Le père sème, le fils récolte {PV Sam

Le père sème, le fils récolte

Feat Samaël Enodril

Destiné à Samaël Enodril.
Possède des informations sur votre père et son sort. Décidé à vous les donner au cours d'une rencontre, aux environs de la forêt d'érode, près du grand chêne, le 9 décembre à vingt-deux heures pile. Si retard de plus de cinq minutes, la rencontre sera annulée.
Cordialement, Noctis.

Le message qu'il avait envoyé il y a de cela une semaine (plus ou moins) au fils d'Ikael Enodril était clair, bref et très précis. Pas de blabla, pas d'explications inutiles ou de propos trop incriminants si jamais cette lettre venait à tomber aux mains du Régime. Il avait déjà suffisamment de problèmes pour ne pas en ajouter un supplémentaire à cause de son manque d'attention. Cela faisait maintenant un certain temps qu'il attendait ce moment, ayant pris le temps de se renseigner sur Ikael Enodril, l'homme qu'il n'avait pas pu sauver, et par conséquent sur sa famille. Grâce au miracle qu'était Internet, et grâce à l'aide d'un ami ou deux, il avait pu réussir à trouver les infos dont il avait besoin. Au départ, il avait hésité, surtout à cause de l'état de sa jambe et des risques qu'il encourrait à faire cela alors que le Régime recherchait activement ceux qui avaient participé à l'opération contre le bloc R. L'article d'Azmitia n'avait VRAIMENT rien arrangé, et le régime paraissait sur les nerfs, à la recherche d'une victime pour se défouler. Bien qu'il appréciait de savoir que ces enfoirés de merde se retrouvaient avec au moins une épine dans le pied qui amènerait une infection, il savait qu'il allait falloir rester discret.
Ainsi, il avait dû faire en sorte que son Corboss délivre la lettre en toute discrétion un dimanche matin, alors que la majorité des gens dormait. Cela avait été dur, mais il avait pris son temps.

Par ailleurs, il avait attendu de pouvoir retirer son plâtre et de pouvoir marcher un tant soit peu sans sa canne pour prévoir cela. Il ne pouvait décidément pas venir dans cet état : il ne fallait pas que le jeune homme puisse l'identifier comme un conseiller, qui avec l'état de ses jambes, attirait les ragots des journaux. De plus, comme d'habitude lorsqu'il devenait Noctis, il portait son casque pour dissimuler son visage et ses cheveux. Sa méfiance était compréhensible lorsque l'on se rappelait qu'il vivait sur une île où un régime dictatorial faisait régner la terreur. On était jamais trop prudent.
Il attendait dans l'ombre, derrière les buissons qui étaient situés autour du grand chêne qui s'y trouvait. Il était si ancien que personne n'aurait pu douter de l’arbre en question, qui couvrait les environs de son ombre et permettait aux pokémon de se cacher, ainsi que lui-même.
Fae, l'Absol, se tenait à ses côtés, prête à défendre son maître si la situation s'envenimait. Pour l'instant, rien ne laissait croire que cette rencontre se passerait mal, mais il devait au moins s'entourer pour ne rien risquer.
A quelques mètres, son Arcanin usait de son odorat très développé pour veiller à ce qu'une seule personne, ou en tout cas un seul humain, arrive. Si plusieurs personnes arrivaient, alors il pourrait prévenir son maître pour que celui-ci disparaisse dans les ténèbres comme l'ombre qu'il était.
Noctis n'était qu'une ombre, après tout. L'ombre de Faust et de tous les mensonges qu'il se racontait chaque nuit, et qui grâce à son échec du Bloc R, gagnait tous les jours plus de force, se moquant presque de lui par son envergure.

Le souvenir de son père, aujourd'hui, paraissait bien plus douloureux que d'habitude, peut-être parce qu'il avait l'impression de revoir ce qui lui était arrivé. Un père disparu, ça, il connaissait, bien que lui avait eu le privilège de voir le cadavre du sien, et il espérait que jamais le jeune homme qu'il s'apprêtait à rencontrer ne soit aussi victime de cela.
C'est pour ça qu'il était ici, après tout. Pour tenter d'offrir à un adolescent innocent la chance qu'il n'avait pas eu lorsqu'il était à peine plus âgé. Peut-être était-il un peu plus égoïste qu'il ne le supposait en faisant cela, mais qui pouvait bien le blâmer ? Et puis, d'un autre côté, il avait beaucoup à faire : si apprendre la vérité à un jeune homme pouvait lui faire oublier quelques uns de ces soucis, il n'allait pas le refuser.

Le père sème, le fils récolte

feat Noctis

Samaël Enodril

Les branches m'écorchent le visage. Les feuilles me fouettent les tempes. Les lianes me font trébucher. Le froid fait saigner mes mains. Mais qu'importe. Ce soir-là, mon destin peut basculer. Et pas seulement le mien. Celui de mon père aussi. Sa vie est en jeu à chaque instant.
Tout en évitant les obstacles que j'arrive heureusement à voir grâce à la lumière de la lune, je relis une énième fois la lettre que j'ai reçu quelques jours plus tôt d'un mystérieux Corboss sorti de nulle part. Un dimanche matin, alors que je parcourais toujours les routes pour mon entraînement, il était arrivé par la voie des airs, déposant sur mes frêles paumes une délicate lettre blanche. Si au départ je m'étais méfié un peu, trop surpris de savoir ce que contenait la lettre, je n'avais pas attendu une minute de plus pour l'ouvrir. Et je me souviens parfaitement que mes yeux s'étaient brutalement agrandis rien qu'à la lecture de la première phrase. Je n'avais pas pu le croire, la première fois. Des informations sur mon père ?... Mais... Qui ? Et comment savait-il pour lui ?..
Je ne pouvais plus détacher mon regard des mots sur le papier que je lisais, relisais, et re-relisais. Mais j'étais si soulagé... Des nouvelles de mon père ! J'allais enfin avoir plus d'informations sur lui ! Je n'avais pas pu me retenir un saut de joie à ce moment-là et je remerciais le Corboss de me l'avoir fait parvenir de si bon matin. J'aurai pu avoir des doutes. J'aurai pu penser qu'il s'agissait d'un canular pour m'emprisonner ensuite et me faire rejoindre mon paternel. Mais il faut croire que le désespoir avait eu raison de moi et j'avais décidé de passer outre la possibilité que cela soit en réalité un piège destiné à remplacer les prisonniers qui leurs avaient échappé au moment de l'attaque contre le Bloc R.
Cependant, le nom de "Noctis" m'intrigue beaucoup. Je ne sais rien de lui, mis à part que c'est pour l'instant la seule personne qui a des informations sur mon père et qui veut bien me les donner, pour une raison qui m'échappe totalement, alors que je suis quasiment sûr de n'avoir jamais vu cette inconnu auparavant, ou même avoir entendu parler de lui. En fait, je suis assez peu porté sur les médias, s'il était un tant soit peu connu. Serait-ce un espion ?.. Peu importe. Cette lettre m'avait touché et j'avais bien compté y venir, à ce rendez-vous.
Voilà pourquoi aujourd'hui, dans cette nuit du 9 décembre, aux alentours de vingt-deux heures moins cinq, accompagné de ma Caninos et de mon Carabaffe, je cours presque comme un dératé à travers la forêt. Je sais que faire trop de bruit pourrait alerter ou réveiller des Pokémons pas forcément très gentils, mais j'essaye de me faire le plus discret possible tout en accélérant le pas. J'estime avoir attendu assez longtemps pour qu'on me fiche la paix sur le silence alors que je pourrais bien avoir des renseignements sur mon père. Car c'est lui, le véritable but de mon voyage. Le rang de Maître ? Pff... Ce n'est que secondaire. Ma priorité restera toujours mon propre sang, et même si j'aimerais bien me trouver au sommet pour prouver à tous ma valeur, je veux avant tout libérer Papa de sa prison glaciale et hostile, de ces tortures horribles et interminables.
Enfin, vingt-et-une heures cinquante neuf, je m'arrête petit à petit devant les buissons qui me séparent de la clairière qui comporte le fameux grand chêne. Je respire un bon coup et m'élance la minute d'après dans cet endroit où je suis censé rencontrer ce "Noctis".
Mais tout ce que je vois, c'est l'ombre d'un Pokémon. Il est plutôt grand, et je peux voir les poils de sa fourrure se dessiner par l'éclairement de la lune. Je n'ose pas faire un geste, tant la créature est impressionnante. Mais lorsque je croise le regard de Windie, je peux y lire de l'émerveillement. Ses prunelles brillent tandis qu'elle s'avance doucement et en silence dans la clairière, vers le Pokémon sur lequel je peux enfin mettre le nom d'une espèce que je reconnais sans mal. C'est un Arcanin. J'admire la prestance de l'animal que mes yeux continuent inlassablement de contempler. Avec Kame, nous finissons par rejoindre Windie qui s'était approché de son Pokémon d'évolution et mes pas me stoppent à seulement quelques petits mètres de l'Arcanin.
Je suis enfin arrivé au point de rendez-vous, mais je ne vois personne à l'horizon qui aurait pu m'envoyer cette lettre. Je scrute les environs, mais la pénombre m'empêche d'y voir plus clairement que ce que j'aurai voulu.
Au hasard, je me tourne vers Windie, toujours si brillante. Je sais qu'elle en rêve, de sa propre évolution. Alors chaque fois qu'elle voit un Arcanin... Je regarde finalement celui en face de moi et me penche un peu.

