Même si je dois avouer aimer rester dans la jolie chambre du centre pokémon, je pouvais clairement sentir la frustration de Sata. Depuis déjà quelques heures, ce dernier tournait en rond dans la chambre en lâchant des grognements à peine cachés. Et ça, ça voulait dire : « Allez bouges toi, on sort ! ». Hors je n’en avais vraiment pas envie. Le décalage horaire venait clairement de m’achever et ce n’est pas la nuit que je venais de passer qui m’avait requinqué. Mais étant vraiment trop généreux envers mon pokémon, j’avais finalement levé mes fesses et m’étais un peu activé. A mon rythme. Oui, je veux bien faire un effort, mais faut me laisser le faire tranquillement. C’est comme ça. Sous l’œil amusé du Malosse, je trainais les pieds dans la ville du nom d’Amanil. J’étais clairement fatigué, en train de dormir à moitié dans mes baskets. Et le pokemon à mes côtés, lui, gambadait joyeusement, heureux de pouvoir se dégourdir les pattes. C’était bien l’une des seules fois ou je pouvais voir Sata courir, la gueule grande ouverte, la langue pendante comme un petit chiot qui découvre la vie. Je ne l’avais presque jamais vu dans cet état avant. Surement le nouvel air qui lui faisait du bien. Avec un petit sourire, je m’accroupis pour me mettre à sa hauteur. Voyant que je m’étais arrêté, il revint vers moi avec un petit regard intrigué. Je lui fis une caresse sur la tête, apaisé.

« - On a fait le bon choix en venant ici, hein ? »

Une petite léchouille pour réponse, je me relevais donc plus motivé qu’avant. Si Sata était heureux, je n’avais aucun doute quant à ma capacité pour m’adapter à ce nouvel environnement. C’est vrai que même si j’avais choisi de quitter l’Angleterre sur un coup de tête pour éviter de rester dans cette ville au mauvais souvenir, j’appréhendais tout de même énormément de venir sur cette île. Je ne suis pas un dresseur et pourtant j’ai déjà reçu deux pokémons. Je ne sais pas encore comment trop gérer la situation. J’ai déjà réussi à « apprivoiser » Sata et il faudra que je m’adapte pour les deux nouveaux de l’équipe. En revanche, je sais une chose. Je ne vais pas pouvoir progresser dans la compétition si je me balade avec trois pokémons au total. Cela doit être possible mais j’en doute fortement. Autant dire qu’avec ma connaissance des combats, c’était quasiment impossible. Autant jeter l’éponge tout de suite. Sata se frotte à moi et me tire de ma réflexion. Nous sommes aux portes de la ville.

« - Dis Sata, il faudrait qu’on agrandisse l’équipe non ? »

Le regard blasé que j’ai en réponse me suffit. Seulement, je ne sais pas trop ou je dois aller. Après tout je suis encore nouveau ici, et comme je pensais qu’on ferait simplement une balade… Oui j’ai oublié ma carte alors que je ne connais pas l’endroit. J’avoue que ce n’était pas la chose la plus intelligente à faire mais je n’avais pas pensé déjà commencer l’aventure. D’habitude, je ne me lance pas aussi vite dans les choses. Il faut croire qu’Enola était synonyme de nouveau pour moi. Je pense que pour une fois, je suis satisfait de découvrir. Quelque part, ça me rend curieux. Peut-être que le psychologue avait raison. Je suis surement sur la voix pour découvrir vers quoi j'aspire.

Spoiler:

Sur les falaises, le vent ne cessait d’essayer de nous repousser. Ce n’était pas à Londres que les rafales de vent étaient aussi fortes. Ou alors j’avais simplement choisi mon jour. Sata s’était calmé une fois sorti de la ville et restait sur ses gardes, juste devant moi. Nous n’étions maintenant plus protéger par le brouhaha habituel que pouvaient produire les habitants. C’était calme et rien que pour cela, ainsi que le facteur inconnu qui se rajoutait à l’équation, Sata était prêt à réagir à chaque mouvement suspect de la nature. Ce n’était pas un endroit si effrayant que ça. Je m’attendais à voir d’énormes ravins impraticable, ou poser un pied devant l’autre relève de l’exploit mais finalement pas du tout. Forcément que ce n’était pas un endroit paisible ou l’on peut courir dans les champs, mais voilà. Le terrain était un peu adapté au Malosse qui d’ailleurs ne semblait même pas remarqué les roches sous ses pattes alors que moi dans mes baskets… Peut-être que j’achèterai de nouvelles chaussures. Tiens c’est une idée. Bon ce n’est pas tout, mais la marche ce n’est pas ma passion. Alors si on pouvait éviter de trop s’éloigner du chemin menant à la ville.

