Je commence un peu à me languir de ce deuil qui m’assaille depuis l’été. Je n’ai plus de larmes pour pleurer. Je suis pourtant encore si triste. J’aimerai me remettre très vite de ce choc pour donner au bébé le plus d’énergie positive possible. J’ai appris récemment que les bébés s’imprègne de tous les sentiments de leur mère reliée par le cordon. Il faudrait que je sois heureuse, mais la vie m’en empêche. Il n’y a qu’une sortie de secours. Son nom est Adélia. C’est ma voisine de palier. Elle m’aide beaucoup depuis l’accident. Elle m’offre souvent le réconfort dont j’ai besoins. Une amie à qui parler et manger. Je me sens moins seule avec elle. Seulement, je ne lui ai jamais révélé ma grossesse. Et mon ventre commence à gonfler. Je me regarde sur le miroir, toujours la même tête. Je devrais changer un peu. Je porte une robe orange qui cache un peu la taille de mon ventre. Je n’ai pas envie qu’on vienne me plaindre à propos de ça. Je me retourne ensuite vers mon balcon. Là où je cultive des légumes. Ca me fait du bien de bosser sur quelque chose, et au moins. Je n’ai pas à sortir pour faire les courses.

-Kate, arrose un peu les tomates s’il te plait.

Mes compagnons sont d’une grande aide. Sans eux, je ne sais pas comment je ferai pour vivre. Je serai peut-être devenue folle. A me parler à moi-même tout le temps. A ne pas savoir ce qu’il y a de bien ou de mal. Rick nous regarde toujours en train de travailler. Il n’est pas flemmard, loin de là. Il aime juste être en hauteur pour observer et intervenir à la moindre menace. C’est un pokémon très doux, qui n’a pas peur de grand-chose. Kate, est un peu le contraire. Elle aime pas attendre le moment venu, elle veut tout faire d’un coup. Elle arrose la terre rapidement et aimerai que les tomates mûrissent de suite. Impatiente celle-là. Elle est si drôle. Je mélange la terre avec mes mains lorsque j’entends sonner. Rick, d’un seul coup d’aile, part devant la porte et attends que j’ouvre. Ayant les mains sales, j’essaye tant bien que mal d’ouvrir la porte. C’est Adélia, elle me sourit, tenant un gâteau dans les mains. Je la fais entrer puis lave mes mains.

-Je suis très heureuse que tu sois là. J’étais en train de m’occuper de mes tomates.

Je tente de sourire un maximum. Il faut qu’elle croit que je vais de mieux en mieux. Elle doit se faire du souci la pauvre. Je met de l’eau à bouillir et attends que le thé soit prêt. J’installe mon invitée surprise sur la table du salon et commence à découper le gâteau.

-Ça faisait longtemps qu’on ne s’était pas vue. Tu sais que je suis arrivée à sortir de l’appartement pour faire un tour la semaine dernière. Un exploit.

Je sers une part à Adélia puis me prends une assiette tranquillement. C’est la seule qui s’est occupée de moi depuis l’accident. Elle mérite quand même un peu de compassion. Elle est si jolie en plus. Cette fille est une envoyée d’Arceus, c’est sûr. Je pourrais même en écrire un livre. Cette pensée amène mon regard aux feuilles blanches et au stylo qui trônent mon bureau que je n’ai pas utilisé depuis des lustres. J’ai peur de réécrire. Sans savoir pourquoi.

-Alors quoi de neuf ?

Je lance un sujet de conversation dans le but qu’elle me parle. Je n’ai pas trop envie de le faire. Elle n’a rien à voir avec ça, bien sûr. C'est juste que je ne sais pas quoi dire car je n'ai rien à dire. Sa vie a l'air plus palpitante que la mienne.

La vie fait changer pas mal de chose à tout le monde. Chaque personne dans ce monde a vu son quotidien basculer un jour ou un autre. Moi, c’est arrivé deux fois. A la mort de mon père tout d’abord puis à la mort de ma grand-mère, de mon copain et à l’annonce de ma grossesse. Bien sûr qu’il y a des côtés positifs, j’ai pratiquement toujours été heureuse. Mais l’annonce qu’Adélia s’apprête à me faire me donne un mauvais pressentiment. Elle se sent coupable de quelque chose. Si elle tient à m’en parler, c’est que ça va me toucher directement. Qu’est-ce que ça peut être ? Elle hésite tout d’abord avant, d’enfin, révéler la vérité. Elle déménage dans pas longtemps. Je pousse un petit cri de soulagement.