- Je... je m'appelle Samaël. Samaël Enodril. Et je suis censé retrouver un certain "Noctis" ici. Tu le connais ?

Oui; au hasard, je me suis adressé au Pokémon directement. Peut-être qu'il pourrait me montrer le chemin à suivre ? Et si je m'étais trompé ?..

Réalisé par BlueBerry pour Orange

Le père sème, le fils récolte

Feat Samaël Enodril

Le chien de feu observa le jeune homme en clignant des yeux, portant tour à tour son regard sur les pokémon qui accompagnaient l'adolescent ou sur l'adolescent lui-même. Il semblait réfléchir à e qu'il devait faire, hésitant probablement sur la décision qu'il devait prendre. Il décida qu'après tout, si son maître attendait ce jeune garçon, alors il fallait qu'il s'assure que les deux puissent se voir. Arthur renifla le jeune homme, principalement par réflexe et pour mémoriser son odeur. Il tenta de le pousser grâce à sa tête vers l'endroit où se trouvait le châtain, avec délicatesse tout de même : il faisait approximativement cent-cinquante kilos, alors il devait contrôler un petit peu sa force, s'il ne désirait pas le blesser.
Ce fut Fae, l'Absol, qui fit comprendre à son maître que quelque chose ou quelqu'un était arrivé en lui jetant un regard significatif. Elle paraissait avoir repéré quelque chose, et Faust remercia mentalement les yeux des pokémon de type ténèbres qui leur permettaient de voir presque parfaitement dans l'obscurité, contrairement à lui. Malgré son affinité pour ce type, il n'avait pas développé de pouvoirs surnaturels. Dommage, sincèrement. Elle l'incita à rejoindre Arthur, mais l'hésitation le poussa à attendre. Ce fut lorsque le conseiller entendit Arthur l’appeler grâce à deux aboiement qu'il se décida à rejoindre à le chien de feu et ce qu'il avait trouvé.
Il s'approcha le plus discrètement possible, se méfiant tout de même encore un peu, se glissant comme une ombre entre les branches et le feuillage en faisant le moins de bruit possible. Ce ne fut que lorsqu'il vit le visage de la personne qu'il attendait qu'il se permit de calmer sa respiration et l'immonde bordel qu'était son cerveau.
Avant de préparer tout cela, il avait fait attention à mémoriser le visage de Samaël Enodril grâce à Internet, et ainsi, il n'y avait pas d'hésitation à avoir quant au fait qu'il s'agissait bien de la personne qu'il attendait. Il s'approcha calmement, désirant ne pas effrayer son 'invité', si l'on voulait.

« Merci, Arthur. » dit-il envers le chien de feu qui, comprenant le message implicite, recula de quelques pas pour laisser son maître s'avancer.

Faust observa Sam en silence, remerciant son casque qui lui permettait de planter son regard dans celui de l'autre sans cela soit vu comme menaçant. Il passa une main sur sa nuque.

« Je sais que l'organisation de cette rencontre laisse à désirer, mais j'ai dû faire vite. » expliqua-t-il.

En effet, il avait été un peu contraint par le temps, et avait longtemps hésité sur la façon dont il pouvait organiser cela.

« Je suis désolé. J'aurais aimé vous contacter de façon plus directe, mais il fallait d'abord que je m'assure que vous étiez digne de confiance. Pardonnez ma méfiance, je vous prie. »

Méfiance serait un euphémisme, mais là n'était pas le sujet. Même si son instinct lui disait qu'il n'avait rien à craindre du jeune homme, il y avait tout de même une partie de lui, celle qui survivait et qui combattait, qui lui chuchotait de faire attention à un peu près tout. Mais il avait pris tant de risques, avait passé tant d'heures à préparer tout cela qu'il était très probable qu'il ne se serait pas arrêté à cause de quelques suppositions stupides et sans véritable sens.
Il avait tant de choses à dire. Des souvenirs et des échecs qui amenaient de violents cauchemars, qu'il allait bientôt devoir partager, bien que la chose promettait de ne pas être plaisante. Ce n'était pas une bonne nouvelle, qu'il amenait au jeune homme, à son humble avis. Bien sûr, il savait que l'homme était vivant, mais... Il était vivant la dernière fois qu'il l'avait vu. Il aurait suffi d'une crise de nerfs d'un des tortionnaires pour que cela ne soit plus le cas.

« Ah, j'en oublie la politesse. Mon nom est Noctis. Ou en tout cas, c'est celui que vous avez besoin de connaître. »

Autant garder une certaine distance, bien qu'il doutait qu'il en soit capable, vraiment.

Le père sème, le fils récolte

feat Noctis

Samaël Enodril

Je vois l'Arcanin nous regarder tour à tour, moi et mes Pokémons. Puis, doucement, il me pousse du bout de son museau et je me surprends à émettre un petit rire discret. Le gros Pokémon enflammé est impressionnant aux premiers abords, mais il a l'air en fait très doux. Je le laisse donc me guider et ne tarde pas à apercevoir une ombre qui se glisse dans le noir et arrive jusqu'à nous. Ébahi, je n'ose prononcer un mot. Une magnifique Absol de couleur rouge s'approche de nous. Elle est aussitôt suivie par un jeune homme tout de noir vêtu avec une sorte de casque sur la tête. Je fais un vif mouvement de recul, apeuré par le nouveau venu. Sa démarche n'est pas menaçante, mais ce qu'il porte sur la tête me donne la chair de poule et j'ai l'impression de revivre une soirée d'Halloween. Lui, s'il venait chez moi, je lui donnerais tous les bonbons qu'il veut... (Hm.. j'espère que cette phrase n'est pas rempli de sous-entendus...)

J'ai l'impression que je pourrais tomber à tout moment, tellement ce type me donne des frissons. Il était vraiment obligé de mettre quelque chose d'aussi étrange pour masquer son visage ?
Quoiqu'il en soit, l'inconnu semble remercier l'Arcanin, qu'il appelle "Arthur", et se tourne ensuite vers moi. Est-ce qu'i peut... sentir ma peur ? Contrairement à moi, mes Pokémons sont bien plus détendus; car eux, ils peuvent sentir l'émotion des gens et ils n'ont pas l'impression que ce gars soit dangereux. Alors j'essaye de me ressaisir et de lui faire face.
L'organisation... Il parle du fait qu'un type louche déguisé en motard emo donne rendez-vous à un gosse mineur le soir dans une forêt sombre et ténébreuse avec un Absol de couleur rouge sang ?
Quoi ? Il aurait "aimé" être plus directe ? Et ba... qu'est-ce que ça aurait été...
Il s'excuse, il devait d'abord m'assurer que j'étais "digne de confiance". Il veut que je lui pardonne sa méfiance. Mouais... Venant de quelqu'un qui cache sa face et qui invite des adolescents à venir le voir en pleine nuit dans les bois... Bon sang, je n'ai même pas le droit de savoir à qui j'ai à faire !
Bon, calme-toi, Sam... Il faut que tu reste calme... J'AI DIT CALME BORDEL ! PAF ! Claque mentale. Il faut que je me maîtrise. Pourquoi suis-je énervé, au fait ? Ah, oui. Le destin de mon père repose peut-être bien sur les paroles d'un parfait inconnu qui a tout d'un... d'un... Non, je ne vais pas dire le mot.

