On  peut accorder bien des défauts à Léopold, bien des qualités aussi, l’une de ces dernières est sa patience. Tant de patience chez un individu est même assez exceptionnel, même si quand on y regarde de plus près, on comprend bien vite que patience rime assez souvent avec passivité et attente (bon, certes, ça rime pas du tout, mais tant pis), dans le cas de Léo, du moins. C’est vrai que quand on est docile en plus d’être patient, eh bien, ça évite bien des ennuis. Cependant, quand on ne fait rien… Ce n’est plus de la patience. C’est juste rater des occasions. Y’en a qui ratent des occasions de se taire, et d’autres qui ratent des occasions de parler. Car qui ne tente rien ne gagne rien, à ce qu’il paraît. Oh, mais non, c’est pas parce que la vieille bique devant lui - Arceus pardonne le brun au regard de Grumpy Cat, pour avoir de telles pensée, bien qu’au fond, il s’en fiche pas mal et ne ressent pas le moindre regret a médire mentalement sur des gens réellement agaçants -  met a peu près trois plombes a insérer sa carte bancaire. Et en plus, elle discute avec sa copine. Bah oui, parce qu’il faut bien donner les nouvelles de la rue, que voulez-vous. Par exemple, Barangère et Plectrude, si vous saviez comme elles ont grossi depuis l’autre jour qu’elles sont allée manger au Chalet de Maxou, parce que oui, la fondue, évidemment la fondue c’est du fromage fondu, n’est-ce pas, c’est pour ça que ça s’appelle de la fondue, ça ne va pas être du bouillon! Oh quelle boute-en-train tu es, ma chère Cunégonde! …. Ou quelque pataquès du genre. C’est a peu près tout ce que saisit Léopold du dialogue ô combien passionnant qui s’étalonne devant lui. Il se dit souvent qu’en enregistrant tout ça et en replaçant les morceaux de conversation ça et là, on peut avoir une pièce de théâtre magnifique (en plus de savoir 80% de tous les évènements et les commérages de la rue de la concierge qui a la générosité de se porter volontaire et de raconter ses aventures). Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage… Léopold roula des yeux alors qu’il consultait un de ses livres de cours, relisant les pages qu’il avait marqué, et relevant parfois les yeux vers le distributeur pour voir ou en sont les vielles. Bons sang mais c’est possible d’être aussi lent?! Léopold poussa un soupir discret, alors que dans sa tête, son côté obscur avait envie de casser la baraque… Enfin « côté obscur »… Il reste discret et… Inexistant? Bref. Dans tous les cas, heureusement que Sisyphe ou Mînn n’étaient pas dans les parages car les environs du distributeur automatique seraient devenus un très joyeux bordel. Seule Thanatos traînassait non loin de là, surveillée par Emil, tous deux semblaient assez peu préoccupés par cette histoire de machine a billets et le Nosferalto préférait superviser la Solochi pendant qu’elle s’amusait a sauter de dalle en dalle sur le trottoir.

Sinon, c’est vrai, il aurait pu trouver un autre guichet. C’est vrai, Anula est une des villes les plus rupines d’Enola, et donc, les banques, il y en a mais… Eh bien, non. Si Léo est ici, c’est qu’il a déjà suffisamment arpenté la ville en ce dimanche midi pour trouver deux fichus billets de 10 Opals pour aller acheter des fichus Mister Freeze a son tendre et cher papa Richard. Donc, non. Dites qu’il fait la gueule si vous voulez, mais il ne bougera plus de cette file, même si il doit prendre racine en ce lieu précis. Quoique, en fait, c’est pas très glorieux comme fin. Enfin, elle en est à entrer le second chiffre de son code bancaire, il y a du progrès, c’est bien de garder l’espoir. Tiens, Léo vient de se trouver un nouveau jeu. Attention les enfants, Léopold Richter va faire quelque chose de pas très bien. Comme il surpasse de plusieurs têtes les deux petites vieilles, il peut tout à fait surveiller tout ce qui se passe sur l’écran et le clavier, alors, pour passer le temps, il décide d’aller espionner le code de l’ancêtre… 5… 0… Allez, le numéro gagnant! Bon, non, pas encore, elle s’est trompée. Comment ça comment on fait?! Mais il y a un bouton annuler, c’est tout de même pas sorcier de… Bon, eh ben, on dirait que c’est reparti pour un tour. Hop, le code, que tout le monde a du bien voir. Et maintenant le montant. Non, madame, ce n’est pas un distributeur de monnaie, pour ça, il faut aller à la poste. Enfin, du coup, on dirait que Cunégonde avait fini et… Ah non. C’est pas l’autre qui va prendre le relais. Cette fois, Léo ne put s’empêcher de laisser tomber ses bras,  avec une expression pantoise. Il se massa brièvement les tempes, et eut l’idée de demander gentiment au couple de vieilles de se dépêcher un peu, alors sa bouche s’ouvrit une seconde, pour se refermer l’instant d’après. Tu penses, tu penses, mais tu n’agis pas, Léo, eh oui. Donc, autant se maudire intérieurement et attendre que quelqu’un d’autre dans la file fasse passer son message. Oui, c’est ça, bonne idée! C’est toujours mieux de laisser faire les autres. Allez, il doit bien y avoir quelqu’un qui ne connaît pas le mot gêne, dans le lot, hein?  Hein? Sinon, Léo, t’es vraiment un caramel mou. Voila.

