Suite directe de cet OS.Rentrer avant minuit le jour de mon anniversaire, ça tient presque du miracle. Surtout que c’était volontaire! Le bilan fini, j’ai décidé de remettre le masque pour rentrer à la maison. Car Irina et ce qu’il me reste de conscience ont certainement un peu raison : il y a des gens qui m’attendent, ce soir-là. Montrer un peu de respects aux gens qui nous apprécient ne fera de mal à personne (et c’est peut-être ça qui me dérange, justement, huhu). J’ai tout de même l’air un peu débile à rentrer à une heure où Ludwig est certainement en train de roupiller et Riku en pleine glande devant la télé.. Bon, ok, à ce rythme, ne pas rentrer du tout en cette nuitée n’aurait rien changé mais certains sont simplement satisfaits de ce genre d’attention, non? J’ai encore bien des choses à apprendre.. Mais, c’est innocent, tout ça, vraiment. La manière dont j’arrive comme une fleur à passer la porte ouverte, dont je souris un peu gaga en apercevant le gâteau un peu foireux mais appétissant trônant sur la table de la cuisine avec 25 bougies (ouais, 25, il s’est ennuyé à ce genre de détail près, alors que ça devenait vraiment difficile à faire tenir sur la surface du dessert au chocolat), tout ça, c’était plus ou moins sincère et sans malice avant que je n’aperçoive Riku. Ou plutôt l’ombre qu’elle est devenue. Plantée au milieu du hall carrelé, je commence à penser qu’elle s’exerce pour les prochaines élections de Miss Zombie. C’est moi ou elle tremble légèrement lorsque je croise son regard? Sa Grahyena, quand à elle, sort toute penaude à l’extérieur. Ouhla. Je m’observe vite fait, mais, non, j’ai pas gardé de sang sur mes vêtements ou d’autres joyeusetés. Tout de même, je sais gérer ces trucs là, depuis le temps! Pour une raison que j’ignore, elle semble craindre ma venue.. Hm, ça pue. Pas encore au courant et de bonne humeur jusqu’à nouvel ordre, je me rapproche et arque un sourcil, en lui envoyant un air interrogatif volontairement abruti. Pourquoi cette expression de terreur et d’apitoiement digne d’un mélodrame gothique du 19ème siècle? J’ai l’impression que je suis le fantôme de l’Opera, là. Ou un truc moche, très moche, au point d’être effrayant. Ce n’est pas très flatteur! Comme elle ne se déride pas, je n’arrive même pas à vanner, et je ne sais pas ce qui m’inquiète le plus, alors : l’état apparent de ma cousine ou mon incapacité de faire une blague nulle face à l’ambiance morose qui règne dans ce rez-de-chaussée..?
« … Quoi? »Mes bras levés en l’air dans une attitude circonspecte me tombent alors que j’arrive devant ma cousine. J’vous vais prévenus, j’ai eu des répliques plus glorieuses. Le visage de Riku se décompose encore plus (si, si, c’est possible). Et vu ce qu’elle m’annonce alors, sans hésiter, car probablement qu’elle est dans l’urgence et que c’est grave, pour bien faire il aurait fallu un bon petit coup de tonnerre pour le drama.. Juste, maintenant!
« Alex, te fous pas en rogne, mais Ludwig est parti. » J’ai ouvert mon dictionnaire mental et ait commencé à chercher tous les sens que je donne au verbe « partir ». Non parce que ça peut aller de « il a trépassé » à « il est parti danser tout nu dans la cave » (donc dans ce cas, oui, on l’aurait un peu perdu).. Donc « parti », c’est vague. Mais avec l’air atrocement sérieux et désolé de Riku, je pense que Ludwig n’est pas en train de se livrer à quelque rite païen bizarre dans les sous-sols du château. Je crois que j’aurais largement préféré ça, à dire la vérité. Mais, à la place, il me faut moi aussi être sérieux et probablement préoccupé et responsable, demander plus détails.
« Parti… ? C’est un peu vague..? »Riku tortille des doigts et baisse le regard vers le carrelage. On a pas mieux à faire que s’embarrasser avec de la culpabilité, actuellement! Si Ludwig est parti je ne sais où, dans une dimension parallèle ou j’ignore quelle autre bêtise. Mais au lieu de parler, la rouge me désigne la porte, et secoue la tête d’un air désolé, avant de se rassembler vers le sol, prête à sangloter.
