Le jeu du miroir

...

Ce n'est pas que faire cela fait particulièrement plaisir à Clive, en fait ; c'est même le contraire, et il grimace tous les jours depuis qu'il a accepté de mettre ce plan en marche. À chaque fois qu'il y pense, il ne peut s'empêcher de se dire que peut-être il existe un autre moyen, que peut-être il peut réfléchir à une méthode qui lui permettrait d'arriver à ses fins sans une confrontation directe avec son imbécile de jumeau, mais sa logique finit par lui faire comprendre qu'il ne servirait à rien de reculer maintenant. Il avait passé un mois entier, voir plus si l'on comptait l'élaboration dudit plan (pendant lequel il avait été insulté d'abruti presque autant de fois que durant une année entière) avec Azazel. Azazel qui au passage avait été la seule personne à être au courant de tout cela, principalement parce qu'il avait été son informateur principal, celui qui lui avait permis de récupérer ce fameux numéro de téléphone, et aussi parce qu'il l'avait aidé à élaborer tout ce bordel. Lorsqu'il lui avait demandé ce qui l'avait motivé, le médecin avait répondu qu'il trouvait tout ça fun, et Clive ne doutait pas un seul instant que cela soit la vérité.
Il avait dû réfléchir. Longuement. Des heures et des heures passées à revoir son choix d'actions, ce qu'elles amèneraient et les conséquences négatives de ce qu'il se préparait à faire. La peur lui tiraillait l'estomac tant l'idée de voir Faust le retournait ; Clive savait déjà que sa réaction ne serait pas positive, et devoir affronter la haine dans ses yeux le terrorisait véritablement. Il n'avait pas peur de la mort, ni de la honte, mais sa haine ? C'était une arme horrible et qui laisserait sûrement des cicatrices aussi douloureuses que vicieuses. Il avait toujours été touché par la colère que son jumeau pouvait émettre à son égard, et même s'il faisait tout pour relativiser et ne pas se noyer dans ses propres regrets, il doutait de sa capacité à tenir face à son frère. Mais il devait être fort, même si en vérité, il avait toujours été le plus fort des deux.

Aujourd'hui, c'était son anniversaire. Leur anniversaire. Une date qu'ils fêtaient ensemble quand ils étaient plus jeunes, qui les faisait toujours sourire même des semaines à l'avance tant imaginer qu'ils partageraient ce moment ensemble égayait leurs journées. Leurs anniversaires avaient toujours été sacrés, du moins jusqu'à ce que Faust parte. Qu'il les abandonne. Son premier anniversaire seul, il l'avait passé à vider des coupes entières de glace à la vanille devant des séries télé de qualité discutable. Avec le temps, il avait appris à faire avec, mais il n'en pouvait plus. Les événements du premier janvier avaient fait que Faust avait coupé toute communication, et Clive ne pouvait tout simplement plus supporter cette façon qu'avait l'autre de l'ignorer, de la traiter comme s'il n'existait plus et était juste une poussière à écraser sur son chemin. Peut-être n'était-il pas le seul à en souffrir, mais il était bien le seul décidé à faire changer les choses
Peu importe ce qui arriverait, en fait ; il refusait de laisser la situation dans un tel état pendant des années, comme cela s'était déroulé auparavant. Hors de question d'attendre trois ans que cet idiot se décide à bouger ; si Faust refusait de prendre des décisions, alors il le ferait.
Bien sûr, ce qu'il s'apprêtait à faire était dégueulasse. Il n'était pas assez naïf pour croire le contraire. Il n'était pas encore au niveau d'Azazel, mais il ne pouvait pas vraiment nier le fait que ce qu'il allait faire était stupide. Incroyablement stupide et abject, mais nécessaire. Oui, peut-être qu'il cherchait encore à se justifier et à faire taire les doutes qui hurlaient et tissaient leur toile d'ombre au fond de son esprit.
Alors il calma ses nerfs, expira un grand coup et composa le numéro maudit. Il y eut un court silence et dès qu'il entendit l'autre décrocher, il prit la parole immédiatement.

« Ah, désolé de te déranger, mais j'me disais qu'on pourrait aller bouffer une glace à Vanawi d'ici une heure ou deux ? J'ai pas envie de rester enfermé, donc... » dit-elle d'une voix volontairement désinvolte.

Il avait passé tellement d'années à côtoyer Faust que du coup, il aurait été impossible de différencier leurs voix lorsqu'il y mettait tout son talent.

« Ça te tente, Sam ? »

Après tout, il n'avait pas laissé ses cheveux reprendre leur couleur originale et retiré ses lentilles pour rien.
Dis-moi, Faust, est-ce que tu vas me haïr pour ce que je vais faire ?

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Le jeu du miroir

Feat Samaël Enodril

Clive a une liste de regrets longue comme le monde.
Il aurait pu commencer à les conter petit à petit, aurait pu se lancer dans de longs discours comme quoi il aurait dû faire des choix différents dans sa vie, mais il n'a ni la patience ni l'ego nécessaire pour croire que les lister les rendrait moins 'graves'. Il n'est pas comme Faust qui se formalise de ses erreurs et se flagelle mentalement même des années après, oh non ; pourtant, lorsque l'image du cadavre de son père lui revient en mémoire, il ne peut pas nier le fait qu'il regrette encore et toujours d'avoir été trop faible pour l'aider. Il n'est pas assez naïf pour croire que ses actes en tant qu'assassin sont pardonnables ou bien même justifiables, bien que toute sa volonté vient du fait qu'ainsi, ses frères sont loin, très loin des griffes plus que dangereuses du Régime ; il les connaît plus que bien, après tout, ses crimes. Il n'a pas vocation à pleurer son sort dans les chaumières avec un fond de violon. Il a plus que conscience que ses actes sont tout à fait nauséabonds, depuis la première fois où il a enfoncé une dague dans la poitrine d'un homme, depuis la première fois où la cervelle de quelqu'un avait éclaboussé les murs suite à un simple appui sur la gâchette...
Il se souvient toujours de son premier meurtre, de ces heures passées à vomir, à se frotter la peau frénétiquement sur la douche pour faire disparaître des traces de sang inexistantes, à sentir l'odeur de la mort sur ses vêtements et à se demander ce qui avait bien pu le pousser à commettre une pareille horreur. Son état d'esprit n'a pas changé, mais il l'a réprimé sous toute sa volonté de bien faire. La route vers l'enfer est pavée de bonnes intentions, comme on dit.
Pourtant, il ne peut pas dire qu'il ne sent pas un nœud de culpabilité se former dans sa poitrine quand la silhouette de Samaël Enodril se dessine devant ses yeux.

Azazel a passé deux mois à récolter des informations sur l'adolescent, ce pourquoi Clive lui est énormément reconnaissant. Il faut dire que le médecin avait accepté de faire ça dans son temps libre, et en dehors du cadre du régime. Il avait vu des photos, avait appris tout ce qu'il y avait à savoir sur cette personne qui était apparemment proche de son jumeau, avait fait en sorte de savoir tout ce qu'il nécessaire de connaître pour arriver à mimer le comportement qu'avait Faust envers l'adolescent. Pour tout dire, Clive n'avait aucune rancune envers le jeune Enodril, il le prenait même en pitié pour des raisons que nous découvrirons tout à l'heure.
Alors pendant un instant, lorsque son regard bleu croise celui de Samaël, il regrette. Il regrette parce qu'il mêle un innocent à leurs sales histoires, mais il est désespéré et pour dire toute la vérité, immensément fatigué par toutes ces conneries. Il n'a plus la force de lutter avec Faust puérilement, ni de supporter son ignorance insupportable. La voix enjouée qu'utilise l'autre n'est qu'un coup de couteau de plus qui rejoint tous ceux qui ont déjà été plantés là.
Pourtant, cela ne change rien à sa résolution ; ce n'est pas comme s'il avait l'intention de blesser le jeune garçon.