- Ce... ce n'est pas grave...

Hein ? C'est tout ce que j'ai pu sortir ? Sé-ri-eux ?!
Je soupire. Qu'est-ce qui m'arrive, au juste ? Est-ce à cause du stress ? Ou de la peur ? Sans doute. Le Régime peut décider à chaque instant de la vie de leurs prisonniers à partir du moment où ils se trouvent dans leurs cellules. C'est pour ça que je suis venu jusqu'à lui, ce mystérieux garçon qui m'a envoyé une lettre, qui semblait urgente. Je n'ai pas le temps de paniquer. Plus maintenant. Il y a un enjeu bien trop important pour moi.
Noctis. Alors c'est bien lui. Celui qui prétend détenir des informations sur mon père. Celui qui sait. Celui qui pourrait bien m'aider à faire un nouveau pas en avant.
Ma peur est partie. Mais j'avoue que mes yeux ont bien du mal à se détacher de l'Absol chromatique qui accompagne Noctis. Elle est belle, elle est ténébreuse, et elle semble puissante. C'est un Pokémon comme ça que j'ai longtemps recherché dans les montagnes, lors de mon aventure infructueuse.
Je m'approche un peu de mon interlocuteur et tente d'enlever en moi le reste de peur qui s'était accumulé.

- Enchanté, Noctis. Je m'appelle Samaël Enodril; mais ça, je pense que vous le savez déjà. Voici Kame et Windie, mes meilleurs amis.

Car dans les présentations, je n'oublie jamais les plus présents. Car la tortue et la chienne sont mes compagnons les plus fidèles, ceux que je connais depuis longtemps, et qu'ils seront à tout jamais une trace de ma vie heureuse passée.

- Donc... vous avez vraiment... des informations sur... mon père ?.., dis-je de ma voix chétive.

J'ai repris le contrôle de mes sentiments. Mais j'ai peur de ce qu'il va dire, à présent. Est-il venu m'annoncer de mauvaises nouvelles ?...

Réalisé par BlueBerry pour Orange

Le père sème, le fils récolte

Feat Samaël Enodril

Les jours suivants l'opération au bloc R, Faust n'avait pas dû dormir plus de dix heures. En quatre jours au moins.
Cauchemars, douleur et regrets furent ses compagnons durant ces longues journées de solitude où, alors qu'il espérait noyer sa peine en dormant et en ignorant le monde, les souvenirs remontaient dans son esprit et lui faisaient l'effet d'une gigantesque gifle à chaque fois. Il était dur d'oublier le visage de celui qu'il n'avait pas pu sauver, il était dur d'oublier les moqueries insidieuses que son propre esprit lui chuchotait à chaque fois qu'il y repensait. Il aurait pu faire mieux, il aurait pu faire plus, aurait pu donner plus de sens à tout cela. Il aurait dû mourir là-bas, partir s'il le faut pour sauver ne serait-ce qu'une personne de plus, mais le destin, cruel destin, avait refusé son offrande et l'avait violemment repoussé, le laissant immobilisé par les caprices de sa jambe et de son os brisé. Ce fut une longue période d'aigreur et de colère, qui le laissa seul dans sa réflexion, pour le meilleur et surtout pour le pire. Il avait fallu une dispute assez violente avec Isaac pour qu'il oublie qu'il n'était pas tout seul dans cette histoire, et la naissance de Sasha, la Baggiguane, lui avait mis un peu de baume au cœur.
Il avait mis un certain temps à trouver les informations nécessaires pour cette rencontre, mais il avait réussi à le faire, avec beaucoup de patience certes mais il avait tout de même réussi. Et pendant tout ce temps, rien que d'imaginer ce qu'il allait devoir annoncer à ce jeune garçon lui rappelait la douloureuse mort de son père il y a de cela cinq ans. Bien sûr, il n'allait pas lui dire cela : il ne savait pas lui-même si Ikaël Enodril était mort à l'heure actuelle ou s'il était encore vivant. Il se contenterait donc de rester neutre sur ce point : autant ne pas être pessimiste, mais donner de faux espoirs serait littéralement irresponsable. Et fou. Surtout fou, quand on y pensait, et Faust n'était pas du genre à promouvoir la folie, vraiment. Il était parfaitement sain d'esprit.
Hehe. La bonne blague. Lui, saint d'esprit ? C'était un bon menteur, mais pas un hypocrite, malheureusement pour sa santé mentale.

« Avant toute chose... Je tiens à m'excuser. Et j'accepterai votre colère. »

Il déglutit. Oh, la honte qu'il ressentait à l'instant et qui lui fit baisser le regard était immense. Il remerciait son casque, qui lui permettait de faire n'importe quelle mimique en dessous, et dans ce cas-là de dissimuler la honte qui était prête à l'engloutir. Il pouvait presque sentir la houle d'ombre dans son esprit qui se déchaînait pour arriver à le submerger et le faire disparaître sous le regret. Il se ressassait les événements de cette nuit fatidique en boucle depuis des semaines et des semaines.
Pour dire toute la vérité, il n'avait pas pu profiter d'une seule nuit sans cauchemar depuis cette fameuse soirée.
Si les résistants sont des héros, alors il n'en est pas un véritable. Peut-être est-ce pour cela qu'il se cache sous son casque, mais c'est une explication bien trop simple pour être réaliste. Rien n'est aussi simple que cela.
Rien.

« Nous avons mené une opération contre un bloc de détention réservé aux Résistants, et j'ai fait parti du groupe chargé de la libération des prisonniers. »

Il prit une grande inspiration. Cette histoire... Isaac le lui avait fait dire tant de fois, afin qu'il sorte toute l'acidité et toute l'amertume qu'il contenait en lui-même

« J'ai... Nous, enfin... C'était un cauchemar. Tous ces gens, tous ces prisonniers... Je ne vais pas mentir sur ce que j'ai vu et ce que j'ai entendu : tous ces prisonniers ont subi des mauvais traitements, ont été torturés et battus, ou en tout cas de ce que j'en ai vu. C'est en libérant ces prisonniers que j'ai rencontré votre père, enfin... »

Un sourire désabusé et amer étira ses lèvres alors qu'il faisait une pause. « Rencontrait » était un terme bien large pour ce qui était arrivé, vraiment. Il l'avait vu et l'avait amené à plus de douleur, lui avait dérobé sa seule chance de s'échapper. Il ne méritait même pas de porter ce foutu casque. Il aurait dû se poser au sol et laisser l'adolescent décider de son sort alors qu'il récitait la longue liste de toutes ses erreurs dans une litanie tragique mais pathétique.

« Malgré la fatigue et toutes les horreurs dont il a pu être victime... Pour tout dire, je n'ose même pas imaginer ce qu'il... »

Il coupa sa phrase et fit une pause très brève.
Oh, il les avait vu, ces petites coupures. Il avait vu toute la fragilité de ce corps maltraité qui, malgré la fatigue et la peur, s'était poussé avec courage vers la sortie avant que...

« Je suis celui qui a ouvert sa cellule. Il était avec un homme, et j'ai ses coordonnées si vous voulez le contacter. Je suppose qu'il pourrait vous en dire plus, si vous voulez vraiment tout savoir. Je ne vous cache pas que ces détails là ne seront pas des plus plaisants. »

Il n'était qu'un mot, dans cette histoire. Une cause, mais pas une conséquence. Trop de mots, trop d'émotions qui ne veulent plus rien dire, et qui semblent vouloir s'acharner à définir la douleur sans vraiment y arriver.
Il était déjà perdu.