« - Hé Sata, évite d’aller trop lo… »

Je suis coupé dans mon élan par la pose que prend le pokémon feu. Il se plaque au sol et montre les crocs. En général, ça, c’est pour me signaler qu’il y a un truc pas cool devant qu’il a vu et que moi en tant qu’humain, je n’ai pas vu. Du coup, je m’avance à pas de loup jusqu’à arriver derrière lui pour pouvoir apercevoir enfin la cause de ce changement de comportement. Un meditikka en train de danser sur une musique (qui ne devrait même pas exister) et il avait l’air de s’éclater d’ailleurs ! Bon pas ses compagnons autour… Les pauvres. Est-ce que je dois faire part de mon immense générosité ou juste passer à côté ? Un bon dresseur se demanderait surement comment exploiter le potentiel de ce pokémon, mais comme je débute (oui je me sers d’excuse maintenant) je vais juste continuer mon petit bonhomme de chemin.

« - Il est inoffensif Sata, on a rien à craindre. Viens on continue. »

Dans un reniflement dédaigneux, le chien se relève pour se placer entre le pokémon sauvage et moi. Il fait barrière entre nous deux, et j’apprécie toujours quand il fait ça. C’est toujours quelque chose qui me rend joyeux quand j’ai cette preuve d’affection de sa part. De base avec son caractère, je ne m’attendais pas à ce que l’on finisse aussi proche mais j’en suis ravie. Je ne pensais pas retrouver un jour cette complicité avec un compagnon mais le temps m’a démontré le contraire. J’attends donc que ce fameux « temps » me montre que je suis capable d’accomplir quelque chose une fois dans ma vie.

Spoiler:

Finalement, c’est agréable de marcher. Observer les alentours n’est pas si déplaisant. Je suis une personne qui change assez vite d’avis, je m’en rends bien compte. Mais bon, c’est plutôt positif vu ce que l’on dit d’habitude. Je jette un coup d’œil à Sata. Ce dernier est frustré, je crois. Il marche en grognant doucement et ses griffes sont sorties alors qu’elles sont toujours rangées en temps normal. Je sais très bien qu’il aurait bien bondi sur le Meditikka pour se faire les crocs et surtout pouvoir comparer leur puissance mais ce n’était pas non plus mon but de sortir pour tabasser des pokémons. Autant s’entraîner avec un pokémon sauvage qui le désir. J’aurais la conscience un peu plus tranquille à ce moment-là et je n’aurais pas l’impression d’envoyer des pokémons à la boucherie. Oui, à mes yeux, le Malosse reste le plus féroce. Pas forcément par sa force pur, mais par sa volonté d’en découdre. Sur ce point-là, je n’aurais jamais à le forcer à combattre. Mon problème sera plus de le retirer de l’arène s’il est en difficulté. On travaillera dessus. Comme sa frustration d’ailleurs.

« - Tu n’allais tout de même pas te jeter sur lui alors qu’il n’était pas dangereux ?! »

Avec ce canidé, je ne tourne jamais autour du pot. Je n’en ai pas besoin, il me connait trop bien de toute façon. Il me lance un regard froid. Je n’aime pas quand il fait ça mais je ne peux pas le contrôler. Il faut qu’il comprenne de lui-même qu’il est en tort. Et ça mettra le temps qu’il faudra mais je ne m’acharnerais pas à lui faire rentrer dans sa petite tête. Il a beau m’apprécier, à trop lui taper sur les nerfs, je n’en ressortirais pas tout à fait intacte dans l’histoire. Les oreilles du Malosse se tournent soudainement vers l’avant et il hume l’air avant de poser sa truffe sur le sol. Il s’arrête en face d’un rocher et se lèche les babines. Je peux apercevoir derrière le rocher un pauvre Archéomire, tout tremblant. Visiblement, il s’était caché en attendant que l’on passe, mais c’était sans compter sur le flair de Sata.