« Tu veux dire euh… Qu’il a… euh… »Mon regard fait des allers-retours frénétiques incessants entre la porte et ma cousine, et mon pouce part vers l’arrière pour désigner l’entrée à son tour. Et l’autre lâche un gémissement amoindri en secouant la tête. Attends.. Ludwig aurait..
« Fugué?! Il a FUGUE?! »
« .. Alex, j’te jure que… »
« MAIS EXPLIQUES MOI AU LIEU DE PLEURER! »Je ne suis pas en colère, juste complètement estomaqué. Je n’y crois tellement pas que mes mains se sont plaquées sur mes joues pour me rendre l’air encore plus con. Je ne comprends pas du tout ce qui est en train de m’arriver, et tous les que la fugue vient de déclencher. La panique commence à me gagner. Bien entendu, je me demande immédiatement « pourquoi »? Et cherche les raisons à l’origine de cette fuite impromptue ; en guise de réponse, les propos d’Irina au bloc me reviennent avec amertume. Aurais-je vraiment dû être là, ce soir? Je balaye d’un regard empressé tout autour de moi et parcours au pas de course la maison en ouvrant tous les placards, sait-on jamais si le blondin s’y est caché. Parce que si ça se trouve, il nous joue juste une mauvaise farce! Je ne sais pas comment j’ai fait si vite tous les armoires et les dessous de carpettes de la maison, mais le revoilà face à Riku qui n’a toujours pas bougé. Je fais quoi, maintenant?! Je fais volte-face et m’approche de quelques pas vers la porte d’entrée encore ouverte. Bien entendu, la nuit est tombée depuis un bail. Un vent frais et humide balaye le terrain exposé aux bourrasques, et je n’aime pas la manière dont se couvrent les cieux étoilés. Je siffle Sophie, Elijah, et avec elle rapplique aussi Anette, toutes trois fidèles au post. Un T-Shirt du gamin en main, je leur explique la situation avec un calme qui me surprend moi-même (aucune idée de combien de temps ça durera avant que je pète un gros câble et que tout cela devienne pas beau). La mine des trois chiennes se couvre immédiatement d’une inquiétude légitime, et elles commencent à renifler avec application la piste que je leur soumets. Riku est sorti à mes côtés pendant que j’appelle à moi les Pokémon présents dans les parages.
« Sophie, Elijah, allez retrouver la piste de Ludwig, je vous rejoins, avertissez-moi si vous trouvez quelque chose! Justin, Val, Lizbeth, vous restez là, et vous êtes chargés de m’avertir si Ludwig revient. Justin, tu sais toujours comment te servir du téléphone pour me biper? »Le Scalproie acquiesce que oui. Ce n’est pas sorcier, je lui ai juste appris à décrocher le téléphone fixe et à appuyer sur un bouton, celui qui a mémorisé mon portable. A vrai dire ce téléphone fixe n’a pas beaucoup d’autre utilité, car je ne donne pas ce numéro à qui que ce soit (et que j’ai pas d’amis).
« Bien, si il revient avant moi, occupes-t-en. N’utilise le téléphone sous aucun autre prétexte. »Je m’en vais dans la maison chercher les balles d’autres de mes compagnons, qui pourraient s’avérer de précieux alliés, au cas où si les choses tournent mal. Et par « tourner mal », j’ai une idée assez précise en tête, mais j’y reviendrais plus tard. Riku m’a suivi sans rien dire, et je la trouve encore sur mon chemin en m’apprêtant à partir, visiblement prête à partir aux recherches, son anorak sur le dos.
« Attends, te barres pas comme ça! J’viens avec toi! »
« T’es pas obligée, tu seras aussi bien à surveiller le château. »
« Je viens, j’te dis. »Concentré à accrocher ma ceinture de Pokéballs à ma taille, je continue de progresser en descendant l’allée du jardin, pestant déjà sur les bourrasques et les premières petites gouttes de pluie qui risquent de sérieusement nous nuire. S’il se met à pleuvoir et que le vent persiste, suivre la trace de Ludwig deviendra un vrai calvaire. J’entends Sophie qui hurle au loin pour signaler qu’elles ont trouvé quelque chose. Que Riku fasse vite son choix. Mais elle a déjà enfilé sa parka, et fait sortir Kalafina et Yui dans les airs.
