Je suis fier de vous dire que j’ai véritablement des progrès au niveau self-control. Depuis ma défaite contre Solène Weber, pour être précis, j’ai eu droit à deux ans ou je me suis forcé à me modérer et à mieux me contrôler pour le bien de ma survie. Aussi, je viens de dézinguer un autre mec, ce qui m’a passablement apaisé pour un petit moment. Seulement, la chaleur fait la vie dure à tout le monde, et ce merdier n’arrange en rien nos affaires. Je ne suis pas quelqu’un de vraiment stressé, au fond. Colérique et impulsif, oui, impatient, aussi. Je connais l’anxiété, mais mon insouciance m’empêche de redouter beaucoup de choses qui pourraient pourtant me porter préjudice. Je serre les dents lorsqu’il faut remonter le camion jusqu’au péage, et sortir les corps du véhicule pour les aligner à terre, en le couvrant d’un drap, conformément à la procédure. En allant appeler les supérieurs, je commandite à Jake de surveiller les corps et de se reposer en attendant. Le gars a déjà l’air sur le point d’exploser même si sa Kangourex qui nous fut rudement utile tente de le consoler. Après avoir téléphoné, je fais les poches des cadavres, dans l’espoir de trouver une preuve du véhicule volé, ou d’un commanditaire de leur mission de résistants. Si on trouve ça, on pourra sans mal faire tenir notre histoire debout. En gros, on sera tiré d’affaire bien plus rapidement. Car, je ne suis pas défaitiste, mais entre moi, le psychopathe qui a déjà fait preuve d’insubordination, et Jake, le simplet… Ouais, ils nous faut vraiment ces preuves. J’examine aussi les environs, à commencer par relever la barrière cassée, notre collège. Je garde aussi le flingue et les armes de côté, sur lequel ils pourront identifier les empruntes. Le cadavre qui était dans le camion, mort depuis certainement plus de temps, pourra également témoigner. Enfin, j’espère.

Je tergiverse longtemps, et pendant ce temps, le gros commence à craquer. Et c’est un peu la goutte d’eau pour moi aussi. Je ne suis pas un baby-sitter. C’est pas dans mes cordes, de consoler les gosses! J’en ai déjà assez à la maison. Je commence par soupirer avec exaspération, et serre les poings, en continuant ma fouille.

« Fermes-la, et calmes toi. »

Dis-je, froidement, d’une voix presque menaçante. Il est dans notre interêt à tous les deux qu’il cesse de s’agiter. Je me contrôle, alors, il peut le faire aussi. Pas question qu’il commence à chouiner en espérant un câlin. Je n’ai toujours rien trouvé, et je vais vérifier dans la cabine de conducteur. Un « oh putain, ouais! » de soulagement m’échappe lorsque je trouve un dossier bien caché dans un double-fond de la boite à gants, résumant toute la mission de nos amis. Je rejoints Jake et m’asseois sur le bord de la benne, en agitant le dossier.

« Eh, grosse vache, arrêtes de chialer, on est sauvés, avec ça ! »

Un véhicule s’approche en déplaçant des nuages de poussière au loin. La cavalerie arrive. Je descend de ma benne, et vais poser le dossier avec les autres pièces à conviction.

« Dis-leur juste ce qui s’est passé. L’arrivée du camion, le gars du péage qui s’est fait tuer, le délit de fuite… Puis surtout, dis bien qu’on a tout mis en œuvre pour les arrêter, mais qu’il nous a fallu en arriver à les tuer pour que le camion n’atteigne pas  les ruines. »

Les supérieurs arrivent et commencent leur investigation dès maintenant, déplorant la perte d’un soldat et d’un officier, mais croient plutôt rapidement à notre histoire avec les preuves que nous avons pu trouver. Ils nous interrogent ensuite un par un, histoire de voir si nos versions collent l’une avec l’autre. Voila où j’en suis désormais, à l’ombre, en train de boire un coup, en attendant qu’ils en finissent avec Jake. Celui-ci ne tarde pas à sortir, et je me tourne vers lui pour l’interroger à mon tour.

« Tu t’en es sorti? »

Bordel, faites qu’ils aient eu assez et qu’on puisse enfin rentrer chez nous. La nuit va bientôt tomber, à force, bordel.

WAZAAAAA!:

J’ai rarement été aussi content de voir un être humain et de l’entendre ouvrir son clapet, sérieusement. C’aurait été pour entendre une sale nouvelle, les choses seraient totalement différentes, je crois. Mais là, les mots de Jake sonnent à mes oreilles comme de doux et magnifiques cris de douleur comme ceux que j’entends si souvent dans  mon très cher bloc R2. Je me suis même un peu imaginé courir tout nu dans des nuages sanglants (#dark) avec une couronne de fleurs sur la tête, pour que vous visualisiez l’état de béatitude dans lequel le soulagement m’a mis. L’essentiel, c’est que je vais pas encore me prendre trois mille avertissements, et potentiellement esquiver le peloton d’exécution.  Je pense que le témoignage de Jake a du jouer en ma faveur… C’est le genre de tête de turc si facile a manipuler par les idées du Régime qu’on est certain qu’il ne mentirait pas. Et d’ailleurs, je ne lui aie pas demandé de raconter des bobards.

Mais la meilleure nouvelle, dans cette histoire, je crois que c’est ce qu’il avait l’air de m’annoncer comment un truc mauvais. A savoir, qu’on sera plus douaniers. En entendant ça, je me mets à sourire avec toutes mes dents, puis j’explose de rire, je sais pas si c’est le soulagement ou la joie mais…

« Putain mais c’est géniaaaaaaaaaaal! »

Je cris « wouhouuuuuu » en levant les bras, je saute sur mes pieds et sautille un peu au milieu du chemin, avant de me diriger vers le fourgon qui va nous ramener à la base avec tout le monde, lalala. Les supérieurs m’observent d’un sale œil en grognant, mais franchement, rien ne pourra entamer ma joie. Oui, lunatique que je suis, me voila soudainement d’excellende humeur. Toujours guilleret, je retourne marcher à côté de mon collègue avant de nous installer à l'arrière du fourgon qui démarre en direction de la base principale.

« Fiou! Eh bah, j’crois qu’avec tout ça… Ça mérite que je te paye un verre un de ces jours! »

Je vous l’avais dit : ne plus être douanier, ça m’a vraiment mis de bonne humeur. De TRES bonne humeur.