« Il était courageux. Incroyablement courageux. Bien plus que moi. Alors que nous étions sur le chemin de la sortie, nous avons découvert une salle où se trouvaient des pokémon, tous dans des état les plus mauvais les uns que les autres. Je ne peux même pas dire tous s'en sont sortis, au vu des traumatismes qu'ils ont vécu. »

Peut-être mourra-t-il ainsi ; un sourire ironique aux lèvres, comme une ultime offrande à cette vie pleine d'amertume.

« Alors que nous étions sur le point d'arriver à la sortie... Une explosion a retenti sur les côtés. A ce moment-là, j'ai été sonné. Je voyais toujours, mais j'avais pris un assez mauvais coup à la tête, et c'est un autre résistant qui m'a raconté ce que je m'apprête à vous dire. »

Il avait suffisamment harcelé Isaac pour qu'il lui dise toute la vérité pour la révéler aujourd'hui.

« Votre père... Il a sauvé son compagnon de cellule, mais s'est pris deux balles et n'a pas réussi à sortir. A ce moment-là, j'ai été évacué par ce même résistant dont je vous parle. »

Il prit une autre grande inspiration, osant à peine rencontrer le regard de Samaël, bien que celui-ci ne pouvait pas voir le sien. Il arrivait à peine à se regarder dans un miroir, alors comment pouvait-il oser prétendre fixer ses yeux sur ceux de l'adolescent lorsqu'il annonçait qu'il avait échoué à sauver son père ?
Il se demandait pourquoi il avait un jour pensé qu'il aurait pu aider des gens, quand au final, ses actions avaient de telles conséquences. L'ombre de l'échec obscurcit la lumière de toutes les réussites, après tout.

« Je... Je ne sais pas vraiment ce qui est arrivé à votre père, après ça. Nous savons que le bloc R a été désaffecté et les prisonniers déplacés, mais après... Je ne vais pas vous mentir, il n'existe que deux probabilités, et elles sont toutes aussi affreuses l'une que l'autre. »

Il se mordit les lèvres et ses épaules parurent se rehausser un peu, de par les émotions contradictoires qui s'abattaient sur lui en symbiose.

« Il a peut-être été tué, mais je pense que le Régime... Préférera la torture. »

Il grimaça avant de s'expliquer, et inconsciemment, ses muscles se contractèrent, comme si rien que le fait de parler lui amenait de la douleur.

« Il nous a vu de près. Je suppose qu'il est encore en vie, mais je ne veux pas vous laisser de faux espoirs. »

Ses yeux brillaient et il serrait les poings pour retenir toute la rage et toute la frustration qui voulait s'écouler dans ses larmes.
Non, il avait trop pleuré. Il n'avait pas le droit de pleurer. Il n'avait plus le droit de pleurer.
Les coupables n'ont pas le droit de pleurer.
Les coupables n'ont le droit à rien.

« Je... Je comprendrais que vous me haïssiez, voir même que vous vouliez vous venger. J'ai échoué, et c'est car je l'ai appelé à l'aide pour libérer les pokémon qu'il a perdu du temps. »

Hurle. Frappe. Je n'attends que ça. Je ne mérite que de crever dans la boue. J'aurais dû être capturé à sa place.
Noctis était une ombre, et ainsi, il aurait aimé disparaître dans l'ombre des cadavres de ceux qui ne reviendraient plus, mais la réalité était bien plus cruelle que cela.
Et malheureusement pour lui, il n'était qu'un homme ; un homme dont les envies n'étaient que des chimères.

Le père sème, le fils récolte

feat. Noctis

Samaël Enodril

Pourquoi ?... Pourquoi s'excuse-t-il ?.. Quelle colère ?.. Pourquoi serais-je en colère ?.. Pourquoi ai-je cette boule creuse à l'estomac ?.. Que s'est-il passé ?..
Cette tension soudaine, ce ton que l'inconnu prend, ce vent qui se rafraîchit brusquement... Quelque chose de grave s'est produit. Mon rythme cardiaque s'accélère, et j'attends la suite, essayant de garder mon calme. Mes Pokémons aussi sont sur la défensive, se préparant à ce que Noctis est sur le point de nous dévoiler.

Ça y est, il se lance. Il me parle d'une opération, chargé de libérer des prisonniers Résistants. Il en a fait partie. Est-ce là qu'il a vu mon père ? Certainement...
Mes pensées se confirment lorsqu'il aborde le sujet de la rencontre. Ce qu'il me dit ne m'étonne guère. La torture, et le reste. Je sais déjà tout ça. Toutes les horreurs dont il a pu être victime, toutes les souffrances qu'il a enduré, toutes ces tortures pour essayer de le faire parler... Mais au Régime, je sais que tout le monde à droit au même traitement, même les Pokémons. Il ne parlera jamais, je le connais trop bien pour ça. Même si ça implique de ne plus nous revoir, la moindre petite information qui tomberait entre les mains des soldats pourrait avoir des conséquences graves pour tout le monde. Papa en est conscient, il ne renoncera pas.
Devant le récit de Noctis, Kame et Windie se crispent tous deux et imaginent à leur tour l'enfer dans lequel mon paternel se trouve. Mais mon Carabaffe est surpris de me sentir si calme. Toujours dans mes bras, son regard se tourne de temps en temps pour se poser sur moi et détecter la moindre émotion.

Noctis a l'air tout aussi bouleversé que mes amis. C'est lui. C'est lui qui a ouvert sa cellule. C'est lui qui l'a sorti de sa prison. Quelqu'un d'autre était avec lui ?.. Peu importe, au moins je suis sûr qu'il n'a pas souffert tout seul. J'irai peut-être le voir, pour en savoir plus, mais pour l'instant je suis centré sur les paroles de Noctis.
Ce qu'il dit ensuite me touche. Courageux... ça oui, il l'était. C'était sans doute l'une des premières fois qu'on pouvait remarquer chez lui. C'est pour ça que j'ai toujours voulu lui ressembler. Son courage, sa détermination, sa générosité... Je suis son seul enfant, mais la seule chose que j'ai hérité de lui, ce sont ses yeux dorés. Je n'ai pas son charisme, sa force ou son courage. Je ne fais que m'attirer des ennuis, à moi et à mes amis.
Il me parle des Pokémons captifs. Mon père s'est précipité pour les libérer, j'en suis sûr. Il a dû se jeter à l'intérieur de la salle, les rassurer, puis ouvrir les cages une par une en encourageant les créatures à se précipiter vers l'extérieur. Je l'imagine en train de les sauver, alors qu'il a sans doute plusieurs blessures qui le font souffrir.
Le bruit d'une explosion retentit à mes oreilles. Celle dont parle l'homme casqué je suppose... Mais il dit avoir été sonné. La fin de sa phrase sonne comme un glas.
La suite me fait comme une balle en pleine poitrine. Mais ce n'est pas moi qui en ait reçu, c'est lui. Mon regard ne se porte plus sur Noctis. Il se perd malgré moi et scrute le sol. Je ne sais comment réagir. Il a sauvé son compagnon... Pourquoi ça ne m'étonne pas ?.. Il a toujours faire passer la vie des autres avant la sienne. Il n'a pas réussis à sortir, mais je garde au fond de moi une part qui est fier de ce qu'il a accompli. S'il n'a pas pu sortir, alors peut-être c'est le destin qui en avait décidé ainsi.
Je m'étais attendu à une nouvelle qui allait moyennement passé. Mais au final, je ne sais plus quoi faire ou comment réagir. Alors j'attends patiemment la fin du récit, en me promettant intérieurement de ne pas réagir jusqu'à ce qu'il ait fini.
Pourtant il ne sait pas. Peut-être a-t-il fini ?.. Je sens que c'est tout ce qu'il peut me dire précisément sur mon père. Les suppositions qu'il émet sont exactes. La torture ou la mort. Le Régime préférera sans doute la première option. Avec tous les prisonniers qui se sont échappés, ils vont mettre la dose pour ceux qui sont restés.
Je sais qu'il est encore en vie. Quelque chose en moi me le dit. J'ai ce sentiment étrange et l'espoir de retrouver mon père disparu revenir à la maison.