« - Allez tu peux partir, on ne te…

- Grrrrrrr

- SATA, NON ! »

Sans même m’écouter le Malosse s’élança sur le pauvre pokémon, maintenant terrorisé. Il ne m’avait encore jamais désobéi à ce point-là. En même temps, nous ne nous étions jamais retrouvés dans une situation comme celle-ci ou je l’empêchais de se défouler. Et là il me faisait bien comprendre que je ne pouvais pas le retenir plus longtemps. Quelque part je me sentais assez misérable de ne pas pouvoir le contrôler comme je devrais le faire. Serrant les poings, je ne peux rien faire d’autre que d’observer la scène. Ou tenter...

« - STOP ! »

En croisant les doigts.

Spoiler:

Je ne pense pas pouvoir rivaliser avec un pokémon. Qui plus est quand celui-ci veut absolument en découdre. Cependant, ce serait échouer dès les premiers jours à la compétition si je laissais Sata me marcher dessus. Je n’ai donc pas le choix que de lui faire comprendre que je ne suis pas d’accord avec ses méthodes. Mon cri semble l’avoir stoppé et maintenant, il me regarde avec de gros yeux. Je n’ai jamais élevé la voix avec lui. Jamais. Alors surement qu’il ne comprend pas pourquoi aujourd’hui je le fais. Mais il va devoir s’y habituer car il est hors de question de que l’on continue de cette manière. Il couche ses oreilles en oreilles et alors que je le pense continuer, il se retire doucement du pauvre Archéomire. Ce dernier est toujours aussi effrayé et je m’en veux de lui faire vivre ça. Alors que Sata reculait doucement, un nouveau pokémon s’interposa. De la même espèce que le dernier. Il ne semblait pas particulièrement plus fort ni même moins effrayé mais je pouvais lire dans son regard qu’il en démordrait pour pouvoir protéger son compagnon. Courageux voilà ce qu’il était.

« - Sata, tu les laisses tout de suite.

- Grrr

- MAINTENANT ! »

S’il faut que j’en arrive à m’énerver, je le ferais. Pas de soucis. Définitivement choqué le pokémon feu recule jusque derrière moi, le ventre a ras de terre, complétement soumis. Désolé je me tournais vers les deux pokémons en face de moi. Ils n’avaient rien demandé et pourtant ils avaient du nous faire face aujourd’hui. Je ne serais même pas étonné de lire dans les journaux que deux Archéomire ont fini complétement effrayé par les humains ou les pokémons d’ailleurs. Je m’accroupis pour être à leur hauteur et surtout pour paraître moins « effrayant ».

« - Je m’excuse pour le comportement de mon ami. Nous n’avions pas du tout l’intention de vous faire du mal. »

Je leur adresse un petit sourire et me lève pour rentrer à Amanil. Hors de question de poursuivre la balade, on rentre. Je fais signe aux deux pokémons en m’éloignant pour bien leur montrer que je ne me retournerais pas pour venir les déranger de nouveau. Sata me suit de trois pas derrière, tête basse. Je ne lui adresse même pas un regard. L’île des premières fois. Je lui fais bien comprendre que ça suffit les bêtises. Alors qu’il remonte à mes côtés et qu’il tente de croiser mon regard, je ne lui réponds qu’avec une expression faciale plutôt froide à laquelle il n’est pas du tout habitué. J’ai vraiment été déçu aujourd’hui. Je ne pensais pas qu’il se comporterait de la sorte une fois sur une île pleine de pokémon sauvage qui eux sont libres contrairement à lui. J’avoue que je ne comprends même pas ce qui lui ai passé par la tête. Il n’est pas du tout comme ça d’habitude. Ses instincts se réveillent peut-être mais il devait être capable de se maîtriser. Bon au moins nous savons sur quoi travailler maintenant.

« - Je suis vraiment déçu de ton comportement aujourd’hui Sata. Va falloir que tu bosses sur tes instincts. »

Il me répond d’un triste hochement de tête. Je tiendrais encore une heure ou deux simplement pour lui faire comprendre que sa petite bouille ne m’attendrira pas cette fois. Espérons que la prochaine fois se passera mieux. Maintenant qu’on sait comment ça se passe, il n’y a pas de raison.

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