« C'est toi ou moi, l'un de nous est de trop! »

''Dégage'', de Bryan Adams.
 
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 Une once d'empathie [OS]

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Mikael J. Evans
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Mikael J. Evans
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MessageSujet: Une once d'empathie [OS]   Une once d'empathie [OS] EmptyDim 8 Mar 2015 - 0:07



Une once d'empathie

Évolution de Juniper, partie 1

Il y a des choses auxquelles Mikael est habitué : la cuisson de son café, le nombre exact de grammes de sucre qu'il prend avec, le nombre de minutes de retard que prenait Adam à chaque fois qu'il revenait de sa pause déjeuner avec des airs de gamin ravi qui croyait que son supérieur ne savait pas qu'il allait voir sa copine durant la pause, l'habitude d'Atlas à sauter sur tout ce qui bougeait et la débilité manifeste de certains des dresseurs qui venaient au centre. Sa vie était devenue étrangement routinière, et ce en dépit des quelques fois où les missions que Clive lui confiait le sortaient de son petit quotidien bien trop soporifique. Honnêtement, ça ne plaisait pas trop au médecin, mais au fond, il n'allait pas se plaindre tant que ça puisqu'il vivait sa vie tranquillement et que personne ne l'emmerdait, ce qui le satisfaisait pleinement et de loin.  
Il avait désiré ça, après tout. En cherchant à quitter l'emprise des Evans et de leur environnement malsain, nauséabond et tellement mauvais pour la santé mentale qu'il y avait dans sa famille de quoi faire travailler des psychologues huit heures par jour de la fin des études à la retraite, il voulait la paix. Mais même si il l'a cherché, c'est dans sa nature de vouloir vivre des choses excitantes et inhabituelles, d'apprécier l'imprévisibilité et de vivre au jour le jour. Toutefois, pour obtenir la sécurité et la tranquillité, il a dû échanger un peu de sa liberté d'action ; c'était rude, mais il pouvait toujours se défouler pleinement lorsqu'il revêtait le masque d'Azazel, même si Clive râlait beaucoup à ce sujet, n'aimant pas qu'il profite de ses missions pour calmer ses nerfs.

Ce à quoi il ne s'attendait pas, c'était de voir son frère cadet devant sa porte. Il resta immobile et cligna des yeux, surpris, et crut pendant un instant que vu sa fatigue causée par le fait qu'il s'était réveillé il y a quinze minutes après avoir dormi au grand maximum cinq heures (ou du moins si son horloge disait vrai, mais là encore il était possible qu'elle soit cassée vu qu'elle était assez vieille) lui offrait une hallucination sur un plateau d'argent. Mais là encore, il aurait fallu que son cerveau soit assez tordu pour-... Ouais nan, il retirait cette pensée.

«... Mikael ? Tout va bien ? »

La question du cadet le sortit de sa transe et après avoir poussé un 'hn ?' à moitié grommelé, il bailla sans honte et se frotta les yeux. Il se pinça ensuite l'arrête du nez et regarda une nouvelle fois la personne devant lui, n'arrivant pas à croire que ce qu'il voit.

« Ça te fait quoi, maintenant ? Vingt-huit... ?
- Vingt-neuf ans.
- Ah, oui, je me disais bien. 18 mars, à mes souvenirs ?
- C'est ça, oui. Enfin, euh, tu n'as pas répondu à ma question...

- Ta question...? Ah, ouais. Euh ben oui, ça va bien, j'ai juste mal dormi. Baaah... Entre hein, t'attends quoi ? »


Rafael sourit maladroitement avant de rentrer. Le médecin ferma la porte derrière lui, et poussa un soupir fatigué. Il en profita pour filer vers la salle de bains et enfiler un t-shirt et un short, parce que déjà que cette situation était awkward, alors autant ne pas rajouter de la maladresse en discutant alors qu'il était en caleçon, aussi peu pudique qu'il soit. Il retourna ensuite dans sa chambre et haussa les sourcils, amusé par ce qu'il voyait.

« T'as peur que le fauteuil te morde, ou quoi ?
- E-en fait, euhm... Où est-ce que tu vas t’asseoir toi, alors ?
- Sur le sol, bien sûr. Qu'est-ce que tu croyais ? »


Silence. Rafael l'observa stupidement, surpris mais n'osant pas dire quoi que ce soit ; Mikael leva les yeux au ciel et gloussa moqueusement.

« Sur le bord du lit, crétin. Maintenant assieds-toi et arrête de me regarder comme un merlan frit. »

Le plus jeune s'exécuta sans poser de questions ou chigner, et le mal rasé alla poser son derrière sur le rebord de son lit comme il l'avait dit précédemment. Il passa sans rien dire sa main sur Juniper qui se réveillait lentement de son somme et, même si elle était toujours sur la couverture, elle vint lentement se lover sur ses genoux, attirant sur le visage du médecin un miro-sourire qui disparut bien vite quand il se mit à dévisager l'individu assis devant lui qui puait par ailleurs le malaise. Mais ce qui inquiétait le plus Mikael, c'était les larges cernes qui, même si elles avaient dû être dissimulée par un quelconque cosmétique car c'était bien le genre de son frère cadet de chercher à les cacher, en disaient long sur le fait qu'il y avait peut-être un problème. Et même si à quelques occasions il aimait les problèmes rien que pour le plaisir de les résoudre, ceux liés aux Evans n'étaient jamais plaisants.

