Des sciences et des coquillettes

Feat Juju

Presque trois mois sans université, au total. Autant dire que rattraper son retard n'avait pas été une partie de plaisir, même si il avait réussi à récupérer ses cours, aidé de ses certificats médicaux. Un vrai casse-tête, et encore plus agaçant quand il constatait qu'il allait devoir passer des rattrapages pour la première fois de sa vie. En dépit de sa fierté abîmée, il s'était toutefois décidé à faire de son mieux pour que sa moyenne soit irréprochable malgré son absence prolongée. Cela voulait donc dire que en plus de ses longues, très longues heures de révisions passées à s'enfermer dans sa chambre pour lire d'obscurs bouquins incompréhensibles, il s'y rajoutait des journées interminables. Tellement interminables d'ailleurs que cela lui avait valu quelques reproches, mais il s'en fichait un peu, pour être tout à fait honnête. Il avait réussi à obtenir un peu de temps de la part d'un petit-ami très collant et en manque d'affection, au moins, en dépit du fait qu'il n'était pas toujours d'accord avec son choix d'activité de ces derniers temps. Le japonais ne regrettait pas vraiment, sachant que c'était temporaire et qu'il commençait à en voir le bout : bientôt, il pourrait reprendre une vie normale. Mais pas aujourd'hui, aujourd'hui y'avait conférence.
De temps à autre, quand il quittait la bibliothèque pour prendre une pause, il avait l'habitude de s'introduire dans les amphithéâtres pour écouter ce qui s'y disait, sans forcément prendre de notes. Déjà parce qu'il en avait le droit, et ensuite parce que même quand il ne comprenait pas tout ce qui se disait, ça ne pouvait pas lui faire de mal d'élargir ses horizons, au moins un peu. Les nouvelles technologies n'étaient pas sa spécialité, même si il avait assez de bases pour suivre les raisonnements sans forcément tout comprendre. Mais il n'était pas dans sa nature de ne pas chercher à comprendre l'inconnu, et pour être tout à fait honnête, il commençait à se rendre compte que réviser des choses qu'il savait déjà, c'était astronomiquement chiant. Un peu comme écouter son voisin de tablée parler de sa vie et de sa dispute avec sa septième copine de l'année dont le dentifrice sentait l’œuf avarié, vous savez, celle qui garde ses chaussettes dans la douche. Bref.

« Alice, tu peux pas m'appeler en journée j'ai di-oui je vais manger ton dessert, promis et oui je rentrer ce soi-non j'ai pas vu ton desssin, je le verrai tout à l'heure, je- »

Impossible d'en placer une, toutefois, maintenant qu'il était sorti de l'amphithéâtre où il était et qu'il s'occupait de répondre à l'appel visiblement urgent et crucial de sa cousine. Il poussa un long soupir en raccrochant, se disant qu'il ferait bien de vider ou de manger ce qu'elle lui avait offert avant de partir ce matin, sous peine de se faire bouder pendant deux jours. Bon, il aurait pu le jeter, mais il n'en avait malheureusement pas le cœur, alors il faudrait qu'il parvienne à avaler cette compote de fruits qui ressemblait davantage à de la soupe...  Et puis passer un autre repas n'était pas une excellente idée, même si son estomac avait encore du mal à s'adapter à son nouveau régime alimentaire. Disons que d'une boîte de conserve en deux jours à trois repas en une journée, il y avait une légère différence que son corps n'avait pas encore complètement digéré, sans jeux de mots. moisi. L'appétit n'était pas là, tout simplement, même si les ramens à l'eau ne prenaient pas énormément de place et étaient aussi sains sur le long terme qu'un régime McDo au mois.
Grommelant, il constata malheureusement qu'il était passé midi et que par conséquent, la cafétéria serait bondée. Son plan d'avaler un sandwich et un dessert en quinze minutes chrono serait donc un échec, et il ne put que prendre son mal en patience pour parvenir au moment où on lui servirait enfin un panini poulet insipide et tout juste décongelé. Mais bon, au moins, c'était fait.

Il alla donc s'asseoir sans trop faire attention à la place qu'il avait choisi et entreprit de se remplir l'estomac, sans accorder d'importance à ce qui se passait autour de lui. D'ordinaire, il passait son casque sur ses oreilles en lisant quelque chose, mais il l'avait oublié aujourd'hui, manque de bol. Il ne réagit pas quand quelqu'un se mit en face de lui, pas franchement dérangé puisqu'il ne comptait pas rester longtemps. Il ne prit d'ailleurs même pas la peine de la regarder.
Ce ne fut toutefois que lorsqu'elle lui adressa la parole pour s'excuser qu'il fut forcé de relever le regard. Il cligna des yeux, reconnaissant un visage qu'il avait vu il n'y a pas si longtemps que ça, et haussa les sourcils devant les excuses qu'on lui faisait.

« Ah, euh... Bah oui, comme vous voulez. »

Il prit quelques bouchées de son sandwich en réfléchissant à un détail qui le tracassait depuis tout à l'heure, et finit par oser poser la question qui lui brûlait les lèvres, l'air incertain tout en étant catégorique à la fois.

