« C'est toi ou moi, l'un de nous est de trop! »

''Dégage'', de Bryan Adams.
 
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 Icarus |PV Lucas|

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Cassey G. Banks
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MessageSujet: Icarus |PV Lucas|   Icarus |PV Lucas| EmptyLun 21 Mar 2016 - 2:00



Icarus
feat. Lucas J. Turnac

La robe noire ondule contre mon corps au rythme effréné d’une brise mordante. À mes pieds, Amanil s’agite, sa voix porte dans une cacophonie de sirènes et de klaxons. Elle pulse, mord et s’entraîne dans sa danse inexorable. J’en suis les mouvements, nonchalamment appuyée sur cette même rambarde où j’ai pensé l’impossible, l’esprit brouillé d’incertitudes pendues dans le vide. La cité, indifférente, poursuit sa course dans ses rugissements habituels. Le ciel nocturne s’est recouvert de nuages que seule la pollution extrême d’une ville toxique peut provoquer. Je le scrute dans l’ambition de calmer l’état de mes doutes, en sachant pertinemment qu’il ne s’éclaircira pas, pas ce soir. Je n’aurais jamais cru retomber aussi bas depuis les événements de juillet dernier, jamais cru que je pourrais douter à nouveau de cette façon, même si tout est différent. Si la voix d’une défunte amie s’est tue pour me laisser dans une paix approximative, le monde des vivants à présent m’aspire, me taraude et me tiraille entre plusieurs avenues aux issues impossibles à calculer. Mère Isolde m’a répété que je n’ai pas à me limiter à un seul chemin dans ma vie, que plusieurs possibilités s’offrent à moi et elle avait bien raison. Si bien qu’à présent j’en perds le fil, je ne sais plus très bien qui je suis ou ce à quoi j’aspire. Je pense à Alexander et à sa famille imparfaite, à la façon dont il jongle avec diverses identités et parts de lui-même pour correspondre à sa vie actuelle. Je pense à Clive, emprisonné dans les prisons du Régime, l’organisation pour laquelle il se dédie depuis toujours. Je pense à mon père, à la déception dans sa voix lorsqu’il s’adresse à moi, encore et toujours cette déception.

Je ne sais plus où j’en suis. Lorsque la sonnerie du téléphone a retentit cet après-midi et que son numéro s’est affiché, j’ai cru mourir de l’espoir d’avoir à nouveau une conversation saine avec lui, de l’entendre dire qu’il m’aime malgré tout ce que je puis être devenue à son insu. Mon cœur battait avec une frénésie indomptable, jusqu’à ce que j’entende l’accusation dans ma voix lorsqu’il m’a questionné sur les articles, parus dans le reste du monde, au sujet des ruines du Titak et la supposée puissance cachée que le Régime aurait obtenu. Je n’ai pas su lui répondre. Je ne détiens pas les réponses qu’il attend, qu’ils attendent tous. Pourtant j’ai la mission encore et toujours de dissimuler la vérité à une population qui, cette fois, pourrait bien être en véritable danger. Je n’ai pas su lui dire, à ce père désapprobateur, que moi aussi je crains ce qui va suivre, que je suis aussi estomaquée et inquiète par ce qui se trame. Que je n’ai plus aucun repères au sein d’une organisation en laquelle j’ai toujours cru jusqu’au plus profond de moi-même. Que j’ai peur, peur de douter car je me retrouve hésitante devant ce qui était une certitude dans mon existence, une si rare certitude. Que je suis en colère, que j’en ai marre des secrets et des paraboles de mon supérieur. Que moi aussi j’ai envie de hurler devant les mots de cette stupide journaliste, aussi illuminée soit-elle. Mais je me suis tue. Je lui ai servi le même baratin que je dis à tous les autres. Puis quand j’ai raccroché, je me suis demandée pourquoi je continue de les protéger.

Et me voilà juchée sur ce même balcon, récipient de mes tourments habituels, seule. Dans cette robe noire, celle qui plonge dans le dos, qui offre une vue assez intéressante de mes cuisses. Et mes cheveux, parfaitement rassemblés dans une queue de cheval sur le côté de ma tête, mes mèches ondulées et agrémentées d’une fleur artisanale aussi sombre que mon accoutrement. Les escarpins aussi, m’offrant quelques centimètres de plus pour mieux surplomber la cité. Aujourd’hui il fait un an jour pour jour depuis notre rencontre houleuse à lui et à moi. Notre parcours ne fut certes pas aisé, d’abord ennemis, puis amants. Nous nous sommes déchirés de nombreuses disputes depuis nos retrouvailles au mois de septembre dernier, tout un épisode auquel j’ai préféré ne pas penser jusqu’à ce que toute cette histoire ne prenne autant d’importance. Et j’ai tenté, désespérément même, de le repousser, de le déchirer et le meurtrir, j’ai souhaité, prié même pour l’éloigner de moi. Sans succès. Encore ce soir où les doutes m’étreignent, il est tout ce que je veux et encore plus, tout ce dont j’ai besoin. Il est aussi mon mouvement rebelle, ma petite traîtrise à un moment où les frustrations s’accumulent. Je lui ai préparé une surprise, mais plus rien de tout ceci n’a d’importance à présent. Je me languis déjà de sa présence, du sentiment de paix qui m’envahit aux moindres de ses regards. Lui aussi, il est source de doutes. Je mentirais d’affirmer que je n’ai pas pensé à lui bien plus qu’il ne le faudrait. Peut-être ai-je décidé de lâcher prise. Peut-être n’ai-je plus envie de me battre ce soir.

J’ai prévu cette soirée, je l’ai concoctée avec soin. J’en ai vécu le scénario encore et encore, jusqu’à ce que la perspective de ce moment ne suffise à illuminer ma journée. D’humeur un peu moins frivole aujourd’hui, je ne vis plus qu’une impatience sauvagement mesurée. Pour fêter notre rencontre, j’ai envoyé Musi lui réserver exactement le traitement qu’il m’a infligé lors de cette fameuse nuit où nos destinées se sont croisées pour la première fois. Je vais le kidnapper. En fait, j’ai dit au musicien que je passerais en soirée, sans lui préciser l’heure. La Natu vient de partir à l’instant, et une fois chez lui, elle le trouvera, se posera sur son épaule et le téléportera jusqu’à moi. Je me retourne, le visage sévère et encore troublé par mes pensées emmêlées, attentive à son arrivée.

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Lucas J. Turnac
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Lucas J. Turnac
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MessageSujet: Re: Icarus |PV Lucas|   Icarus |PV Lucas| EmptyLun 21 Mar 2016 - 9:55


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Icarus
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" On croit connaître son environnement, pourtant parfois il suffit qu'un détail change et vous ne vous doutez pas que c'est toute votre vie qui va y passer. Et ça, on ne le voit jamais venir. "

Un an, 365 jours, 8760 heures, 525 600 minutes et 31 536 000 secondes...
Un an, jour pour jour.
Ce soir, je veux la voir. Je ne pense qu'à elle, qu'à notre rencontre un peu chaotique, au hasard qui nous a poussé l'un vers l'autre, à la chance qu'elle m'a donné, à nous. Je regarde l'heure à mon portable, il est déjà tard. Nous n'avons rien prévu, elle ne m'a rien dit, pas d'appel ou de sms non plus alors j'en déduis que ce sera pour une autre fois. Je soupire et brusquement, je ne suis plus pressé de rentrer. Je vais prendre mon temps et flâner dans les rues, rallonger volontairement le chemin jusqu'à ma porte. Chemin qui me paraît encore bien trop court. Je soupire en pénétrant à l'intérieur du studio, la nuit va être longue.