Lorsqu'il l'appelle par le prénom de son jumeau, Clive retient une grimace ; enfant, il détestait être confondu avec lui. Haïssait cette façon qu'avaient les gens de prendre l'un pour l'autre et inversement. Même maintenant, c'est quelque chose qui lui hérisse le poil dans le mauvais sens.
Il offrit son plus beau sourire plein de dents, identique à celui de son frère. Combien de fois l'avait-il vu ? Il était bien le seul à pouvoir se targuer d'en avoir été le premier récepteur, et ainsi l'imiter ne lui pose pas de problèmes. C'est comme une évidence de jouer le rôle de son jumeau, comme une seconde peau qu'il ne fait pourtant qu'emprunter. C'est presque trop facile.

« Eh. J'crois que j'ai pas besoin de te rendre le compliment, tu le sais déjà ! »

Son sourire se transforma en petite moue amusée.

« Alors, tu viens ? Il y a un glacier pas loin d'ici, à quinze minutes de marche. On va passer par les ruelles, ça permettre d'aller plus vite et d'éviter le bordel de la rue principale, parce que je n'ai vraiment pas la patience d'aller au rythme d'une tortue, vois-tu. »

Des expressions, des mimiques, des haussements dans sa voix, tout ce qui caractérise son imbécile de frère jumeau. Il faut dire que Clive a suffisamment vécu avec lui pour connaître la moindre de ses petites manies.
La chose que Clive ne dit pas, c'est qu'il attend juste qu'ils soient hors du champ de vision de potentiels témoins pour pouvoir l'emmener là où il fallait être.

« Et sinon, quoi de neuf ? Désolé de ne pas t'avoir appelé de la journée! J'ai paumé mon portable hier soir, donc j'ai emprunté celui d'un pote. »

Il aurait presque fait demi-tour.
Presque.

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Le jeu du miroir

Feat Samaël Enodril

Est-ce que c'était vraiment mal de sa part que d'avoir la sensation que tout cela aurait bien mérité un bon éclat de rire ? C'en était presque trop facile, incroyablement même quand on considérait le déroulement de la situation jusqu'à maintenant. Aucune trace de méfiance ne se dessinait sur le visage du jeune Enodril et Clive se demanda un instant si tous les efforts qu'il avait eu à faire n'étaient pas si inutiles comparés à la difficulté de la chose en elle-même. En un sens, vous pourrez me dire que kidnapper un adolescent, ce n'est généralement pas la plus complexe des tâches, mais sachez que pour Clive qui s'était assuré que rien ne vienne perturber son plan, c'était un peu déconcertant. Il était habitué aux imprévus, aux retournements de situations impromptus, mais là c'était juste trop beau pour être vrai. Bien trop beau même. Si Azazel avait été là, il en aurait ri étant donné la quantité de travail que toute cette opération avait demandé. Tant d'efforts, de prévisions et de recherches pour quelque chose qui était pourtant si facile. Cela ressemblait presque à une blague. Une très mauvaise blague.
Un détail le fit tiquer ; alors comme ça, son jumeau ne répondait pas aux appels du cadet ? Rien d'étonnant à cela. Faust avait pour coutume de disparaître de la circulation le jour de leur anniversaire, comme lui avait confié Isaac quand ils étaient plus jeunes et n'étaient pas encore ennemis. Il rejetait tous les appels, quittait l'endroit qui était sa demeure pour la journée et évitait tout contact humain comme le lâche imbécile qu'il était. Il peut comprendre la douleur que ressent son frère parce que c'est la même qui parcoure ses veines et le ronge de l'intérieur, mais entendre cela ne fait que confirmer ses doutes ; encore une fois, Faust ne l'aurait pas contacté ce jour-ci. Le jour de leur anniversaire. L'idiotie de cet abruti n'avait donc aucune limite ?! Ces mots, au final, ne firent que raffermir encore plus sa volonté.

Ils marchèrent un peu, et Clive rendit à Samaël tous les sourires dégoulinants de naïveté que celui-ci lui donnait. Il pouvait bien comprendre ce que son jumeau voyait de bon en lui ; il lui faisait un peu penser à Eliott, avec sa gentillesse. Néanmoins, ce fut un point qui l'agaça, mais nous verrons pourquoi plus tard encore une fois, soyez patients.

« Ben disons qu'avec l'hiver, difficile d'aller bouffer une glace sans se geler le cerveau surtout ! » dit-t-il avant de rire un peu pour l'effet.

Excuses, en voici en voilà. Ils avancèrent, passant par des ruelles qui devinrent de plus en plus étroites, et la main droite du hérisson serra un peu plus le mouchoir imbibé de chloroforme qui se trouvait dans sa poche. Depuis le début, Castiel le Kirlia les suivait à une vingtaine de mètres, se téléportant au dessus des doigts pour ne pas les perdre de vue et ainsi pouvoir agir dès qu'il le faudrait.
Ils étaient complètement hors du champ de vision de quiconque lorsqu'il décida enfin de passer à l’action. Il chassa par ailleurs les doutes qui envenimaient son esprit ; ils ne serviraient strictement à rien ici.
Sans avertissement aucun, il attrapa l'adolescent par la taille et le bloqua avec son bras gauche. L'entraînement d'assassin était vraiment efficace pour avoir un contrôle complet sur ses gestes et apprendre à immobiliser quelqu'un en quelques secondes ; si ce n'était pas ironique, tout ça... Il passa le mouchoir puant le chloroforme sur le nez de l'Enodril, le maintenant pour l'empêcher de se débattre. Entre temps, Castiel était descendu de sa cachette et les attendait en silence, son regard lourd mais dépourvu de tout reproche, ce qui n'était en rien étonnant ; Ezekiel était en vérité plus gentil et empathique envers les cibles de son maître que lui. Si ce n'était pas ironique pour un pokémon supposé être caractérisé par sa capacité d'empathie...
Il ne pu s'empêcher de glisser quelques mots à l'adolescent avant qu'il ne s'endorme.

« Je suis désolé, vraiment. »

Et le truc le plus drôle dans tout ça ? C'était qu'il ne mentait pas.
Lorsque tous les mouvements du cadet cessèrent et qu'il finit enfin par succomber aux effets du chloroforme, Clive le passa au dessus de son dos comme un vulgaire sac à patates et hocha la tête en direction du Kirlia. Ils pouvaient enfin partir ; fini d'emprunter le comportement de son jumeau. Lentement mais sûrement, il retrouvait ses propres mimiques et ce qui faisait de lui ce qu'il était aujourd'hui.
Castiel les téléporta dans un appartement entièrement vide excepté pour une table et une chaise, plein de poussière et l'on pouvait aisément deviner qu'il n'avait pas été habité depuis bien longtemps. En réalité, cet appartement lui avait été procuré par Azazel, qui lui avait dit que c'était celui de sa femme avant qu'elle ne vienne habiter avec lui. Clive avait été surpris d'une telle générosité, mais venant d'Azazel, il avait vite compris qu'il avait s'agit en fait pour le médecin d'une occasion de se débarrasser d'un autre rappel douloureux.
Il déposa délicatement le jeune Enodril ensommeillé contre un pan de mur, veillant à ne pas le réveiller immédiatement. Au dessus d'eux, Lilith la Migalos les observait avec beaucoup de curiosité et d'impatience. Après tout, son maître l'avait capturé avant tout pour ce jour et elle allait tout faire pour accomplir un travail impeccable ; tout cet entraînement ne pouvait pas avoir servi à rien !

