Casser la routine

Feat Yuna Utako

« Tu as tout ce qu'il te faut ?
- Oui, 'saac.
- Tes antidouleurs, la pokéball de Dalhia et ton pokégear ?
- Oui, et ma camisole. Ça serait bête de choper une écharde, hein. »

Isaac leva les yeux au ciel devant le sarcasme dégoulinant dans la voix de Faust.
Cela faisait maintenant une vingtaine de jours qu'il avait été blessé à la jambe, et que Faust se voyait forcé de se déplacer en béquilles ou en fauteuil roulant, ce qui amoindrissait considérablement sa mobilité. Ainsi, il avait dû passer un certain temps cloîtré dans son appartement ou dans les environs de Nuva Eja, à son grand malheur. Malgré ses tentatives répétées, il ne put pas garder l'ennui très longtemps. De plus, avec sa maladresse, il fit souvent de mauvais mouvements et il n'était pas rare de le voir pousser des jurons très colorés et assez surprenants venant de lui, redoublant à chaque fois d'inventivité lorsqu'il avait le malheur de faire un mauvais geste. Un tibia brisé n'était vraiment pas quelque chose de fantastique, bien que ce n'était pas la fin du monde. Toutefois, comme la plupart des blessures et des maladies, l'intéressé avait généralement tendance à penser que si. Faust, lui, préférait grommeler sur le fait qu'il ne pouvait pas se déplacer comme il le désirait et que, par conséquent, son voyage était quelque peu bloqué, ce qui amenait chez lui beaucoup de frustration. Le truc, c'est que la frustration chez Faust n'amenait pas à des crises de colère subites, mais plutôt à une sorte de lassitude qui l'amenait souvent à être un peu plus sarcastique qu'habituellement.
Toutefois, aujourd'hui, il avait laissé cela de côté. Il avait demandé, suite aux menaces d'Isaac de le priver de café s'il ne le faisait pas, à Yuna par message si elle avait un peu de temps pour faire un petit check-up, et au passage vérifier si son os était en chemin vers la réparation.

« À tout à l'heure. » dit-il avant que la Gardevoir d'Isaac, Thalie, ne le saisisse par le bras.

Cela lui permit d'arriver au centre pokémon de Vanawi en un claquement de doigt grâce à téléport. La Gardevoir n'attendit pas et partit dès qu'elle l'eut déposé. Il avait deux heures avant que celle-ci ne revienne le chercher.
Il passa quelques secondes à observer les environs, silencieux et soudainement frappé de pleine force par les souvenirs qui remontaient à sa mémoire. Cela faisait un certain temps qu'il n'était pas venu dans sa ville natale, et pour cause : il l'évitait à tout prix. Il espérait par ailleurs qu'un membre de sa famille ne soit pas présent dans le centre à cette heure-ci. Mais il s'imaginait des trucs.
Bon, l'avantage avec sa jambe, c'était qu'il pouvait prétendre être un pirate. Ou un truc du genre. En fait, non, il n'y avait absolument aucun rapport, mais Faust aimait beaucoup relativiser. Cela aidait beaucoup dans ce genre de situation.
Et puis bon, malgré ce qu'il disait, Faust avait toujours préféré les ninjas aux pirates. Peut-être était-ce simplement une tentative désespérée de la narratrice pour donner un sens au gif utilisé, mais cela n'est que spéculation.
Il soupira et avança lentement, majoritairement parce qu'il n'avait assez d'expérience avec ses béquilles pour aller rapidement. Foutue jambe. Sincèrement, c'était une plaie. Sans mauvais jeu de mots.

Les portes coulissèrent et il entra dans le centre pokémon, jetant des petits coup d’œil aux environs pour vérifier qu'un de ses frères ne traînait pas dans le coin. Une fois qu'il en fut assuré, il alla se poser sur un des canapés en attendant patiemment. Il aurait voulu pouvoir laisser sortir Dalhia, mais il ne souhaitait pas que la Démolosse fasse son numéro de maman poule ici. Autant attendre.
Il s'amusa à jouer avec son pokégear, sans but précis.
Oh bon sang, l'ennui allait le rendre fou, ou en tout cas plus qu'il ne l'était déjà. Bon, en un sens, ce check-up lui permettait de bouger un peu, alors en un sens, cela l'aidait un peu à casser la routine.
Comment ça, le rapprochement se voit trop ?