Tremblotant, je relève la tête vers Noctis. Je m'apprête à parler, mais me ravise tout à coup. Ce n'est que maintenant que je percute enfin; que je me rends compte de tout ce que ce mystérieux jeune homme a traversé. Je n'avais pas pris conscience, je ne m'étais pas mis à sa place. Je me dégoûte moi-même d'avoir été aussi égoïste pour ne penser qu'à ce que je pouvais ressentir. Je n'ai pas imaginé une seule seconde la souffrance de Noctis. Il reste pour moi très mystérieux, mais son cœur n'est pas aussi protégé que son visage, et je le discerne enfin. Devant la frustration de Noctis, mes deux Pokémons lancent des regards inquiets et compatissants.
Mes poings se serrent, mais je tremble de plus belle et ma respiration est plus rapide. Mes yeux brillent, ma vue se brouille. Alors que j'avais retenu toute ma peine jusque là, alors que je n'avais pas réagis parce que je savais tout ça, alors que je n'avais pas remarqué à quel point Noctis était sans doute bien plus bouleversé que moi...

Ce n'est qu'au moment où j'essaye d'avancer vers Noctis que mes mots se perdent, que j'ai du mal à respirer, mais surtout, que j'explose. D'un seul coup, mes larmes montent jusqu'à mes yeux et descendent toutes seules sur mes joues. Je n'arrive plus à me contrôler, tout part brusquement. Je pleure comme une fontaine, si ce n'est pire.
Je m'incline légèrement en avant.

- Je... je suis désoléééé...

Mes mots se perdent dans mes sanglots et je n'arrive plus à contenir les perles salées qui continuent de couler malgré moi. Le haïr... Le détester... Mais pourquoi ?! Je veux juste le remercier, lui présenter mes excuses et repartir en grattant le sol jusqu'au sang pour me promettre de libérer mon père coûte que coûte.
C'est la première fois que je pleure depuis que le Régime est venu me l'arracher violemment sans que je puisse quoi faire.
Je n'essaye même plus de me contenir, de garder mon sang-froid. Je ne suis pas courageux, je suis un pleurnichard et un égoïste, là voilà la vérité. Pourquoi n'ai-je pas remarqué plus tôt la douleur et la peine que cette rencontre provoque chez Noctis ?

- Il... il a dû vous causer beaucoup de soucis... Il... il ne changera jamais... Mais je... je sais qu'il n'aurait pas voulu vous... vous inquiéter autant...

J'arrive à articuler quelques mots, mais tout se perd, tout se mélange. Je craque, je n'arrive plus à me dire que je dois rester fort. Ce qu'il a dit, surtout vers la fin, a fini d'achever le peu de fierté que j'avais. Je ne voulais pas pleurer devant Noctis. Je voulais être fort, je voulais montrer que j'étais plus qu'un gamin de seize avec des rêves pleins la tête.

- Je ne sais pas pourquoi des choses terribles nous arrivent quelques fois mais je... je dois croire que quelque chose de bien en sortira...

Windie se presse vers moi et esquisse de petits mouvements de têtes affectifs. Kame, lui, me fait un câlin, qui me rappelle le temps où il était encore le Carapuce frêle qu'il était il y a quelques années, quand mon père l'a sortit pour toujours de la solitude dans laquelle il se croyait condamné. Ces années ont été les plus belles de ma vie, et je les regrette déjà. Nous étions si heureux, mais ces temps sont loin, maintenant.

- Vous n'avez rien à vous reprocher car... c'est... c'est pour ça que je me suis inscris à la Compétition ! Je compte bien le libérer, même si je sais que ça sera dur, et qu'il y aura d'autres dresseurs bien plus forts que moi mais je... je veux quand même essayer...

J'ai repris un peu de mon calme. J'ai dis ce que j'avais sur le cœur. Je suis un gosse de seize ans, d'accord. Je vais devoir affronter des compétiteurs bien plus expérimentés, d'accord. Mais j'ai un rêve, un but à atteindre. Mon père n'a pas mérité de moisir dans une prison toute sa vie. Noctis n'a pas mérité de faire des cauchemars à cause de lui. Je ne mérite peut-être pas la victoire, mais c'est pour lui et lui seul que je veux gagner ! Je n'ai jamais demandé autre chose que sa présence à mes côtés, les conseils qu'il avait l'habitude me donner ou encore ses encouragements; sa voix rassurante qui me dit qu'il sera toujours avec moi, peu importe la situation.
Mais si j'avais su à ce moment-là ce qui allait arriver dans le futur... Si j'avais su à ce moment-là... Par Arceus, qu'aurai-je fait ?...

Réalisé par BlueBerry pour Orange

Le père sème, le fils récolte

Feat Samaël Enodril

Faust n'avait jamais été aussi doué que son jumeau pour gérer le flux instable de ses émotions. Là où Clive pouvait oublier sa douleur pour se concentrer sur le présent, Faust n'avait jamais réussi à faire cela ; alors il l'enterrait sous des mensonges, sous des identités différentes et des vieux souvenirs. Il n'avait pas créé Noctis pour rien : il avait fallu créer quelque chose qui lui permettait de rester distant envers toutes les horreurs dont il pouvait être témoin, et ainsi Noctis été né. Il était supposé être un mur qui le protégeait de tous les dangers, de tout ce qui pouvait le briser et le laisser dans la douleur, mais au final, il supposait qu'il avait fini par se mentir à lui-même. L'ironie de la chose le faisait presque grincer des dents.
Chaque mot de l'adolescent paraissait être une gifle de plus, un coup de poignard qui finissait de parachever l'océan d'ombre dans lequel il se débattait depuis maintenant plus d'un mois. Aussi rassurants et touchants qu'étaient ces mots, il ne pouvait pas s'empêcher de ressentir son cœur se serrer. Parfois, quand la douleur est telle et qu'on la libère, qu'on la chasse brusquement, cela est tout aussi douloureux que si on l'avait laissée s'infecter et Faust n'est pas très doué lorsqu'il s'agit de gérer cela. Il sait que Noctis a disparu, remplacé par Faust qui dans toute sa faiblesse ne peut pas immédiatement parler, ne peut pas réagir. Ses pensées sont encore trop confuses, incompréhensibles et fuguasses. Il ne parvient pas à leur donner de véritable sens, et c'est avec difficulté qu'il tente de contrôler sa respiration qui se fait maintenant rapide.

Derrière son casque, ses yeux sont rougis par les larmes qui menacent de couler alors qu'il se sent prêt à flancher. Il prend une grande inspiration qu'il espère discrète avant de relever légèrement la visière de son casque, juste assez pour que l'adolescent ne puisse apercevoir rien de plus que ses yeux, pour ainsi les frotter et faire disparaître les quelques larmes qui avaient coulé malgré ses efforts. Il remit sa visière en place et joua machinalement avec un de ses gants en cuir, cherchant à se calmer, bien que c'était futile.
L'âge n'arrangeait rien, vraiment. Un maigre sourire étira ses lèvres. Des fois, il détestait ce foutu casque.

« Je... Merci. »

Silence. Il ressert sa main, respire à nouveau. Son regard, finalement, se planta sur l'adolescent.

« Je ne suis pas vraiment la meilleure personne pour vous dire ça, et ce ne sont peut-être pas mes affaires, mais... Vous n'arriverez à rien contre le Régime avec uniquement la force pure. »

Il grimaça, un désagréable souvenir lui revenant. Il avait un jour fait l'erreur de laisser Dalhia, sa Démolosse, se jeter sur un soldat du Régime. Le résultat avait été dramatique : la chienne s'était prise une balle dans la jambe, que Faust avait dû retirer par lui-même après, une fois qu'ils furent en sécurité. L'expérience avait été horrible, et c'était un euphémisme. Même deux jours après, il tremblait à la vue de la cicatrice de la Démolosse. Depuis, elle avait disparu et les souvenirs étaient moins douloureux, mais il avait appris à ses dépends que même la force de ses pokémon était ridicule face à celle du Régime.

« Je vous remercie de vous inquiéter de mon bien-être, mais je ne le mérite pas, croyez-moi. »

Bonjour les problèmes d'amour-propre, ça faisait un petit moment qu'on ne vous avait pas vu.
Combien de fois avait-il échoué ? Il avait rejoint la résistance par égoïsme, et non par grandeur d'âme ; il ne s'était jamais prétendu entièrement bon et il ne le ferait jamais.