L'araignée descendit très lentement, et en moins d'une minute, vint lier les mains de l'adolescent avec sa toile. Maintenant, je trouve qu'il est utile de préciser que, comme le mentionne le pokédex, il est impossible de s’échapper de la toile d'une Migalos par la force brute. Impossible donc pour le jeune homme de partir comme ça. Lilith fit de même avec les pieds de sa cible, puis, une fois son travail accompli, remonta en haut du mur. Clive retira les pokéballs que possédait sur lui l'adolescent (par mesure de sécurité seulement, il n'était pas un voleur nom d'un Caninos) et alla les mettre dans une boîte en plastique suffisamment étroite pour qu'il n'y ait absolument aucune place pour que les pokémon s'y trouvant en sortent. Oui, il avait pensé à tout. Deux mois de réflexion, ça aide.
Maintenant, la seule chose qu'il ne pouvait pas prévoir en totalité, c'était les réactions de l'adolescent et de Faust. Il n'avait plus qu'à attendre. Clive alla s'asseoir sur la chaise, et se mit à jouer sur sa tablette électronique qui était posée sur la table. Il n'avait plus que ça à faire, pour l'instant.
Il avait une petite conversation à avoir avec le jeune Enodril avant de faire avancer les choses.

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Le jeu du miroir

Feat Samaël Enodril

Même si Clive avait passé deux mois à préparer son coup, il y a une chose qu'il n'avait pas calculé : la capacité du jeune Enodril à essayer de se suicider ou en tous cas, de faire quelque chose qui aurait pu l'amener à une mort brutale dans n'importe quelle situation. Il faut comprendre que le principe de 'suicide' n'existe quasiment pas dans le cerveau de Clive, même s'il a vu nombre de ses victimes se donner la mort avant qu'il n'ait pu les amener à la faucheuse. Il faut croire qu'il a aussi vu tant de personnes tout faire, même proférer des promesses désespérées et sans véritable sens logique pour ne pas périr, que maintenant, le fait de voir quelqu'un tenter de se faire du mal lui apparaît comme un point d'interrogation gigantesque dans son esprit.
Apparemment, l'adolescent était réveillé, et il était en train de se cogner la tête vers la mur à répétition. Clive se leva immédiatement ; son but n'était pas que l'autre meure, bordel de merde ! Il était bien mauvais psychologue, le hérisson : l'idée que le fait de voir, pour l'Enodril, une copie conforme de quelqu'un qui lui était proche l'enlever pourrait être potentiellement traumatisant ne l'avait pas tant effleuré que ça. Que son acte soit horrible, il l'admettait certes. Après, les conséquences... Il y avait une raison pour laquelle Faust était largement le plus doué des deux quant aux relations sociales.
Il alla arrêter l'adolescent en attrapant sa tête avec ses mains, de sorte à ce qu'il ne puisse plus bouger.

« Arrête immédiatement. Tu n'es pas ici pour souffrir. Ne me force pas à demander à ma Migalos qu'elle te paralyse ; si tu recommences, elle n'hésitera pas une seule seconde. » le menaça-t-il d'un ton sec et tranchant.

Nous vous laisserons quelques secondes pour rire de cette phrase.
Il planta son regard bleu dans celui du cadet, inflexible et dénué de toute émotion. Une étincelle de sympathie passa dans ses yeux, mais elle disparu bien vite, chassé par la volonté de fer qui l'animait. Lilith descendit lentement du mur et vint se dresser à côté de Clive, observant l'adolescent comme on observait un de ses travaux.
Clive s'éloigna un peu, gardant son regard fixé sur l'adolescent qui était bien pathétique à ses yeux, bien qu'en vérité ils l'étaient tous les deux tout autant. Il poussa un long soupir fatigué, exaspéré et probablement un peu énervé par l'attitude du jeune homme qui rentrait un peu en contradiction avec ses plans ; jamais il n'avait été question de le blesser, à aucun moment. C'était d'ailleurs pour ça que Azazel avait accepté de l'aider ; dans un autre cas, le médecin lui aurait probablement refait le portait vu son refus catégorique de blesser des adolescents, des enfants ainsi que des pokémon.
Castiel était en train de méditer en silence dans la coin de la pièce, attentif. Quant à Ezekiel, il entra quelques secondes après avoir entendu son maître crier et alla s'asseoir à côté de la table, prêt à réagir s'il le fallait, bien qu'il avait reçu l'ordre explicite de ne rien faire, sauf quand il le faudrait plus tard évidemment. En attendant, les pokémon étaient supposés rester en retrait.

« Je suppose que je te dois quelques explications, en fait. Je ne suis pas Faust, comme tu as pu le deviner. En fait, il est probable qu'il ne t'ai jamais parlé de moi, ce qui m'arrange d'ailleurs. » dit-il d'une voix amusée.

Il passa une main dans ses cheveux, tic qu'il partageait avec son jumeau. Toutefois, ici, il n'y avait pas d'imitation volontaire. Il avait tant de fois prévu ce moment dans son esprit que tout cela lui paraissait être devenu une pièce de théâtre dont il était l'antagoniste principal.

« Il y a vingt quatre ans, deux enfants sont nés, dont Faust. Je suis le second ; Clive. Ravi de te rencontrer, Samaël Enodril. »

Sa voix n'a rien de menaçante, elle est même tout à fait neutre, dépourvue du moindre avertissement, presque professionnelle, comme s'il parlait à un client du bar.
Parce qu'il ne parle pas à une victime, non ; il parle à un acteur de la pièce qu'il a passé deux mois à imaginer.

« Je suis désolé de devoir t'impliquer dans tout ça, mais il te suffira de jouer ton rôle et tout se passera bien. Autant pour toi que pour lui, s'il n'agit pas comme un enfant. »

Il soupira. La potentielle réaction de Faust ne le mettait pas en joie, loin de là, mais c'était un facteur qu'il ne pouvait nullement retirer de son équation, vu qu'il était sûr et certain qu'apprendre que Clive avait kidnappé l'adolescent ne le mettrait pas de très bonne humeur.

« Tu dois avoir des questions, je pense. Si tu souhaites m'insulter, fais-toi plaisir, nous avons tout notre temps. »

Après tout, il n'était pas du genre à laisser des questions en suspens.
Aujourd'hui était la preuve irréfutable de ce fait.