Je m'avance jusqu'à la salle de bain et me regarde dans le miroir. Du sang séché barre la moitié de mon visage, j'ai dû être touché par un débris. Ca ne fait pas mal, ce n'est pas grave. J'attrape un gant humide pour me nettoyer en repensant à la fin d'après midi. Pas facile, de moins en moins facile. Tout se complique ces derniers temps, le régime est plus agressif, plus organisé. La rumeur sur les ruines du Titak inquiète nombre de nos soldats et ne pas en savoir plus nous met tous à cran. Personne ne semble rien savoir et ceux qui savent ne disent rien. Et puis il y a les tentions internes, très fortes. Depuis que je la connais, j'ai décidément du mal à me débarrasser des gêneurs. J'imagine toujours que c'est peut-être un ami ou quelqu'un de cher pour elle et je ne me pardonnerai pas de lui faire du mal, de lui prendre une vie qui lui est précieuse et ça, ça ne plaît pas à mes gars. Ils ne sont pas mauvais et ils ont raison, ce sont nos ennemis mais... Tout ça, j'y arrive pas, j'y arrive plus. En un an tout a tellement changé pour moi. C'est la première fois depuis que j'ai tout perdu que j'ai la sensation de plus être au bon endroit, comme si mon désir de vengeance avait laissé sa place à quelque chose de différent, de plus fort qui me tirerait ailleurs, dans une autre direction. Ca m'est insupportable, de me sentir partagé entre deux mondes : la résistance et elle. De plus en plus, je me sens faillir à ma promesse, à ce qui m'a gardé vivant jusqu'à maintenant, à ce qui m'a rendu fort et qui m'a amené là où j'en suis maintenant. Il faudrait que je fasse un choix mais j'en suis incapable, comment renoncer à l'un ou à l'autre alors que les deux font maintenant partie de mon existence ? Bien sûr, comparé à la résistance, on pourrait penser que Cass qui vient d'arriver dans ma vie ne représente rien ou peu de choses mais c'est faux. Je me mentirai à moi-même si je pensais comme ça parce que c'est tout le contraire. Aujourd'hui, je suis tellement imprégnée d'elle que j'en viens à me poser ces questions alors qu'un an plus tôt rien n'avait plus d'importance que mon combat. Alors, comment concilier les deux ? Comment me battre contre sa famille tout en continuant de la regarder dans les yeux ?

Je soupire et termine de me débarbouiller. Je fixe un instant mon reflet, je suis si pâle que je crois que je pourrai tomber, là tout de suite, m'écrouler et dormir des heures et des heures jusqu'à me sentir mieux, me sentir bien mais en réalité, je ne suis à bout que physiquement parce que ce que je peux lire dans mon regard, dans ces prunelles pétillantes, c'est la vie, le bonheur. Un an déjà. Je souris béatement en quittant la salle de bain lorsqu'un contact sur mon épaule me fait sursauter. Je croise le regard d'un Natu et à peine quelques secondes plus tard, je suis agenouillé dans son salon. Quel accueil ! Je distingue sa silhouette sur le balcon, sa robe noire lui allant à merveille dessine chacune de ses courbes que je dévore du regard. Je me redresse et m'approche, je ne suis pas présentable : je suis fatigué, sale et je n'ai même pas eu le temps de me changer mais je m'en fou. Elle s'en est souvenue, elle m'a fait venir pour elle ce soir comme si mon souhait avait été exaucé. Oui, elle a ce pouvoir là, celui de me surprendre, celui de me rendre heureux.

" Je ne m'y attendais pas. "

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MessageSujet: Re: Icarus |PV Lucas|   Icarus |PV Lucas| EmptyMer 23 Mar 2016 - 22:48



Icarus
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J’attends, scrutatrice, l’endroit où nous avions convenu de son arrivée. Fébrile, encore agitée des spasmes douloureux de doutes prenants, je m’avance de quelques pas en quittant la quiétude de la balustrade pour considérer l’intérieur de l’appartement. J’y ai mis un effort considérable cette semaine, à ranger l’endroit afin qu’il ressemble d’avantage au penthouse luxueux qu’il est qu’au dépotoir que j’en fais à mes heures. L’unité me semble presque étrangère ainsi éclatante de propreté. Son manque de vie, sa rigidité adéquate me déprime. On me reproche souvent mon désordre, sans réaliser qu’il s’agit pour moi d’une manière de m’exprimer. À l’instant où de si nombreuses réflexions me hantent, l’étendue désordonnée habituelle m’aurait quelque peu rassuré. J’attends un signe, une familiarité, qui se déclenche sitôt l’oiseau téléporteur revient avec sa prise du jour qui semble aussi surprise que ce je prévoyais au départ. Un élan de soulagement, de libération me traverse alors qu’il observe tout autour de lui en mettant quelques secondes salvatrices pour comprendre. Pour comprendre que je viens de l’enlever à une vie probablement plus calme sans moi, qu’encore une fois je m’obstine et je m’acharne auprès de lui alors que j’aurais dû lâcher prise il y a de cela si longtemps. Mon regard s’adoucit de rencontrer le sien. J’ai rapidement fait fi de son allure douteuse pour simplement profiter de sa présence qui, déjà, m’apaise. Je soupire d’un soulagement véritable alors qu’il s’approche. Ses prunelles sombres le trahissent si ardemment que j’en perds presque pied.

Lucas. Nous nous sommes jurés fidélité, peut-être un peu en blague. En sachant que nous aurions tôt fait de trahir notre promesse. Peut-être cherchions-nous une échappatoire à un sentiment grandissant, intense et grisant. Depuis toujours, nous testons nos propres limites, dans une danse complexe et épuisante. Jusqu’où pourrons-nous aller avant que cette histoire ne se brise entre nos doigts? J’ai pensé avec naïveté que cette émotion s’effriterait avec le temps. Que l’habitude et le temps me lasseraient de lui. Qu’au détour je trouverais quelqu’un de mieux, qui capterait mon attention. Que cette personne m’offrirait l’excuse pour quitter Lucas. Néanmoins elle n’est jamais venue, même plusieurs mois après, même si d’autres occasions se sont présentées. Sans jamais me satisfaire ou m’apporter le bien-être provoqué par cette tête brulée qui vient d’apparaître chez moi. Un sourire se peint sur mes traits alors qu’il me rejoint finalement. L’envie me brûle de le toucher, de sentir son cœur battre contre mes doigts, de goûter à ses lèvres. Une lourdeur dans la poitrine me retient. Ma main trouve la sienne cependant. Ses doigts pèsent une tonne entre les miens. Je soupire, me sentant lasse, fatiguée, vulnérable à ses côtés. Je déteste l’effet qu’il produit, ce bonheur imprononçable qui me traverse alors qu’il se tient à mes côtés.