« Donc, tu voulais... ?
- Je voulais te voir.
- Oui, ça j'avais remarqué, mais ma question se portait sur le but de ta visite. Tu m'excuseras Rafi, mais je ne crois pas que tu sois venu me voir à huit heures vingt du matin pour m'offrir un café ou me réveiller avec des croissants.
- Je pensais que tu serais réveillé, alors je-
- Aujourd'hui, j'étais supposé faire la grasse matinée en laissant le centre aux infirmiers et à mon assistant. Mais peu importe. Viens en au fait. Enfin non, pas tout de suite. Sois un ange et va me faire un café d'abord, tu me dois bien ça. »


Rafael parut hésiter, mais obéit bien vite et tandis qu'il entendait d'ici son frère galérer dans la cuisine à essayer de comprendre comment fonctionnait la machine, il expira profondément et passa une de ses mains sur son visage, fatigué et pas vraiment mis d'une excellente humeur par la venue de son frangin. Quand un autre Evans venait le voir, c'était généralement mauvais signe, et ce coup-là ne sentait vraiment, vraiment pas bon. Certes, il voulait un café, mais il s'agissait en réalité plus d'une excuse pour avoir quelques secondes à lui plutôt qu'à cause de son amour inconditionnel pour la caféine, surtout que si il en voulait un tant que ça il aurait été le chercher lui-même, parce que...

« Mika, pourquoi est-ce qu'il y a une balance à côté de la cafetière ?
- Pour mesurer le sucre. Mais laisse tomber, mets en un juste un demi. »


Il était quelque peu capricieux en matière de café, comprenez. Lorsque Rafael revint avec sa tasse et une seconde qui, au vu de la couleur, devait contenir bien plus de lait que de café, il gloussa intérieurement et prit sa tasse après l'avoir remercié brièvement. Une gorgée plus tard, ignorant la sensation de brûlure qu'il avait ressenti à cause du fait qu'il l'avait avalé trop vite, impatience et nerfs sur le vif obligent, il brisa le silence qui s'était installé.

« Bref. Tu en viens au sujet ? »

Rafael fut tiré de sa transe et cessa son observation intensive de boisson chaude.  

« Ah, je... Tu te souviens que je me suis marié il y a quatre ans, hein ?
- Oui oui, avec... Jali, c'est ça ?
- Kali, Mikael.
- Désolé, désolé. Vrai que son poulet à l'orange était le meilleur truc que j'avais mangé depuis longtemps, tiens. Elle va bien ? »

Il parlait de ça, mais en réalité il n'était jamais allé au mariage, parce que même si il était assuré que très peu de membres de sa famille seraient là (Rafael s'en était personnellement rendu sûr, désirant à tout prix rester loin d'eux), la perte simultanée de Rachel et Daniel l'avaient rendu trop amer et déprimé pour qu'il fasse quoi que ce soit, surtout assister à un mariage qui l'aurait à coup sûr fait penser au sien qui avait fini par disparaître dans les flammes. Mais toutefois, avant cela, il l'avait rencontré, la femme de son frère. Pour tout dire il ne l'aurait pas vu si Rachel n'avait pas insisté plusieurs fois pour qu'ils acceptent l'invitation à un dîner, et vu qu'elle avait menacé de dormir sur le canapé pendant une semaine si il 'continuait à faire son gros bébé', il avait été forcé d'accepter. Mais au final il n'avait pas regretté, puisque celle qui finirait par devenir sa belle-sœur avait été... Ouais, même si le mot était dur à sortir pour lui, elle avait été adorable, et sincèrement, il avait été content pour son frère d'avoir trouvé quelqu'un de pareil, qui par ailleurs n'avait pas été un seul instant intimidée par les Evans et leurs gros sabots. Un caractère fort allié à une gentillesse à la limite d'inhumaine pour aller contre son incertitude, sa maladresse et sa naïveté quelquefois, c'était bien ce qu'il fallait à son pas doué de cadet.
Mais il remarqua que sa question avait mis Rafael mal à l'aise. Le notaire (car il en avait tellement bavé pour en arriver là que Mikael devait bien le reconnaître comme tel) baissa le regard, et l'inquiétude du médecin grimpa alors en flèche. Bien sûr, il se doutait qu'elle ne pouvait pas être morte ou dans un état proche de la mort puisque sinon il savait très bien que cela aurait définitivement brisé Rafael, mais en tous cas, quelque chose n'allait pas avec elle, ce qui déplaisait à Mikael puisqu'il l'avait bien apprécié, cette fille.