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Le jeu du miroir

Feat Samaël Enodril

Il n'aurait pas cru qu'entendre que Faust ne mentionnait jamais son existence serait aussi douloureux. Bien sûr, ce n'était qu'une confirmation définitive de ce qu'il avait toujours pensé et supposé, mais il y a quelque chose dans la naïveté de Samaël qui fait que Clive dissimule difficilement une grimace à l'entente de ces propos. C'est un nouveau coup qu'il doit supporter tant bien que mal, et pendant un instant, il peut sentir ses traits se froncer ; le masque paraît flancher pendant une seconde, mais il se reprend bien vite. La dernière chose qu'il devait faire, c'était d'apparaître faible. Il pouvait bien tenter de le rassurer, mais il devait tout de même veiller à garder ce côté un peu menaçant pour le principe de la chose. Il se doute bien que Faust ne doit parler de lui qu'à occasion rares avec Isaac lorsque le suédois est fatigué des habitudes d'autruche du hérisson, mais très honnêtement, il aurait préféré apprendre que l'adolescent avait entendu son nom au moins une fois, même furtivement.
Ce qu'il veut à Faust ? Pas grand chose, en vérité. Son envie est bien pathétique en fait ; tout ce qu'il veut, c'est enfin pouvoir avir une conversation avec lui. Tous les non-dits qui subsistent encore dans leur relation, toutes les vieilles rancunes qu'ils n'ont jamais mis à plats, tout ça, Clive veut une bonne fois pour toutes pouvoir en discuter avec son jumeau. Il veut une raison pour le forcer à venir, et l'adolescent est le meilleur des appâts qu'il aurait pu trouver. D'autres auraient été bien plus difficiles à capturer, mais disons qu'un ado de 16 ans naïf et qui avait Faust en estime était la meilleure des cibles, et la plus facile à attraper donc. Isaac, ça aurait été une autre paire de manches et il est probable qu'il serait mort avant d'être arrivé à quelque chose.

Toutes les questions du jeune Enodril le firent glousser, plus qu'amusé par la confusion naïve du jeune homme. Vraiment, les cachotteries de Faust arrangeaient considérablement ses affaires ; le fait que son jumeau n'ait jamais rien dit à Samaël faisait qu'il avait l'avantage de la surprise, ce qui n'était pas rien. La confusion qui habitait le jeune dresseur faisait qu'il détenait un peu plus le contrôle de la situation, ce qui était ma foi très utile vous en conviendrez.
Il attrapa la chaise et l'avança un peu avant de s'asseoir et de planter son regard dans celui de l'adolescent. Oui, il avait parfaitement conscience que le fait de voir le même regard bleu chez Clive que chez Faust pouvait déconcerter et effrayer l'autre, mais cela faisait un peu partie du jeu. Oui, c'était tout à fait abject, mais mine de rien, vu ce qu'il pouvait observer et entendre, cela marchait à merveille. Un sourire amer étira ses lèvres alors qu'il se remémorait les nombreuses disputes qui avaient amené à leur opposition franche et directe. Il chassa du mieux qu'il pu les souvenirs encore vifs et douloureux du premier janvier ; s'il commençait à partir dans la déprime, ils y seraient encore demain et Clive n'en avait vraiment pas la patience.

« Disons que nous avons eu et aurons toujours nos désaccords, mais je ne peux pas le laisser fuir la discussion que nous devons avoir. Je regrette de t'avoir embarqué dans tout ça, mais connaissant mon cher frère, il accourra dès qu'il saura que je te retiens prisonnier. » expliqua-t-il avant de soupirer lourdement.

Il ne mentait nullement, ici. Il fallait dire qu'il n'aurait eu aucun intérêt à mentir, surtout vu qu'il n'avait aucun tact et que l'honnêteté valait plus le coup que le mensonge ici. Il n'y avait aucun besoin de tenter d'embobiner l'adolescent, et bien que se montrer volontairement 'méchant' aurait pu être intéressant pour le terroriser un peu et donc faire paniquer Faust... Cela n'en valait vraiment pas le coup. Déjà, il n'avait pas envie de traumatiser l'autre d'avantage, et deuxièmement, il aurait préféré que Faust et lui discutent un peu ; si son jumeau lui tirait dessus dès qu'il le voyait, cela foutrait un peu en l'air son objectif.

« Ne commence pas à paniquer, je n'ai pas l'intention de lui faire du mal ; le voir mort est bien la dernière chose que je veux voir arriver. » dit-il d'un ton effleurant presque l'amusement.

Il releva un peu son bras, et de cette façon, il était possible de voir le très joli Beretta 92FS qui se trouvait à sa ceinture. Il n'avait pas l'intention d'utiliser cette petite merveille, mais c'était quelque chose qui persuaderait Faust de ne pas tirer immédiatement. Après, il risquait probablement d'arriver avec Dalhia, et Ezekiel serait là pour la retenir du mieux qu'il pourrait. Il allait se faire battre à coup sûr, mais au moins cela lui ferait gagner un certain temps qu'il emploierait à ne pas mourir.

« Ton rôle est d'être l'appât qui le fera venir. En temps normal, il ne veut voir personne aujourd'hui, alors je me suis dit qu'il fallait trouver une raison suffisamment importante pour le sortir de son exil temporaire. »

Il jouait machinalement avec avec le stylet de sa tablette.

« Et c'est là que j'ai appris ton existence, après un bon nombre de recherches je dois dire. En fait, tu n'étais pas le seul choix, mais le lien que tu as avec mon jumeau fait que je trouvais plus approprié de solliciter ta présence, de force certes. »

Son sourire amer se transforma en rictus moqueur. Oui, il avait une idée du pourquoi Faust n'avait jamais parlé de lui à cet adolescent qu'il appréciait pourtant énormément, vu ce qu'il avait lu.

« Quant au fait qu'il ne t'ai jamais parlé de moi... Tu n'auras qu'à lui demander. Tu vas bientôt le voir, de toute façon. »

Peut-être que sa voie était devenue un peu railleuse sur la fin, oui.

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Le jeu du miroir

Feat Samaël Enodril

La naïveté de Samaël Enodril aurait été touchante si elle n'était pas si navrante à l'heure actuelle. C'était comme si il était complètement incapable de saisir tout ce qui se passait autour lui, bien que Clive pouvait tout à fait comprendre cela étant donné qu'il ne disposait pas de toutes les pièces du puzzle. Pièces du puzzle que Clive avait passé deux mois à réunir et à collecter, à relier et à imaginer.
Pourtant, même en sachant cela, il ne peut s'empêcher d'avoir une certaine pitié pour l'adolescent qui ne comprend décidément rien. Clive gloussa un peu, amusé et quelque peu désabusé également par le fait d'avoir à expliquer tout point par point. Une chose était pourtant sûre ; toute cette conversation lui paraissait être une immense farce dont ils étaient les acteurs. L'officier caressa machinalement la tête d'Ezekiel qui était venu se mettre à ses côtés dans l'espoir de le calmer un peu et d'apaiser son esprit. Le regard qu'il jeta vers l'Enodril était entièrement neutre ; il se contentait de le voir comme une cible de plus, bien que son maître lui avait strictement interdit de le traiter ainsi ou de le blesser. Par ailleurs, il devait garder ses forces pour plus tard.
Puis, après quelques secondes d'attente qu'il passa à contempler le fait de répondre ou non, il décida qu'il n'avait rien à perdre à expliquer tout en détails, avec les précisions bien évidemment parce que quitte à tout révéler, autant y aller franchement.

« Pourquoi crois-tu que tu es là ? » finit-il par dire, une moue moqueuse étirant son visage.

Il sortit alors son portable qui traînait dans sa poche depuis tout à l'heure et après l'avoir déverrouillé et avoir farfouillé un peu dans la base de données, dévoila à l'adolescent une photo qu'il avait pris tout à l'heure. On y voyait le jeune homme, assommé par l'effet du chloroforme, appuyé contre le mur, les pieds et les mains ligotés mis en évidence. Une véritable provocation à destination de Faust donc. Il aurait été stupide de sa part de prendre une photo après, une fois qu'il se serait réveillé, pour la simple et bonne raison que l'autre n'aurait probablement pas accepté de coopérer et que cela aurait rendu la tâche plus ardue encore. Clive n'avait pas envie de se donner une migraine à essayer, merci bien.
Il bailla un peu, fatigué. La nuit d'avant avait été courte, très courte ; dérangé par de nombreux réveils brutaux, il n'avait pas dû disposer de plus de six heures de sommeil, et encore, c'était être généreux que de dire ça.