«Tu croyais vraiment que j’oublierais l’anniversaire de notre rencontre? Comment oublier une rencontre pareille d’ailleurs? Aujourd’hui j’ai décidé de me venger et de te rendre la pareille. Tu es mon prisonnier pour la nuit! Par contre je n’ai pas pensé aux menottes. Tant pis, ce sera pour une prochaine fois.»

Doucereuse, je m’approche de lui pour saisir son visage d’une main caressante, venant quêter contre ses lèvres un baiser tendre et rieur. Je me dégage à contre-courant, à contre-cœur, le regard rivé vers lui. Je remarque enfin son état déplorable et lève les yeux au ciel, amusée. J’ignore où il aura été traîner une fois de plus. À sa place, je passerais tout mon temps près des ruines du Titak, à tenter d’obtenir des bribes d’informations au sujet de ce qui se trame. À cette pensée, mon regard s’assombrit. Depuis quand je formule des plans pour les Résistants?

«Tu devrais prendre ta douche, mon pauvre, je t’ai surpris alors que tu n’es pas à ton meilleur. Je vais nous préparer de quoi boire un attendant.»

J’espère, probablement en vain, que la lourdeur qui m’habite ne l’alertera pas. Qu’il se fera aveugle à ce qui me ronge, ou du moins qu’il n’en parlera pas. D’un pas qui se veut assuré, je me dirige vers la cuisine pour y dénicher la bouteille que j’ai laissé reposer, ainsi que deux verres. Je ne me rends même pas compte que je vide la première coupe d’un seul trait.

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Lucas J. Turnac
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MessageSujet: Re: Icarus |PV Lucas|   Icarus |PV Lucas| EmptyVen 25 Mar 2016 - 13:35


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Je dévisage le salon où je suis arrivée avec la Natu. C'est différent, propre, rangé, le désordre naturel s'est envolé, il a laissé place à la clarté et aussitôt, je les remarque. Embellis par la pièce, la lumière, les cadres aux reflets dorés... Chacun de ces dessins attirent mon attention et une boule me serre la gorge. Je ne pensais plus croiser ce regard de mon vivant et pourtant, la réalité, la vie de ces tableaux m'ébranlent et fait à nouveau tanguer mon monde. Mon coeur se serre mais mon regard continue de capter et d'absorber le souffle des oeuvres. Son pelage, cette douceur qui s'émane d'elle, mon envie de glisser mes doigts dans son épaisse fourrure, de sentir son museau au creux de mon cou, tout est si bien représenté... Seule Cass peut faire ça, faire vivre ce qui ne l'est plus. Donner un second souffle à la mort et m'aider à ne pas oublier. Je me retourne vers elle, pour faire face à celle qui me donne tant, qui me rappelle quand c'est nécessaire et m'aide à oublier si c'est trop dur, qui m'offre des sentiments assez fort pour me rendre vivant et je devrai être heureux à cet instant, savourer ses yeux bleus posés sur mon moi et sa main qui effleure mon visage mais alors que mon regard s'arrache à la contemplation de celle qui fût durant de longues années ma partenaire, un souffle de désespoir m'échappe sans que je l'ai voulu et je sens en moi se mêler la tristesse, la colère, la peur, la nervosité et tout un tas d'autres ingrédients qui me donnent la nausée.

Je croise son regard et je la laisse me rassurer. Ses lèvres viennent trouver les miennes et dans un souffle, je lui rends avidement, cherchant son réconfort, sa chaleur et tout ce qu'elle saura me donner. Mes mains glissent dans son dos et je la serre contre moi, fort, comme si on risquait de me la prendre, de me l'arracher là tout de suite et de ne plus me la rendre. C'est parfaitement ridicule mais les portraits de Wisp me rappellent combien la vie est capricieuse et le temps compté. Je m'écarte enfin après quelques longues minutes pour la laisser respirer, la pauvre, j'ai même froissé sa jolie robe noire. Je soupire en passant ma main dans mes cheveux, un sourire gêné greffé sur le visage en remarquant le contraste de nos tenues.

" Je ne sais pas ce que je croyais Cassey mais ce que je sais là tout de suite, à cet instant, c'est que je suis heureux d'être là. Mais je te préviens... Je ne suis pas un prisonnier facile, je ne parlerai pas même sous la torture. "

Je souris en déposant un nouveau baiser sur ses lèvres. Je suis toujours surpris de ce pouvoir qu'elle a sur moi, la façon dont elle arrive à manipuler mes sentiments, à m'arracher un sourire alors qu'il y a quelques secondes, j'étais en proie au désarroi, le coeur au bord du vide. Je souris en glissant quelques caresses du bout des doigts à l'extrémité de sa nuque. Elle est décidément la personne qu'il me faut, celle qui me comprend et qui me fait basculer dans le meilleur des mondes à chaque fois que je vois son sourire. Seulement un an, je ne la connais que depuis 12 mois pourtant elle est tout ce que j'ai et tout ce dont j'ai besoin et si demain elle partait, si demain elle décidait de me laisser, de m'abandonner alors c'est la plus belle partie de moi qui s'en irait avec elle, la plus belle partie de moi.

Je suis du regard sa progression jusqu'à la cuisine ouverte sur le salon. Quelque chose ne va pas, je le sais, je le sens. Entre elle et moi, c'est fusionnel et là, je vois bien qu'elle est habitée par de nouvelles chimères, des problèmes, encore et encore... Chaque personne à ses bêtes noires et quand l'une vous laisse enfin tranquille, c'est dix autres qui vous tombent dessus. J'avais espéré, tant espéré qu'après la fin de ses tourments, l'acceptation de la mort de son amie, elle serait enfin paix, plus paisible qu'elle ne l'a jamais été mais ce n'est pas le cas et je dois admettre avec horreur que tant que cette guerre durera, ce ne sera jamais le cas. Je la suis, décidé à lui rendre ce qu'elle me donne, à la soutenir, à l'écouter, à être là pour elle et à l'aimer. Je colle mon torse contre son dos et je prends délicatement sa coupe vide des mains avant qu'elle ne se resserve un verre et je la pose sur le plan de travail. Je l'enlace affectueusement, ma tête reposant contre son épaule.

" Ca va aller Cass, ça va aller. "


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Cassey G. Banks
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MessageSujet: Re: Icarus |PV Lucas|   Icarus |PV Lucas| EmptyVen 1 Avr 2016 - 1:25



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Le goût du vin envahit ma bouche, sans la moindre saveur. Il descend contre ma gorge indifférente, s’écoule en moi avide de la sensation qui accompagne sa consommation. Pas assez que mon instinct me crie au-dessus du tumulte qui gronde en moi. Ce soir, tout devait être facile, simple, une esquisse sur un canevas vierge. Pourtant je découvre des lignes déjà toutes tracées, des courbes et des détours non prévus que je dois contourner pour poursuivre mon œuvre. Dans quel but? L’inspiration qui m’avait pris quelques jours plus tôt semble s’être envolée au profit d’une foule de questionnements qui ne devraient pas être, d’interrogations qui me rongent à l’instant où je repose ma coupe contre le comptoir. Sa venue devait m’apporter la paix, et je constate qu’en quelque sorte, sa présence m’apaise. Pourtant je n’avais pas calculé à quel point la culpabilité m’alourdit à chaque nouveau coup d’œil que j’aventure en sa direction. Il est tout ce qu’il me faut, tout ce qu’il me suffit pour qu’à nouveau ce monde fasse du sens. Cette pensée m’est irrécupérable. Comment ai-je pu laisser notre relation évoluer ainsi? Devenir aussi significative, même significative tout court? Nous devions n’être que deux amants, deux oiseaux de nuit cherchant auprès de l’autre chaleur, satisfaction, une once d’oubli dans un océan de tracas. Pourtant j’ai perdu le contrôle sur ce que je croyais acquis, probablement depuis la première fois où je lui ai déclaré la haine. À l’instant où il me rejoint près du comptoir, qu’il prend délicatement le verre vide de mes mains, qu’il m’enlace avec une douceur incomparable, toute tension m’abandonne. Je sombre.