« Dites, vous étiez bien à la conférence de tout à l'heure ? J'me trompe peut-être, mais c'était intéressant, ce dont vous avez discuté. J'ai pas réussi à tout comprendre, mais c'est pas vraiment ma spécialité, alors... »

Il aurait pu partir sur un long discours quand on parlait de ce sujet, mais il préférait se restreindre quand il ne connaissait pas la personne, car dire autant de choses à une inconnue était déjà pas mal, pour lui.

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D'ordinaire, Natsume ne va pas vraiment aborder les gens qui se trouve à la cafétéria. Il avale son sandwich ou sa salade en dix minutes tout au plus et retourne à la bibliothèque sans plus attendre, pas vraiment fana du fait de perdre autant de temps en se remplissant la panse. Et puis bien souvent, le blabla de cantine le laisse complètement indifférent. Non, il n'a pas envie de savoir si oui ou non le prof de ilnesaitpasquoi a mis un caleçon vert à pois jaunes. Tout ce dont il rêve, c'est de poser de nouveau ses fesses dans l'antre du savoir pour qu'on lui foute la paix. Qu'il n'adresse la parole à la femme en face de lui ne s'explique donc que par le fait qu'il l'ait repéré lors de la conférence, et qu'il soit donc au courant d'une chose : il s'agit d'une scientifique. Et lorsque Natsume trouve quelqu'un de plus expérimenté que lui dans le domaine très vaste des sciences, il ouvre grand les oreilles et parle soudainement bien plus.
Néanmoins, son intervention semblait avoir provoqué un blanc, ce qui le gênait un peu. Il était pourtant sûr de ne pas avoir été trop lourd dans son intervention... Ou alors elle avait tout simplement du mal avec les gens, ce qui n'était pas vraiment quelque chose de rare dans une faculté majoritairement tournée vers les sciences. Peu importe au fond, puisqu'il n'aurait pas été des masses dérangé par le fait d'être ignoré : il aurait repris son train-train sans y penser. Il n'avait, après tout, pas vraiment de problèmes de sociabilité, et ne s'importunait pas des masses de ses échecs en la matière.

Sauf que visiblement, c'était juste qu'elle cherchait quoi répondre. Il l'écouta en prenant de temps à autre des bouchées du bout de carton qui lui servait de sandwich, en se demandant d'ailleurs si le vieux Rodolphie qui s'occupait de les préparer n'avait pas craché dedans cette fois, et ne prononça pas un mot jusqu'à ce qu'elle ait terminé. Si en effet il n'était pas vraiment habituel que des étudiants aillent témoigner des conférences, disons qu'il s'agissait d'une des seules choses qui était un peu pourvu d'intérêt, contrairement à ses cours qu'il connaissait déjà sur le bout des doigts. Et puis vu qu'Esther lui envoyait régulièrement les coordonnées de ce qu'elle trouvait intéressant, il n'était plus concevable pour lui de les manquer. Si c'était ce que senpai disait, après tout...
Il prit quelques secondes avant de répondre, avec un sourire tranquille et un peu amusé sur les bords, étant donné ce qu'il allait avouer.

« Biologie, enfin, biologie végétale et moléculaire, surtout. J'ai à peine commencé, mais j'aimerais bien pouvoir étudier en détail les pokémon plantes et les éléments végétaux qu'ils produisent. Peut-être qu'en cherchant un peu, il serait possible de... »

Il s'arrêta avant de continuer. Il n'aimait jamais parler en détails de ses projets, en dépit du fait qu'il adorait parler de son domaine de prédilection, mais il avait toujours du mal quand il s'agissait de rentrer dans ses idées les plus ambitieuses. Ce n'était pas tellement la peur d'avoir l'air prétentieux, mais surtout celle de se tromper. Avoir l'air d'un idiot, même si c'était la majorité de son existence, n'était pas quelque chose de plaisant.

« Enfin, peu importe. Vous, si j'ai bien compris, c'est au sujet du rapport entre nouvelles technologies et pokémon, c'est ça ? Je n'ai pas toutes les notions mais c'est ce que j'ai cru comprendre, tout à l'heure. »

Enfin, il avait au moins retenu ça, contrairement à son nom. Il faudrait d'ailleurs qu'il trouve le moyen de lui demander par la suite, pour vérifier si elle n'avait pas publié des travaux ou quoi que ce soit d'intéressant. Mais bon, il trouverait une occasion, ce n'était pas vraiment pressé.

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Ce n'est pas comme si il était pessimiste sur ses travaux ces temps-ci, mais il devait avouer que devoir participer aux rattrapages avait porté un sacré coup à sa sacro-sainte motivation. Non pas qu'il ait l'arrogance de croire que parce qu'il les passait en circonstances exceptionnelles il avait perdu en 'talent' (mot qu'il détestait, d'ailleurs, du plus profond de son âme), mais disons que son temps libre était drastiquement réduit. En outre, il avait également un petit-ami très demandeur en affection à cause des événements de ces derniers mois, alors il ne trouvait que rarement, si ce n'est pas du tout l'occasion de s'adonner à ses recherches. Frustrant, car perdre presque six mois à ne rien faire n'était absolument pas à la carte à la base, et qu'il devait se rendre à l'évidence. Peu importe à quel point il se surchargeait de travail, il ne pourrait jamais rattraper son retard, même avec des nuits de quatre heures de sommeil. Et oui, c'était exaspérant.
Néanmoins, parler de son domaine de prédilection l'aidait à oublier le fait qu'il n'avançait pas d'un millimètre. C'était un exutoire fantastique pour éviter de surcharger ses neurones par des frustrations et des souhaits irréalisables, et peut-être ainsi qu'il arriverait à se calmer en attendant le moment venu. Si son imagination arrivait à apaiser le flot de pensées qui l'assaillait en permanence, il ne pouvait que s'en satisfaire. Même si leurs domaines étaient différents, puisque la femme à qui il parlait était une ingénieure, il arrivait tout de même à y trouver son compte, quelque part. Quand on cherche, on trouve, me dira-t-on. Sans doute était-il tout particulièrement réceptif à ce genre de choses ces temps-ci.