« Je ne supporterais pas une seule plainte, alors t’as pas intérêt à faire le poids mort, la naine! »
« Euh. Ouais, hein.. J’crois qu’on a autant à rattraper l’un que l’autre ce coup-ci, abruti. »Je ne rétorque pas à son ton accusateur irritant, car elle n’a pas entièrement tord, même si l’envie m’en démange. Que cela ne tourne pas en bataille de « qui a raison » et « qui a tord », par pitié! Je fais mes derniers ajustements en enfilant la veste coupe-vent imperméable sombre à poches multiples pour laquelle j’ai laissé tomber mes par-dessus chics habituels, et remet également un couteau dans son holster, à ma cuisse, car, comme je le craignais, on risque de s’aventurer dans un terrain que je redoute pas mal. Au pas de course, nous rejoignons le groupe de canidés en train de japper en reniflant le sol marqué par le passage d’un Pokémon de grande taille et bien lourd. Pendant que Riku demande à Anette de l’informer, je découvre une sorte de débris vert-doré tombé au sol. Vu ces traces que je connais et la couleur de cette roche, je suis certain qu’il s’agit de traces laissées par Zak, l’Onix chromatique de Ludwig.
« Changement de plan, on piste Zak. Ludwig doit être avec elle. Si vous avez les odeurs de Loulou, Tutur, Bobby ou Lily, ça pourrait aussi nous mener à lui. »Je sais à quel point l’Onix est protectrice du jeune garçon, c’est une belle relation qu’ils se sont trouvés, tous les deux. Je ne doute pas qu’elle aura insisté pour aider Ludwig dans sa fugue, ou plutôt, s’assurer qu’il ne lui arriverait rien de fâcheux. Si j’avais su que l’Onix lui servirait à ça. Cela m’aurait grandement rassuré s’ils n’étaient pas partis dans la direction que je redoutais. Si Zak n’a peut-être pas tant d’odeur que Ludwig, au moins, il est bien plus aisé de suivre sa trace. Pour les autres, j’ai quelques doutes sur Lily ou Tutur, mais Loulou le Mateloutre et Bobby le Mangriff ne quitteraient pas leur petit maître dans ce genre de crise. Leur trajet n’est donc pas à négliger dans nos recherches. Néanmoins, je n’aime toujours pas comment se profilent les choses.
« Quand on arrivera dans le coin des roches noires, restes bien derrière moi, ok? »
« C’est quoi ce délire, encore? »
« Néron y a fait son territoire, et depuis qu’il fait sa crise d’ado.. enfin, qu’il a évolué, c’est pas mal dangereux de le déranger là-bas. »Riku hoquette un « Ah » moins assuré. Elle n’aime vraiment pas Néron. Et comme je la comprends! Et les roches noires, c’est comme cela que je désigne une partie des falaises qui avoisinent le château, ou le sable laisse place à du gravier et plus de rocaille, le tout plus sombre qu’à l’accoutumée. Oui, ça fait très dark, mais c’est peut-être pour cela que notre prince en exil y a élu domicile (et si j’étais de bonne humeur je dirais même « Dauphin en exil », et ce ne serait pas vraiment drôle, en fait, car Néron est un pingouin, mais, bref, voila, comment couler sa propre blague). Depuis l’arrivée de Néron, le jardin était un peu devenu un champ de bataille, dans la façon ou le Prinplouf se la jouait guerres de succession avec le reste de ses camarades. Il est devenu de plus en plus fort au fil du temps, puis il a fini par s’ostraciser de lui-même. Je sais pas si il fait sa crise d’ado en raison de sa récente évolution dans sa forme royale dernière et qu’il se pense trop flamboyant pour nous, ou parce qu’il a une réelle excuse derrière tout ça. Dans tous les cas, il continue de combattre, et de devenir plus fort. Je pense qu’il est simplement du genre solitaire. Mais on ne rentre pas sur ses terres sans prendre de risques. Si il n’a jamais tenté de faire du mal à Ludwig (ce qui est étonnant, vu la façon agressive dont il l’a toujours regardé), j’ai toutefois des raisons de me faire du mouron à l’idée que le gamin et ses alliés aient aussi pu passer par la case « Néron le Pingoléon ». Malheureusement, les traces et la route des odeurs continuent de nous mener sur la même piste. Les plus chiant, c’est en pleine nuit et avec cette lune cachée par les nuages, on n’a pas vraiment d’autre chois que de traverser le coin à pattes. Il n’aurait pas pu fuguer en journée, non? Non, ça aurait été moins marrant, si on n’avait pas eu à sortir les lampes frontales à la con. J’ai même pris les lunettes infrarouges dans le cas où ça se gâterait vraiment, quoi. Qu’est-ce qu’il faut pas faire! Parmi les miens, Lizbeth la Bruiverne et probablement Chris également sont suffisamment nyctalopes pour se repérer dans la nuit noire. Mais la première surveille au Château, et le deuxième ne s’est pas encore montré ce soir.. Et je le vois mal venir nous aider.