Mon souffle s’égalise à mesure que ses bras se referment sur ce petit corps frêle qui me constitue. Probablement ai-je perdu du poids depuis notre rencontre, probablement n’ai-je jamais semblé si fine, si menue, que contre lui dans sa chaleur envoûtante. Et ses mots rassurants, j’aurais aimé scander ne pas les attendre pourtant mon cœur s’emballe devant la tendresse qui constitue chaque syllabe prononcée. Sa voix si familière, trop probablement, coule en moi en mettant feu à chacune de mes cellules. Tout en moi s’éveille, rend les armes, frôle la démence. Mon cou s’étend contre son torse qui me retient, un soupir trop las m’échappe, un soupir fatigué. Lentement, je me retourne pour enfouir mon visage dans sa poitrine où bat un cœur farouche. Je l’enlace à mon tour, prise d’un vertige de réaliser à quel point je suis attachée à lui, à quel point il me manquera lorsque notre histoire volera en pièces. Inévitable. Nous n’allons pas aller plus loin que cette aventure qui s’éternise, nous ne pouvons pas. La fin de nous m’apparaît pourtant comme une hérésie. J’ai encore besoin de sa présence, je crois que quelque part il le réalise. Je déteste dépendre de lui. De le désirer autre part que dans mon lit.

«Je le sais.»

Mes lèvres viennent chercher les siennes avec tendresse, avec envie, avec détresse et désespoir peut-être. Ce sentiment me submerge, celui d’une paix délicieuse qui ne devrait pas être. Je ne me recule que lorsque les doutes disparaissent en ne laissant que cette culpabilité qui doit se lire dans mon regard attisé, ce regard de celle qui court à sa perte.

«Je le sais parce qu’à chaque fois que tu es là, tout va bien. C’est bien ce qui m’agace.»

Je soupire, en tentant un sourire amusé. N’est-ce pas là une semi-confession de mes sentiments pour lui? Ceux qui causent tant d’émoi, de détresse chez moi, ceux qui me terrorisent. Ceux qui ne devraient pas être pourtant mais qui rendent tout bien plus aisé et complexe tout à la fois.

«Je compte bien abuser de toi un peu, mon prisonnier, aussi difficile sois-tu.»

Oui, je profiter de la chaleur qu’il provoque chez moi, de l’apaisement qui l’accompagne à chaque visite. Même si je suis faible, si faible face à lui. Parfois, j’ai aussi envie de ne plus me battre.

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MessageSujet: Re: Icarus |PV Lucas|   Icarus |PV Lucas| EmptyDim 3 Avr 2016 - 23:57


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Je l'écoute, je la laisse m'enlacer, goûter mes lèvres, se blottir contre moi et me faire mal. Très mal. Elle s'écarte et aussitôt, je lâche son regard, je l'esquive. Je cherche à m'en détacher, à fuir ce supplice, cette douleur qui s'insinue en moi, appuyée par chacune de ses paroles. Chaque mot est un coup de plus qui me déchire le souffle.

" Arrête Cass. Arrête ça tout de suite. "

Je souffle, un rictus nerveux déforme mes lèvres et je dois me contenir pour ne pas exploser, pour ne pas lui hurler tout ce qui me traverse l'esprit. Ca fait un an bordel, un an que ça dure et je suis sur le point d'exploser. Je devrais être content de son aveux, content de savoir que grâce à moi, elle se sent bien mais non, non non et non. Parce que derrière ce demi-aveux comme j'ai envie de le nommer, il y a bien autre chose. Un quelque chose qui me tue à petit feu et qui est de plus en plus dur à supporter avec le temps et les sentiments.

" Ne dis plus jamais ça Cass. Ne dis plus jamais que ça t'agace. Je ne le supporte pas... Non, je ne le supporte plus. Jusqu'ici j'ai préféré ne rien dire, laisser couler et penser à autre chose. De toute façon, tu aurais pensé, toi, que notre relation allait en arriver à ce point ? Mais te voir comme ça... Si... Tu as perdu du poids, tu sembles fatiguée. Tu es presque ailleurs et ne me raconte pas une histoire à dormir debout. Un an... Je le vois bien, je le sens bien Cass, ça te fait du mal. J'ai l'impression de te détruire à petit feu, de voler ta vie... "

Ma dernière phrase se mue dans un déchirement de voix, prononçant à peine audiblement le dernier mot. Tout le bien que je lui apporte ne saurait combler le bouleversement que notre relation impose à son existence et contre ça, je ne peux rien faire et j'aurai beau lui dire que tout ira bien, que ça va durer et qu'un jour toute cette guerre sera finie... Je ne sais pas si elle sera encore là pour m'entendre et m'écouter. A chaque fois que je la regarde, j'y lis une culpabilité qui me fend le coeur, qui me rappelle combien notre relation est interdite, si paradoxale et je n'en peux plus, cette sensation de lui du mal, de lui voler ce qu'elle possède, de la contraindre à trahir sa famille, ses amis, sa vie toute entière qui n'a été dessinée que par le régime depuis qu'elle est jeune. Par égoïsme, peut-être pas peur aussi ou tout simplement par mal d'amour, je l'ai ignorée, j'ai fais comme si je ne le voyais pas, comme si tout ça me passait au dessus mais cette soirée marque une étape invisible mais importante de notre couple car c'est ce que nous sommes non ? Je m'en rend compte ce soir, là, face à elle. Cette année avec Cassey, plus qu'une relation, c'était une invitation à l'espoir. Elle m'a remué et m'a forcé à me poser beaucoup de questions auxquelles je n'ai pas forcément eu de réponses mais si je suis sûre d'une chose, c'est que j'ai trouvé la bonne. Elle a compris qui j'étais, aussi bien à travers mes qualités que mes défauts. Elle m'a permis d'être moi-même, en force et en paix.

" Je vais partir quelques semaines aux ruines Titak, je voulais que tu le saches. On va faire une pause Cassey Gwen Banks. Je vais te laisser du temps pour réfléchir, pour te remettre mais quand je reviendrai... Terminé. Tu m'appartiendras parce que tu es aussi folle de moi que je suis fou de toi. Et ce regard que tu as là, si tu ne t'en débarrasses pas, je le ferai à ta place. Et s'il faut botter les fesses du régime pour ça ou arrêter mon activité de résistant Cass, je le ferai. "

J'ai pris ma décision. Il est temps d'arrêter d'exister pour les morts et de vivre pour les vivants.

