Je sens le plaisir monter, m'irradier de l'intérieur. Je le sens me ronger au creux du ventre, me secouer de tremblements puis exploser succinctement, brutalement et laisser la vague de chaleur m'envahir et me retourner l'estomac. Se déverser rapidement jusque dans le bas de mon dos et remonter le long de mon échine. Me forcer à serrer les draps et à étouffer un râle de plaisir. Je souris, le corps secoué de spasmes, bien heureux de l'instant que je lui ai offert et qu'il m'a rendu. Je me laisse enlacer, laisse ses lèvres effleurer les miennes sans le quitter un instant du regard. Je me noie une seconde fois dans son plaisir et je soupir de bien être.

" C'est une invitation John ? "

Je ris et je me laisse glisser à côté de lui. Je reste allongé quelques minutes, le souffle court puis je me lève pour me débarbouiller à la salle de bain. Je reviens et sans aucune honte, je fouille dans son étagère pour y trouver un boxer propre. Hm... J'esquisse un sourire amusé en découvrant sa collection plus que colorée : des pikachu, un " Propriété privée " qui me fait beaucoup rire, des cup cake, des kiwi... J'opte pour quelque chose de plus sobre, noir. Je l'enfile et retourne m'allonger à ses côtés. Je me serre contre lui, mon torse pressé contre son dos et je soupire. Je tire les draps sur nos corps et je ferme les yeux.

" Quelle collection. "

Je ris en glissant quelques baisers sur sa clavicule. J'ai passé une bonne soirée, une très bonne soirée. Je ne sais pas si c'est réellement ce dont j'ai besoin en ce moment, le sexe, l'alcool et tout ça... Je crois même que j'ai dépassé les bornes. C'est rarement le cas mais je me sens débordé, emporté par quelque chose de nouveau pour moi. Ca fait longtemps que je n'avais pas été rattrapé par mon passé, par l'abandon de mes parents, par la résistance, par tous ce que j'ai toujours fuis, par la part que je n'ai jamais voulu prendre. La résistance, le régime... Je leur en veux à tout les deux, je les déteste autant l'un que l'autre car ils n'existent pas tout seul, chacun de leur côté. La résistance est née parce que le régime est apparu et le régime continue d'exister parce que la résistance le pousse. Et c'est un cercle vicieux qui emporte les vies. Toujours plus de morts, de chagrin, de blessures et une île qui respire le rythme des combats et de la désolation. J'avais pourtant choisi de l'ignorer jusqu'à maintenant mais quand on vous prend et qu'on vous plonge dedans tête la première, vous n'avez plus le choix, vous apprenez à nager. Et si j'ai pu penser une seule seconde que boire un peu, profiter et sortir me changerait les idées, j'ai eu tord. Bien sûr, quelques heures, un moment de paix partagé avec John mais la réalité vous rattrape au galop et je me rends compte que la vie que je menais dans mon coin, que la discrétion dont j'ai fait preuve jusqu'à aujourd'hui, que mes habitudes, ma routine, tout ça c'est terminé.

" Je partirai tôt. Je ne te réveillerai pas. "

Je l'enlace et enfoui mon visage sur la courbe de sa nuque. J'ai l'intention de m'en aller aux aurores, je ne veux pas lui laisser croire qu'il peut y avoir quelque chose entre nous, que nous pouvons nous revoir car ma vie telle qu'elle est est sur le point de changer et ne pas avoir d'attache rend ce bouleversement plus facile à accepter et à affronter. Cette nuit était un plaisir, un plaisir que je n'oublierai pas mais un plaisir éphémère qui doit rester où il est.

" Bonne chance pour la suite John. "

Je passe ma main dans ses cheveux bruns, je respire une dernière fois son odeur et je me laisse sombrer dans un sommeil, emporté par les dernières effluves d'alcool, la fatigue et l'euphorie. Peut-être mon chemin croisera-t-il à nouveau le sien dans le futur ? D'une certaine façon, je me surprends à l'espérer.