Sa proposition le fit cligner des yeux, puisqu'il ne s'était pas attendu à entendre cela. L'idée était saugrenue, paradoxale, mais en même temps c'était justement pour cela qu'elle titillait sa curiosité et lui plaisait autant rien qu'à l'entendre. Il n'était pas un énorme fana de méchas et autres robots, mais vu son goût caché pour les séries Gundam, cela aurait été un mensonge éhonté que de dire qu'il était partiellement opposé à l'idée. Au moins, l'imaginaire permettait de satisfaire ce genre d'idées complètement absurdes.

« Hmm... Certains pokémon plantes se rechargent en grande partie grâce à la lumière du soleil. En ce sens, en s'inspirant de la façon dont ils récupèrent l'énergie solaire, il y a peut-être moyen d'avoir accès à une source d'énergie plus grande ? C'est théorique, bien sûr, mais étant donné que nous sommes sur une île tropicale, la ressource ne manque pas. »

Il prit quelques bouchées de son repas, le regard fixé sur le morceau de carton qui se faisait passer pour de la nourriture digérable, même si le goût le trahissait. Sans qu'il ne s'en soit aperçu, un sourire s'était dessiné sur son visage et il s'était mis à parler plus rapidement, d'un ton relativement enjoué qui ne dissimulait pas du tout son excitation malgré ses tentatives. Il ne pouvait pas s'en empêcher, c'était naturel. On aurait même pu dire que lorsqu'il était plongé dans ses pensées, il ne pensait pas à afficher sa façade habituelle, et une grande partie de sa personnalité en profitait. Tout ce qu'il avait tendance à laisser de côté, derrière son expression désintéressée, ressortait immédiatement.

« En plus de ça, les plantes ont également les meilleurs capacités de régénération qui existent. Ce sont les seuls, en dehors de certains pokémon psychiques, qui peuvent se soigner par eux-mêmes. Ils sont capable de modifier volontairement leur propre organisme, et à leur avantage. Il y a peut-être quelque chose à explorer, pour économiser de l'énergie ? J'sais pas. »

Il souriait tranquillement, l'air perdu dans son petit monde rempli de licornes et d'arcs-en-ciel. Dessinés en version équations chimiques de l'ASCII.

« Le propre de la nature, c'est de ne pas avoir besoin de l'être humain. Quelque part, perfectionner la technologie, ça revient à créer une nouvelle nature, alors... Il doit bien y avoir un moyen d'utiliser ce qui existe déjà. »

Il avait marmonné sa dernière phrase, n'osant pas trop expliciter ce qu'il pensait. Mais la pensée était là, même si elle était fugace.

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Le paradoxe scientifique par excellence est d'essayer d'égaler voir de surpasser ce qui existe déjà, en étant pourtant totalement conscient de l'impossibilité de la tâche. C'est une sorte d'optimisme sans faille, en proie néanmoins à tant de doutes et de contradictions que c'en est parfois drôle. L'ironie de cette constatation ne l'avait jamais vraiment affecté, puisqu'il estimait qu'étant donné qu'il était impossible d'égaler la nature, il valait mieux s'en servir. Sans doute était-ce pour cela qu'il n'était pas si porté que cela vers la mécanique et les technologies : à ses yeux, tout cela était temporaire, passager, imparfait. Alors que les inventions tirés de procédés naturels, eux, perdureraient. C'était une vision certes partiellement idéologique, mais qui lui plaisait. Il n'avait toutefois plus l'arrogance de penser que c'était forcément le meilleur choix, même si la logique le poussait à penser cela. Entendre une experte de ce domaine avouer que l'objectif de dépasser la nature était rassurant, en quelque sorte, et remontait en partie son estime de ces types de chercheurs. Non pas qu'il soit hippie au point de les voir comme des vampires destructeurs de planètes, mais il avait longtemps gardé de nombreux préjugés. Encore une preuve, à ses yeux, qu'on aurait dû l'enterrer vivant il y a quelques années.

Il sourit assurément en entendant parler des créations résultants de ce mélange étrange entre technologie et nature. Ça, c'était quelque chose qui l'intéressait déjà plus. Si il était impossible de la dépasser, il existait en revanche peut-être une probabilité de l'utiliser ou même de l'améliorer. Tout cela tenait bien sûr en grande partie du 'si', et si il se laissait espérer, c'était avant tout avec une énorme pessimisme sur les capacités de ses congénères à le réaliser. Après tout, l'intérêt personnel, la cupidité, la paresse et les conflits passeraient toujours avant l'envie de progrès. Ou peut-être était-il encore trop négatif, mais bon.
Il hocha négativement de la tête lorsqu'il l'entendit dire qu'elle s'était égarée, s'excusant alors que ça n'avait pas sens à ses yeux. Si cette conversation l'ennuyait vraiment, il serait déjà parti, après tout. Poliment certes car il gardait un peu de respect pour ceux qui étaient plus expérimentés que lui, mais tout de même. Son nom ne rappela rien au jeune homme, mais vu qu'il n'était pas féru de nouvelles technologies, il n'avait peut-être jamais lu un de ses ouvrages, si elle en avait écrit. Bah, il regarderait sur internet à l'occasion, si il s'en rappelait encore.