Casser la routine.  

Casser la routine

Feat Yuna Utako

Il salua Yuna avec un grand sourire. Lorsque l'on lui demanda ce qu'il voulait boire, Faust choisit du thé, ayant dépassé son quota de café pour la journée, majoritairement parce qu'il avait passé la nuit d'avant à travailler sur son dernier roman. Le rire de Yuna remonta un peu son moral et il s'apprêtait à répondre, mais très vite, Loki le Noctali vint à ses côtés. Celui-ci se blottit contre lui et les lèvres de Faust se tordirent en un sourire affectueux. Il caresse le Noctali chromatique, qu'il appréciait beaucoup. En effet, l'affection de Faust pour les pokémon de type ténèbres faisait qu'il avait tout d'abord eu un a priori positif sur le Noctali, et avec le temps, Loki s'était assez rapproché de lui. Le jeune homme s'amusa à passer ses doigts sur le pokémon ténèbres et à le grattouiller doucement.
Il gloussa légèrement.

« Tu ne risques rien, crois-moi. Je ne suis même pas en état de courir. »

Il passa une main sur sa nuque, un sourire d'imbécile heureux sur son visage. En réalité, il était en train d'essayer de trouver une excuse pour expliquer ce qui l'avait amené à se briser le tibia. Dire directement qu'il s'était blessé en participant à l'opération de la résistance contre le Bloc R il y a vingt jours aurait été légèrement stupide de sa part. Il chercha une bonne raison, se tritura les ménages quelques secondes en essayant de ne pas monter qu'il était légèrement gêné par le fait d'avoir à s'expliquer quant à ce qui l'avait amené à se faire une telle blessure.

« Disons que j'ai été un peu imprudent et euh... Voilà. C'est pas très malin, je sais. »

La main qui était sur sa nuque venait de remonter dans ses cheveux. Il rit jaune, se rendant soudainement compte qu'il paniquait un peu pour rien. Il tripota ses mèches indomptables, un mauvais réflexe qu'il avait depuis l'enfance (Arceus maudissez la génétique pour les cheveux bizarres).

« J'ai été me faire plâtrer. Le truc, c'est que les médecins n'ont pas beaucoup de temps et que donc, je n'avais personne pour me suivre, mais ça, ça ne me dérangeait pas trop. En fait, ça ne m'arrangeait beaucoup, pour dire toute la vérité. »

Une petite ombre de rouge passa sur son visage, se fustigeant mentalement pour agir comme un enfant lorsqu'il s'agissait de sa santé, mais il était légèrement agacé par le temps qu'il devait passer à être aussi immobile et, en étant parfaitement honnête, à être aussi inutile. Car oui, ainsi, il n'aidait personne, il ne voyageait pas, ne progressait pas. C'était une sale période à passer, mais il ne pouvait pas s'empêcher de ressentir une frustration massive.
Faust et l'agacement, c'était une équation aux résultats assez hilarants.

« Mais j'ai un ami qui m'a poussé à venir te demander si je pouvais faire un check-up, pour vérifier que tout va bien. »

Intérieurement, Faust promettait des heures et des heures de torture à Isaac. Et BEAUCOUP de sel dans son thé, de préférence pendant une semaine ou deux.

« Je...  Je suis vraiment désolé de te faire perdre du temps pour te demander ça. »

Si il avait pu, il se serait caché dans un trou. Un trou très très profond. Faust n'aimait pas demander des services, pas du tout. Il avait toujours appris à se débrouiller seul, ou bien à prendre fierté lorsqu'il pouvait résoudre ses problèmes tout seul. Malheureusement pour lui, dans le monde réel, c'était déjà un peu plus compliqué.

J'adore les cadeaux !