« Tu te souviens aussi de ma fille, Maya ?
- Un peu, oui. Elle m'avait vomi dessus, je te rappelle.
- A-ah, c'est vrai. Enfin, euh... On a voulu avoir un second enfant. »


Il n'aimait pas la direction vers laquelle allait cette conversation. Pas du tout. Il espérait se tromper, mais...

« Le bébé est mort né. Après des heures, elle a dû accoucher d'un bébé mort. De notre enfant. Il s'était étranglé avec le cordon. »

Silence. Choqué, l'aîné ne sut que dire, horrifié, bien que son visage ne montrait qu'une peine légère et qu'il grimaça. Le visage de Rafael était lourd, bien trop lourd ; ses yeux trahissaient un âge qu'il n'aurait pas dû avoir, mais que Mikael connaissait bien trop. Une peine qu'il ne pouvait que trop bien comprendre, et qu'il savait comme affreuse, qui saisissait la poitrine pour en arracher tout ce qu'elle contenait même si il y avait peu à arracher, une peine qui ne laissait que des cicatrices qui ne guérissaient jamais. Alors Mikael sait, et il sait aussi qu'il n'y a rien à dire.

« Je... On avait déjà préparé la chambre. On avait même refusé de connaître le sexe jusqu'au dernier moment, pour la surprise, mais... Je... »

Rafael se mordit les lèvres, les yeux humides.

« Ça fait quatre jours. Je voulais juste te demander si... Si tu viendrais à l’enterrement après-demain. Je ne te force à r-rien, hein, c'est juste que-
- Bien sûr, Raf. »
répondit le plus doucement du monde le médecin qui l'observait sans un mot.

Il ne se souvient plus de la dernière fois qu'il a utilisé une voix aussi chaleureuse. Il était presque sûr que cela datait de la dernière fois qu'il avait bordé son fils.
Le mutisme se réinstalla, lourd, pesant, et Mikael laissa le cadet filer vers la salle de bains pour aller se moucher et essuyer ses yeux, les pensées lourdes. Juniper les regardait d'un air inquiet, et le chercheur caressa la tête de la Nidoran en essayant de la rassurer comme il le pouvait. Il poussa un très long soupir avant de terminer son café d'une seule traite, se fichant maintenant complètement du goût de sa boisson. Il ne savait plus quoi penser à l'heure actuelle, hormis quelque chose qu'il avait constaté il y a maintenant bien longtemps : la vite était et serait toujours une pute. Mais ça n'avait rien de nouveau et il avait conscience que le dire ne changerait rien, d'autant plus que se plaindre était absolument dénué d'intérêt. Mais dans la catégorie des mauvaises nouvelles... Celle-là était assez bien placé. Une fois revenu, Rafael reprit sa place et passa une main dans ses cheveux.

« Je... On a décidé de l'appeler Kusha. Kali voulait un prénom de son pays d'origine, alors... Elle y tenait tellement, après la naissance de Maya... Mais maintenant... »

Mikael ne répondit pas. Que pouvait-il bien dire ? Et plus sincèrement, Rafael souhaitait-il vraiment qu'il réponde ou voulait-il juste parler et dire ce qu'il avait sur le cœur ? Il se contenta de rester contemplatif, jusqu'à ce que son frère brise le silence qu'il avait lui-même installé par une question si simple mais prononcée d'une voix si faible qu'il n'aurait pu ne pas l'entendre.

« Comment tu as fait, pour supporter... ? »

Un sourire jaune étira les lèvres de l'aîné.

« J'ai jamais supporté. »

Il rit jaune, puis se tut. Juniper, remarquant ce silence, se blottit davantage contre son dresseur pour essayer de chasser les images mentales douloureuses qui devaient lui assaillir l'esprit même si elle n'avait aucune idée de ce dont il s'agissait, n'étant pas au courant de ce qui était arrivé il y a quelques années. La Nidoran arracha au barbu un onzième d'un maigre sourire ainsi qu'un autre du même calibre à Rafael. Toutefois, remarquant son impuissance, Juniper ne pu s'empêcher de se sentir inutile, et alors qu'elle cherchait un moyen pour aider son dresseur, une vive lumière blanche se mit à l'entourer et elle évolua sans autre forme de procès.
Mikael ne su que dire, mais il gloussa légèrement devant la Nidorina qui se tenait dorénavant à côté de lui.

« Ta mère sait pas ce qu'elle rate, t'es putain d'adorable toi. »

Enfin, 'mère'.. Le terme était trop élogieux pour qualifier Atlas, mais peu importe. Rafael ne dit rien, juste un peu heureux d'avoir témoigné de ça, et surtout de voir qu'il restait un peu du grand frère qu'il avait connu quand ils étaient petits et qui était mort peu à peu, à chaque coup qu'il avait reçu.

« Allez, viens, on va bouffer un truc. Je paye.
- Mais j'ai pas f-
- Au moins un verre alors. Et ne discute pas, au pire on ira faire un tour. Profite en, c'est pas souvent que je t'offre ce genre de sortie. Juni, tu nous suis si tu veux.
- ... En effet. »

D'ordinaire, il n'aimait pas se lier aux Evans. Mais cette fois, il faisait une exception.
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