-Mon dieu, tu m’a fais peur !

Bien que cette nouvelle ne me rende pas heureuse, sa tête d’enterrement me faisait présager la mort de quelqu’un ou la destruction de quelque chose. J’imagines bien que si elle déménage, ce n’est pas à Amanil. J’en suis sûre, elle n’en serait pas aussi triste. Je comprends maintenant le sens de son mot coupable. C’est elle qui m’a aidé depuis l’accident, elle a toujours été là pour moi. Peut être qu’en déménageant elle pense devoir m’abandonner à mon triste sort et qu’elle regrette de faire ce choix. A vrai dire, ça me rend triste mais si c’est pour son bien.

-Je te mentirai si je te disais que je suis complètement heureuse mais sache que je ne me sens, en aucuns cas, abandonnée.

Je me lève et pousse ma chaise juste à côté d’elle pour me rassoir aussitôt. Je la prends dans mes bras. Qu’est-ce que je vais faire sans elle ? J’ai longuement songé à partir moi aussi. Cette vie à Amanil ne me plait plus du tout et c’est vrai qu’un peu de changement me ferait du bien. Kate et Rick seraient totalement d’accord et me pousseraient presque pour que je le fasse dans la semaine qui vient. Elle a été une grande amie et le sera toujours. Je voulais lui rendre la monnaie de sa pièce en l’aidant de son côté mais je pense que ça ne se fera jamais.

-Je sais pas comment je vais faire pour ne plus pouvoir te voir mais je pense y arriver. Si on garde contact bien sûr.

Je lui fais un clin d’œil avec un large sourire. Vous savez, ce genre de sourire qui montre faussement que vous êtes heureux. Je suis contente qu’elle ait prise une décision de ce genre et que ça n’a pas été facile pour elle. Cela montre que c’est une amie puissance mille. Jamais je ne pourrais ne pas avoir de contact avec elle. Il faut que l’on soit amies encore.

-J’aimerai pouvoir prendre le même choix que toi. Mais j’ai bien trop peur de ce monde. Avec ce régime et ces résistants qui se battent tout le temps. Si tu savais à quel point je ne me sens pas en sécurité.

Je mens un peu. Bien sûr qu’elle sait. Tous les habitants de cette île le savent. C’est juste qu’avec le bébé, j’ai encore plus peur. J’aimerai qu’il ai un bon avenir, qu’il puisse aller à l’école et qu’il puisse avoir un bon métier accompagné des gens qu’il aime et de nombreux pokémons. Il faudrait d’ailleurs que je songe à prendre rendez-vous avec mon médecin pour voir si il va bien. Tout ce stress et cette tristesse qu’il emmagasine depuis le début ne doit pas le rendre heureux. Je reprends mes esprits lorsque je vois ma main droite caresser mon ventre. J’écarquille les yeux et regarde si Adélia n’a pas vu. Malheureusement, elle a remarqué. Je dois faire comme si de rien n’était. Elle va se sentir encore plus coupable.

-Je vais sans-doute faire le tour de l’île pour pouvoir me remettre à écrire. Ça va me donner de l’inspiration j’en suis sûre. Peut-être qu’on se recroisera. Tu vas où d’ailleurs ? C’est pour rejoindre un garçon ?

J’étends le sujet pour l’éloigner de ma grossesse. Elle ne doit pas savoir. Elle ne le saura que quand j’en aurai décidé. Peut être que dans les prochains mois à venir cette guerre va s’arrêter. C’est à ce moment là que je lui révélerai la vérité. Je n’ai pas envie qu’elle soit encore plus triste de prendre ce choix. Oui je resterai seule ici, oui je serai sans doute triste. Mais son avenir compte plus que le mien. C’est une magnifique jeune femme.