Casser la routine

Feat Yuna Utako

Faust n'était pas habitué aux cadeaux, pour dire toute la vérité. Étant, avec son jumeau, l’aîné d'une famille assez nombreuse, Faust avait toujours été celui qui devait préparer et donner des cadeaux à ses petits frères, question d'habitude. Et sachant que, dans une grande famille, offrir quelque chose à un enfant signifie donner quelque chose de même valeur aux autres, il était très rare que l'on lui offre quelque chose. Pour tout dire, le seul cadeau qu'il avait reçu, hormis quelques broutilles ici et là, avait été son Embrylex, dont il avait pris grand soin. Il ne se plaignait pas, loin de là, mais tout cela signifiait une chose : Faust n'avait pas du tout l'habitude d'être celui qui recevait quelque chose. Il se sentit gêné, malgré le sourire mi-bancal et joyeux sur son visage. Il fermait sa bouche et l'ouvrait à plusieurs reprises, à la manière d'un poisson. Légèrement étonné, il n'osait pas parler, observant l’œuf tacheté dans ses mains avec incrédulité. Il en était presque arrivé à croire qu'il allait se réveiller dans quelques seconde, et finissait par le vouloir, persuadé que tout cela n'était qu'un rêve cruel destiné à le narguer. Néanmoins, ce n'en était pas un et Faust voulut bredouiller des remerciements, mais il eut du mal à les prononcer. Il devait avoir l'air fin, avec ses yeux écarquillés, sa bouche entrouverte et l'expression sur son visage qui devait être le synonyme du mot 'incrédule'.
Toutefois, son cerveau parut bien vouloir fonctionner après que l'idée même de la chose soit devenue possible à ses yeux.

« Tu... Tu en es sûre ? Ça ne dérangera pas Loki non plus ? »

Il ressemblait à un enfant gêné, à l'instant, pensant qu'il dérangeait d'une façon ou d'une autre. Il observa l’œuf quelques instants, légèrement anxieux. S'occuper d'un œuf, ce n'était pas rien. Bien qu'il s'était occupé d'un autre petit œuf il y a peu et qu'il en soit sorti une Baggiguane en parfaite santé, il doutait de sa capacité à s'occuper d'un si petit être, qui était surtout très fragile.
Et là, c'était une surtout une question d'insécurité. Que voulez-vous, il y avait des trucs qui ne partaient jamais vraiment. En cherchant une façon d'être redevable à Yuna, une idée lui vint.

« Par contre, je pense que j'ai aussi quelque chose pour toi ! » dit-il avec un grand sourire.

Il posa doucement l'oeuf sur lui, de façon à ce qu'il ne tombe pas et reste bien protégé par son corps avant de saisir une pokéball à sa ceinture. Le châtain appuya sur le bouton au centre de la pokéball et dans un faisceau rouge, Fae, l'Absol chromatique, apparut. Elle jeta un regard circulaire aux alentours, avant que ses yeux ne se concentrent sur le conseiller et sur l’œuf qu'il tenait. D'un regard significatif, elle indiqua au châtain son incompréhension. Faust lui fit les yeux de chien battu, ou du moins l'équivalent qui lui permettait de ne pas perdre toute sa dignité. Ou en tout cas ce qui lui en restait.

« Fae, tu veux bien donner quelques uns de tes poils à Yuna ? »

L'Absol parut réfléchir quelques instants, observant la jeune femme de façon minutieuse, avant de hocher légèrement de la tête pour montrer son accord. Un grand sourire étira les lèvres de Faust.
Au moins, il aurait l'impression que cela aurait été un échange égal.

« Désolé de ne pas y avoir pensé plus tôt ! Je pense que ça pourra t'être utile pour tes recherches, non ? »

Casser la routine  

Casser la routine

Feat Yuna Utako

Le jeune homme remercia l'Absol pour sa coopération et la rappela dans sa pokéball, désirant ne pas occuper trop de place dans le centre. Il offrit un sourire radieux à Yuna, son moral retrouvé en voyant qu'il avait réussi à faire quelque chose de sympa, aujourd'hui. Il jeta un coup d’œil à l’œuf pour s'assurer qu'il ne risquait rien et, en souriant, se lança sur un sujet de conversation qui se promettait long.
Il ne fallait pas lancer Faust sur son job, vraiment. Si Méphisto, le conseiller, était presque une toute autre dimension de sa personnalité, il n'en restait pas moins que le châtain adorait son job, malgré les inconvénients que cela apportait, comme la curiosité des journalistes. Et les rumeurs plus que nombreuses sur sa vie privée.