Bien que très terre-à-terre, Léopold se demanda pendant un instant si la télépathie n’existait pas chez certains humains, car a peine eut-il souhaité que quelqu’un d’autre que lui prenne les choses en main que l’homme derrière lui se manifesta en posant un contact encourageant sur son épaule. Le plus jeune des deux bruns, plutôt que sursauter sous le coup de la surprise, eut le réflexe de se mettre en garde, il faut dire qu’elle dehors des contacts qu’il avait avec ses partenaires d’escrime ou durant ses entrainements avec sa Kungfouine, il a pris certains réflexes conditionnés pour le moins étranges. Mais ce n’est pas parce que son adversaire qui n’en est pas un manifesta une aura belliqueuse qu’il retint son souffle, mais encore par surprise, en voyant le visage de l’homme en question, car ce visage lui est très familier. Léopold cligna des yeux sans avoir le temps de faire le moindre commentaire, il resta dans sa torpeur quand Mikael -si c’est bien lui-, lui demanda de faire comme si ne rien était et de le suivre dans son délire. De toute façon il n’eut pas le temps de dire quoique ce soit que l’ainé était déjà parti dans un speech impossible à l’adresse des ancêtres. Léo se mit à cligner des yeux en observant faire le barbu, partagé en admiration et incompréhension. Il en vint même à se demander si c’était bien le Mikael qu’il pense avoir reconnu qui est en train de déclamer de plates excuses aux deux vielles dont les traites s’attendrissent peu à peu. Il tenta de jouer le jeu de son côté, envoyant quelques faux sourires se voulant attendrissants. Oui, ça, Mikael a toujours été très fort pour l’entrainer dans ses bêtises, et c’est ce qui fait croire à l’apprenti médecin que l’homme en imper est bien celui qu’il croit. Bien que ses propos et les intonations soient… bien plus polis et révérencieux que dans ses souvenirs? Enfin, ça, il se poserait des questions plus tard. Surtout, peut-être qu’il est face à un sosie… Non, Léo n’est pas assez naïf pour croire a quelque chose comme un sosie. Dans tous les cas, il tombait encore des nues et son cerveau devait assimiler tous les facteurs qui faisaient que cette rencontre ait pu se produire en cet endroit insolite, et que le type qu’il avait tendance a suivre partout pendant les messes de l’Eglise d’Arceus comme un grand-frère et qui l’emmenait faire des sottises était en train de se confondre en excuses plus plates que la terre dans la tête des chercheurs du 15ème siècle en Europe. Et finalement Léo se retrouva presque poussé jusque devant le distributeur automatique, son livre encore ouvert dans les mains. Apparemment, c’était à lui de retirer des sous. Il se tourna vers les deux petites vieilles, puis vers le grand brun, enfin, quoique, il lui semblait bien moins grand qu’il y a plus d'une dizaine d’années, il l’a presque rattrapé maintenant! Il voulu poser la question à son interlocuteur concernant son identité, mais au moment ou il ouvrit la bouche, il se rappela qu’il fallait jouer le jeu jusqu’au bout, et s’empressa d’insérer sa carte bancaire pour retirer à une vitesse record les sous dont il avait besoin, histoire de ne pas trop s'imposer, être le moins envahissant possible, comme a son habitude. Il adressa un signe de tête en guise de remerciement  à Cunégonde et son amie, puis laissa passer Mikael pour qu’il prenne ses billets à lui. Il fit la moue en attendant, brûlant un peu de mettre en lumière les interrogations quant à l’attitude étrange de son ainé qui embouteillent son cerveau. Il attendit que Mikael termine, et retrouva enfin l’usage de sa voix.

« Merci, mesdames. »

Fit-il, avec un faux sourire plutôt réussi, et les deux vielles roucoulèrent un peu, en disant que des jeunes hommes charmants comme eux, si elles avaient 20 ans… Léopold eut un rire forcé et recula poliment en secouant la tête d’un air pas très rassuré. Il se tourna alors vers son ainé et s’adressa à lui d’un ton peu confiant :

« On devrait y aller… Pour euh… Eh bien le magasin… Le magasin va fermer, à ce train. Tu… Tu viens…. Mikael? »

Le pire dans tout ça, c’est que même si Léopold est bien moins adroit que Mikael pour  se prêter a cette petite comédie, car il n’est pas franchement à son aise en public, eh bien, dans tous les cas, ce mensonge marche, car il faut bien le dire, les deux hommes se ressemblent et peuvent presque facilement passer pour des frères, avec leurs cheveux bruns, leurs yeux bleus, et leur grande taille. Et puis, l’essentiel c’est que ça ait marché, non? Léo voulut une nouvelle fois parler, mais ne parvint pas à parler, une fois encore. En fait, il n’avait pas vu Mikael depuis fort longtemps, et ne sait vraiment pas quoi lui dire pour commencer. En fait, il devait avoir l’air assez stupide, à juste le dévisager, à la manière d’un chiot un peu perdu.