Il me faut m’interrompre dans mes irritations mentales et relever vivement le visage vers l’horizon, mes sens à fleur de peau, prêts à surprendre le premier signe de la présence de Néron. Je grimace en sentant l’atmosphère mute pour devenir plus étreignante. On y est, je crois. Je fais signe à Riku de rester collée à moi et aux trois chiennes de rester groupées elle aussi. Seul, j’aurais une chance de convaincre le Pingoléon mal dans sa gaine de me laisser passer, mais me présenter à lui avec mon armée serait la meilleure manière de déclencher sa folie. Je ne comprends rien à cette sale bestiole, je pensais y comprendre quelque chose, mais en fait, non, il est con comme ses pieds, on dirait mon paternel quand il est mal baisé. Ou pas, je n’en sais rien, à vrai dire. Mais, de manière plus ou moins officielle, nous sommes encore alliés.. Neutres, tout au plus. Du genre « l’ennemi de mon ennemi est mon ami », voyez-vous. Terriblement ennuyant, n’est-ce pas? Du coup, je n’ai aucune idée de qui d’entre moi, Ludwig et ses alliés, Néron, et ma clique actuelle, qui sont les ennemis de qui. J’essaie actuellement de faire mon petit graphique mental, mais je manque de temps et d’efficacité réflexive.
Un bruit métallique sollicite mon tympan et je saute immédiatement sur ma cousine pour l’entrainer vers le sol. Une lame lumineuse d’eau et de métal s’élance vers nous et se brise dans un flash contre un rocher. Le tout émet un bruit suraigu désagréable qui nous fait serrer les dents. Les chiennes s’éparpillent, et Sophie me rejoint en aboyant à l’adresse de l’ombre majestueuse apparue au milieu du terrain rocailleux et aride. Je me redresse en me tenant un côté endolori par la chute. J’intime à Riku de rester à terre, planquée dans le creux du rocher, mais la rouge s’accroche à mon bras de peur. La nervosité me gagne et je me débats maladroitement en lui ordonnant de me lâcher, puis un nouveau tintement retentit. J’écarquille les yeux en voyant une nouvelle lame s’élance vers nous avec plus de vitesse encore que la précédente, éclairant temporairement la nuit d’une lumière blanchâtre agressive. Dès que la première attaque s’était ruée sur nous, j’avais porté ma main à ma ceinture, et immédiatement étaient apparus Hardie et Siegfried. L’Archéondong et le Métalosse dressèrent sans perdre un instant leurs murs psychiques sur lesquels se réfléchit la nouvelle lame vaporeuse. Hardie fait apparaître une boule lumineuse d’énergie solaire derrière nous pour éclairer les lieux, dévoilant par conséquent la position de Néron à quelques dizaines de mètres. A découvert, l’empereur se rue de plus belle à ses attaques aquatiques tranchantes, prêt à les enchainer jusqu’à ce que nous n’en puissions plus. Ma cousine peureuse m’implore de rester à ses côtés et de ne pas faire de conneries, et j’envoie Hardie la protéger de son imposant corps de métal, lui interdisant de bouger jusqu’à ce que cette guéguerre soit finie.
Je progresse vers l’ennemi derrière mon Métalosse qui continue de contrecarrer avec rigueur les attaques du Pingoléon aveuglé par le soleil artificiel temporaire produit par Hardie. Mon couteau à glissé dans ma main, même si cela risque de n’être d’aucune utilité contre le pingouin d’acier, c’est un réflexe de défense devenu conditionné avec les années. Nous n’avons pas franchement de temps à perdre à affronter ce drama-queen de monarche à bec, mais il me faut tout de même sécuriser les miens. Si Ludwig est passé par là, Néron l’as forcément vu. Et il est assez intelligent pout comprendre qu’on est ici pour le chercher. Entre deux attaques, lorsque revient le silence et que le bouclier psychique de Siegfried s’estompe, je m’arrête pour interroger d’une voix ferme le Pingoléon avant qu’il ne prépare son nouvel assaut.