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Cassey G. Banks
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MessageSujet: Re: Icarus |PV Lucas|   Icarus |PV Lucas| EmptyDim 10 Avr 2016 - 21:13



Icarus
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Probablement nous ai-je damnés au premier regard. En prenant une décision de trop, celle d’étendre mes heures de travail déjà surchargées à quelques détails aujourd’hui considérés futiles. L’erreur de rester encore quelques heures au bureau, pour oublier les spectres de la nuit, pour bien paraître aux yeux des supérieurs, de l’équipe, pour me satisfaire de ma propre performance peut-être. Maintenant, les raisons ayant éclairées mon jugement alors m’apparaissent confuses et lointaines alors que les souvenirs de notre rencontre me viennent avec une netteté insolite. Je peux revivre chaque moment, chaque battement de cœur ou respiration, chaque pensée ayant traversé mon esprit lorsqu’il a jaillit de la nuit pour prendre mon cœur en otage. Oui. S’il le demandait, je pourrais affirmer qu’il aurait été plus facile que nos destinées ne se croisent jamais, que nous en aurions tous les deux été plus heureux ou sereins. Maintenant que nous avons consommé le fruit de notre traitrise, impossible de faire marche arrière; je me raccroche à ce que nous avons au moment-même où je considère faire voler en éclats tout ce que nous avons bâti contre vents et marées, mais surtout contre nous-mêmes. Sa chaleur coule contre mon épiderme assoiffé de sa présence, je frissonne toute entière d’une vulnérabilité délicieuse, m’imaginant à tort que cette soirée, comme tout le reste, sera probablement plus aisée que ce qu’elle le devrait. Peut-être ai-je simplement envie d’y croire ce soir, d’effacer la honte provoquée par la conversation avec mon père, par la confusion occasionnée par la capture d’un ami fidèle, ou l’inquiétude quant aux intentions encore nébuleuses d’une organisation pour laquelle je me suis pourtant toujours battue sans poser de questions.

Mais il m’arrête. Il se crispe dans ma poigne pourtant légère, pourtant tendre. Son regard a changé, plus sombre encore, un rictus blessé étire son visage. Mystère. Les mots s’échappent de sa gueule sans que je ne puisse les retenir, il parle d’un poison, peut-être n’a-t-il pas tort. Je secoue la tête sans comprendre, sans la force même de me battre pour lui ou contre lui, ou contre moi. Je laisse couler, sa haine, sa peine, qu’il emmagasine semble-t-il et qui me parvient telle une gifle imprévisible. Une véritable tempête dans un verre d’eau, une vérité qui ainsi prononcée me paraît tellement incongrue, futile. Je n’ai pas besoin de mots pour comprendre ce que je ressens, peut-être ai-je décidé de lâcher prise il y a un moment. Dans tous les cas, il a raison sur bien des points, mais il a aussi tort, bien bien tort. Je n’ai pas le temps ou l’énergie de le contredire qu’il revient à la charge, chantage supposé m’emmener à réagir. Une pause? Ma main se referme sur son bras comme pour le retenir, un mouvement d’une intense vulnérabilité, me voilà déjà en train de le supplier de ne pas partir. Terminé? Mon sang se fige, ma respiration se coupe d’une douleur que je n’aurais pas pu soupçonner. Avant qu’il n’éclaircisse. Fini le mensonge, l’illusion. Il veut une relation, une vraie. Un rire nerveux m’échappe à mon tour alors que je le relâche, passant mes doigts dans ma chevelure à la recherche d’une échappatoire au piège qu’il vient de refermer sur moi.

«Arrête Lucas, tu paniques pour rien. Nous n’allons pas prendre de pause ou peu importe ce que tu proposes. Tu iras vivre tes aventures comme tu l’entends dans les ruines du Titak et je ferai semblant de ne pas m’inquiéter pour toi dans toute ma mauvaise foi et après on verra bien.»

Je me sais me contredire. Je me sais faussée, une image qui menace de s’effondrer à tout moment. Je me retourne pour ne plus lui faire face. Je n’ai pas envie qu’il m’avoue l’amour que je le sais ressentir pour moi, pas envie de lui appartenir tel qu’il le décrit. Pourtant il est tout ce que je souhaite et plus encore.

«Tu es trop sensible. Je suis heureuse avec toi, ça ne suffit pas? C’est difficile pour moi de l’accepter, de… dépendre de quelqu’un. À chaque rencontre je crois qu’il s’agit de notre dernière, que nous allons nous rendre à la raison une fois pour toutes. Mais je n’ai pas envie que ça se finisse.»

Le discours qui refuse de vivre dans un monde ou un autre, de trancher entre le blanc et le noir.

«Je veux seulement profiter ce soir, est-ce possible?»

Possible, je l’ignore. Mais terriblement égoïste, ça…

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MessageSujet: Re: Icarus |PV Lucas|   Icarus |PV Lucas| EmptySam 30 Juil 2016 - 23:12


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Je sursaute lorsque sa main se referme sur mon avant bras, me laissant apercevoir son intense vulnérabilité, son besoin de s'accrocher, de ne pas me laisser partir, de ne pas me laisser l'abandonner une nuit de plus au coeur d'une guerre qui finira par nous détruire. Le flot de paroles que je lui lançais sans lui laisser le temps de répondre se calme brusquement et après un dernier point, plus aucun bruit ne sort de mes lèvres. Seul le silence, lourd et pesant tourne autour de nos deux êtres. Je lis à travers ce simple réflexe, toutes les choses qu'elle ne me dit pas, tous les non-dits cachés sous des émotions auxquelles j'ai été aveugle durant toute cette année. Je me sens idiot, insensible, perdu... Alors je cherche les mots, ceux qu'elle a besoin d'entendre, ceux que nous avons besoin d'entendre. Des paroles pleines de non-sens qui pour nous représenteront toute la logique de notre monde.

« Nous sommes tombés amoureux, malgré tout ce qui nous séparait. A partir de ce moment-là, il s'est créé quelque chose de rare, tu ne penses pas ? »

Je l'attire lentement et prudemment vers moi, mes mains glissant le long de ses bras, caressant sa peau du bout des doigts, cherchant sa chaleur, sa familiarité. Je la dévisage, mes yeux se noyant dans les siens d'un bleu que je redécouvre à chaque regard et qui me fait un peu plus plonger à chaque fois. Elle a besoin d'être rassurée, de savoir que je ne la laisserai pas, que je ne l'abandonnerai pas à la vie. Elle ne sera jamais seule. Comme j'aimerais pouvoir lui promettre, lui jurer d'être toujours là pour elle, de rester à ses côtés. Mais je ne peux pas, tout ce que je peux lui dire, tout ce qu'elle peut entendre, ceux sont ces sept petits mots. Les plus simples, les plus justes.  

" La vie est belle à tes côtés. "

Je la serre contre moi, boulversé d'une certaine manière par mes propres paroles. Est-ce que je pensais pouvoir reprendre goût à la vie il y a quelques années ? Certainement pas et pourtant je suis là aujourd'hui, à serrer contre moi ce pourquoi je suis prêt à vivre... Ou à mourir. Parce que maintenant, je suis prêt à tout risquer avec elle plutôt que de tenter d'être heureux sans elle. C'est comme ça.
Je glisse mes mains dans son dos et je frotte énergiquement comme un enfant que l'on console après une mauvaise chute ou un cauchemar. Je sais que nous sommes différents, que nos mondes sont opposés et que notre histoire n'a rien à envié à celle de Roméo et Juliette mais j'ose croire que la fin sera différente.