L’ainé Richter fut soulagé de voir que Mikael avait décidé de ne plus faire durer toute cette comédie. Quand ce fut fini, il l’entraina par le bout de la manche de sa veste pour aller vers leur magasin imaginaire. C’est vrai que le barbu avait toujours été très fort pour l’attirer dans toutes ses bêtises. Il faut dire qu’ils ne se voyaient que pendant la messe, et Léo avait toujours détesté la messe, bien qu’il l’ait toujours tu et qu’il se forçait pour faire plaisir à son père. Mais la foi en la parole sainte ou en tous les apparats de l’Eglise, il ne l’avait jamais eu. Donc, quand celui en qui il avait souvent vu un grand frère qu’il n’avait pas pu avoir lui proposait quelque chose de rigolo pour se distraire et s’émanciper de cette pesante monotonie, le petit Léopold disait toujours oui. En fait, une fois dans l’Eglise, si Mikael était là, il lui collait au train pendant toute la durée du rassemblement saint, ce dernier durait parfois plusieurs heures, un timing très amplement suffisant pour faire des tonnes de plans stupides. D’ailleurs, bête comme est le grumpy cat, il culpabilise et se demande actuellement si son vieil ami ne le trouvait pas franchement collant et envahissant. Et puis, ou Léo n’avait pas eu de phase rebelle, eh bien ces excursions dans l’Eglise passées a remplacer le vin de messe par du vinaigre ou quelque mélange maronnâtes dont son ainé s’était toujours gardé avec un grand sourire de ne pas lui dévoiler la composition top-secrète… Bon dieu qu’il était naïf… Enfin, pas tant que ça, en fait. Finalement, à ces anecdotes, Léopold hausse maintenant les épaules et n’en rougit même pas comme il pourrait rougir d’autres expériences gênantes ou compromettantes. Avec son aversion pour la religion et la superstition  en général, il ne regrette absolument pas. Il lui faut bien une petite vengeance envers, Richard, non? Même si à ce moment, là, son but était aussi de se faire remarquer de son paternel. Il balaya ce détail de sa mémoire et en resta au côté jubilatoire de ces souvenirs. D’ailleurs, un sourire en coin s’était dessiné sur son visage à force de se remémorer toutes leurs bêtises pour lesquelles Mikael finissait toujours par porter le chapeau. Vu les sourires victorieux  que ce derniers arborait généralement quand il se faisait sermonner, Léo a toujours eu bien du mal à le plaindre, dans ce genre de moments.

La  séance nostalgie prit fin quand le cadet figura que, oui, ça fait un bail. Bien plus de dix ans. Et, oui, il a grandi, oui, il est devenu un adulte, lui aussi (enfin, ça, rien n’est moins sur). Cette réflexion tire un nouveau faible sourire à Léo, qui ne sait toujours pas trop quoi dire, a part lâcher un bref rire nerveux.

« Ah, oui… Je suis presque aussi grand que toi, maintenant! »

Nouvel éclat de rire embarrassé, suivi d’un sourire en coin peu naturel mais pourtant sincère. Même si il a du mal avec ce genre de situations, Léo espère que Mikael ne s’imagine pas qu’il manque d’enthousiasme au fait de le revoir. C’est l’inverse, il est plutôt très heureux de faire ce genre de rencontre surprise, en ce dimanche qui s’annonçait si ennuyeux. D’ailleurs, il se hâta de ranger son libre dans sa sacoche pour se concentrer sur les propos du barbu et ne pas trop avoir l’air d’un nerd. Il fit la moue quand Mikael le railla gentiment sur son incompétence à déloger des vielles de devant un distributeur, mais reprit vite une expression plus enthousiasmée (du moins  à son niveau, ça donne juste un sourire un peu plus expressif que d’habitude).

« On a pas tous des idées aussi tordues que toi, que veux-tu. »

Fit-il, avec un ton joueur dont il fut lui-même surpris. Puis, comme il sentait qu’il allait retomber dans une torpeur embarrassante, il décida d’enchainer.

« Euh… Je… Euh… J’ai fait la fac de médecine et… euh… Maintenant, je suis en stage dans un cabinet généraliste d’Anula et… Et aussi… parfois je… à la clinique Connors d’Amanil. Et… Et… voila? »

Dit-il d’une voix timide en haussant un peu le ton sur la fin de sa phrase, comme pour signaler implicitement qu’il ne savait pas comment continuer à moins qu’on lui pose des questions moins vagues. Il remarqua à ce moment là qu’il avait presque oublié la compagnie  de ses Pokémon, qui avaient eu la présence d’esprit de les suivre. Thanatos trottait gaiement a ses pieds tandis que Emil volait un peu plus haut, tel une sentinelle. Le Nosferalto a pour habitude de surveiller les inconnus qui s’approchent de son maitre. Bien que Mikael ne soit pas vraiment un inconnu. D’ailleurs, a propos de Pokémon…

« Et.. toi? Je crois que tu voulais devenir médecin Pokémon, non? »

Une question assez stupide, en fait…

« Ah, je suis con… J’ai entendu dire que tu travaillais au Centre Pokémon de la ville… Je suis toujours tombé sur ton assistant, pourtant… Monsieur... Smith, c’est ça? Enfin… Ce n’est pas un reproche, hein, tu dois… Tu dois avoir un emploi du temps… chargé. Oui. Chargé… »

Léo ne put s’empêcher de se mettre a culpabiliser en pensant qu’il aurait pu avoir l’occasion de venir saluer son ainé et de lui demander des nouvelles  bien plus tôt, mais qu’il ne l’avait jamais fait. Pourvu que Mikael ne lui en veuille pas d’être terriblement nul pour garder le contact et mener une conversation, car il lui déléguait un peu cette tâche, du coup.