Elle n’a rien remarqué. Ouf ! Elle se sentirai vraiment coupable. Elle est si heureuse pour moi, elle me dit même que ça me fera du bien. Oui…mais non. S’il n’y avait pas le bébé. Je peux penser beaucoup de chose avec des si. Mais celle là je n’y avais jamais pensé. Si je n’étais pas enceinte, si j’étais encore libre de tout mouvement, si je ne commençais pas à avoir des petites nausées. Et si, et si, et si. J’en ai marre. Je devrais lui dire. Elle me raconte ensuite qu’elle va bien rejoindre un homme là-bas. Elle semble gênée et elle rougit beaucoup. Comme c’est mignon. Elle nie sa véritable intention d’aller à Zazambes en disant que c’est pour avoir un plus grand espace pour ses pokémons. Je la croit à moitié. Je sourie. Elle est tellement mignonne. Je devais sûrement être pareil avec Lucas. Dès que je pensais à lui ou que je le voyais, je me sentais toujours gênée. Malheureusement, il est décédé. Et depuis, cette gène est partie s’enterrer avec lui.

-J’espère qu’il sait la chance de t’avoir.

Je lui fait un clin d’œil. Elle va partir. Elle peut se téléporter, soit, mais ce ne sera plus jamais pareil. J’aimerai bien m’inviter chez eux rien que pour avoir sa compagnie. Mais il faut que je grandisse, que je mûrisse encore plus. Il faut que je voyage. Mais j’ai encore ce bébé à m’occuper. Les médecins ont dits que ce sera entre Avril et Mai 2016. Je ne pourrais donc pas partir avant, au minimum, Juillet. Je suis donc condamnée à rester ici pendant de long mois. Je regarde alors Adélia. Je devrai quand même lui dire. Peut importe sa réaction. Il ne faudrait quand même pas qu’elle découvre ma grossesse lorsque j’aurai accouché. J’aurais sans doute besoins d’une présence à ce moment là. J’essaye plusieurs fois de commencer ma phrase mais je ne sais jamais comment la structurer. Dois-je dire d’un seul coup que je suis enceinte ? Ou alors lui faire comprendre ? Je n’en sais rien. Il faut trouver quelque chose.

-Est-ce que tu pourrais venir me voir tous les jours d'Avril et de Mai, s’il te plait ?

Je me sens complètement conne, lui dire simplement ce qu’il se passe serait beaucoup mieux. Mais son départ l’attriste déjà, pas besoins de rajouter encore plus de tristesse. Je sais qu’elle aurait aimé être là tout le long de ma grossesse. Mais je la préfère heureuse à Zazambes dans les bras de celui qu’elle aime plutôt qu’avec une dépressive en cloque qui a perdue toute sa famille. D’ailleurs, elle ne m’a jamais trop parler de la sienne. C’est elle qui posait les questions, moi je n’osais jamais. Je ne suis qu’une bonne à rien.

-Je vais avoir besoins de toi à ce moment là, sinon vient quand tu veux. Et ne préviens pas, comme ça je serai encore plus heureuse de te voir.

Je lui lance encore un sourire. Au fond de moi, j’espère vraiment qu’elle a comprit. J’espère qu’elle pourra quand même être là. Et qu’elle pourra m’accompagner dans ce court moment.

Je pourrai partir tout d’abord vers les montagnes du Sud et à Anula. Ce sont les deux seuls lieux proches d’Amanil. Je pourrai donc rester près de chez moi tout en explorant l’île. Ça ne me fera aucun mal. Je pourrai ainsi écrire ce livre que je veux tant faire du début à la fin. Ce bébé ne me laisse pas le choix de toute façon. Jusqu’à ce qu’il naisse et quelques mois après,  je pourrais faire le tour de mon pays. Et je serai libre de pouvoir voyager avec mon fils, de m’éloigner de cette guerre sans fin et vivre une vie sans tragédies. J’en ais déjà eu beaucoup trop. Tout d’abord, même sans m’en rappeler, ma mère. Ensuite mon père à Baguin. Après…ma grand-mère et mon amour. J’espère être la prochaine sur la liste. Je ne veux pas voir mon enfant mourir jeune. Il n’en a pas le droit. Il vivra heureux jusqu’à un âge où la vie ne compte plus. Je veux qu’il vive, tout simplement.
Adélia me promet tout. De venir sans prévenir chez moi n’importe quand et de ne pas me laisser seule ici. Elle me questionne ensuite sur les deux mois que je lui ais indiqué. Elle me regarde, elle est inquiète. J’espère qu’elle commence à comprendre. Je l’espère tellement. Je touche alors mon ventre. Il a un peu grossi, on distingue une vie à l’intérieure. La vie de mon fils donnée par mon copain mort. C’est le plus beau cadeau qu’il a pu me faire. Les larmes ne me montent pas aux yeux. Non, je ne suis pas triste d’être enceinte malgré mon jeune âge, malgré ma solitude dans ce monde. Je l’assume pleinement, je suis fière de porter ce fils qu’on a failli ne jamais avoir. Je suis fière de pouvoir donner la vie.