" D'accord, alors profitons. Pour ce soir. "

J'esquisse un sourire, mes mains relâchent leur étreinte et se rejoignent dans mon dos. Mes lèvres trouvent son front et y déposent un baiser plein d'émotion et de bienveillance semblable au premier qui a effleuré son âme. Renouvelable tous les 365 jours.

" Et pour tous les autres soirs à venir. "

Soyons fous et aimons nous. Elle a raison, oublions un peu cette guerre lorsque nous sommes ensembles, oublions le sang, la mort. Oublions la colère et la souffrance. Pour chaque instant partagé, profitons de cette petite amnistie qui nous est offerte par la vie et soufflons.

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MessageSujet: Re: Icarus |PV Lucas|   Icarus |PV Lucas| EmptyVen 12 Aoû 2016 - 2:38



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Voilà exactement ce que je cherchais à tout prix à éviter. Les prises de têtes, celles qui vous entrechoquent dans la durée, celles qui malgré vous viennent vous changer. Qui réécrivent peu à peu vos habitudes, vos convictions les plus profondes. Je refuse. Refuse de me laisser changer, refuse même de voir le gouffre entre nos deux points de vue sur ce qui pourtant ne pourrait être plus simple. Deux personnes vivant une aventure, pour moi sans nom, pour lui si claire. Je me demande pourquoi il aura cédé à des sentiments qui n’auraient jamais dû voir le jour, pourquoi l’y ai-je encouragé probablement sans même le réaliser, pourquoi l’ai-je laissé faire nous entraîner sur cette pente houleuse? Je tente désespérément de me raccrocher à une réalité que j’ai fui sans aucun remords avec un ex qui n’a rien compris de ma définition, qui trop longtemps a tâché de réécrire mon histoire et qui aujourd’hui n’est plus que bribe d’un passé vers lequel j’ai juré ne plus jamais m’aventurer. Me voilà agrippée pourtant à son bras, raccrochée pour m’empêcher de sombrer à mon tour. Ou est-ce parce que je refuse de le laisser tout détruire à sa suite? J’ignore encore sur quel pied danser, l’impression désagréable de ne plus mener la valse depuis un moment déjà m’étreint dans un malaise imperceptible. Ce pouvoir qu’il possède sur moi dans son houleuse indécision, il me consume petit à petit et je réalise qu’au-delà de son affection, et des possibles promesses qui devront nous enchaîner, il s’agit de cet élément qui me terrifie, qui me fait reculer aujourd’hui et qui possiblement vient de provoquer cette brisure.

Ma tentative, aussi désespérée soit-elle, m’apparaît presque transparente, inconsistante, théorique. J’aimerais la retirer maintenant, effacer ce soubresaut pathétique pour lui rabattre entre les deux yeux à quel point je peux me ficher de notre idylle sans importance. Pourtant la date, d’elle-même, vient me contredire. Malgré le plaisir émanant de nos rencontres, il n’est pas suffisant pour expliquer la nature complexe et longitudinale de notre relation. Le pire est bien qu’elle fonctionne, car bientôt mon compagnon se calme, oublie son idée spontanée et horripilante de me quitter pour vaquer à ses actions illicites… je ne parviens plus à le suivre, il change d’idée si facile, je me demande si parfois il passe de l’amour à la haine avec autant de facilité. D’ailleurs ce mot lui échappe avec une aisance bouleversante, je me mets à trembler dans ses bas alors qu’il décrit la beauté de ce que nous sommes. Je peux presque sentir les attaches profondes qui me rattache à cet inconnu pourtant qui s’est décidé à entrer dans ma vie pour la révolutionner à jamais. Je me demande encore une fois pourquoi il cherche à nous mettre une étiquette, pourquoi il doit nous nommer ainsi. Amoureux. Comme si nous possédions un avenir. Je me demande ce qu’il s’imagine pour nous, à quel point je devrai me réinventer pour lui, à quel moment j’en aurai assez. Pourquoi je refuse encore de mettre fin à la malédiction.

«Tu es une impossible guimauve Lucas.»

Un sourire malicieux éclaire mes lèvres, même si mes yeux sont encore tristes, même si le poids du monde m’assaille toujours. Il parvient toujours à m’apaiser lui, j’aimerais bien connaître sa recette, celle de mon propre bonheur. Il embrasse mon front et c’est tout mon être qui en chavire, je viens poser mon front contre sa joue pour m’imprégner un peu plus de lui.

«Un romantique, même. Sous tes airs durs. Un véritable cœur d’artichaut. Tu as sorti tes grands mots ce soir. Comment ça se fait que ce mot te vienne si facilement?»

Ma voix est si douce, un murmure à peine, empreint d’une curiosité sans animosité. Je caresse son visage, j’essaie de savoir ce qu’il fait d’être lui.

«Il y a encore tellement de choses que j’ignore de toi, tu parviens toujours à me surprendre.»

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MessageSujet: Re: Icarus |PV Lucas|   Icarus |PV Lucas| EmptyVen 12 Aoû 2016 - 13:40


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Le mot amour ? J'hausse les épaules. Je ne sais pas, c'est comme ça. Je ne suis pas spécialement romantique comme elle le pense, enfin ce n'était pas mon truc, jusqu'à maintenant en tout cas mais j'aime simplement prendre soin des gens que j'aime. Et des gens que j'aime, il n'y en a plus tant que ça. Les mots sont faits pour être entendus alors je ne les garde pas pour moi, pour ne rien regretter, pour ne pas me le reprocher à nouveau, comme dans le passé. Un passé dont elle ignore tout, un passé que j'ai jugé plus prudent de lui cacher jusqu'à maintenant. D'abord pour la protéger et ensuite par égoïsme pour ne pas la perdre. Mais était-ce la bonne solution ? Elle a raison, elle ne sait pratiquement rien de moi comme je n'en sais pas beaucoup plus sur elle. Jusqu'à maintenant, notre relation était basée sur la confiance de l'autre mais si je lui raconte mes cauchemars, qu'en adviendra-t-il ? Malgré mes hésitations, je sais que je lui dois la vérité. Je ne lui ai pas réellement menti mais je ne lui ai pas tout dit et je sais que si je veux continuer à la voir sans mensonges et tromperies, sans avoir honte de lui cacher qui je suis réellement alors je ne dois plus attendre.

" Je vais te raconter quelque chose alors. Quelque chose d'important. "

Je m'écarte d'elle jusqu'à heurter le plan de travail derrière moi, lequel j'agrippe de mes mains. Et je replonge, je replonge dans mon passé, une fois de plus, je reviens à cette nuit d'été qui a changé ma vie.

" Tu te rappelles de cette nuit de juillet où le régime a lancé un coup d'état contre le manoir de la famille Turnac ? "

Je déglutis et sans parvenir à me contrôler, mes mains se mettent à trembler. J'ai l'habitude d'y penser, en fait je revois souvent cette nuit dans mes rêves mais c'est autre chose de la raconter, de laisser quelqu'un savoir dans quel état d'angoisse cette attaque pourtant lointaine, parviens à me mettre. Je serre les doigts sur le marbre de la cuisine et je continue sans vraiment lui laisser le temps de répondre, je veux en finir au plus vite. J'ai pris ma décision, il est trop tard pour reculer.