Il ne savait forcément pas tout des choix ou des rêves de Mikael, pour sur, il sait juste l’avoir un jour entendu parler de médecine, et cela était plus ou moins resté gravé dans sa mémoire. Probablement car depuis tout petit, l’ainé Richter nourrissait le rêve de pourvoir de venir médecin, pour sauver des vies, celle de son père y compris. Oui, ça sonne cliché, il le sait pertinemment, mais voilà ou il en est désormais. Enfin, cela leur fait un autre point commun, quelque part, la médecine, même si ce n’est pas appliqué aux même êtres vivants. Léo commençait à se décrisper un peu, son visage se détendait peu à peu, s’adoucissant un peu car quelque part, son ainé savait le mettre à l’aise. Il faisait le gros de la conversation, et pour ça, il lui en était reconnaissant. Il aurait presque pu croire avec le cinéma de tout à l’heure que Mikael eut perdu son côté familier au profit d’un comportement plus… Socialement acceptable. Et quoi qu’il puisse en dire… Voir le barbu changer vers quelqu’un de rangé l’aurait un peu déçu. Léopold est du genre plutôt tolérant, parfois trop, même pour le meilleur et pour le pire, comme avec les vioques de tout à l’heure. Bien qu’il ne parvienne pas a être efficace socialement et à se lier aux gens, il accepte assez facilement les personnes qui se donnent le mal de venir vers lui (par contre, garder les amis qu’il s’est fait de cette façon, c’est une tout autre paire de manches). Ne serais-ce que pour les remercier de leur effort qu’il considère comme surhumain. Enfin, en ce moment, il n’est pas lieu de commencer a broyer du noir et à se dévaloriser! Il prit donc le temps de bien écouter les paroles de l’ainé médecin, qui avait passé un bras amical par-dessus son épaule. Contact auquel Léo ne réagit pas vraiment. Enfin, si, ça lui faisait plaisir, en fait. Bien qu’il ait besoin trop souvent d’être seul, cela ne signifie pas que le contact humain ne lui manque jamais. Eh bah oui, que voulez-vous, il a besoin d’affection, ce petit Grumpy Cat pas si vilain. Puis, il remarqua une lueur dans le regard de son interlocuteur. Une lueur dont il se souvenait assez bien. Certes, ce n’est pas une lueur malfaisante, bien loin de là. Mikael a toujours eu ce genre de lumière dans le regard quand il avait un plan en tête… Enfin, là, Léo avait la singulière impression que ce plan… Le concernait directement?

Et bingo. Effectivement. Il redevint immédiatement nerveux en entendant les propos rigolards de son ami, qui avait toujours son bras autour de ses épaules. Il ne lui fallu pas deux secondes pour comprendre que si il comptait le kidnapper eh bien… Il l’avait déjà fait prisonnier, car mine de rien, il le tenait bien fermement, et bien que désormais, la force de Léo puisse certainement un peu rivaliser avec celle du barbu, eh bien, il se contenta de déglutir discrètement et d’ignorer le mauvais pressentiment qui venait de l’investir.

« Euh… Mais… »

Allons, voyons, Léo, tu sais bien que c’est Mikael. Tu n'as ni choix, ni excuse suffisante pour refuser son invitation. Et puis, tu le connais, il est pas très net par moments, mais ça ne l’empêche pas d’être un bon gars quand il le veut bien… Il ne te veut pas de mal hein juste… Retirer ce balais que t’as dans le cul! Oui, ben, forcément, si tu le prends dans le sens littéral de l’expression normal que tu flippes. Et puis… Avoue qu’il n’a pas vraiment tord, hein. Faudra bien que tu t’en débarrasse, un jour. Puis, tu le sais que c’est inconfortable, en plus, d’être handicapé socialement… Les petites voix en Léo n’arrangeaient en rien l’anxiété de Léopold quand son vis-à-vis lui désigna un bar plus loin. Décidément, le plus jeune brun se résigne trop vite.  Ah, bon, au moins, il ne lui demandait pas de danser le Gangnam Style au milieu de la rue et de chanter l’intégrale de Bali-Bali en faisant un strip-tease. Ne vous demandez pas pourquoi Léo a pensé qu’on pourrait lui faire faire un truc pareil, mais, c’est Mikael J. Evans dont on parle, aussi, hein, qui sait. Enfin, comme ce n’était qu’un bar, Léopold soupira pour se donner un faux air tranquille, et pour oublier le kidnapping et le balais dans le popotin. Il ne chercha en revanche pas a savoir ce que Mikael voulait entendre par trainée de poudre, mais il espérait juste que ça n’ait pas rapport avec le balais et le postérieur dont il venait de parler. Enfin, on digresse et ça fait pas franchement avancer le schmilblick, tout ça.

« Oui, oui, a-allons-y… C’est toujours mieux que de rester… debout… hein? »

Répondit-il seulement, avec un sourire forcé, bien conscient qu’il n’avait pas vraiment le choix. Dégonflé. Mais, quelque part, cela le réjouissait un peu plus d’être assis pour discuter que rester planté au milieu de la rue… Et puis, ça prouve qu’il n’était peut-être pas ennuyeux au point que Mikael ait déjà pris la poudre d’escampette. Même si manifestement, ce dernier semble s’amuser de la situation plus qu’autre chose… Et probablement du fait que le cadet soit totalement constipé socialement. Enfin… ça va, ça. Ce n’est pas la première fois que son côté coincé amuse les gens. Il a appris à s’y faire, bien que la chose continue parfois de lui peser. C’est bien gentiment et comme la brave bête docile qu’il est que Léo se laissa guider tranquillement jusqu’au bar, en cachant bien ses petites insécurités qui se manifestent quand il doit aller dans ce genre de lieux. La dernière fois qu’il était entré dans un bar, ce devait être à la soirée de fin d’étude de sa promo de médecine… Un bail, donc. Et si ses souvenirs sont bon, il s’était fait porter pâle pour partir plus tôt. Oui, bon, c’est pas glorieux, il le sait. Il ne dit mot jusqu’à ce qu’ils soient installés à une table à l’intérieur. Dommage que le soleil ne soit pas trop au rendez-vous aujourd’hui, ils auraient pu s’asseoir en terrasse (et Léo aurait pu prendre la fuite plus facilement, comme ça?). Une fois assis face à son ainé, il commença à tapoter un peu nerveusement le bord de la petite table, et ne pensa pas à quitter sa veste pour se mettre à l’aise. Il prit un temps pour explorer l’intérieur du troquet. La décoration y était sobre, et des enceintes diffusaient un fond musical discret et plaisant. Finalement, ce n’est peut-être pas si mal que ça. Un serveur souriant  vint vers le duo pour prendre leurs commandes. Comme le garçon semblait attendre qu’il parle le premier, Léo passa commande en premier, non pas sans hésitation.