-Avant de partir, Lucas m’a laissé un cadeau.

Je la regarde avec un sourire gêné. Elle ne doit pas s’en vouloir de quitter Amanil. C’est un lieu malsain, qui regorge de malheur depuis l’arrivée du Régime. Elle a raison de changer de lieu. Les plages de Zazambes vont mieux lui correspondre que la puanteur de cette ville.

- Je suis enceinte Adélia.

Je prends la main de ma seule amie et la pose délicatement sur mon ventre. Je lui fais sentir mon fils qui grandit peu à peu en moi. Il se forme, il se prépare à devenir le plus beau bébé du monde. Il se prépare à vivre une chouette vie. A connaitre toute la beauté de ce monde et de sa face cachée. Celle qui obscurcie la nuit et qui la rend magnifique.

-J’hésitais à te le dire. J’avais peur que tu te sente encore plus coupable. Mais…j’aurais vraiment besoins de toi à ce moment là. Je ne connais que toi.

Je l’enlace de toute mes forces. Elle va me manquer. Je sais que je pouvais, que je peux et que je vais pouvoir compter sur elle jusqu’à la fin. C’est une magnifique personne, jamais elle ne m’abandonnerai. J’espère qu’elle sera heureuse pour moi et mon fils.

Je me rappelle m’être affalée sur une chaise en apprenant la nouvelle. Je n’étais enceinte que d’un mois et Lucas était mort depuis quelques semaines déjà. Je ne savais pas comment réagir. D’une part j’étais malheureuse d’en être arrivée là à ce moment précis, puis d’une part, j’étais heureuse car je pourrais revoir les traits de mon défunt homme sur le magnifique visage de mon fils. Je me posais également des milliards de questions. Qu’est-ce que j’allais bien pouvoir faire seule avec un enfant ? Et dire que je n’ai même pas encore vingt ans. Si j’avais su mon avenir je n’aurais rien fais. Je crois que j’aurais tout fait pour éviter l’homme qui a fait chavirer mon cœur pour qu’il puisse vivre plus longtemps. Car j’en suis persuadée, si je ne l’aurais pas rencontrée, il serait toujours vivant. Bien que ma vie n’aurait pas été aussi magique que tous ces instants passés avec lui.
Adélia semble choquée. Tu m’étonnes. Je viens de lui lancer une bombe. J’espère vraiment que je n’aurais pas d’impacts sur elle comme j’en ais eu avec Lucas. Je crois qu’au fond, et ce depuis longtemps, tous les membres de ma famille sont maudits. Ma mère est décédée à ma naissance, mon père a été assassiné à Baguin pour que cette ville reste libre, ma Grand-mère est morte pour pouvoir m’offrir une surprise. Enfaîte, je crois que c’est moi la maudit de cette famille car après tout, ils sont tous mort pour moi. Ma mère voulait me donner la vie, mon père la protéger et ma Grand-mère la combler. Qu’est-ce que je peux bien faire ici ? Pourquoi suis-je encore là ? Ais-je une mission à faire ou quelque chose du genre ? J’aimerai tellement qu’on me réponde.

Ma voisine et seule amie me propose alors quelque chose que je pensais impossible. Enfaîte, je n’y avais jamais pensé. Peut-être par peur de trop m’imposer ou de me taper l’incruste chez elle. Mais là, les mots sont là. Sa phrase fut si rapide mais mon cœur a eu le temps d’accueillir toute la tendresse que ces mots me lançaient. Je regarde dans le vide un instant. Que dois-je faire ? C’est vrai que je n’ai plus rien ici. Je n’ai que des souvenirs qui, pour l’instant, ne font que ronger mon être petit à petit. Mais j’ai peur pour Adélia. Elle tente de m’aider. Et pour l’instant, tous ceux qui ont voulu le faire sont mort. Je ne veux pas qu’elle meurt ou qu’il lui arrive quoi-que-ce-soit. Mais pourtant, mon intuition me dit qu’il faut saisir cette chance. Non seulement elle n’aura pas besoins de se téléporter de l’autre bout de l’île mais elle sera là H24 avec moi. Je ne sais pas. Non, je ne peux pas. Du moins pas maintenant.