« J'espère pour vous que vous arriverez à le retrouver. Je vais vous laisser un moyen de me contacter, sécurisé bien évidemment, si vous avez un jour besoin d'aide. Ce seront des numéros de portable jetable, que je change tous les quinze jours. Je vous enverrai le nouveau numéro à chaque fois. »

C'était un principe de précaution. Rien qu'en laissant à l'adolescent un moyen de le contacter, il prenait des risques énormes. Bien entendu, les fameux portables ne pouvant pas se connecter à Internet, il suffirait de briser définitivement les puces pour effacer toute trace. De plus, jamais il n'aurait une conversation complète sur une de ces choses. Si l'autre avait besoin de son aide un jour, il n'aurait qu'à lui envoyer un message et il accourrait.
C'était tout ce qu'il pouvait faire.

« Je... J'espère que vous y arriverez, vraiment. »

Il voulut continuer dans sa lancée, mais ce fut l'Absol à ses côtés qui le stoppa, alarmée. Faust rencontra son regard et comprit vite ce qu'elle voulait dire lorsqu'elle désigna l'endroit où il avait laissé son sac, et plus particulièrement son œuf, d'un mouvement de tête. Le jeune homme écarquilla les yeux, effrayé par la possibilité que l’œuf soit perdu.

« Fae, tu veux dire que l’œuf serait ?... » balbutia-t-il.

Et merde.

« Excusez-moi, mais c'est une urgence ! » dit-il à l'adolescent.

Il courut vers l'endroit où il avait posé son sac, et constata avec horreur que l’œuf avait disparu, laissant son sac grand ouvert. L'Arcanin vint à ses côtés, et lui montra les petits Chétiflors qui tentaient désespérément de se cacher.

« Merde... » pesta-t-il.

Si tous ces Chétiflors attendaient, cela voulait dire que leur mère, ou leur père, allait se nourrir. Ou était en train, s'il arrivait trop tard. La couveuse étant ouverte, vide de son contenu, et il était donc facile de comprendre ce qu'il venait de passer si on partait un tant soit peu attention aux détails.
Merde, merde, merde, merde !

Le père sème, le fils récolte

feat. Noctis

Samaël Enodril

En fait, je suis content que Noctis m'en ait parlé. Même si ce n'est pas forcément une bonne nouvelle, je me réjouis d'apprendre qu'il n'est pas mort. Noctis m'a avoué qu'il ne savait pas s'il était encore en vie, mais je ne sais pas.. j'ai.. j'ai l'impression qu'il a raison, que la Régime préférera sans doute la torture, après ce qui s'est passé. Ils ont sûrement des questions à lui poser. Mais je sais que jamais mon père ne parlera. Même si on lui arrachait un bras, il resterait muet. Mais si jamais il a un secret, je sais qu'il fera tout pour que j'en hérite; ou dans le cas contraire, il l'emportera dans sa tombe. Mais je ne dois pas penser à ça. Je dois à tout prix rester positif et me dire que je vais le revoir. Car il m'a toujours dit de garder espoir, quelque soit la situation dans laquelle je suis. Je ne dois en aucun trahir la confiance qu'il a placé en moi.

Je relève la tête vers l'homme mystérieux. Surpris, je constate qu'il a relevé légèrement la visière de son casque pour laisser apparaître ses yeux bleu-océan. Est-ce qu'il... pleure ? Je ne saurais dire, mais il a un regard envoûtant qui me réconforte d'une certaine manière. Ses remerciements me vont droit au cœur et je ne peux m'empêcher de sourire, malgré ce qu'il me dit à propos du Régime. Je sèche mes larmes à mon tour, de nouveau confiant. Il a raison, je ne suis qu'un gamin. Je n'ai pas la force nécessaire pour atteindre le Régime par la force brute. Mais c'est pour ça que j'ai autant confiance en moi. Je ne suis pas seul. J'ai mon équipe qui m'accompagne, mes amis, ma famille. Tant qu'ils sont prêts de moi, je sens que rien n'est impossible. Ce n'est sûrement pas ma force qui va affronter le Régime, c'est celle de l'amitié qui me lie à mes Pokémons. Cette confiance en moi, je l'ai aujourd'hui; mais si seulement je pouvais parler au Sam du futur pour lui dire la même chose... Car même si je n'en suis pas encore conscient, plus tard, un jour, je serais amener à perdre foi en ce qui m'anime à cet instant présent.

Je reprends mon air étonné quand il m'avoue ne pas être méritant. Au contraire, il m'a tant aidé !... Mais il a dû souffrir à cause de ça, et je m'en veux un peu. Je ne sais pas exactement quelles épreuves il a traversé mais cela devait être vraiment pénible.
Puis, il me donne son numéro de téléphone. Je suis soudain de ce qu'il me dit et de la confiance qu'il me porte. Je prends délicatement le petit bout de papier et le place bien en sécurité dans ma veste, près du numéro de Victoria que j'ai soigneusement conservé. Ses encouragements manquent de me faire pleurer à nouveau. Pourtant cette fois-ci je résiste. Je suis content de l'avoir rencontré. C'est un type étrange qui se promène avec un Absol chromatique dans une forêt sombre, mais je l'aime bien quand même.
Cette même Absol échange des regards en alerte à Noctis et celui semble soudain s'affoler. Il s'excuse aussitôt auprès de moi et repart en compagnie de ses deux Pokémons.

- Ah, au fait je voulais vous dire... merci...

Trop tard, Noctis est parti dans les ténèbres de la nuit. Je suis un peu triste de ne pas l'avoir remercier correctement. Il a été si gentil avec moi... Alors que je n'ai pas dû lui rendre la vie facile. J'espère qu'un jour, j'aurai l'occasion de le revoir, et de le remercier. Son aide m'a été précieuse, je le sens. Mais même s'il a des manies un bizarres, je crois que je l'apprécie. J'aimerais bien en apprendre un peu plus sur lui, et lui apporter mon soutien à mon tour.
Je me tourne vers mes propres Pokémons.

- Bon ba... en route !

Windie aboie pour acquiescer et Kame me lance un sourire avant de nous éloigner à notre tour de la clairière. Nous nous enfonçons dans les bois, sans trop savoir où aller. Après quelques minutes de marche, nous trouvons finalement une nouvelle clairière en pente où l'herbe est moelleuse et confortable. Peut-être que nous pourrions dormir à la belle étoile, ce soir ? Je me sens en sécurité avec mes Pokémons, je ne crains donc plus de me faire attaquer par quoique ce soit.
Alors que je m'assois sur le sol tendre, je sens tout à coup quelque chose me toucher le dos. Je me retourne brusquement. Mes yeux s'agrandissent lorsque je remarque que c'est un Oeuf de Pokémon. Je tourne la tête dans toutes les directions. Aucun trace d'un quelconque Pokémon dans les parages qui aurait pu l'avoir laissé ici.

- Hé, qu'est-ce que tu fais ici, toi ? T'es tout seul ?

Je parle à l'Oeuf comme à un enfant. Est-ce qu'il peut m'entendre, au moins ? Je n'en ai aucune idée. Les Oeuf sont un véritable mystère, pour moi. Les seuls que j'ai eu en ma possession étaient ceux de Windie et de Volt. Mais je n'ai jamais pu savoir s'ils m'avaient écouté quand je leur parlais.
Une chose est sûre pour le moment : je ne peux pas laisser cet Oeuf à la merci de potentiels prédateurs qui voudraient en faire leur dîner. Mais je ne peux pas le prendre avec moi, ce n'est pas le mien. Il a sûrement des parents qui doivent s'inquiéter pour lui. Je pourrais peut-être partir à la recherche des géniteurs ou les attendre ici ?
Mais avant même d'avoir le temps de réfléchir, j'entends un bruit qui attire mon attention et celui de mes amis. Heureusement, la lumière de la lune me permet de voir sans mal le nouveau venu. J'écarquille les yeux et manque de pousser un cri lorsque j'aperçois un énorme monstre s'approcher de moi. Deux grandes feuilles sur les côtés, une grosse bedaine surplombée d'une gueule béante et une liane qui claque comme un fouet.