" Alors qu'un incendie ravageait les lieux, le père est mort tué d'une balle dans la tête sous les propres yeux de ses enfants impuissants. Eliza s'est fait capturée et traînée tandis que les deux filles étouffaient dans les flammes. Et le fils, presque inconscient, une balle logée dans la clavicule, n'a rien pu faire, il les regardé un par un s'arracher à son monde sans avoir la possibilité de tenter de les sauver. "

Je dois me reprendre à plusieurs reprises. Les larmes menacent de couler et je dois me battre pour les repousser. Le plus dur est passé, presque passé.

" Tu dois connaître un peu la suite. Eliza Turnac a été enfermée et soumise à de rudes interrogatoires en attendant le jour de sa pendaison quant à son fils. Il a été soigné pour être mieux torturé, physiquement, mentalement. Brisé, anéanti. Et puis il devait être la première partie du massacre en place publique. Bel exemple. Mais tout ne s'est pas exactement passé comme prévu, non. "

A son regard, je vois bien qu'elle a compris et je sais aussi, en connaissant Cassey que cette nouvelle ne lui plaira pas. Peut-être qu'une autre fille qu'elle me dirait que peu importe qui je suis, peu importe d'où je viens ou ce que j'ai fait, qu'elle m'aimera mais avec Cass, c'est différent. C'est toujours différent et c'est peut-être pour ça que je l'aime aussi. Elle ne va pas être contente, elle ne va pas apprécier mais pour l'instant elle ne dit rien, elle attend. Elle attend que les mots sortent de ma bouche et lui annonce l'horreur encore plus profonde de notre situation.

" Il s'est échappé, il a fui, avec l'espoir idiot et vain de tenter de sauver sa mère. Et il était là le jour où elle est partie. Il l'a regardée se faire passer la corde autour du cou, il a vu sa force face à la mort. Il a vu l'amour dans ses yeux, pour ses fidèles, pour son pays. Mais ça ne l'a pas aidée, elle est morte, assassinée. Après ça, il s'est retrouvé seul, libre mais seul. "

Cette fois ci, je ne parviens pas à réprimer un haut le coeur et une larme silencieuse de rouler sur ma joue. Je me retourne, secoué de tremblements et il me faut plusieurs longues minutes pour me calmer.

" Oui Cassey, tu as compris. Je suis Lucas James Turnac, le propre fils de Eliza Turnac. "

Je n'ose pas me retourner, je n'ose pas affronter son regard. Après cette dernière phrase, je sais juste que ce qui va suivre ne va pas être une partie de plaisir, ni pour moi, ni pour Cass.

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MessageSujet: Re: Icarus |PV Lucas|   Icarus |PV Lucas| EmptyDim 14 Aoû 2016 - 21:45



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Sitôt les mots s’envolent que je réalise mon erreur. Une porte à ma suite laissée entrouverte, une invitation peut-être pour lui décidé de franchir ce pas impossible. L’anonymat m’a toujours plu au final, ma curiosité asséchée au sujet de son passé et l’envie de lui parler du mien tout aussi aride. Il est cette étincelle à laquelle j’aime goûter au quotidien, cet instant présent qu’on chérit pendant qu’il dure avant qu’il ne s’effrite. Nous n’avons aucun avenir, et ce qui est derrière soi n’importe plus. Mais lui, il fait un moment qu’il nous considère différemment. Je sais que lorsqu’il affirme m’aimer, il dit vrai. Je sais aussi que j’en pense tout autant. Mais que je ne peux véritablement m’autoriser à m’abandonner à lui. L’ambiance s’est changée alors qu’il affirme devoir me divulguer une information importante à son sujet. Je ferme les yeux, il est trop tard pour l’en dissuader. Il s’appuie contre le comptoir, m’échappe soudain et je sais, je sens, que nous nous disputerons. Lorsqu’il se met à parler du Régime, je ne peux réfréner un soupir légèrement irrité. J’oublie, à mes heures, à quelle espèce il appartient. Il est de ceux portant leurs histoires sur leurs épaules, tel un fusil. Leur arme. Je me demande s’il espère m’endoctriner, croise les bras sur ma poitrine comme pour me couper du récit qui devra s’en suivre et auquel je préférerais ne pas devoir participer.

Il me conte l’histoire de la famille Turnac. Si je connais bien sûr l’ex-présidente, je n’ai jamais véritablement porté attention au reste de sa famille, mais selon les dires de Lucas, ils auraient vécu tout autant de misère que leur mère. Je me laisse à peine atteindre par ce récit, aussi horrible soit-il, insensible depuis longtemps aux discours sensés me convaincre de l’impureté et de la cruauté de mon mouvement. Comme si je n’étais pas au courant. En tant qu’ennemie politique du Régime, il n’est guère surprenant le sort qu’on a réservé à la dame en question, même si ses enfants et son mari n’en méritaient certainement pas autant. Ce qui me trouble, ajoutant à mon malaise, est l’apparente émotion ayant saisi mon interlocuteur. Lorsque ses mots insistent, avec une souffrance palpable, sur le sort du fils de la présidente, je me crispe, prise d’un doute qui me fait reculer. Un doute bientôt confirmé par ses dires, et par réflexe, je me mets à ricaner nerveusement en le dévisageant. Personne sur cette île d’à peu près sensé ne viendrait affirmer telle chose. Et lui, il ne sait pas mentir.

«Et tu me dis ça pourquoi?»

Mon ton est si sec, si venimeux, qu’il me laisse un goût amer en bouche. Je tremble à présent, d’une frustration que je ne cherche pas même à dissimuler. Car il ne pouvait pas me laisser douter en paix. Il se devait d’ajouter une pierre à mon sac déjà bien lourd. En moi, s’embrase la colère, la colère qui me précipite à lui, après la froide indifférence vient la tempête.

«Pourquoi hein, Lucas? Pourquoi? Tu veux qu’ils me prennent, tu veux qu’ils me tuent? Ne sais-tu pas que le savoir est mortel sur cette île?»

N’est-il pas assez pour me torturer d’aimer celui portant l’étendard des meurtriers de ma meilleure amie? Pourquoi, aujourd’hui se permet-il d’ajouter à mes remords, pourquoi me persécute-t-il de ses histoires? Je frappe sans énergie contre son torse, épuisée du monde entier, épuisée de moi-même avant tout.

«Espèce d’imbécile, pourquoi faut-il que tu existes?»

Dans un autre monde, je m’engourdis à nouveau de ma doctrine. Dans un autre monde… dans un autre monde… Je parviens à peine à respirer, étourdie dans ses bras, sans être surprise pour autant. Peut-être même le savais-je déjà.