« Euh… je… Un sirop de cassis s’il vous plaît. »

Bizarrement, quelque chose lui disait que cette commande risquait de faire rire une certaine personne. Bon, là, il ne pourra pas dire qu’il ne l’a pas cherché. Coupable, Léo se mit à contempler des sous-verres posés sur la table en bois, devenus bien plus intéressants que tout le reste de l’endroit. Bon sang… Il est vraiment ravi de revoir Mikael mais il se sentait bizarrement piégé, et un peu obligé de répondre aux questions qui allaient venir. On a déjà dit que Léopold était un gros tas de patates molles? Non? Bon, bah, au moins, ça innove un peu.

Léopold avait commencé a avoir un mauvais pressentiment en voyant le sourire de Mikael, mais avait décidé de l’ignorer, mettant cela sur sa paranoïa habituelle. Puis, quand il avait vu un Nidoking sortir d’une capsule bicolore pour se poster tel un vigile devant le bar, son pressentiment était revenu en force. Il déglutit avec difficulté et décida de se concentrer sur sa boisson qui ne tarderait pas à arriver. En attendant, c’est comme si il se résignait déjà. Après tout… Il le sait hein. Il le sait que Mikael est un être retors sous les apparences aimables qu’il aime se donner. Sa manie de faire des plans dans le dos et l’ignorance des gens n’avait pas changé. Le sourire malsain que porte le barbu assis en face de lui ne le rassure nullement, et ne lui donne pas le loisir de penser à autre chose qu’à la prochaine question (qui sera certaine foireuse et surprenante dans le mauvais sens du terme). Vraiment, on peut dire que l’espoir fait vivre mais… Qu’est-ce qui a pu faire croire une seconde a Léopold que tout se passerait tranquillement, sans accrocs, dans la cordialité la plus totale, alors que c’est de Mikael Jeremiah Evans qu’on parle? Certains ne changent jamais, il faut croire. Pas que Léo méprise d’un coup son ainé pour cette raison. Il serait bien mal placé de lui reprocher de ne pas avoir changé d’un poil. En fait, actuellement, il est plutôt anxieux en anticipant sur ce que son vis-à-vis allait bien pouvoir lui sortir. En fait, avant que Mikael ne parle, il ferait mieux de trouver quelque chose à dire, un sujet débile, quel qu’il soit, mais il sentait que si Mikael parlait maintenant, ce serait pour dire quelque chose qui le ferait s’étouffer dans son verre de façon très peu gracieuse. Comme si il avait le cou pris dans une guillotine, Léo attend que la lame lui tombe sur la tronche. Et quand le grand couteau arrive eh bien… Encore une fois, il se demande pourquoi il ne s’est pas douté que Mikael n’aurait jamais pensé à lui parler de fille et le mettre en face de son incompétence en matière de drague.

C’est après un bruit guttural étouffé que Léo parvint a avaler sa gorgée de sirop sans en mettre partout. Puis il resta face à la table, se gardant bien de ne surtout pas regarder la jeune femme dont était en train de parler Mikael. Ce serait probablement lui donner raison. Les yeux délibérément rivés sur son verre, Léo ne trouvait rien à renvoyer à Mikael, et ne lèverait certainement pas le visage vers lui, pas tant que celui-ci serait rouge tomate, du moins.

« Non, je n’ai rien vu. Rien vu du tout. Personne ne fixe personne. Enfin, si elle fixait quelqu’un, ça devait être toi. Ou ton Nidoking. Bref. Pas moi. »

Dit le plus jeune brun dans un chuchotement de diarrhée verbale, toujours sans regarder son interlocuteur, et encore moins la brunette qu’il avait -allez, il doit bien l’avouer- entraperçue en entrant dans le bar, même si elle n’est qu’à quelques tables. En plus, l’autre andouille en remet une couche, et si il n’y avait pas un Nidoking planté devant la porte, Léo aurait déjà prit ses jambes à son cou. Mais là, il est condamné à se recroqueviller sur lui-même. Si seulement il était né Rattatta ou Statitik... Tiens, il ne pensait pas faire ce genre de réflexion existentielle un jour. Il se sentait assez ridicule. C’est ça. Et en fait, il ne comptait pas se laisser faire. Il se redressa soudainement et commença a soutenir avec force le regard de son ainé.

« Pas question. Personne de meure de rencontrer personne. Je n’ai pas le temps pour ça,  je te ferais dire. On est obligé de devoir en venir à ce genre de sujets? De toute façon… j’irais pas. Je n’ai pas envie de satisfaire ton envie de me ridiculiser en public. »

Dit-il, en tentant d’insuffler un semblant de détermination dans ses paroles. Puis, il croisa les bras sur son torse et sortit sa tête de Grumpy Cat de compétition pour montrer qu’il n’est pas content. Aussi, il aurait pu inventer un excuse du genre, qu’il a déjà une copine, qu’il voit des filles toute la journée à la clinique, inventer sa vie, en bref. Mais Léo méprise trop le mensonge pour se décider à faire pareille chose. Puis, les questions que poserait alors Mikael ne seraient que plus embarrassantes. Finalement, le jeune médecin se trouve dans une impasse. Normalement, il est docile et fait ce qu’on lui dit comme un gentil chienchien, mais là… Non il n’en est simplement pas capable. En même temps, si il n’a rien d’autre à dire… Que faire? Curieux quand même et un peu calmé, il jeta un œil furtif vers la jeune femme en question, qu’il vit alors tourner le visage vers lui, se sentant certainement observée. Voila, il la dérangerait.