Se faire appeler 'monsieur', toutefois, coupa court à son envie de lui dire qu'elle ne le dérangeait pas. Disons surtout qu'il n'en avait pas l'habitude, et que l'entendre le surprit un peu. Il était après tout à un âge ou entendre cette appellation était étrange et inhabituel, un peu gênant sur les bords. Il ne lui en tiendrait pas rigueur, puisqu'il lui arrivait lui-même de faire l'erreur, de temps à autre, et qu'il n'aurait pas su faire mieux dans sa position.
Sa question fit naître une toute petite vague de honte. Vrai que passer les rattrapages, pour lui, était assez gênant, bien qu'il avait une excuse en or massif plaqué avec quelques petits diamants sertis de saphirs. Il gloussa d'un air gêné en se massant la nuque.

« En quelque sorte. J'ai eu de gros problèmes médicaux au deuxième semestre, du coup je n'ai pas pu aller en cours et aux examens, alors je repasse à peu près tout. Mais bon, il ne m'en reste plus que deux, et étant donné que la bibliothèque est tranquille, j'en profite. Ce n'est pas souvent qu'elle est aussi paisible. »

Il est vrai que se caler dans cet endroit était tout particulièrement agréable. Pas que la présence continuelle d'Alice à la maison maintenant qu'elle était en vacances avait tendance à être fatigante, mais cela lui donnait une excuse pour rester un peu seul, entre ses bouquins et leur odeur rassurante. Pas qu'il voulait éviter ses proches mais eh, il ne serait pas lui-même si il ne préférait se mettre au milieu d'ouvrages scientifiques en journée. En tous cas, il remerciait la formule 'problèmes médicaux' qui permettaient d'en dire davantage.

« Enfin, après, je crois que j'ai vu des ouvrages à la bibliothèque sur ce dont on parlait tout à l'heure... Si vous avez le temps, je pourrais vous les montrer. Je ne me souviens plus exactement des titres en revanche, donc il faudra chercher un peu, je crois. »

Il haussa les épaules, ne se rendant pas totalement compte de ce qu'il proposait. Ayant terminé son sandwich, il s'attaqua alors à la compote ratée d'Alice, qu'il décida de manger rapidement.

« Tout de même... Vous pensez vraiment qu'on pourrait faire ça ? Je veux dire, utiliser la nature sans que cela ne se retourne contre nous ? »

L'hypothèse le troublait, lui faisant froncer les sourcils d'un air un peu soucieux. C'était une question qu'il se posait souvent, mais qu'il n'osait jamais vraiment aborder, étant donné que peu de ses connaissances étaient très calés sur le sujet.

« Je veux dire, on ne saura jamais tout sur elle. Alors peut-être que cela pourrait se révéler dangereux quand il serait trop tard... Je suis peut-être trop pessimiste, après. »

Juste un peu.

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Un peu comme lui, Julianne semblait particulièrement intéressée par l'idée de quitter la cafétéria pour la bibliothèque. Il la comprenait, d'un côté, puisque c'était très souvent ce qu'il faisait à l'heure de midi, ne supportant pas le brouhaha constant de l'endroit qui l'empêchait d'étudier. Il se dépêcha donc de terminer son repas, en repoussant comme il le pouvait la nausée qu'il ressentait en mangeant le dessert préparé par Alice. Conscient qu'il les retardait, il préféra presser le pas et suivit Julianne sans plus attendre, en prenant son sac sous les bras. De toute façon, il était clairement en avance dans son travail, alors il pouvait se permettre de ne pas se sentir trop coupable... Ou du moins il se le disait pour atténuer la petite voix dans sa tête qui s'amusait à lui murmurer des reproches.
Effectivement, ce qu'elle disait résonnait en lui fortement. C'était quelque chose qui le motivait en général, la simple idée de la possibilité d'une réussite. Parfois même, il allait contre ses préconception sur la possible réussite en s'acharnant. C'était sa curiosité et sa tendance naturelle à pousser le bouchon toujours un peu plus loin, rien que pour voir si il en était capable. Et, comme elle le disait, c'était en quelque sorte un jeu. Aux yeux de Natsume, c'était d'abord un défi constant qu'il opposait à lui-même. Il avait toujours fait ça, après tout ; chercher à voir jusqu'à où il pourrait aller était presque sa façon de vivre. Pas étonnant, donc, que la science lui plaise autant. Il n'y avait pas de meilleur domaine pour ça. Étant donné qu'il était prêt à se donner corps et âme à son travail, il pouvait se considérer prêt à tout, même si ses proches n'étaient pas toujours d'accord avec son acharnement. Il estimait, lui, que c'était pourtant nécessaire et anecdotique, ce qui résultait de son surmenage.