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MessageSujet: Re: Icarus |PV Lucas|   Icarus |PV Lucas| EmptyMar 16 Aoû 2016 - 18:34


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Icarus
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J'aimerais lui dire qu'il n'est pas trop tard, j'aimerais lui dire que tout peut s'arranger, mais c'est impossible. J'ai déjà connu cette frontière, celle, infranchissable, qui sépare l'avant de l'après. Pourquoi ? Pourquoi ?! Je le savais, je le sentais. Je... Je n'en sais rien. Je voulais qu'elle sache, je voulais qu'elle soit sûre, qu'elle soit verte à qui elle avait affaire. Je crois que j'espérais au plus profond de moi-même qu'elle m'accepterai, qu'elle nous accepterai tels que nous sommes. Je sais qu'en lui disant la vérité je lui fais courir un risque énorme tout comme à moi-même mais j'ai confiance en elle et elle peut avoir confiance en moi, je la protègerai. Pourtant, elle le vit mal. Ses remords continuent de la ronger, hantée par les fantômes de son passé et mon aveu est suffisant pour la secouer. Pour lever son masque et me laisser voir la torture qu'elle s'inflige chaque jour en pensant à notre relation. Et puis, graduellement, sa vulnérabilité laisse place à de la colère, une colère qu'elle me jette à la figure, moi, le responsable de ses maux. Je la laisse se défouler, éliminer sa rage en me frappant. Ses coups sont privés de force, comme lassés, épuisés. Je crois qu'elle est à bout. Et pourtant, je dois lui expliquer, je dois lui dire pourquoi, je dois la ramener près de moi mais elle ne m'en laisse pas le temps et ses derniers mots, son ultime question finit par avoir raison de moi. Comment peut-elle ? Comment ose-t-elle ? Après tout le chemin que j'ai fait pour en arriver là, après tout les moments qu'on a partagé, le bonheur auquel on a croqué, le temps passé ensemble...

" Tu penses ce que tu dis ? "

Une vague de colère monte en moi. Elle grimpe, glisse au creux de mon ventre et menace d'exploser. Je suis hors de moi, j'ai envie de tout envoyer en l'air, de tout arrêter, d'abandonner. Je suis rarement dans un état émotionnel si instable. Pourquoi cette phrase doit elle m'atteindre autant ? Et je comprends, je sais pourquoi je suis comme ça. Tout ça, c'est parce qu'elle a raison. Pourquoi j'existe ? J'ai renoncé à la mort pour vivre mais dans quel but ? J'étais déterminé à venger ma famille mais depuis un an, tout a changé pour moi, pour nous. Elle est devenue ma raison d'exister alors si elle part, que restera-t-il de moi ?
Je l'attrape brusquement par le bras et je me penche pour lui faire face. Je la force à se tenir droite à me regarder, droit dans les yeux.

" Et toi, pourquoi tu existes hein ? Tu penses que... Tu penses que tu peux encore venger ton amie alors que tu te tapes un résistant ? Tu penses que tu peux continuer à vivre comme ça ? Ouvre les yeux Cass, réveille toi bon sang ! Ouvre les yeux et vis dans le présent. Rien ne la ramènera et elle ne t'en voudrait pas de... De me fréquenter. Ce que j'étais ne change rien à ce que je suis aujourd'hui. "

Je marque une pause, cherchant à garder mon calme malgré toutes les paroles qui menacent de sortir.

" Depuis combien de temps n'avais-tu pas été heureuse ? L'as-tu seulement été avec moi ou bien tout n'était que mensonges... "

Je la regarde, toute colère envolée, seule une profonde tristesse persiste et la peur, la peur de perdre l'autre.



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Cassey G. Banks
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Cassey G. Banks
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MessageSujet: Re: Icarus |PV Lucas|   Icarus |PV Lucas| EmptySam 20 Aoû 2016 - 18:16



Icarus
feat. Lucas J. Turnac

Ce soir, je l’ai désiré. Ce sentiment grisant accompagnant chaque rencontre. L’éclat de ses prunelles furtives m’embrasant de chaque contact inespéré. La lourdeur calculatrice de ses caresses. L’espérance qui vient tendre son cou, chaque fois un peu plus loin. Ce soir, perdue et jetée aux quatre vents, il devait former mon port d’encrage, celui dont je me défile pourtant sans cesse. Oscillant inlassablement entre deux intérêts, de me purger ou de me protéger. Il est à la fois l’exorciste et le démon, et moi je suis à court de prières. La soirée m’échappe, loin les rires légers et les baisers volés. Qui de lui ou de moi nous aura précipité contre cette pente humide, je ne saurais dire à présent. Néanmoins je nous sens chuter vers l’abysse, inexorablement, moi abandonnée à la rage, la désillusion et l’anxiété, et plus encore la culpabilité. Car Lucas ne pouvait être qu’une erreur de passage auprès d’un Résistant sans visage, il devait être cette part de moi dont je ne parviens plus à me détacher. Ce qui m’hérisse, plus encore que mes propres mots insensés… Cette vague de honte, de culpabilité cette fois non relative à mes principes, et l’envie grandissante de le protéger, lui. Il me semble à présent que ce secret éclaté aura tout changé d’une dynamique banale quoique laborieuse, vers une relation concrète, profonde et dangereuse. Et je l’aime, je l’aime, je l’aime, je le réalise aujourd’hui plus que tout, car plutôt que d’envisager les dangers, je panique à la perspective de le perdre, ou pire, le condamner.

Il glisse. Lui aussi. Son visage se décomposant, la colère éclatant au creux de son estomac, la blessure vive. Il n’a rien compris. Tout aussi réactif que la jeune femme lui faisant face, il explose. J’ai frappé, trop rapidement, trop profondément, à présent je devrai vivre avec les conséquences. Je me prépare, la lèvre retroussée par la méfiance, les traits crispés d’incertitude. Je suis si lasse. Les émotions me gagnent, indomptables, accentuées d’autant plus par la mention du nom sacré, celui qu’il n’a plus le droit de prononcer depuis notre première rencontre. Le nom maudit, celui qui m’a hanté au point de me perdre.

«Comment oses-tu prétendre la connaître? Tu ne sais rien, absolument rien d’Aimee alors je te défends de même prononcer son nom! Elle était ici, elle t’aurait tranché la gorge, si tu me crois endoctrinée alors tu n’as rien vu! Comment oses-tu la nommer quand enfin j’arrive à faire mon deuil, un jour à la fois? Ne sais-tu pas à quel point j’ai eu mal, espèce d’enfoiré? Que je l’entendais dans ma tête, que sa présence me tenait encore la main quand j’ai failli me jeter de ce balcon en août dernier?»

J’ai hurlé. Et dit beaucoup trop. Le silence retombe, pesant, ma voix brisée par mes cris aigus et stridents, par la violence de ces vérités crachées. Je titube, renverse mon verre en m’accrochant au comptoir, déglutis avec difficulté. Je viens de lui avouer avoir passé tout près de me suicider, ce que j’avais prévu garder pour moi à jamais. Ma colère se mute en nervosité, la nausée m’a pris, je lui fais dos en nettoyant le dégât, mes doigts se coupent contre le verre éclaté.

«Je ne t’ai jamais menti. Si je suis encore ici avec toi, c’est parce que tes sentiments sont réciproques. Que je me suis attachée à toi. Mais après tu peux croire ce que tu veux, ça m’est égal. Tu es venu surclasser tous mes projets, révolutionner mon existence. Tu veux la vérité? Je trouve tout cela difficile à avaler, mais ce serait encore pire de te laisser aller.»

Et je lui en veux encore. Terriblement. La colère grouille sous ma peau parcourue de spasmes. Je porte mon doigt coupé à ma bouche en tâchant de calmer les soubresauts de mon cœur.

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