« …Et en plus, tu ne viens jamais me voir! »
« Maman… On va pas encore s’engueuler pour ça! »
« Je sais, je sais, tu as beaucoup de travail. Mais tu vas te tuer, à force! Je ne serais pas si inquiète si tu m’appelais plus souvent. C’est toujours moi qui t’appelles… De plus, cela fait des mois que tu ne me racontes plus rien! »
« Rei, qu’est-ce que tu veux que j’te dise… J’ai jamais été douée pour raconter ma vie, moi. »
« Tu parles d’une excuse… »

Julianne ne pouvait pas faire l’innocente. Comme elle ne pouvait rien dévoiler à Reine. Mais une mère sait toujours plus qu'on ne le pense sur son enfant, à ce qu’il paraît. Et il n’est pas sorcier pour Rei de comprendre quand sa fille lui cache quelque chose. A cette dernière, même si elle est sa mère, Julianne n’a même pas dévoilé le fait que son employeur est le Régime Enolian. Ce même règne politique qui dégage tant d’effroi chez sa génitrice quand celle-ci allume la télé et tombe sur des nouvelles de l’île du Pacifique. Reine est bien assez intelligente pour savoir que sa fille, même si elle n’est qu’une ingénieure neutre (selon elle) peut courir un danger en restant sur Enola. Et elle ne croit pas si bien dire car Julianne est devenue une cible privilégiée de ces derniers mois. Bien entendu, en dehors du PDT et quelques autres, la Générale fait tout pour que son visage ne soit pas connu. Si Mazinkaizer porte une tenue militaire et un bandeau sur l’œil pour ses apparitions publiques, Noriko, elle, ne se montre jamais en public. En dehors des employés du PDT, les Régimeux ne voient d’elle qu’une ingénieure chevronnée qui parle depuis un interphone ou toujours barricadée derrière une porte, et ne sort jamais de son laboratoire. Dans tous les cas, Rei ne doit rien savoir de tout ça. Surement pas pour le Régime ni pour sa promotion. Un froid s’était installé entre les deux femmes encore pendues à leur téléphone. Julianne faisait les cent pas dans son appartement, en se tordant les doigts de sa main libre de nervosité. Quel est le meilleur, entre ne rien dire et mentir? Le jeune Générale se rend bien compte qu’elle s’éloigne de sa mère au fur et à mesure que les mois passent. Si cela n’était pas déjà entamé depuis son départ de la maison, à vrai dire. Et elle s’en voulait parfois terriblement de s’en foutre à ce point. Rei devait se sentir vraiment seule, sans elle. Mais, que peut-elle lui dire sans vendre directement ses secrets.

« Hm… M’man, t’es toujours là? »
« J’attends que tu aies quelque chose à me dire, en effet. »
« Roh, mais écoutes je… J’sais pas. Et puis zut, t’inquiètes pas trop pour moi. Je me suis fait des amis et… J’ai même été promue, j’ai beaucoup de subordonnés sous ma direction maintenant. Tu vois, j’ai bien plus de travail. Pour travailler sur mes projets. Ne t’inquiètes pas, ok? »
« Tu dois dire ça pour me faire plaisir, cela fait des mois que j’n’entends plus que ça. Es-tu sûre que tout va bien? »
« Évidemment que ça va, tu m'saoules, à la fin! Tu sais, t’es lourde, franchement! Tu veux quoi, que je me sente mal pour toi et que je m’excuse d’avoir pris ma vie en main toute seule comme une grande, c’est ça?! »
« Arrêtes, Julianne, ne m’énerves pas. Tu n’aurais pu ne même pas exister, je te rappelles. »
« Ça me fait une belle jambe, tiens! T’as rien trouvé de mieux à dire? Désolée de réussir ma carrière, vraiment, tu m’esclaves avec ton chantage affectif! »