« Quand tu étais perdu au pays des rêves, j'en ai profité pour prendre une photo. Il ne répond pas aux appels, ni aux messages, mais les voit. Dès qu'il va la recevoir, il va accourir. Je pense qu'il devrait être là en un peu moins d'une demi-heure à partir du moment où j'enverrai ce message. » expliqua-t-il d'un ton calme, comme s'il parlait de la recette d'un gâteau au chocolat et pas du kidnapping d'un ado de 16 ans.

Il sourit, un mélange d'amusement et d'amertume se dessinant sur son visage. Il avait l'impression d'être un parfait clown tragique, en réalité, ce qu'il était probablement, vu le pathétisme dont il faisait preuve depuis qu'il avait décidé de mettre ce plan en marche.

« Il est peut-être têtu, mais en te voyant dans une telle situation, il oubliera bien de déprimer dans un coin avec une bouteille à la main. Sois en flatté ; je n'ai jamais réussi à le faire décrocher en trois ans. »

Cette fois-ci, il gloussa un peu, amusé par sa propre stupidité. Il hésita quelques instants devant l'écran, son expression se faisant subitement neutre, voir même un peu peinée, avant que son instinct ne reprenne le dessus et qu'il appuie sur le bouton 'envoyer' avec assurance. Son visage reprit cette expression froide et distante qui le caractérisait.  Il se retourna vers Samaël, souriant un peu, et posa le portable sur ses genoux ; il était probable que Faust tente d'appeler après tout. Peut-être qu'il répondrait, peut-être pas. Clive avait pensé à joindre l'adresse de l'appartement avec la photo, ce qui était un peu plus poli vous m'en conviendrez.

« Et voilà. Maintenant, il ne reste plus qu'à patienter. Je te ferais bien un thé en attendant, mais avec tes mains liées, je crois que ce ne serait pas une très bonne idée, tu comprends ? » s'excusa-t-il en se massant la nuque par réflexe.

Encore un tic qu'il partageait avec Faust. Décidément, il y avait des mimiques qu'il n'avait pas vraiment eu à imiter vu qu'elles étaient les siennes.
Néanmoins, il souhaitait encore aborder un aspect avec l'adolescent. Un aspect qui l'avait quelque peu agacé tout à l'heure, et qu'il ne manquerait pas de rappeler maintenant que les formalités étaient passées.

« Oh, et essaye de ne pas te faire plus de mal que ça, je n'aimerais pas le voir plus peiné qu'il ne va l'être, et de toute façon, je ne suis pas particulièrement friand de voir les gens se faire du mal. »

Sa voix ne laissait pas transparaître la moindre trace d'inquiétude, mais c'était bel et bien une préoccupation à laquelle Clive accordait une certaine importance pour une raison particulière et très égoïste en somme, mais nous ne sommes plus vraiment à ça près à ce niveau.

« D'ailleurs, tu devrais peut-être considérer le fait d'arrêter de tenter de te faire du mal lorsque tu es dans une situation pareille. Tu as pensé à la réaction de ceux qui t'entourent ? » demanda-t-il en haussant les sourcils, sa voix montrant clairement un reprocher léger mais présent.

Oui, c'était le comble, mais il fallait comprendre une chose chez Clive ; un problème qui pouvait peiner son jumeau était également son problème. Cela l'incluait évidemment dans l'équation, vu qu'il était la source d'une grande partie de ses problèmes, à son grand regret. Alors que l'Enodril se blesse devenait également son problème.

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Le jeu du miroir

Feat Samaël Enodril

Pour tout dire, la réaction de Samaël rassura considérablement Clive. Il aurait détesté savoir que Faust accordait autant d'importance à quelqu'un qui aurait été trop faible pour répliquer ; cela aurait signifié qu'il aurait été la source de trop nombreuses préoccupations pour son jumeau. En fait, pendant que l'adolescent parlait, il se contentait d'écouter en silence, contemplatif. Ses sourcils étaient levés dans une moue moqueuse, presque dédaigneuse tant les reproches du cadet lui passaient au dessus de la tête. Bien que ses paroles ne manquaient pas de sens, Clive avait eu suffisamment de temps pour s'en faire d'autres bien plus vicieux et mordants pour que ceux-ci le touchent réellement. Oh, si l'Enodril voulait commencer à énoncer tout ce qu'il y avait de mauvais et d'égoïste en lui, alors qu'il patiente un peu, il avait une liste complète d'erreurs et de regrets à énoncer. Bien évidemment, ce qu'il entendit ne lui fit ni chaud ni froid ; s'il commençait à prier le pardon à la moindre faute qu'on lui reprochait, eh bien sa carrière en tant qu'assassin se finirait comme elle avait commencé, c'est-à-dire par un meurtre. Le sien évidemment, parce qu'on ne vire pas un assassin comme on vire un pigiste ; on le tue, purement et simplement.
Enfin bref. Durant tout ce discours qui lui aurait presque mis la larme à l’œil si le ton agressif de l'autre (qui était mérité mais comprenez bien qu'il s'agit de Clive et pas de l'Abbé Pierre) n'avait pas instinctivement réveillé son côté beaucoup moins chaleureux. Une fois que l'autre eut terminé, il fit un signe de main à Ezekiel qui grognait de plus en plus fort envers le jeune Enodril. Le Démolosse partit rejoindre le Kirlia à contrecœur grâce à un regard équivoque de son maître.
Clive se leva, recula la chaise et s'assit en tailleur, de sorte qu'il était à un mètre de l'adolescent.  Il le considéra en silence en premier lieu, puis gloussa et se mit enfin à parler.

« Tout d'abord, merci de me rassurer sur le fait que tu n'es pas une simple victime qui prend les coups en silence. Le contraire m'aurait inquiété quant à la santé mentale de Faust, bien qu'elle est semblable à la mienne donc bancale mais tu as eu le temps de le remarquer. »

Clive étira ses muscles et bailla une nouvelle fois. Puis, sa voix redevint railleuse, car la situation était tout simplement trop amusante pour que cela n'arrive pas.

« Néanmoins, je crois que tu m'as mal compris : je me fiche complètement de ton sort et de l'avis que tu as sur moi, gamin. Je serais même le premier à te donner une liste entière de mes défauts et de mes erreurs, alors tu peux t'énerver tant que tu veux. »

Il n'était pas vexé, ni même énervé. Plutôt lassé, oui, un peu blasé sur les côtés aussi, parce que le comportement de l'adolescent lui apparaissait comme presque hilarant maintenant. C'était tout simplement trop facile, et le comportement de l'autre lui faisait tellement penser à Faust quand il était plus jeune qu'il ne pouvait s'empêcher de trouver cette joute verbale divertissante. Bien que son jumeau avait eu un langage bien plus coloré et plus agressif durant l'adolescence, il y avait quelque chose dans l'insolence du jeune Enodril qui le distrayait énormément. Qui le rassurait encore un peu, parce que plus il s'opposait à lui, plus cela signifiait que l'adolescent avait du potentiel pour devenir fort, ce qui était bon signe. Clive respectait les capacités de son frère à aider ceux qui en avaient besoin, mais il avait un certain mépris pour ceux qui pouvaient être la cause de ses malheurs par leur faiblesse. Ainsi, en s'opposant à lui, ironiquement, Sam gagnait en mérite dans l'esprit de Clive
Ce qui préoccuperait le plus Faust ? Ah. Quelle naïveté. Il en aurait presque ri. L'Enodril n'avait-il donc pas conscience de ce qui se passait par la tête de son abruti de jumeau ?! Clive soupira et posa son menton dans le creux de sa main, décidément las de cette naïveté presque stupide qui paraissait émaner de l'autre comme une odeur qui lui était caractéristique.