« Et… Et puis… Euh… De toute façon, c’est e-évident qu’elle n’a pas envie d’être ennuyée. Elle… Elle est avec une amie. »

Qui a dit que ce genre d’excuse bateau réglerait le souci? Personne.

« Et ne m’appelle plus jamais Casanova. »

Et hop, retour de la moue du chat grincheux. On est pas arrivés.

Bien sur, il y a le stade de la gène, Léo est forcé d’y passer, tel qu’il est actuellement. Peu a peu, la gène s’en va pour laisser la place à la désillusion, puis, sans pour autant que la déception s’empare de lui ; après tout, c’est Mikael, Léo savait qu’il ne serait pas tranquille avec un tel type face à lui, et surtout, il n’espérait pas vraiment qu’il ait vraiment gagné en maturité de ce côté-là, son ainé  avait toujours été très porté sur « la chose ». Parce que oui, Léo assurerait avec certitude que lui-même l’est moins que le commun des mortels. Enfin, on déborde du sujet. Désillusion, car il pensait encore vraiment qu’il pourrait s’en échapper en avançant maladroitement quelques arguments. Mais visiblement, sa défense n’était pas assez puissante pour contrer le sourire bien trop malicieux pour paraitre sain de son vis-à-vis, qui se foutait totalement d’enfoncer la porte sans même réfléchir deux secondes. Mais le contraire aurait aussi étonné Léopold. En entendant son ami le nommer d’un nouveau sobriquet, il soupira en comprenant que ses mots n’avaient affecté personne et il leva un regard des plus blasés vers Mikael qui continuait d’insister sur le fait que le cadet a un bâton bien trop gros enfoncé dans le derrière et qu’il faudrait bien s’en débarrasser un jour. Charmante image. Ne sachant plus quoi dire pour s’opposer au médecin-chercheur,  le grumpy cat laissa sa tête reposer sur sa main en attendant que son interlocuteur finisse son speech, en justifiant que oui, c’est bien Léo que la brunette regarde. Léo ne rougit même plus quand Mika avança avec un sourire des plus irritants des bêtises comme  « femme de ta vie  ou de ta nuit ». Si elle pouvait se passer d’être l’une comme l’autre, ce serait pas mal, en fait, se dit alors Léo, faisant cette dernière observation surtout de par son envie de contredire son faux grand frère et de s’esquiver de pensées et de situations pour le moins embarrassantes. Il bougea de nouveau et recroisa ses bras devant lui, fixant Mikael. Puis, il secoua la tête d’un air mitigé.

« Je m’en fous, j’ai un balais dans l’cul si je veux! Et puis, je n’ai rien à lui dire! »

Quel intérêt de dire ça, au juste? C’est probablement inutile vu l’adversaire en face. En plus, dans sa nervosité, il n’avait pas bien contrôlé le volume de sa voix et la moitié de la clientèle s’était retournée dans sa direction Et en effet, il est coriace, l‘animal. Le voila qui parle d’aller directement parler aux deux jeunes femmes si Léo ne se bouge pas le cul par lui-même. Remarque qui fit tomber une nouvelle pression sur son dos. Si Mikael y va, il irait raconter monts et merveilles à son sujet, et ils aurait l’air bien con si jamais il sortait une connerie du genre… Non, on va éviter d’y penser, en fait. Le plus jeune brun faisait de son mieux pour garder un visage neutre, pour faire comme si il s’en fichait éperdument, et ignorer l’anxiété qui l’envahissait seconde par seconde. Si il y va, il se mettra terriblement dans l’embarras, et il est certain que tout le bar l’observerait dans sa manœuvre. Et puis… Pourquoi commence-t-il à y penser, au juste? Il n’est pas question qu’il y aille!  Il lui faut trouver une parade. Vite. Alors que son regard soutenait encore celui de Mikael, son bras balaya maladroitement la table… Pour faire tomber son verre désormais presque vide à terre.

« Oh zuuuuuut… »

Fit-il mollement, avant de se baisser vers le sol pour ramasser son forfait. La poisse, le verre n’étais qu’a peine cassé. Pourtant, il failli exploser, d’irritation ou d’embarras, il ne sut pas sue le coup, quand il main plus fini vint l’aider à  ramasser son verre... La brune dont Mikael lui rabattait tant les oreilles était venu l’aider, sauf que ça ne lui faisait pas vraiment plaisir, en se visualisant déjà la tronche de l’autre débile. En plus, on dirait que la jeune femme prenait cette fausse maladresse qui aurait du servir de porte de sortie vers les toilettes ou il serait peut-être bien resté enfermé le temps de trouver une meilleure idée, voire de mettre la fenêtre si fenêtre il y avait au service de sa fugue. Enfin, bref, on dirait qu’elle prenait ce geste stupide comme une tentative d’approche, en plus ! Décidèment, rien ne se passe comme prévu.

« Je vais vous aider, laissez donc... »
« Oh, non! »

Répondit-il du tac au tac, prit de court, comme si il venait de se retrouver face à un espèce de monstre. En espérant que cela suffise à chasser l’intruse qui souriait toujours, bien que surprise, il continua de ramasser les bouts de verre, tout en cherchant désespérément un échappatoire. Puis, il eu une nouvelle idée, pas vraiment brillante, a vrai dire, ni flatteuse.