Un bruit sec retentit à l’autre bout du fil. Julianne ne fut qu’à peine surprise, car cela fait un bout de temps que toutes ses conversations téléphoniques avec Reine finissent ainsi. C’est toujours le même sujet qui revient sur le tapis, et la mère autant que la fille ne peuvent plus s’empêcher de finir par se dire des choses qu’elles n’ont pas envie d’entendre. C’est peut-être vrai, en fait, Julianne devrait peut-être penser à aller rendre visite à sa mère. Si ses employeurs la laissaient quitter Enola pour des raisons personnelles, toutefois. Dans tous les cas, je jeune femme en avait plutôt marre et partit s’avachir sur le canapé avec un regard morne, tout en balançant son portable vers un autre coin de la pièce. Le téléphone se brisa, et Julianne ne réagit qu’à peine… Qu’importe, elle en trouvera un autre, ou alors, elle bricolera celui-ci pour le rendre plus performant encore. Elle passa ses mains sur son visage en grognant, et tendit le bras pour ramasser sa manette. Elle se sent patraque, ces derniers temps… Ses high scores sont en train de baisser dans le classement international! Alors que la geek se remettait tranquillement à jouer comme un zombie, son Magneti qui surveillait la conversation téléphonique depuis le début sorti de son coin et se rapprocha du portable tombé à terre, éparpillé désormais en plusieurs morceaux sur le sol. Il ne fallu que peu de ses pouvoirs électroniques et magnétiques  pour rassemblent les composants dans le bon ordre. Pourtant, Tochiro n’aime pas vraiment quand il s’agit seulement de réparer sans innover. Il est vraiment comme sa dresseuse, à ce niveau là. C’est bien pour ça que ces deux là se sont si vite entendus. Après avoir vu Julianne avec son air morne et un peu triste, le Magneti scruta les posters disposés dans l’appartement, ainsi que les figurines. Son œil unique semble prendre une expression plus espiègle, et il emporta avec lui les composants plus loin, avec dans l’idée de faire une surprise à l’ingénieure. Il avait bien gravé les images qu’il avait repéré dans le salon, et s’en alla re-bricoler le téléphone portable avec quelques pièces supplémentaires qui trainaient dans la chambre sur les étagères. Tout cela fit un peu de bruit, et c’est quand un éclair accompagné d’une petite explosion se produisit dans la chambre à coucher que Julianne sortit de ses pensées pour aller voir ce qui pouvait bien se passer. Tochiro était fou de joie, car il avait terminé juste à temps son œuvre d’art. Le Magneton qui venait d’évoluer tout en donnant toute son énergie dans cette petite reconstruction de portable fixa ses trois yeux sur l’ingénieure au regard brillant, et fit léviter le téléphone jusqu’à elle, fier comme un paon.

« Toto… c’est toi qui a fait ça? Mais c’est… »

Julianne avait du mal à croire ses yeux… Ce nouveau portable… était une figurine d’un de ses mecha favoris. Bien sur, la reproduction était approximative et la manufacture également, mais il n’avait pas fallu deux secondes à l’otaku pour le reconnaitre. Le tout restait tout de même sophistiqué pour une petite expérience : il suffisait d’appuyer sur un bouton, et un écran certes plus petit que l’ancien apparaissait en faisant tomber vers l’arrière la tête du robot, et il suffisait de faire glisser une plaque situé au niveau du torse du mecha pour trouver le clavier.

« C’est trop stylé! Euh, tu… tu l’as fait pour moi..? »

Le Magneton hocha la tête en signe d’affirmation. Julianne se mordit la lèvre, ce qui ne put l’empêcher de sourire bêtement, véritablement touchée par le geste adorable de son Pokémon. Avait-il fait ça pour lui rendre le sourire après sa conversation houleuse avec Reine? Dans tout les cas, c’est vraiment classe de la part de Tochiro. Julianne caressa l’un des trois corps sphériques de métal de son Pokémon en signe de reconnaissance, le félicitant au passage de son évolution.

« Merci Tochiro… Je vais le garder super précieusement… C’est un mega collector, que tu m’as fait là! »