« Laisse-moi te dire un truc ; Faust est une autruche. Quand il a un problème, il l'ignore. Le truc très marrant, le petit effet secondaire si tu préfères, c'est qu'il accumule tout jusqu'à l'explosion. Quand cette explosion arrive, vois-tu, les dégâts sont considérables. Quand il était plus jeune, sa façon d'exploser, c'était d'aller chercher la baston avec les racailles du quartier ; il est revenu plus d'une fois avec des côtes fêlées et des hématomes assez impressionnants. »

Il s'arrêta un peu et grimaça.

« Maintenant, essaye d'imaginer ce qui arriverait avec les moyens dont il dispose ; je ne vais pas te faire un dessin. Te kidnapper est probablement une des pires choses que j'ai jamais faite, mais je préfère retirer notre conflit de sa liste de problèmes. Toutes mes excuses si tu es impliqué, mais vu que tu vas t'en sortir vivant et sans la moindre cicatrice... Sois patient, tu vas le voir dans peu de temps de toute façon. »

Il fit une courte pause et haussa un peu les épaules, sa voix perdant de son côté moqueur pour redevenir sérieuse, vide toute arrogance et presque... Presque paisible oui. Un peu fatiguée aussi, blessée sur les bords si l'on écoutait.

« Alors certes, ce sont mes actes qui le blessent le plus. Beaucoup plus même, et j'en ai parfaitement conscience. Je l'admets et la culpabilité me rongera toute ma vie, mais je ne regrette en rien de le faire. Néanmoins, permets-moi tout de même de m'inquiéter pour son sort ; j'ai encore ce droit, que je sache. »

Il s'arrêta et poussa un long soupir las.

« Quant à ce que je sais de toi... Je sais ce que je devais connaître pour pouvoir imiter le comportement qu'a mon frère envers toi. En tous cas, il t'apprécie beaucoup, vu ce que j'ai compris. »

Toutefois, alors qu'il allait continuer à parler, son portable se mit à sonner, amenant un sourire à ses lèvres. Il prit l'appareil dans sa main et vit avec joie le nom 'Faust' s'afficher sur l'écran. Un parfait timing, tiens. Clive sourit un peu, ce fameux rictus de trouduc made in Donovan dont il faisait rarement usage avant de montrer l'écran à l'adolescent pour que l'information soit comprise et assimilée.

« Mais on parle, on parle... Je crois qu'il y a quelqu'un qui veut nous parler. Je te laisse commencer, je crois que c'est toi qu'il veut entendre en priorité, même s'il va probablement m'insulter en premier. Je laisse le haut-parleur, il serait dommage que je rate ça. »

Il n'attendit pas la réponse de l'adolescent et décrocha. La voix de Faust, bourrée de colère, de rancune et tout ce qui faisait que Clive savait qu'il risquait gros aujourd'hui, résonna dans l'appartement comme une menace bourrée de sous entendus.

« Clive ?! »

Le concerné sourit un peu. Il avait besoin que l'adolescent confirme qu'il était bien en vie à son jumeau, alors il allait laisser l'autre parler, ou du moins s'il le désirait. Il ferait avec dans le cas contraire.

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Le jeu du miroir

Feat Samaël Enodril & Clive G. Donovan

Soyons honnêtes ; Faust, le jour de son anniversaire, est une épave tout à fait pathétique.
C'est un peu devenu une tradition, avec le temps. Tous les ans, il quitte la maison, ne répond à personne et s'isole de tout pour aller dormir quelque part où il ne serait pas dérangé. Généralement, il laisse ses pokéballs chez lui (hormis celles de Dalhia et Hadès) pour ne pas avoir à supporter les regards lourds de reproches de ses compagnons alors qu'il vide joyeusement la deuxième bouteille de vodka aux alentours de cinq heures de l'après-midi une fois que les batteries de ses consoles de jeux portables sont épuisées. Cette année, Isaac n'a même pas tenté de l'empêcher d'accomplir son rituel ; il l'a simplement prévenu qu'il ne devait pas avoir la gueule de bois le lendemain vu qu'ils devaient aller voir Katya et Nova à Zazambes. Ainsi, il s'était promis de ne vider qu'une seule et unique bouteille aujourd'hui, et de passer son temps libre à écrire des trucs sordides, ridicules et tout à fait grotesque pour apaiser ses nerfs décidément très sensibles aujourd'hui.
Ce n'est pas qu'il est de très mauvaise humeur, mais si. Pour tout dire, il fulmine. Cette année, c'est bien pire que d'habitude ; la charmante révélation qu'il a eu en janvier quant aux activités de son jumeau ne l'a pas vraiment ravi et pour être tout à fait honnête, elle lui laissait encore un goût amer dans la bouche. Il était probable que cela soit le cas pendant longtemps, et qu'il cuve son malheur seul comme il avait l'habitude de le faire car personne d'autre que Isaac n'était au courant de l'existence même de Clive ; c'était un petit secret qu'il gardait bien enfoui sous des tonnes et des tonnes de mensonges par omission. Ces trucs étaient véritablement sa spécialité : il ne mentait pas, mais il 'oubliait' de dire. C'était la même chose, voir même peut-être pire, mais en tous cas, ils lui évitaient de très nombreuses conversations qu'il se refusait d'avoir avec les gens, proches ou non.  
Alors oui, il faisait l'autruche. Aujourd'hui, il avait élu un hôtel d'Anula comme lieu de résidence pour la journée. Il y serait bien installé, et de toute façon vu la charmante haleine de vin rouge du patron, il y serait tranquille. Il s'était étalé sur le lit, jouant machinalement et nerveusement avec son portable, un très harmonieux morceau de death metal lui hurlant dans les oreilles (ici il est peut-être utile de préciser que cette phrase est sarcastique).

Il n'avait pas envie de penser à lui, oh non. Il voulait juste oublier qu'il s'agissait de leur anniversaire pour que son jumeau sorte de son esprit une bonne fois pour toute. Parce que bordel, même après des mois passés à cuver tout ça et à enterrer chacune des émotions contradictoires que le nom de Clive amène dans son esprit, rien n'est moins douloureux ou même plus supportable qu'auparavant. C'est une putain de blague, tout ça, parce qu'il veut le détester, le haïr même, mais il n'y arrive pas. Lorsque l'idée de lui tirer une balle dans le crâne pour en finir une bonne fois pour toute lui passe par l'esprit, il ne peut que rire en se rappelant qu'il est bien pathétique à s'imaginer capable d'accomplir une telle chose alors, le jour du nouvel an, il n'avait même pas réussi à le frapper. Imbécile qu'il est, a été et sera.
Oui, c'est une autruche, et il le sait. Toutefois, la peine qui lui ronge le cœur est si douloureuse est si affreuse et amère qu'il ne parvient presque même pas à la regarder en face. Se regarder dans le miroir est devenu le pire des supplices qu'il peut s'infliger.
Il regarde de temps en temps son téléphone, grimace un peu lorsqu'il voit des prénoms s'afficher sur la liste des appels manqués et des messages reçus, mais ne fléchit pas. Même lire le prénom de Sam ne lui donne pas envie de décrocher ; il n'a pas envie de montrer à son petit frère cette facette de sa personnalité bien trop amère et mauvaise. Il appellerait demain en prétextant avoir eu des problèmes de réseau, voilà tout. C'était un mensonge, oui, mais les mensonges étaient devenus sa spécialité. Sa vie entière était un putain de mensonge, de toute façon. 
Toutefois, lorsqu'il voit le nom de son jumeau attaché à un MMS, il fronce les sourcils. D'habitude, il ne prendrait même pas la peine de regarder, mais aujourd'hui, son instinct lui dit qu'il doit le faire. De plus, le fait que ce soit un MMS ne lui disait rien qui vaille.