« Je vais mettre tout ça euh… à la poubelle. Mikael avait hum… très envie de te parler, alors, je vous laisse un moment entre… entre vous, oui, c’est ça! »

Fit-il en présentant brièvement les deux inconnus, puis il fonça maladroitement vers les toilettes, ou il alla jeter les quelques bouts de verres dans une poubelle qui se trouvait là. Ah, et… Est-il nécessaire de préciser qu’il n’était pas décidé a sortir des toilettes de sitôt? De toute façon sortir, maintenant ne ferait que le faire passer pour encore plus débile. Mais pourquoi il a fait ça, au juste?! Allez, on applaudit pour le délit de fuite et le niveau de pas doué!

Ce que Léo vient de faire, à part lui éviter de voir le sourire que Mikael devait surement porter sur son visage au moment ou il broie du noir, c’était totalement stupide et inutile. Car tout le monde sait qu’il est allée se planquer dans les toilettes, personne ne doute que ce doit-être tout bêtement une mini-fugue. Enfin, actuellement, le jeune Richter n’est pas franchement beau à voir, avec ses yeux ronds comme des assiettes, sa tête entre les mains, et un maigre filet de voix sortant de lui, incompréhensible et composé uniquement d’injures qu’il s’auto-destinait. C’est presque glauque comme image, j’en conviens volontiers. Enfin, faut bien le dire : vu les débilités que Mikael devait trèèès certainement être en train de balancer sur son dos, il y a de quoi flipper un peu. A tout hasard, le brun plaqua son oreille contre la porte, espérant entendre quelques échos de la voix de son ainé baratineur, mais le résultat ne fut pas concluant. Finalement, il continua d’attendre encore un bon moment. Léopold aimerait vraiment que ses nerfs mis à mal se calment sous peu et que cela lui évite de se casser les doigts contre la porte de bois massif. Il tentait de se parler à lui-même et de se persuader que non, Léo, quand tu t’énerves, tu sais ce qui arrive. C’est mauvais, vraiment mauvais. Mais c’est pas sa faute, cet fois-ci en un sens. Enfin, si peut-être. Peut-être est-ce la faute de son humour insuffisant. Se dire cela n’arrange pas  vraiment ses affaires, à vrai dire.

Le bruit d’un pas léger et hésitant se fit entendre au dehors. Léo leva le visage et sentit que la personne s’arrêta brièvement devant la porte, pour se déplacer plus loin, probablement les toilettes de femmes. Ce qui attira son attention, c’est que la personne frappa aux dites toilettes avant d’ouvrir le porte et de soupirer qu’il n’était pas là. Qui ça « il »? Lui? Léopold ouvrit brusquement la porte des toilettes homme, ou il se cachait, pour se retrouver nez-à-nez avec la brunette du bar. Cette fois, pas de place pour les bégaiements ou la timidité, ce qu’avait pu dire Mikael pour réussir a envoyer la jeune femme le chercher, c’est ça qui l’intéresse. Mais ce fut elle qui le prit de court.

« Je… Votre frère m’a dit pour… Il m’a dit que je devrais venir vous parler… ? »
« Plait-il? »

Fit-il, sévère, en se rapprocha de la jeune femme encore inconnue, le regard presque menaçant.

« Vous savez… pour… »
« Pour quoi? Qu’est-ce qu’il vous a raconté?! »
« Eh bien… »

Après un claquement de langue agacé, Léo se détourna de son interlocutrice dont les réponses ne le satisfaisaient guère. Il sorti en trombe des sanitaires et s’approcha en quelques pas de son faux frère qui aimait tant lui faire des saloperies depuis maintenant un bon quart d’heure. C’est ça, ça ne fait qu’un putain de quart d’heure, et voila ou il en est : à tenter de faire taire son énervement qui lui hurle de fouetter un poing dans la face arrogante de Mikael. En inspirant profondément, Léo parvint tout de même à se contrôler. Pour le moment.

« Qu’est-ce que tu lui a dit? »

Dit-il sur un ton impatient et des plus sec, l’hésitation semble avoir momentanément disparu de sa voix.

« QU’EST-CE QUE TU AS ENCORE DIT PUTAIN DE BORDEL DE CON DE MERDE?! »

Ouuuuuuups. Ca y est, le boulon a cédé. Faudra le penser à racheter une clé à molette pour le refixer un jour. Mais bon, la joueuse a totalement la flemme. Puis, si elle fixait ce truc, ce serait même plus marrant alors voila. Bref. Cette fois, Grumpy Cat avait carrément attrapé le barbu par le col de sa veste pour le secouer comme un prunier, tant qu’il le pouvait. Son interlocutrice des toilettes, en voyant la situation s’avança prudemment pour tenter de le faire lâcher prise, on dirait qu’elle savait certainement bien gérer ce genre de situation, car Léo cessa de secouer son vis-à-vis… Pour le meilleur et pour le pire.

« TOI, CASSE-TOI ESPECE DE SALE GUEUNON! »

Puis il constata le silence de mort qui s’était installé dans le bar. Pourtant, cela ne le calma pas pour autant. Alors il se remit à fixer Mikael, bouillonnant toujours à l’intérieur. Mais franchement… A quoi s’attend-il, même après un pareil coup de sang?