« Néron, arrêtes tes conneries et écoutes : on cherche Ludwig, et il est forcément passé dans le coin. Dis-nous où il est allé et ça nous évitera de perdre notre temps avec tes crises débiles! »Une lueur de doute passe dans le regard endurci du Pingoléon. Sa nageoire est restée en l’air, prête à lancer une nouvelle attaque. Mes propos ne semblent pas l’avoir calmé, cependant, il me fusille par les yeux plus encore que tantôt. Je ne sais pas bien si il comprend ce que je lui dit, mais je le forcerais bien à piger ce qu’on veut de lui. Je n’ai pas vraiment comme habitude d’être magnanime et de tendre l’autre joue quand on me donne le premier coup. Si j’étais seul, je me serais contenté de passer sur le dos de Chris, mais là, il nous faut passer ensembles et en limitant les risques au maximum. Sauf que l’autre n’est pas décidé à nous laisser la moindre parcelle de son terrain libre. Ce que ces bestioles sont territoriales, les clichés sont tout de même souvent un minimum honnêtes!
« Bon, bah, si tu veux en arriver là, tant pis. »A ces mots, le Pingoléon recommence à enchainer ses attaques avec frénésie, et Siegfried fonce sur lui tant qu’il le peut tout en nous protégeant. En agitant ses nageoires métalliques l’une après l’autre, Néron enchaine les assauts plus rapidement, sans plus d’intention de nous surprendre, juste décidé à tout casser comme un bourrin puis avoir la paix. Il change parfois de mode d’assaut pour cracher un jet d’eau bouillant au sol et ralentir notre progression. Sieg’ tient bon, mais je vois bien ses boucliers faiblir et devenir plus focalisés, ce qui nous vaut de nous recevoir quelques éclats rocheux, m’égratignant à plusieurs reprises, mais presque sans effets sur le corps indestructible du Métalosse. Néanmoins, c’est notre victoire, Néron est désormais trop focalisé sur Siegfried tout près de lui assommer son énorme patte métallique sur la face. Il recule de quelques pas, déséquilibré par le coup qui vient de le frôler. Dans l’état actuel des choses, sa position aurait été idéale pour nous crucifier. Mais un vrai stratège a toujours un coup d’avance dans sa poche. Cet atout se nomme Sophie et surgit sur le côté dans un hurlement de guerre, sa mâchoire débordante d’éclairs affamés d’électrocuter. Si la foudre avait suffit à engourdir un instant durant Néron, l’empereur parvient tout de même à balancer son aile vers Sophie avant que celle-ci ne tente de planter ses crocs. Merde. C’est raté. Il envoie la chienne mauve se ramasser sur le sol de roche sombre, monnayant des égratignures plus sérieuses sur le flanc de la fée canine. La chienne fulmine et saute vivement sur ses pattes, prête à revenir à la charge. Mais ce n’est pas d’elle que vient l’assaut suivant, mais du ciel.
« Reculez!! »Beuglais-je à tous mes alliés en entendant la vocifération familière dont le propriétaire est encore invisible dans la nuit. Sophie et Siegfried comprennent immédiatement et battent en retraite de quelques mètres, alors que l’éclair écarlate frappe avec violence la position de Néron, éclatant une partie du terrain rocailleux au passage, et fait trembler la falaise. Chris retourne dans les airs après un hurlement arrogant à la destination de son adversaire qu’il n’a jamais pu sentir. Il vole autour de lui en le narguant. Néron est encore sonné par le séisme du Scorvol, et accuse le choc en émettant des rugissements menaçants. Dans tous les cas, nous avons gagné. Aux côtés de Siegfried, j’arrive à la hauteur du Pingoléon tombé à terre.
« Vas-y, Sieg. »Ordonnais-je, glacial, à mon Métalosse qui s’exécuta, récalcitrant malgré tout. Néron nous donnera les réponses, qui le veuille ou non. Siegfried n’aime pas user de ses capacités psychiques pour fouiller la mémoire des gens ou des Pokémon, mais accepte malgré tout pour la cause de retrouver Ludwig. Et sachant aussi que ma patience du jour est très limitée. Pas qu’il n’ait grand-chose à craindre d’un humain, ce serait plutôt de Chris et Elijah réunis dans le coin qu’il se méfierait. Ce n’est pas la première fois qu’il accepte de faire ce genre de boulot à contrecœur. Brave bête. Derrière, Riku semble me demander de ne pas faire ça, elle aussi, qu’on peut passer, maintenant. Je ne l’entends plus, je suis en colère, et je veux savoir la vérité. Il est également possible que Néron ait fait prisonnier Ludwig, ou pire encore. Mais, ça, je ne veux pas y penser. Je ne ferais pas dans la demi-mesure ce soir, et je n’ai pas besoin d’excuses pour cela, je crois, si?