Avec une certaine hésitation mais sans aucune peur, il finit par ouvrir le message et manqua de s'étouffer lorsque l'image se dessina devant ses yeux. Il en lâcha sa console et sa respiration se bloqua subitement ; il eut l'impression d'avoir pris un coup si brutal et direct qu'il avait chassé tout l'air qui se trouvait dans ses poumons.
Ses pensées explosèrent dans tous les sens. Que s'était-il passé, qu'allait-il se passer, pourquoi est-ce que Clive disposait d'une pareille photo, pourquoi est-ce qu'il le lui avait envoyé, que pouvait-il faire ?! Des milliers de questions se bousculaient dans son esprit alors que son cœur se mettait à tambouriner dans sa poitrine, plein de questions, de peurs et surtout, empli d'une sensation de froid glacial si déstabilisant qu'il tangua et serait tombé s'il ne s'était pas raccroché à la commode à sa droite. Il dû tout faire pour calmer sa respiration et ramener ses pensées dans un semblant de droiture ; paniquer ne lui servait strictement à rien, mais le traumatisme amené par les enlèvements de janvier faisait que la situation le mettait un peu dans un état de terreur relative.
Il passa en tout deux minutes à reprendre son calme, petit à petit.

Puis, dès que ses mains cessèrent d'être agitées par des tremblements nerveux et incontrôlables, il appela sans autre forme de procès. Il n'y eut pas beaucoup d'attente, et dès qu'il su que l'autre avait décroché, il ne pu s'empêcher de s'exprimer assez fortement.

« Clive ?! »

Sa propre voix résonnait à ses oreilles comme complètement étrangère. Toute la colère qui suinait de sa voix lui paraissait complètement opposé à ce qu'il ressentait à l'instant. Ce qui glaçait son cœur et lui comprimait la poitrine à l'instant, c'était la terreur. Une insupportable peur qui le dévorait de l'intérieur, mais pourtant c'est un venin acide et méprisant qui s'écoulait de sa voix, à sa grande incompréhension. Pourtant, alors que le silence fut sa seule réponse, ou alors la réponse avait été trop minime pour être entendue, il commence à ressentir les flots de la haine remonter en vagues houleuses et nauséabondes. Car il haït Clive autant qu'il l'aime, mais en cet instant, c'est bien la haine qui prime et qui remonte en grandes vagues de fureur. Ses émotions sont plus rapides et honnêtes que ses pensées, et très vite, l'adrénaline fait son travail. Il ne tremble plus, et la lueur orageuse dans ses yeux a vite fait de chasser la peur et de l'utiliser comme charbon pour cette colère qui ne demande qu'à se déverser sur le principal responsable qui n'est autre que la seconde moitié de son âme.
Parce qu'ils sont les mêmes et c'est ça qui tue Faust à petit feu ; il reconnaît chacun de ses défauts dans ceux de Clive, et la pourriture qui corrompt peu à peu son jumeau le blesse parce que le voir s'enfoncer dans l'ombre, c'est tout aussi douloureux que de s'y enfoncer lui-même. Il est la personne qu'il aime et déteste le plus, mais pourtant aujourd'hui, il n'y a que la haine qui se montre. Durant ce moment, il n'y a pas un seul instant où il pense à lui pardonner son acte. Parce qu'ils n'ont jamais mêlé les autres à leur dispute, et que enlever Sam pour le toucher, c'est tout simplement abject. Faust ne sait pas où est passé le petit garçon qui le soignait après qu'il se soit battu pour lui, ce garçon qui souriait aux autres dans l'espoir de leur remonter le moral, ce garçon qui malgré sa maladresse était toujours le premier à vouloir réconcilier les autres et qui prenait volontiers le blâme pour ses proches si cela pouvait résorber la gravité de la situation. Faust en vient même à se demander s'il pourra un jour le ramener ou s'il a été dévoré par l'ombre dans le cœur de Clive.
Peut-il même encore dire qu'il l'a connu ?

« Clive, bordel, réponds !
- Je suis là, Faust. Ton petit protégé ne veut pas parler, donc... »

Et entendre sa voix comme ça, c'est la pire des provocations. Clive parle comme si rien de tout cela n'était monstrueux, comme si son comportement n'est pas grave, comme s'il ne s'agissait que d'une boutade, une plaisanterie naïve et innocente. Pourtant, ils ne parlent pas d'une farce aussi banale que lorsqu'ils se jetait des seaux d'eau à la tronche en été, mais bel et bien d'un putain de kidnapping, chose que Faust n'aurait jamais pu penser Clive capable de faire. Mais de toute façon, si on lui avait dit il y a deux ans que Clive tuait des gens pour le compte du Régime, il serait probablement mort de rire.
L'ironie de la chose était magnifique.

« Clive, laisse-le en dehors de ça bon sang, qu'est-ce que tu v-
- Passons les formalités, s'il te plaît. Je, non, on t'attend. Dépêche-toi, Faust. » le coupa la voix de Clive, brutale et sèche, qui ne laissait pas supposer la moindre possibilité d'un compromis avant de raccrocher.

C'est un nouveau coup que d'entendre Clive raccrocher. Faust fixa le téléphone pendant quelques secondes, perdu et hagard, puis la photo de Sam endormi et ligoté revint par défaut s'afficher sur l'écran. Il déglutit et nerveusement, passa une main dans ses cheveux avant d'en empoigner plusieurs mèches fermement jusqu'à se faire mal. Il ne savait plus quoi faire.
Depuis qu'il a revu Clive, depuis qu'il a vu cette lueur impitoyable dans ses yeux, Faust sait qu'il arriverait un jour où il devrait s'opposer nettement à son jumeau. Il avait toujours su qu'il arriverait un jour où il devrait alors prendre la décision de le tuer, qu'il devrait saisir son arme et lui loger une balle entre les deux yeux pour le bien être de quelqu'un d'autre, mais Arceus, il n'aurait jamais désiré que cette personne soit Sam. Surtout par lui bordel, après tout ce qui lui était arrivé en janvier... Faust priait pour qu'une partie de Clive, celle qui était encore bonne, soit majoritaire et l'ait poussé à ne pas faire de mal à l'adolescent, même si celui-ci  l'avait provoqué. En même temps, il ne savait plus grand chose de son jumeau. Il n'était plus sûr de rien du tout. Il n'est jamais sûr de rien et ça commençait vraiment à l'énerver.
Après avoir repris un contrôle semi-correct de ses fonctions vitales et de ses muscles, il rangea son portable dans sa poche après avoir inscrit l'adresse au fer rouge dans son esprit. Il sortit une arme à eu de son sac et l'accrocha à sa ceinture ; son manteau servirait largement à le dissimuler, et il avait l'intention d'être rapide, donc personne n'aurait le temps de l'interpeller. Il sortit de la chambre et descendit les escaliers à toute allure, sa capuche couvrant son visage. Il ne porta même pas attention aux regards intrigués qui se posèrent sur lui et sortir de l'hôtel en moins de temps qu'il en aurait fallu pour dire 'pouet'. Il s'éloigna en courant de la ville, ses chaussures claquant sur le sol alors que sa respiration erratique ne faisait que prendre de la vitesse.
Dès qu'il fut dans un lieu suffisamment grand, il libéra Hadès de sa pokéball. Le Corboss croassa, agacé et un peu inquiet, mais le regard que lui lança son maître suffit à le faire taire et à lui faire comprendre l'urgence de la situation.