Et en plus, Mikael a décidé de ne rien arranger. Mais son rire n’ajouta pas à la colère de Léo comme on aurait pu le croire, il eut plutôt pour effet de mettre encore plus le bazar dans l’esprit de l’ainé Richter qui ne savait vraiment plus ou donner de la tête. Il avait la singulière impression qu’un mini-Mika s’était infiltré sournoisement par son oreille et était en ce moment en train de jouer à activer des leviers dans son esprit dans un ordre totalement anarchique, et de patauger au passage dans sa cervelle en jouant à Mimi Cracra ce serait une très bonne explication à tout ce bordel, pas vrai? Le jeune homme tira un encore plus sale gueule quand il se vit affublé d’un nouveau surnom pas franchement plaisant, et il n’a étrangement pas l’envie de savoir d’où le barbu l’a encore sortit. Il a bien une idée d’où ça peut sortir, en fait, vu comme ce type est porté sur les trucs scabreux, mais pour respecter les règles de la décence (ou pas), ce ne sera pas dit ici, de toute façon, tu sais ou j’ai voulu en venir. Léo était encore trop occupé à fulminer dans son coin en silence, ses oreilles tentaient de se fermer avec force aux débilités de son traitre de grand-frère, et il ne reprit ses esprit qu’une fois dehors, au contact d’un peu d’air frais. La rue. Tellement moins étouffant que ce foutu bar. Il se rappela vaguement qu’il s’était aussi fait appeler schizophrène. Et cette constatation l’inquiétait bien plus que tout le reste. Léo connaît la chose, un peu parce qu’il a pu consulter la question pendant ses études, mais surtout car son paternel y est sujet (cela et bien d’autre soucis), et il refuse de se retrouver dans le même état. Mais ses actions d’il y a quelques secondes venait de faire s’insinuer à lui des doutes plutôt affreux. Une partie des évènements récents ne lui revenaient pas, ne plus, c’est comme si il avait agit sous la poussée d’une espèce… d’état second? Maintenant qu’il y pense, il se sent parfois un peu comme ça, quand il revêt le costume de White Dragon. Non, ça, c’est un rôle, un déguisement, un personnage, ce n’est pas la même chose, il est normal d’intérioriser quand on joue la comédie. Léopold secoua la tête et son regard se posa sur Mikael, qui affichait toujours son sourire de débiloïde profond, et son Nidoking. Son premier réflexe fut de faire volte-face brusquement pour chercher ses Pokémon, à lui, mais ces derniers avaient suivi d’eux-mêmes le mouvement, et à ses pieds, Thana semblait inquiète. La prendre un moment dans ses bras termina de le calmer. Par la collection de pin-up légendaires de ce coquin d’Heatran, mais son absence de parole et ses gestes actuels le faisaient vraiment passer pour un lunatique. Avec embarras, il reposa sa Solochi à terre et se décida à s’adresser de nouveau à Mikael, pour lui répondre, peut-être. Ne pas le laisser seul dans son délire. Le gentil garçon stupide est de retour! Et il ne voudrait pas ignorer les paroles de son  faux grand frère… Surtout que le barbu à l’air presque… réellement? Véritablement heureux que Léo ait poussé sa gueulante devant tout le bar?

« Ne penses pas que tu sois le premier à avoir essayé. Au moins, toi, tu as le mérite de m’avoir poussé à bout! Ne me remercie, pas, je sais que ça doit te faire terriblement plaisir d’entendre ça. »

Fit-il, inexpressif, comme pour prendre de la distance par rapport à ses actes dont il n’est pas fier. Cet andouille est même en train de penser à aller platement s’excuser à la jeune femme du bar, alors a qu’il n’a du lui parler que dix secondes, grand maximum. Enfin, est-ce que tout ça, ça veut dire que Mikael voulait sincèrement l’aider, avec ces méthodes détournées qui ne font rire que lui? Lassé de se poser des questions sans jamais trouver de réponses, Léo se mit à soupirer et mis les mains dans ses poches, agacé d’avoir été roulé dans la farine. Dans tous les cas, a affirmation débile, réponse absurde.

« Et, sinon, j’adore insulter les femmes, je ne te l’ai jamais dit? Je les traite comme des moins que rien et elles m’aiment quand même. Ce que je préfère, c’est quand elles imitent les perroquets et répètent tout ce que je leur demande de répéter. Elle, je m’attendait à ce qu’elle imite la gueunon, mais elle n’a pas voulu. »

Il dit cela sur un ton totalement monocorde, et en haussant les épaules. Bien entendu, c’est une énorme connerie. Passons sur le fait que cette blague est plus que noire et douteuse, mais il faut bien se défendre. Pourquoi est-ce qu’il à dit ça, franchement? Il faut vraiment qu’il aille consulter, ce pauvre petit, car il ne sait plus ce que font ses neurones, là. Normalement, il aurait dit « pardon, ma blague était nulle » en s’excusant platement avant de prendre la poudre d’escampette. Là, il n’arrive même pas à regretter. Ces changements soudains ont pour effet de le mettre dans un état second, et il commence à se demander si Mikael n’a pas glissé en douce des substances illicites dans son verre.

« Tu n’as vraiment pas changé d’un poil. Toujours avec des plans sortis du cul… »

Simple constatation, Léo ne savait pas trop que penser d’une telle réplique. Nouveau haussement d’épaules. Sa voix était un peu vide d’expression. Le contrecoup, probablement. En fait, le pire dans tout ça…

« Ça m’a donné faim… Euh… Enfin, on s’en fout de ça, hein? Ou-oublie.»

A ce moment, on dirait que la constipation était revenue d’elle-même. Magie! Et le pire, c’est que Léo était tout d’un coup bien rassuré, bien qu’il n’en ait pas l’air. Incompréhensible. Après ce post chaotique, la joueuse a eu bien envie de rendre son tablier.