- "Empiflor, Pokémon Plante et Poison. Empiflor vit en petit groupe familial, au plus profond de la jungle. Il se pend aux branches basses, à quelques centimètres du sol et attend que la malheureuse proie passe devant lui sans s'en rendre compte pour la happer d'un coup. Elle est ensuite lentement digérée dans sa poche ventrale"

Je déglutis suite à la description du Pokédex. Il ne manquait plus que ça, je suis vraiment chanceux, moi ! Après un gros serpent de mer, un ours enragé et des soldats du Régime, j'ai le droit à la plante carnivore ! J'ai un don pour attirer les gros trucs pas gentils, c'est pas possible !
L'Empiflor en question me fixe d'un regard mauvais. Puis, il scrute l'Oeuf à quelques centimètres de moi. Il fait ensuite bouger sa liane jusqu'à l'Oeuf et l'entoure de son fouet. Enfin, il le rapproche petit à petit de lui en se léchant les babines. Je comprends alors qu'il ne veut le récupérer que le pour le manger.

- Hé !!

D'instinct, je m'élance sur la liane et la mordille de toutes mes forces pour faire lâcher prise à l'animal. Ma stratégie marche et l'Empfilor lâche bien vite sa prise. Je m'empare de l'Oeuf, le prend dans mes bras et le serre fort contre moi. Hors de question de le laisser se faire avaler par cette bête ! Jamais je ne le permettrais !
Mais alors que j'essaye de courir loin de la créature, sa liane s'enroule autour de mon pied et me fait perdre l'équilibre. La prise autour de ma cheville me serre et m'entraîne de plus en plus vers le Pokémon Plante et Poison.
Ma Caninos et mon Carabaffe se jettent à leur tour sur l'adversaire pour qu'il me lâche, mais en vain. La bête fait ua moins le double de leur taille et ils ne sont pas encore assez entraînés pour combattre quelque chose de semblable. Windie a l'avantage avec ses attaques feu mais de nouvelles lianes apparaissent et l'une d'elle s'enroule autour de sa queue pour la suspendre dans les airs et la projeter au loin afin de l'assommer.

- Kameee ! Windiiie !

Ma tortue, désavantagée par le types, n'a pas plus de chances et se retrouve prisonnière des liens de l'Empiflor. Les lianes du monstre jaunâtre se concentrent maintenant vers moi et l'Oeuf, que je tiens toujours fermement dans les bras.
Je ne peux retenir un frisson d'effroi m'envahir quand je sens les plantes grimpantes entourer mon pantalon en resserrant leur étreinte et s'engouffrer à l'intérieur de ma chemise. Le contact avec ma peau est une véritable torture et je me retiens de crier pour ne pas faire davantage plaisir à mon ennemi. Ses fouets verts continuent de me caresser et de me retenir prisonnier. Pourtant j'essaie de me débattre et de mordre continuellement toute plante qui s'approcherait de moi, mais en vain. L'Empiflor est le plus fort. C'est alors que j'arrête brusquement de bouger. Désormais, tout ce que l'on peut entendre dans la nuit, ce sont mes pleurs. Je n'arrive plus à contenir mes larmes, tant je suis en colère.

- Pourquoi !... Pourquoi tu veux empêcher un être de venir au monde ?!... Ce Pokémon, il a... il a sûrement une maman, et... un papa... qui l'aiment !.. Alors je... je ne te laisserais pas l'empêcher de vivre !

Furieux de ne pas obtenir son casse-croûte, le Pokémon Plante pousse un cri de mécontentement. Puis, il lance des feuilles coupantes dans ma direction. L'attaque Tranch'Herbe, si je ne me trompe pas. Ces feuilles me taillent comme des lames de couteaux et font des coupures dans mes vêtements. Cependant, au lieu de lâcher l'Oeuf, comme c'était l'intention de l'Empiflor, je le colle un peu plus contre moi.
Mon opposant voit rouge et fulmine de rage. Il libère de nouvelles lianes et les fait retomber sur moi comme des fouets. Je ferme les yeux mais j'entends le bruit atroce du claquage et je laisse enfin mes cris exprimer la douleur qui me submerge. L'Empiflor émet un sourire satisfait en écoutant le son de mes gémissements et continue sa cadence tortionnaire.
Oui, cet Oeuf a sûrement une maman et un papa qui le cherchent partout; ils doivent sans doute s'inquiéter pour leur progéniture. Papa... pardonne-moi...
A vrai dire, ce n'est pas comme ça que j'imaginais ma mort. Mais peut-être que le destin m'a réservé ce sort cruel pour me punir de mon insouciance et ma naïveté ?...
Si je ne sors pas indemne de cette confrontation, je prie Arceus de toutes mes forces pour que l'Oeuf et mes Pokémons s'en sortent. Dans un effort désespéré, parmi mes sanglots et mon sang qui se répand peu à peu, je pousse un dernier appel, dans l'espoir que quelqu'un m'entende.

- A l'aide...

Réalisé par BlueBerry pour Orange

Le père sème, le fils récolte

Feat Samaël Enodril

Elle sait.
Fae n'est sûrement pas la plus forte, ni la plus sage des Absols. Elle se souvient encore de sa mère, bien que les souvenirs soient flous et éparpillés dans son inconscient ; cette force de la nature qui de son seul grognement pouvait faire trembler n'importe quel homme qui avait l'audace de se mettre sur son chemin. Elle se souvint de sa force, de sa lame qui pouvait trancher dans les rochers comme du beurre, et qui, malgré la rudesse de son éducation, faisait preuve d'une présence constante et rassurante. Sa mère n'avait jamais été particulièrement douce, et elle ne peut se souvenir que de quelques rares fois où elle avait témoigné d'affection envers elle. Mais Fae ne peut pas lui reprocher d'avoir été trop dure, loin de là : sa vie aurait été très courte si sa mère ne lui avait pas enseigné comment survivre. Sa couleur et la rareté ainsi que la puissance de leur espèce avaient amené la convoitise des humains, et il avait fallu apprendre à courir aussi vite que le vent, à escalader des montagnes toujours plus dangereuses, à être forte et courageuse pour ne pas abandonner. Fae savait que sa mère avait tout fait pour elle, et sait qu'il ne faut donc pas regretter ce fameux jour où elle mourut en la protégeant. Elle n'a jamais lamenté la disparition de sa mère, et ne regrette pas de ne pas avoir connu son père.

Elle n'aurait jamais pensé avoir un jour des enfants, pour dire toute la vérité. La solitude lui paraissait être une compagne idéal, et la vie que Faust lui offrait la satisfaisait assez pour qu'elle n'en demande pas plus. Et puis elle avait rencontré Arthur.
Oh, elle avait vite compris quelle était la nature de l'affection que l'Arcanin lui portait avant et après son évolution. Elle n'était pas sotte, loin de là. Il avait été très aisé de deviner ce que désirait le chien majestueux. Au départ, elle l'ignorait avec toute la politesse qui lui était caractéristique, mais ce fut en la combattant qu'il gagna son respect.
La différence de niveau était presque abyssale, et l'Arcanin le savait. Là où Fae avait été élevée par Faust depuis le début de son adolescence, le chien ne faisait partie de l'équipe que depuis presque un an maintenant. C'était ridicule, et il y avait fort à parier qu'il lui faudrait beaucoup de temps pour s'adapter au niveau du reste de l'équipe. Même Nero, qui était le plus faible de l'équipe originale, arrivait à battre l'Arcanin, avec certes toute la ruse dont il savait faire preuve. Mais Arthur avait combattu.
Il avait été un adversaire honorable, tenant jusqu'au dernier coup. Faust, pour l'occasion, s'était posé en arbitre et les avait laissé à leurs propres règles. L'Absol avait pu voir toutes les maladresses chez l'Arcanin, dans ses postures quand il attaquait, dans son jeu de pieds qui était encore ridicule si on le comparait au sien, dans ses attaques trop subites et irréfléchies. Mais malgré chaque coup, celui-ci se relevait, ses yeux brillants de détermination. Ce jour-là, malgré la défaite écrasante de l'Arcanin, il avait gagné son respect.
Ce n'était qu'avec le temps qu'elle avait commencé à se rapprocher de lui. Elle ne savait pas vraiment expliquer comment tout cela s'était passé, mais d'un mois à l'autre, elle s'était retrouvé avec un œuf.