Sa capacité à s'adapter n'est pas très développée lorsque cela concerne les autres, mais il n'avait aucun souci lorsque cela le concernait personnellement. Son confort personnel n'était pas vraiment sa principale préoccupation, et il sortait vite de sa zone de confort dès qu'il le fallait. Après tout, avec la vie qu'il avait vécu jusqu'à maintenant, ce n'était pas si étonnant. Au moins, cela lui faisait un talent utile et qui pouvait lui servir dans ses recherches, même si ce n'était pas grand chose.
Il hocha de la tête, signe qu'il allait effectivement la guider. Depuis qu'ils étaient rentrés dans la bibliothèque, il se sentait bien plus dans son élément, et ses yeux parcouraient déjà les rayons d'un air jovial. Une petite lueur brillait dans ses yeux, ne cachant pas son appétit de savoir devant cet étalage de connaissances diverses et toutes plus variées les unes que les autres. Là, il se sentait déjà plus à l'aise, et ses épaules s'étaient relâchées par défaut.

« Hm, je crois que c'est par là... »

Il était venu assez souvent, après tout, pour savoir où se trouvait le rayon biologie. Ce serait de la malhonnêteté pure de la part de son idiote de joueuse de prétendre le contraire, et il faudrait une raison un peu plus recherchée pour qu'il ne se passe une malheureuse petite mésaventure. Il avança à pas lents rapides vers l'endroit qui l'intéressait, souriant d'un air guilleret et atrocement niais.
Néanmoins, pauvre de lui, il était arrivé au mauvais moment. Pour une raison anecdotique, il se produit un petit accident. Un personnage inintéressant et random au possible, appelons-le Jean-Paul Dufond, était venu chercher un ouvrage quelconque sur l'éducation des castors à la Nouvelle-Orléans. Malheureusement, l'individu étant un peu petit, il se voyait obligé de sauter pour attraper son précieux, ce qui l'amena par un horrible jeu de maladresse à s'accrocher sur sa partie de l'étagère. Et dès lors, ce fut le chaos complet. Un des rayons tomba en direction de l'autre, produisant un effet de domino qui se rapprochait peu à peu d'eux à une vitesse assez effrayante.
Remerciant ses réflexes, il saisit la plus âgée par le bras avec une force qu'il ne se savait pas posséder (on supposera que c'est grâce à l'urgence de la situation) et la tira brusquement en arrière, leur évitant ainsi de finir écrasés au sol comme de vulgaires crêpes.

Néanmoins, ces pas en arrière les avait emmené dans une pièce un peu plus sombre, dont la porte était entrouverte auparavant et que Natsume avait renvoyé vers l'avant à cause du danger. Si il avait eu à la fois le temps de réagir et de regarder tout autour de lui, il se serait aperçu que la porte qu'il avait poussé était magnétique. Du coup, maintenant qu'elle avait claqué devant eux, avec un autre petit son de 'clic', le japonais comprenait petit à petit qu'ils étaient enfermés. Dans une pièce sombre, qu'il ne savait absolument pas situer, et vu le bordel ambiant, difficile de se dire si ils avaient été vus. Pour couronner le tout, la salle devait être bien insonorisée, comme dans toutes les bibliothèques d'un côté, car il n'entendait que très faiblement ce qui aurait dû être du vacarme.

« Ah, euh, merde. Rien de cassé ? »

Si il était cynique, il aurait ri en se disant que c'était incroyablement prévisible, connaissant sa maladresse. Il se rapprocha du mur en essayant de trouver un interrupteur avec ses mains, sans succès. Il finit par toucher quelque chose de dur et qu'il reconnut vite comme étant une rambarde au vu de la forme sous ses mains. Dans l'ombre, il se permit tout de même un sourire rassuré, quand bien même il ne pouvait pas être vu.

« Dites, y'a des escaliers, là. On finira bien par déboucher sur une sort- »

Continuons dans ce qui se voit arriver à des kilomètres à l'heure, donc. Sans surprise, Natsume dégringola dans les escaliers, atterrissant au bout d'une longue descente sur un sol dur. Il grommela une injure, la tête en vrac après s'être étalé ainsi, et poussa un geignement de douleur en essayant de se relever. Il marmonna la suite de ses propos.

« 'Tention à la marche. »

You don't say, Sherlock.

Des sciences et des coquillettes

Feat Juju

Aïe. Comme d'habitude, en somme, car il n'y avait pas une heure où il ne trouvait pas le moyen de se ramasser d'une façon ou d'une autre. Au bout d'un moment, il s'y était habitué et ne s'en préoccupait plus avec le temps, hormis lorsqu'il s'agissait de comptabiliser le nombre d'hématomes qu'il s'était fait au bout de la journée. La douleur passerait vite, et sa fierté s'en remettrait assez aisément, vu que sa chute n'avait pas vraiment été clairement vue, ce qui le dédouanait d'une grande partie de la honte. Il se contenta d'un maigre 'hm hm' quand la plus âgée lui demande si il était mort, plus pour lui indiquer qu'il respirait encore à peu près qu'autre chose. Il la laissa l'aider à se relever, car honnêtement ses cicatrices n'avaient pas du tout apprécié sa petite cascade, et la remercia brièvement. Un peu perdu, et remerciant tous les dieux qu'il ne craignait rien de l'obscurité (elle avait, sans être trop dramatique, souvent été son échappatoire quand il était plus jeune), il essaya de distinguer quoi que ce soit dans cette pénombre, sans succès. Il ne parvint donc pas à donner réponse à la question de l'ingénieure, lui-même perdu face à ce qu'il fallait faire. Il n'osait néanmoins pas lui dire qu'il n'avait aucune idée, de crainte qu'elle ne se mette à paniquer. Et vraiment, il n'avait pas besoin d'une adulte de près de trente ans (à vue d’œil) en train de se faire dessus, même si son imagination exagérait sûrement son image mentale.

