentais comme un arracheur de dents pour faire passer nos actions pour ce qu'elles n'étaient pas, c'est à dire des bienfaits. Il était si simple de mentir et d'être crû, par ici. Mais notre problème numéro un était la résistance, et je me promis, un verre de whisky brut dans la main, ondoyant sous les lumières comme de l'or liquide, que j'allais mettre la main sur leurs chefs et les liquider, proprement - ou salement selon mon humeur. La résistance ne ferait plus long feu. Je refusais de les laisser nous mettre des bâtons dans les roues plus longtemps.

Après tout, c'est à l'un d'eux que je devais ma cicatrice. J'aimais torturer moi-même ceux que je capturais, et l'un d'eux avait réussi à m'atteindre l'oeil. C'était au début du régime, je n'étais pas encore assez méfiant que je torturais. A présent, je prenais garde à ne pas laisser un seul mouvement possible, et je prenais mon temps. En attendant, une cicatrice pâle ceignait mon oeil, en haut du sourcil et sur ma pommette, et je devais un de mes pseudonymes à cela : Scar. J'effrayais facilement les gens, quand je plissais les paupières, et quand ma cicatrice semblait se flouter. Même si cet homme qui m'a blessé a bien payé cette erreur, je me suis promis de faire payer à toute la résistance. Oeil pour oeil, dent pour dent, sang pour sang. Si ils osent toucher à mes pions, je toucherais aux leurs, et je ne suis pas d'humeur gentille. Je n'ai pas de scrupules comme eux. Qu'ils approchent, qu'ils viennent. Ils verront de quoi est capable le Visage du Régime.

HORS-JEU
PSEUDO: Yuna / Sky.
ÂGE: 22 ans
DISPONIBILITÉ: 7/7.
COMMENT AVEZ-VOUS CONNU LE FORUM?: TC /o/
QUE PENSEZ-VOUS DU FORUM ET DU CONTEXTE? Super intéressant, mature, accrocheur ... 8D
PERSONNAGE SUR L'AVATAR: silvers rayleigh [ One Piece ]
CODE: Code vavavavavalidé!
AUTRE: /

FICHE DRESSEUR
INFORMATIONS GÉNÉRALES
RAPPEL GROUPE: Régime.
RAPPEL RÔLE: Général Politique.
VILLE DE RÉSIDENCE/D'ARÈNE: Amanil.


TEAM

- Cornèbre ♂  - Hannibal - Chanceux - Mauvais
COMMENT L'AVEZ-VOUS CONNU?: C'est le premier pokémon de Syd. Il l'a rencontré sous un orage, l'a aidé à se mettre à l'abri de la pluie. Pendant des années, ils ne se sont plus vu, puis il est revenu et n'a plus jamais laissé Syd. Si l'homme a bien un ami, c'est ce pokémon. Hannibal se montre affectueux uniquement avec son maître, par contre gare à ceux qui oseraient le toucher ! Son bec est acéré ! Il est têtu, aime l'odeur et le goût du sang, et partage les ambitions de Sydney.
- Insécateur ♀ - Bathory - Technicien - Maline
COMMENT L'AVEZ-VOUS CONNU?: Elle était à la base un cadeau pour sa femme, pour lui laisser un peu d'aide et permettre de protéger sa famille. A la mort de sa femme, il l'a laissé s'occuper de son fils. Mais ayant promis à Syd de lui obéir, elle continue de répondre à ses moindres ordres, malgré que le départ de Gadriel l'ait chamboulée. Elle est rapide, efficace, et obéissante ; elle protège son maître des gens qui voudraient le doubler, et il n'est pas rare de la voir dans l'ombre de Syd, prête à intervenir si quelqu'un venait s'en prendre à lui, ses faux tranchantes prêtes à frapper.
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MessageSujet: Re: Sydney Adams ♠ Sans ambition, il n'y a pas de talent. [Terminée]   Sydney Adams ♠ Sans ambition, il n'y a pas de talent. [Terminée] EmptyMar 29 Oct 2013 - 19:36

Pioupidou miss!
Alors t'as eu mes réactions en direct pendant ma lecture. À part ne plus avoir de yeux, je dois dire que j'ai beaucoup apprécié ^^ Le départ était un peu long, mais une fois que Sydney prend son envol, on se surprend à bien l'aimer et à souhaiter le voir s'en sortir. La partie qui décrivait la lente mort de sa femme m'a particulièrement touchée. Maintenant, j'espère qu'on aura rapidement un Gadriel! J'aurais voulu plus de détails sur la fin, mais tu as assez écrit, je te laisse donc te reposer un peu ;)
Voilà, tu connais le chemin, je te valide, et t'offre 50 Opals, 3 Poké Ball et 2 Potions pour commencer! Tu peux dès maintenant créer ton Pokédex ainsi que ta RS pendant que je vais faire ton Sac :)
Bon jeu à toi ^^
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