Expliquer cela à Faust avait été étonnamment facile, en réalité. Elle et Arthur étaient arrivés devant lui, presque honteux, comme des enfants pris en train de faire une bêtise, avec un œuf sous les bras. Ou sous les pattes, dans ce cas-là. Ils s'étaient attendus à ce que leur dresseur les taquine et les embarrasse, voir les réprimande, mais il avait été particulièrement compréhensif et leur avait assuré, avec un petit sourire doux, qu'il était prêt à les aider à s'occuper de leur enfant. Elle avait souri, parce que c'était bien l'homme qu'elle avait choisi, qu'elle avait vu grandir et à qui elle avait confié sa force et son âme. L'homme pour lequel elle était prête à mourir, parce qu'il lui avait tant donné et qu'il avait grandi en quelqu'un à qui elle pouvait accorder son entière confiance.
Elle l'avait vu. Elle le connaissait presque mieux que ce qu'il savait de lui-même, et accepte chacun de ses défauts, même les plus laids. Elle accepte sa cruauté parfois, elle accepte son entêtement, sa jalousie, ses crises de colère, son aveuglement et ses doutes les plus futiles. Il est loin d'être parfait et elle le sait, mais elle le suivra, jusqu'au bout s'il le faut. Elle est heureuse, ce jour-là.

Alors lorsque l’œuf disparaît, elle sait qu'il se sent coupable, et fait tout ce qu'elle peut pour chasser les pensées noires qui viennent lui ronger l'esprit. Arthur, à ses côtés, doux et aimant, retient difficilement la panique qu'il ressent. Très vite, leur maître tente de se calmer pour réfléchir. Il monte sur le dos d'Arthur, accroche solidement son sac à son dos et l'Arcanin se met à renifler, cherchant désespérément l'odeur de l'Empiflor.
Fae espère de tout son cœur qu'ils n'arriveront pas trop tard. Ce n'est que maintenant qu'elle voit tout l'amour qu'elle ressent pour un être qui n'est pas encore né, et elle est chamboulée par la force des émotions qui la traversent. Elle sait qu'elle doit réfléchir, rester calme et être en cet instant comme sa propre mère, mais elle ne l'est pas. Elle est mère et elle refuse qu'un Empiflor lui vole cela. Elle lui fera payer, quel que soit le résultat, tragique ou pas, de leur recherche désespérée.

Ils courent. Elle peut sentir le vent lui fouetter le visage et les odeurs lui agresser les narines, mais elle s'en fiche. Arthur paraît plus perdu qu'elle, mais elle peut le voir remuer vents et marées pour trouver une piste. Malheureusement, en pleine nuit, les pokémon courent et les odeurs se mélangent, et son odorat, bien que légendaire, n'est pas assez entraîné pour toutes les différencier.
Un cri déchiré brise le silence de la forêt. Puis un second. Puis un troisième. Les yeux de Faust s'écarquillent, elle peut l'entendre rater sa respiration et pousser un juron. Très vite, ils suivent leur ouïe qui leur indique la provenance des cris, et elle peut voir son maître serrer les dents, brûlant de colère et de peur à la fois. Elle se demande si c'est Noctis qui a soudainement pris le dessus, où si c'est Faust qui laisse aller tout ce qu'il est maintenant qu'il est libéré de son identité de résistant.
Elle n'a jamais vraiment su identifier l'un ou l'autre, et elle suppose que même Faust ne peut pas le faire. Peut-être que Dalhia sait, mais là n'est pas le sujet aujourd'hui.

En sachant où se diriger, ils arrivent très vite à leur destination, et le spectacle qu'ils découvrent leur glace le sang. Du sang, beaucoup trop de sang. Et le corps du jeune Samaël, proie des caprices d'un Empiflor furieux. Elle voit son œuf, dissimulé sous le corps de l'adolescent qui, et elle le comprend vite, l'a protégé au péril de sa vie. Une sensation étrange s'installe au creux de sa poitrine.

« Fae, vite ! » hurle Faust, lui donnant un ordre qu'elle comprend à l'instant.

Et elle n'est plus que colère. Sa corne brille, enhardie par l'attaque Danse-Lames qu'elle maîtrise depuis longtemps maintenant. Ses yeux émeraudes, brillants de haine, rencontre ceux de l'Empiflor qui fixent maintenant son attention sur elle. Toute sa colère brûle en elle alors qu'elle pousse un grondement fort et orageux, et que sa corne déchire violemment les liens qui retiennent l'adolescent prisonnier.
Elle voit Faust descendre de l'Arcanin et soulever l'adolescent de toutes ses forces pour l'éloigner du combat, non sans difficulté. Il n'est pas le plus musclé, mais elle suppose qu'il doit y mettre beaucoup de force. Il accompagne les pokémon du garçon à ses côtés, au loin, pour s'assurer qu'ils ne seront pas blessés eux aussi.
Arthur vient se placer à ses côtés, son regard bleu enflammé par la colère. Ses crocs brillent sous l'éclat de la lune qui éclaire le ciel.

L'Empiflor ne tient pas plus d'une minute.
Ils sont Furie et Colère, ensemble. Les flammes d'Arthur semblent danser autour de son corps et de sa corne, et celle-ci s'abat, furieuse, comme une punition divine. Il est derrière elle, à chacun de ses pas, et elle n'entend que les cris paniqués de l'Empiflor. Ses reflets transparents accompagnent Arthur dans une charge enflammée, l'entourant alors que le feu brûle de lumières or et carmines autour de lui. Les Chétiflors sur son passage tombent comme des mouches, les uns après les autres. La roue de feu est violente, destructrice, punitive. L'Empiflor tombe, vaincu, et elle s'apprête à l'achever.

« Fae ! Arrête ! »

Cela n'aurait duré qu'une seconde. Il aurait suffit d'une seule tranche de sa lame émoussée pour que cet Empiflor méprisable répande ses organes sur le sol, comme signe ultime de sa défaite, et Fae aurait volontiers couvert son pelage de neige du sang de son ennemi comme trophée. Elle l'aurait porté comme un avertissement, mais lorsqu'elle rencontre le regard bleu paniqué de son maître, elle expire et sa corne reprend sa couleur normale, perdant de sa lumière. Arthur vient à ses côtés et appuie sa tête contre elle, et elle ne peut qu'apprécier sa présence qui apaise sa colère. La chaleur qu'il lui prodigue chasse la haine qui brûlait en elle.
L'Empiflor n'est pas mort, ou en tout cas il n'est pas encore. Peut-être survivra-t-il, peut-être qu'il mourra avant le lever du soleil, mais en tout cas, cela ne la concerne plus. Elle laissera le destin décider pour lui, et ne cache pas qu'elle serait la première à apprécier la possibilité qu'il crève dans la boue, entouré par ses enfants qui jamais ne referont la même erreur, le souvenir d'une Absol à la corne rouge leur revenant à l'esprit.

Elle sent la langue de l'Arcanin laper les quelques blessures que lui ont fait les attaques de l'Empiflor, et ronronne presque. Mais très vite, ils reviennent à la réalité et vont aux côtés de Faust.
Fae comprend vite. Thalie et Merlin, la Gardevoir et le Gallame de l'Isaac, sont là pour les téléporter. Elle jette un coup d’œil à son œuf, leur œuf, puis à Faust, qui hocha la tête pour lui assurer qu'il le protégera. Elle partage un dernier regard avec Arthur avant que les rayons rouges de leurs pokéballs ne les aspirent et ne leur offrent un repos dûment mérité.

==> Topic suivant.

» Qui sème le vent récolte la tempête. [C]
» On ne nait pas père : on le devient [OS]
» Promenade entre père et fille n°1 [C]
» Promenade entre père et fille n°2
» Promenade entre père et fille n°3

Le père sème, le fils récolte {PV Sam

Le père sème, le fils récolte {PV Sam

Sujets similaires

Sujets similaires