Descendre semblait en effet la seule situation, puisque la porte refusait de se déloger, peu importe à quel point il insistait sur la pauvre poignée dans sa main. De toute façon, même si elle n'avait pas été magnétique, il aurait également eu du mal à l'ouvrir, puisqu'il avait souvent regardé ailleurs lorsque Winter avait voulu lui enseigner la simple mais très utile méthode pour crocheter des portes.  Bordel. Il FALLAIT qu'il trouve le moyen de s'embourber dans une situation grotesque et hautement incongrue, hein ? Sérieusement, c'était à s'en éclater la tête sur le mur à force d'y frapper son front.
Il ne put pas davantage se blâmer et s'injurier intérieurement, puisque le son d'un objet métallique tombant au sol le fit se retourner brusquement, alerte. Julianne s'était déjà cachée derrière lui, pas du tout rassurée, et le japonais n'aurait pas vraiment pu lui en vouloir. Pas qu'il avait peur, hein, messieurs dames, non, jamais, JAMAIS, mais la situation pouvait inquiéter. Enfin, si on suivait la logique, il y avait tout à fait de quoi se sentir menacé, et il n'était absolument pas anormal pour lui de ressentir au moins un peu de malaise. Il n'était donc pas lâche ou peureux, non messieurs dames. Ahaha.
La gorge serrée, enfin non, hein, il était juste en train de réfléchir au lieu de dire quelque chose inutilement (bien sûr), il fit un pas vers la source du bruit. En espérant que ce ne soit qu'une frayeur, car il n'aurait pas du tout pu se battre correctement dans la pénombre totale, il attrapa d'une main la rambarde de l'escalier pour se guider dans l'obscurité.
Ça va, on est pas dans un film d'horreur non plus, c'est pas comme si quelque chose allait soudainement m'attraper la main et-OHPUTAINMAMANSAMÈÈÈÈÈRE !

Il gigota immédiatement pour se dégager, se débattant comme une souris prise dans un piège avec une ferveur qui aurait presque forcé le respect si il n'était pas pathétique, jusqu'à ce que la chose ne finisse par le lâcher et ne s'écrase au sol avec un son grave. Des bruits de sons étouffés, semblable à des geignements de douleur, résonnèrent juste à la suite, ce qui eut au moins le mérite de calmer un peu Natsume. Et oui, ça a l'air très glauque, dit comme ça, mais flemme de refaire la phrase.

« Vous avez dit quelque chose ? »

En vérité, il savait bien que son interlocutrice n'avait pas parlé, c'était assez aisé à savoir. Mais il essayait davantage de calmer ses inquiétudes grandissantes quant à la source. Quand son pied buta sur quelque chose, il se pencha et tâta l'objet, avant de geler sur place. Il pouvait reconnaître la texture, et vu la forme de ce qu'il touchait, il n'y avait pas beaucoup d'hésitation à avoir. Ce qui le bloquait surtout, c'était la bizarrerie de la situation actuelle.
… Koa ?
Assez lentement, il se releva, l'air perplexe, la voix pleine de doute et de confusion. À côté traînait un morceau de tuyauterie, sans qu'il ne sache d'où il ne provienne, mais qui était sûrement ce qui était tombé tout à l'air, maintenant qu'il y pensait. Enfin, si son cerveau lui permettait de réfléchir de temps à autre.

« … M'dame, vous avez une idée de pourquoi quelqu'un est saucissonné et bâillonné ici ? »

Non parce que vraiment, pour le coup, il n'en croyait toujours pas ses yeux. Si il avait pu vérifier le pouls, il aurait su qu'il ne s'agissait pas d'un cadavre, mais une partie de lui-même se bloquait un peu, en dépit du fait que la seule main libre de la personne gesticulait pour se libérer. Parce que comprenez, tout ça devenait un peu glauque.

Des sciences et des coquillettes

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Tout cela, en somme, commençait à devenir un peu glauque sur les bords. Le calme et le sang-froid de Natsume avaient beau ne pas être inexistants, il devait avouer sentir un certain malaise. Nerveux, il se serait bien approché du corps saucissonné, si et seulement si il avait un peu plus de cran. Pas que ce serait la première fois qu'il serait proche d'un cadavre, puisque Athéris en voyait assez comme ça, mais l'hypothèse ne restait pas plaisante à envisager. Il espérait, vraiment, qu'il ne s'agissait que d'une soirée qui avait mal tourné. Il en savait quelque chose, vu son souvenir d'une fête étudiante qui lui donnait encore des frissons de dégoût quand il y repensait. Non, vraiment, il était bien plus heureux en restant éloigné des déboires de la vie estudiantine, et si il n'aimait pas tellement manquer de sociabilité, son petit monde personnel avait quelque chose de plus sympathique.  
Il la laissa se lancer dans le découpage de la corde, mais sursauta brutalement en reculant de deux pas en voyant une chose rose gluante se défaire de sa transformation Les yeux un peu écarquillés, il essaya de de se convaincre qu'il devait forcément avoir halluciné, mais non, il venait bien de voir un Métamorph passer entre ses jambes. Et vu la peur de la scientifique, il ne pouvait pas se convaincre que tout cela était le résultat de son imagination, ou des restes du poison qui avait endommagé son cerveau.
Qu'est-ce que...