« Hadès, on doit aller à Vanawi. Ne perds pas une seule seconde. »

Il s'installa sur l'oiseau et donna deux coups léger sur la collerette du Corboss qui, comprenant qu'il s'agissait d'un cas exceptionnel et totalement urgent, ne se plaignit pas. L'oiseau s'éleva brutalement, si bien que Faust dû s'accrocher un peu pour ne pas tomber et s'écraser. S'il y avait une chose que le conseiller appréciait chez son ami volant, c'était sa capacité à se donner à fond lorsque le châtain le lui demandait, sans poser aucune question.
Le voyage fut rapide et passé à angoisser. Il avait l'impression que son cœur allait sortir de sa poitrine et qu'il allait dégobiller ses tripes d'un instant à l'autre. Alors que le vent lui fouettait le visage et que sa gorge était nouée par une boule de terreur, il commençait lentement mais sûrement à envisager ce qu'il allait devoir faire une fois arrivé là-bas. Il avait bien pensé à prendre un flingue avant de partir, mais aurait le courage de tirer ?
Le pire dans tout ça ? Il n'en avait aucune putain d'idée.

Dès que le paysage de Vanawi arriva à ses yeux, il ordonna au volatile de le faire descendre sur le toit d'un bâtiment en particulier. Ayant passé son enfance, son adolescence et une petite partie de son âge adulte à traverser et explorer ces rues dans tous les recoins, il savait plus que bien où trouver l'appartement qui était indiqué sur l'adresse que Clive avait joint à la photo.
Une fois descendu sur le toit, il remercia Hadès d'un très bref hochement de la tête que le Corboss lui rendit avant de le faire retourner dans sa pokéball. Il fit quelques pas jusqu'à arriver devant une fenêtre ; il s'agissait d'une de ces pièces mansardées. Sans grande surprise, il constata que la fenêtre était déverrouillée ; Clive ne l'aurait pas 'invité' sans s'être assuré que toutes les entrées possibles n'étaient pas déverrouillées. Il en serait presque venu à admirer son côté consciencieux.

Il entra sans autre forme de procès et prit quelques secondes pour retrouver une respiration normale et un tant soit peu discrète ; s'il jouait bien son coup, il parviendrait à dissimuler sa présence le plus longtemps possible pour avoir l'avantage. Il fit sortir Dalhia de sa pokéball, et la chienne lui jeta un regard confus.

« C'est Clive. Il est en train de faire une grosse connerie. » lui chuchota-t-il.

La chienne comprit immédiatement l'urgence de la situation en lisant l'expression de peur et d'inquiétude qui s'était peinte sur le visage de Faust. Elle hocha la tête et resta à ses côtés, prêtes à agir à la moindre mauvaise surprise.

« Il y a des pokémon ? »

Dalhia hocha de la tête, et tapa trois coups avec sa patte sur le sol pour signifier le nombre. Faust grimaça, mais la remercia par un très maigre sourire.
Il pouvait tenter la discrétion, mais il y avait de grandes chances pour que Ezekiel les ait déjà repéré grâce à son odorat. Connaissant Clive, s'il y avait trois pokémon de sortis, alors le Démolosse en faisait obligatoirement partie. C'était l'évidence même.
Il prit une grande inspiration. Tant pis. Il allait devoir jouer le jeu de son jumeau, même si cela lui donnait la nausée.
Encore et toujours, il était un pion sur l'échiquier de son frère.

Il traversa deux pièces avant d'arriver là où se trouvaient les autres. Il remarqua immédiatement  Castiel, une Migalos qu'il n'avait encore jamais vu et Ezekiel dans un coin. Lorsque son regard se posa sur Sam, son cœur rata un battement et il lui adressa un très maigre sourire qui se voulait rassurant, mais sachant qu'il avait immensément peur, il était peut-être un peu boiteux. Il constata que rien n'avait été fait au cadet et en aurait presque soupiré de soulagement si l'adrénaline ne dirigeait pas chacune de ses actions à l'instant.
Puis enfin, il trouva le courage de poser ses yeux sur Clive. Il attendait, assis à l'autre bout d'une table, Sam derrière lui, contre un pan du mur. Visiblement, il n'avait pas bougé de l'endroit où il était sur la photo, ce qui était relativement bon signe.  Son jumeau lui accorda un bref hochement de tête comme salut. Ezekiel se tenait à ses côtés et lui et Dalhia se foudroyaient du regard, bien que les grognements furieux de la Démolosse étaient nettement plus menaçants.

« Clive. Le salua-t-il, dissimulant difficilement la colère dans sa voix.
- Ravi de voir que tu nous as rejoint, mon cher. Tu m'excuseras, mais-
- Bordel, qu'est-ce que tu veux ?! S'exclama-t-il, ne souhaitant pas entrer dans le jeu de son frère et en finir le plus rapidement possible.
- Je veux qu'on parle. Tu refusais de m'écouter, alors je me suis dit que je devais être plus persuasif. Visiblement, j'avais raison. » conclut l'officier en jouant machinalement avec son flingue.

Chose qui n'intimidait nullement Faust ; il savait pertinemment que cette arme n'était là qu'à but décoratif. Son regard se fit plus tranchant et sa voix plus acide qu'elle ne l'était déjà.

« Il n'y a rien à dire, Clive. Et faire ça... Pour l'amour d'Arceus, donne-moi une raison de ne pas te tuer. Gronda-t-il en serrant les dents.
- Pour la même raison qui fait je ne pourrais le faire, mon frère. » répondit l'autre, une moue amusée sur les lèvres

Faust grimaça. Cette réponse était bien trop semblable à la vérité qu'il évita momentanément le regard bleu de Clive. Car oui, aujourd'hui, il avait eu l'audace de ne pas porter ses lentilles et de ne pas se teindre les cheveux, choses que Clive n'avait pas fait de puis de très longues années, et qui était encore plus blessant pour Faust dans cette situation. Son cerveau assemblait lentement les pièces du puzzle, et la réponse qu'il trouvait à l'énigme de l'apparence de Clive ne lui plaisait pas, mais alors pas du tout. Son attention se reporta automatiquement sur l'adolescent.

« Sam, tout va bien ? Demanda-t-il, sa voix suintant l'inquiétude et la peur.
- Détends-toi un peu, tu sais très bien que je ne lui aurais pas fait de mal. Le rabroua Clive.
- Non, je ne sais pas. Je ne sais plus. T'as changé. Répliqua sèchement le conseiller.
- Je te retourne le compliment. »

Comment en étaient-ils arrivés là ? Quelle avait été la vraie première source de leur opposition ? Étaient-ce leurs différences, le conflit entre Régime et Résistance ou bien même leurs natures même ? Non, leur nature. Il n'y avait pas de pluriel à appliquer ici. Faust le savait plus que bien.

« Sam ? Il ne t'a pas fait de mal, j'espère ? »

Et au fond de lui, tout au fond de son cœur, il espère que Sam lui répondra que Clive a voulu le faire, pour qu'il puisse enfin trouver le courage d'en finir.

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