-…

Elle me félicite ensuite. Comme s’il fallait vraiment le faire. Je lui sourie un instant en guise de remerciement puis je m’accroche à ses paroles. Ce bébé m’offre quelque chose sur laquelle m’accrocher. Non seulement l’élevage qui est maintenant mon métier, mais sur quelque chose en quoi je peux croire pour une éternité. Je ne sais pas s’il aura tout le bonheur du monde. J’essaierai de lui en donner un maximum. Je prends les mains d’Adélia. Elle me réconforte. Que dois-je faire ? Je sens alors quelques coups dans mon ventre. Mon bébé semble vouloir choisir à ma place. Et je connais sa réponse, je la sens. Ses battements de cœur sont en harmonies parfaites ceux du mien. Nous sommes sur la même longueur d’onde. Je ne prends pas ce choix égoïstement. Je prends ce choix pour nous deux.

-Merci infiniment Adélia. Je…je ne sais pas quoi te dire. Si ça ne te déranges vraiment pas, je veux bien m’installer chez toi mais…j’ai quelques trucs à faire ici avant. Il est juste question d’un ou deux mois. Promis je viendrai vivre chez toi avant l’accouchement.

Des larmes sortent de mes yeux. Je ne sais pas si c’est le bon choix mais je préfère agir ainsi. Je pleure de bonheur. C’est bien la première fois depuis longtemps. Maintenant, je suis heureuse. Heureuse de vivre, heureuse de contempler la plus belle facette de l’Homme. Celle de la bonté, celle qui réchauffe le cœur. Celle qui donne du bonheur pour être heureuse. Celle qui permet de vivre une vie aussi belle que chaleureuse.

Il faut que je m’évade un peu. Je devais me promener vers les montagnes dans quelques jours et surtout voir mon médecin pour l’échographie. Je dois faire ces deux choses avant de partir. J’ai allongé le temps à un ou deux mois. On ne sait jamais ce qui peut arriver. Je n’ai la force de sortir que pour aller à l’hôpital. Les montagnes me font peur et je repousse sans cesse la journée tant attendue. Je sais que je vais encore me décourager pour cette semaine mais je dois le faire avant de partir chez Adélia. Il faut que j’arrive à tourner la page d’Amanil. De mon arrivée avec ma Grand-mère, de celle de mon copain dans l’appartement et la mort de ceux-ci. C’est assez dur pour l’instant et je dois absolument me concentrer dessus avant de faire autre chose. C’est vital.

-J’aime beaucoup.

Adélia me montre quelques photos de sa demeure où je vais passer une partie de ma vie. Elle est magnifique et surtout, possède une véranda. Je crois que pour moi, c’est l’essentielle dans une maison. On peut être à l’intérieur tout en profitant de l’extérieur. Ça va me changer de mon petit appartement ici. Déjà, je n’aurai pas des problèmes de voisinages car la maison se trouve dans la campagne de Zazambes, je n’aurais plus le bruit et la pollution de la ville. Et surtout, la nature est présente. Je crois que je ne peux pas rêver de mieux.

-Si tu veux, je peux t’aider à la rénover. Il doit me rester un peu d’économie que je n’utilise pas.

Je ne suis, en aucuns cas, dérangée de le faire. J’aime même l’idée. Elle me propose de l’héberger alors autant l’aider. Bon, peut-être pas tout de suite vu l’état de mon ventre mais après l’accouchement je serai d’attaque. Je vais changer de vie. Cette idée m’enchante grandement. Je ne penserai plus à toute cette vie ici. Je vivrai avec mon fils et m’occuperai de son éducation quant à Adélia je sais qu’elle fera une colocataire géniale. Je pourrai enfin écrire mon livre que j’aimerai pouvoir publier. Je sens qu’une nouvelle vie s’offre à moi. Il faut que je prenne les devants, mais ça me fait quand même peur. J’ai peur de quitter Amanil. Il y avait une certaine sécurité que je retrouverai sans aucun doute à Zazambes mais j’ai l’impression que si je quitte l’appartement, je ne me souviendrai plus de ma famille et de mon passé. C’est peut-être normale.