Sa surprise fut de courte durée, puisque aussitôt après, un courant d'air frais provoqua un frisson puissant dans son corps, qui s'expliqua dès lors qu'il aperçut deux yeux rouges au centre d'un corps spectral gazeux.
Un Fantominus. Toujours des emmerdeurs, ceux-là...
Entre la starter de sa mère et celui de son copain, il avait ses raisons d'avoir ses réserves quant à cette espèce en tous cas, en dépit du fait qu'il n'était pas friand des clichés. De toute façon, dans ce cas-là, les pokémon qu'ils venaient de voir n'avaient pas l'air d'être d'honnêtes petites choses gentillettes. Il ne se sentait du coup pas mal de penser avoir affaire à de belles saloperies. Si il n'avouerait pas avoir senti une boule d'angoisse dans sa gorge, fierté oblige, il constatait que sa partenaire de mésaventure n'était elle-même pas forcément très à l'aise. En même temps, dans leur situation, beaucoup se seraient déjà fait dessus, donc ils pouvaient faire comme si ils étaient très courageux, en comparaison.

Appeler l’accueil était une bonne idée. En effet, il n'y avait pas pensé, et ils pourraient s'en sortir sans plus de souci en faisant ainsi. Néanmoins, aussi vite qu'il s'était réjoui, leur échappatoire glissa entre leurs doigts en même tant que le téléphone de l'ingénieure. La réaction de celle-ci ne se fit pas attendre, car elle se précipita pour remonter les escaliers, souhaitant sans doute donner une raclée à ceux qui leur avait joué un tour. En temps normal, Natsume aurait sans doute réagi normalement. Du moins, si il n'était pas claustrophobe.
Sa phobie des espaces fermés avait perdu en force, depuis quatre ans. Si peu après la mort de sa mère il suffisait que la porte de sa chambre soit fermée pour qu'il parte dans une crise d'asthme, des années de thérapie et de patience l'avaient aidé à atténuer ses réactions. Il n'irait pas danser non plus, mais même si il sentait sa gorge se nouer et si un malaise certain lui secouait l'estomac, ses poumons ne lui jouerait pas de tour tant qu'ils trouvaient un moyen rapide de sortir. En outre, il était heureux que l'obscurité permette de cacher la teinte blanchâtre de son visage.

Son malaise expliquait son manque de réaction, pour le coup, car hormis un regard perplexe vers la porte fermée, il ne réagit pas tout de suite. Avec un derpisme assez fort, il prit un ton décontracté sans s'en rendre compte, en haussant les épaules comme si tout cela était tout à fait normal.

« Bah, à la limite, on pourrait défoncer la porte ? »

Il avait du mal à croire qu'il avait dit ça. Lui, proposer de détruire une porte de la sacro-sainte bibliothèque ? Celui qui trouvait que le plus grand crime du monde était d'abîmer un livre ? Mais en dépit du fait qu'une partie de son cerveau était interloquée, l'autre était persuadée que c'était leur seule chance.... Ou du moins au départ.

« Mais il doit y avoir une sécurité, alors ça se trouve, ça ne marchera pas. »

Et il aurait pour cela fallu trouver quelque chose de suffisamment lourd, robuste et aisé à transporter pour réussir cet exploit. Pas qu'il doutait que leurs gigantesques muscles pourraient venir à bout de leur obstacle, mais si. Combiné au fait qu'il n'avait pas encore entièrement récupéré de ce qui lui était arrivé, et il était persuadé qu'ils ne réussiraient pas. Le fait qu'il n'avait pas ses pokémon sur lui n'aidait pas : rentrer avec des pokémon dans une université, dans un pays en proie à un guerre civile permanente, était une mauvaise idée. Il aurait pourtant pu aisément s'en sortir ainsi, vu le nombre de monstres de son équipe (si on pouvait appeler son troupeau ici, au bout d'un moment). Mais non.

« On pourrait continuer à descendre jusqu'à déboucher sur une sortie, si il y en a. »

Si il y en a, effectivement. Autre risque que celui-ci, et il aurait peut-être dû arrêter d'énoncer toutes les possibilités d'échec, car il allait finir par les décourager d'essayer de s'en sortir.

« Ou alors on attend ici que quelqu'un arrive, mais vu le chaos de la bibliothèque, je ne crois pas qu'ils réaliseront que nous sommes là avant un bon moment. En espérant qu'on ne manque pas d'air avant ce moment. »

Il haussa les épaules, l'air de rien. Oui, quelque chose dans son cerveau avait dû griller, définitivement. Sans doute que son malaise le rendait imperméable aux autres risques. Ou alors un de ses neurones avait éclaté. Probablement les deux. Il porta une de ses mains sur sa nuque, avant pour la gratter de façon nonchalante.