« Tu as fini? »Bras croisés, je m’impatiente. Cinq minutes devraient suffire à Siegfried pour sonder un souvenir si précis et récent. Et en effet, il en a terminé, mais ne semble pas disposé à me transmettre ce qu’il a trouvé. Oh, serait-il tombé sur des souvenirs sensibles du Pingoléon? Pauvre petit chou, je me prendrais d’un malin plaisir à m’en faire une séance cinéma! Je ne vais pas m’apitoyer sur le sort de Néron. C’est certain que ce dernier n’a pas forcément eu l’existence facile, vu où il en est désormais. Peut-être même qu’il me déteste tant car j’ai réussi ou il a échoué, avec mon armée, ma famille, mon frère? Et encore, je ne vois pas encore en quoi on peut dire que j’ai réussi. Tout est encore à faire. Mais tant pis, je le découvrirais bien un jour. Après un soupire sonore, je décrète que ce n’est de toute façon pas le moment de soulager mes besoins sadiques avec le visionnage mental des Malheurs de Néron en VoD. Encore à terre, ce dernier continue de m’assassiner du regard. Siegfried, en qui j’ai confiance, m’indique la direction par laquelle Néron a laissé partir mon jeune frère, a partir de ce qu’il a pu voir. Donc, il ne lui a manifestement fait aucun mal et juste laissé passé. Je continue de trouver ça étrange. Surtout vu l’animosité qui semblait l’occuper quand nous avons débarqué. Serait-il protecteur de Ludwig, malgré tout, pour une raison qui serait perdue dans ses souvenirs, ceux que Sieg aurait découvert?
Plus ou moins satisfait, je peux ordonner à ma clique de me suivre pour passer la zone. Riku se réfugie non loin de moi pour cela, tout en me lançant des regards désapprobateurs à l’égard du forcing mental que j’ai imposé au Pingoléon. Qu’elle ne commence pas à me juger, elle! Je demande à Sophie de rejoindre le château au plus vite, histoire de ne pas se forcer avec ses blessures, et à Elijah et Anette sont déjà parties devant. J’ai pris soin de confier sa propre Balle bicolore à la Démolosse, au cas où la pluie lui tomberait dessus et pourrait l’endommager, et Riku conforme que la Grahyena veillera sur elle dans ce cas-ci. Il leur faut prendre de l’avance sur la pluie imminente, et suivre autant que possible la piste qu’elles ont commencé à flairer depuis plus d’une heure désormais. Siegfried et Chris quant à eux sont invités à rester dans le coin jusqu’à ce que nous soyons sortis du territoire, histoire de contenir Néron encore un moment.
Nous nous apprêtons à progresser vers la fin des roches noires, toujours dans le sillage des traces laissées par l’Onix de Ludwig, et l’averse choisit son moment pour se déclarer. Forte, venteuse et lourde, les nuages au ciel semblent se foutre de nous en signifiant que ça ne cessera pas de sitôt. On ne pourra plus compter sur les zéniths de l’Archéodong, dans ces conditions, elle ne peut pas non plus faire disparaître les nuages à grande échelle. J’entends Riku commencer à marmonner dans mon dos. Ce n’est pas ça qui entamera ma détermination.
« Tu peux rentrer au Château, moi, je continue. »
« ..La pluie va pas m’arrêter comme ça! »
« T'en es sûre de ça? »
« Bah, la confiance règne, dis-donc.. Si je te le dis.. »J’ai l’impression qu’elle reste encore pour la forme, ça ne me plaît pas nécessairement, mais je ne saurais pas la contredire. Nous n’avons pas le temps de partir dans un débat d’égo, fort heureusement. La partie la plus difficile va donc commencer : averse, plus boue qui glisse, plus traces qui vont s’effacer, plus tension dramatique d’engueulade latente! Retrouvez notre programme de réjouissances après la coupure pub! Oui, bon, c’est ultra lourdingue comme référence, mais voila, cette situation est lourdingue, tout comme cette marche façon randonnée Golgotha Rando qui commence. Sauf qu’à la place de porter des croix, on est déjà trempés jusqu’à la culotte, j’vous raconte pas. Ouaip. Ça va faire mal.