-J’ai très bien compris pour le jardin et je suis d’accord mais, tu as parlé de quoi avant ? De situation amoureuse ?

Je lui sourie à pleine dent et sèche mes larmes. C’est une situation qui va beaucoup me plaire. Aider ma meilleure amie dans sa vie de couple. Pourquoi pas, ce n’est pas gênant. Et garde le silence. Non, ce n’est pas un sujet pour un autre jour. Compte sur moi pour qu’on en parle avant ton départ. C’est sûr, curieuse comme je suis.

-Flash info People d’Enola, la belle Adélia Frey serait en compagnie d’un jeune homme mais refuse catégoriquement d’en parler. Qui est-il ? Nous pouvons le savoir grâce à notre reporter Camélia Queen partie interviewée la principale intéressée.

Je rigole devant Adélia, ayant pris ma cuillère comme micro, et des tonnes de questions viennent dans ma tête. Si je lui les pose tout de suite, elle ne saura même pas par laquelle commencer. Elle ne veut pas m’en parler de suite mais si je peux en soutirer quelques informations, moi je dis pas non. Je l’enlace, heureuse de pouvoir enfin servir à quelque chose depuis l’accident l’été dernier. Heureuse de pouvoir vivre comme avant tout ce qui s’est passé dans ma vie. Tout simplement heureuse de vivre, et ça, ça fait longtemps.

Je fais soudainement un point dans ma vie. J’ai trop souvent été malheureuse, et quand je pensais enfin être heureuse, la tristesse venait toujours prendre le dessus. A compter de maintenant, je ne faiblirai plus. Je serai forte pour protéger Adélia, le bébé et moi-même par la même occasion. Vivre chez elle sera peut être la meilleure chose qui peut m’arriver en ce moment. Je ne risque plus de penser à ma vie d’avant. Bien sûr les souvenirs seront toujours là, mais je serai en faire bon usage. Au lieu d’être nostalgique je serai heureuse, heureuse que tout ça soit arrivé.

-Ne t’inquiète pas pour la chambre. Avec l’argent de la vente de l’appartement et tout ce que j’avais déjà commencé à acheter, tout sera réglé rapidement.

Elle me raconte ensuite ce qu’il se passe concrètement avec le garçon dont elle m’a parlé quelques minutes plus tôt. Je pensais qu’ils étaient à un stade plutôt élevé de leur couple mais je me suis bien trompée. Ils ne sont qu’au début. Le meilleur moment. Et dire que je pourrai être là pour assister à la scène ! Je l’a sens gênée. C’est mignon. Après tout, il ne s’est pratiquement rien passé entre eux. J’ai déjà tant de conseils à lui donner. Déjà, il faudrait qu’ils se voient plus souvent. Ce qui, apparemment, est le sujet de son déménagement. Ensuite, ils doivent avoir des rendez-vous dans des lieux romantiques. Je suis sûre que Zazambes en a tout un paquet. Après, tout dépend d’eux. S’ils ont vraiment envie de continuer dans une voie d’amitié, ils pourront le faire. Cependant, s’ils ont envie d’aller plus loin dans leur relation… Oh, je me perd. J’ai encore du temps avant tout ça. Il faut que je fasse ma balade à côté de la montagne comme je me l’étais promis puis que je vendre l’appartement et que je déménage. C’est une nouvelle étape qui va commencer et, avant cela, il faudra attendre un ou deux mois avant de pouvoir définitivement partir d’Amanil. Mais avec les pokémons d’Adélia, je suis sûre que tout cela sera fait en un rien de temps. Si certains d’entre eux peuvent se téléporter, ce sera un jeu d’enfant.

-D’accord, pas de soucis. J’y songerai.

Je la remercie pour le gâteau puis me lève pour l’accompagner jusqu’à la porte. Je l’enlace une dernière fois puis la laisse partir. J’ai compris la leçon maintenant. Il ne faut pas pleurer parce que telle ou telle chose est terminée, il faut sourire parce c’est arrivé. Et que rien au monde ne pourra gâcher ces souvenirs qui resteront, à jamais, graver dans notre mémoire. C’est ainsi que je verrai la vie maintenant. C’est ainsi que je vivrai.