« Personnellement, je pense qu'il vaudrait mieux continuer à s'enfoncer, il doit bien y avoir une sortie, si c'est aussi large. Enfin, à mon avis. »

Ou alors il se trompait complètement, c'était possible aussi.

Des sciences et des coquillettes

Feat Juju

Certaines matinées, il se disait qu'il aurait mieux fait de rester au lit. Que ce soit à cause l'ennui insupportable de certains travaux dirigés, de la présence un peu trop collante d'un individu dans son lit, ou bien même du fait que son instinct lui intimait qu'il s'en sortirait mieux si il restait à sa place. Natsume est du genre assidu, malgré sa mauvaise foi légendaire, alors il passe généralement au dessus de tout ça, même si il lui arrive souvent d'être en retard, au grand dam de ses professeurs qui fatiguent souvent en voyant ceci. Aujourd'hui avait été une de ses journées. Entre la demie-heure qu'il avait passé à essayer de s'extirper d'un espèce de pot de glue en manque d'affection, le bus qu'il  avait raté pour arriver à l'université et le fait qu'il avait dû poireauter près d'une heure devant les portes du secrétariat (ouvert de 11h30 à 11h45 tous les jeudi après la pleine lune)... Hé bien disons qu'il aurait toutes ses raisons de vouloir retourner chez lui pour s'emmitoufler dans son bureau et s'intéresser à ses tubes à essai chéris.
Manque de bol, toutefois, vu qu'il finissait ici, sans la moindre idée de ce qu'il allait faire. Pas franchement enthousiasmé par l'hypothèse de rester à croupir ici, il acquiesça pour signifier qu'il la suivrait. De toute façon, ce n'était pas comme si il pouvait faire autre chose. Et puis visiblement, l'ingénieure souhaitait récupérer quelque chose, c'est-à-dire son portable, avec suffisamment de conviction pour qu'elle ne fasse appel à son Motisma et à son Ténéfix pour les aider. En un sens, si elle avait de la volonté pour deux, ça ne pouvait qu'arranger l'éleveur qui, de son côté, manquait d'énergie. Sûrement qu'être constamment blasé par ce qui lui arrive n'aidait pas.

Il haussa les sourcils quand elle avoua que l'objet volé avait une valeur spéciale à ses yeux. Ça, il pouvait comprendre. Il avait lui-même quelques possessions qui lui tenaient à cœur : la guitare offerte par Nagisa ou sa cape, donnée par Yann, étaient des exemples concrets. Du coup, il s'apprêtait à répondre qu'il n'y avait pas le moindre souci, mais il n'en eut pas le temps. Des bruits bien trop inquiétants se rapprochaient d'eux et avant qu'ils aient pu comprendre quoi que ce soit, ils se retrouvèrent pourchassés par des sceaux, balais et serpillières qui n'avaient pas l'air prêts de s'arrêter. Les yeux écarquillés, le japonais laissa échapper un juron.

« PUTAIN DE ME- »

Ouais, quelque chose comme ça. Son cri mourut quand un sceau lui tomba sur le visage, l'empêchant de voir vers où il se dirigeait, ce qui le fit se cogner à de nombreuses reprises contre diverses étagères, murs et autres surfaces dures. Sonné et tanguant, il ne put donc opposer aucune résistance lorsque les pokémon de la plus âgée leur sautèrent dessus avant de les délivrer de leurs « prison ». Le cadet se débattit comme un diable, en poussant des jurons qui feraient pâlir un militaire, accompagnés de geignements paniqués. Même lorsqu'il parvint à sortir la tête du sceau, ce ne fut que grâce à un sursaut, qui le projeta une nouvelle fois face contre terre.
En essayant d'oublier la douleur, il se releva d'un pas chancelant et chercha du regard la cause de la source. Lorsqu'il entendit un ricanement aigu et mesquin près d'eux, il se retourna vivement et constata que le Fantominus leur riait à la face, très content de son tour. Bouillonnant de colère, l'asiatique serra les dents en imaginant mille et une mort pour la grosse brute qui venait de les maltraiter. Et puisque celui-ci ne l'avait pas vu, Natsume se dit qu'il s'agissait là de l'occasion rêvée. Il n'hésite donc pas une seconde à bondir en direction du spectre, dans l'espoir de l'attraper, oubliant par la même occasion que saisir un corps gazeux risquait d'être très compliqué. Malheureusement pour lui, il ne vit que trop tard que Julianne se tenait tout près, ni qu'ils étaient dangereusement près du mur.

L'éleveur sauta, le fantôme se dématérialisa, et l'étudiant tomba sur le dos de la scientifique qui fut emmenée dans sa chute, contre la surface solide du-... Ou pas, en fait, puisque la porte noire qui se trouvait ici et qu'il n'avait pas vu (les joies du RP) s'ouvrit brusquement, les laissant tomber jusqu'au sol. Un sol particulièrement clair, d'ailleurs, comme du bois verni, et Natsume fut obligé de fermer les yeux suite à l'afflux soudain de lumière. Il ne comprit qu'en rouvrant les yeux qu'ils venaient d'arriver en plein amphithéâtre, sur la scène, devant les regards éberlués (ou indignés) de centaines d'étudiants. Grillé, le châtain s'obligea à sourire, et ne put s'empêcher de rire nerveusement.

« Ahaha, euh, b—b-b-onjour... »

Tuez-moi.