« J'ai croisé quelques compétiteurs, et j'ai entendu des noms ici et là, mais vu le nombre... Apparemment, la compétition de cette année risque d'être intéressante, et j'attends l'été avec impatience. » dit-il d'un ton jovial.

Il adorait les combats depuis le début de son adolescence. Sa rivalité avec son jumeau avait peut-être attisé tout cela, en fait. Ce constant désir de s'améliorer était né dès sa première défaite, dès qu'il avait compris qu'il était loin d'être invincible. Pour Faust, qui lui vivait encore sur un nuage et dont l'égo, à treize ans, n'avait de taille que la bizarrerie de la coupe de cheveux, ce fut une véritable claque. Et non pas une leçon d'humilité, malheureusement, mais plutôt d'étincelle qui l'avait amené à vouloir progresser.
Après, bien évidemment, il y avait eut la vie qu'il avait vécu dans la rue pendant quatres ans, alternant entre dormir à la belle étoile et dormir à l'auberge. Pour pouvoir disposer d'un lit chaud, il avait dû remporter combats sur combats pour pouvoir payer. Les défaites, et surtout le manque de confort, l'avaient poussé à s'améliorer.  
Maintenant, les défaites n'avaient plus ce sens-là pour lui.

« Je ne suis pas stressé, tu sais. J'adore cette période de l'année ; voir tous ces gens, tous ces dresseurs, tous ces pokémon qui sont arrivés si loin et qui donnent tout ce qu'ils ont. Et puis, depuis que je suis devenu conseiller, de l'eau est passée sous les ponts. »

Il fit une petite pause, une moue légèrement embarrassée sur son visage en se souvenant de ce qu'il allait confier à la scientifique.

«  J'étais terrorisé, pour mon premier match. Je veux dire, je crois que j'étais plus terrorisé que mon adversaire ! » expliqua-t-il, avant de glousser en y pensant.

Il se souvenait encore de son premier match en tant que conseiller, alors qu'il bafouillait à chaque mot et lorsque voir tant de personnes l'observer le paralysait par la peur. Maintenant, il avait trouvé son truc. Loin était l'époque où il tremblait à l'idée de disputer un match important : dorénavant, il affichait un grand rictus sous son masque et ses yeux, malgré les différentes lentilles de couleurs qu'il portait selon l'humeur, brillaient toujours d'une lueur folle.

« Mais tu sais, je dois t'avouer un truc : j'adore perdre. »

Il offrit à Yuna un sourire franc et plein de dents. Il appréciait la jeune femme, et pour cela pouvait se confier à elle sans se sentir particulièrement gêné .

« Voir un dresseur gagner... C'est voir tout son potentiel qui éclot. Toute la force qu'il tire pour arriver à son but, l'affection qu'il porte à ses pokémon et sa volonté qui embrase chaque obstacle. Ces quelques secondes avant la fin d'un match sont magnifiques. »

Et était honnête. Il se sentait toujours comme spectateur, dans ces instants, et il était aux premières loges. Ainsi, il avait tendance à faire une sale tête le soir, si un challenger prometteur avait perdu d'un centimètre.

« Gagner, c'est parfois pour moi aussi décevant que pour celui qui a perdu, parce que certains ne sont pas prêts. Certains n'ont pas acquis assez d'expérience, d'autres ont été malchanceux. »

Il passa une main derrière sa nuque et un rire bancal s'échappa de sa gorge.

« Je ne vais pas mentir en te disant que des fois, gagner ne me remonte pas le moral. Quand je peux renvoyer certains dresseurs qui ne sont arrivés là que par la force brute et sans considération pour leurs pokémon... C'est un vrai plaisir. »

Un sourire véritable et honnête étira ses lèvres.

« Je... Désolé. Je me suis un peu emporté. Et toi, de ton côté ? Hormis le boulot, rien de neuf ? »

Casser la routine.

Casser la routine

Feat Yuna Utako

L'expression « la bombe fut lancée » ne pouvait pas être plus proche de la situation dans laquelle se trouvait Faust. Hormis si une véritable bombe était lancée, évidemment, mais là n'était pas le sujet. En effet, en entendant cela, Faust se mura dans le silence, incapable de donner une réponse immédiate. Il baissa les yeux, comme s'il cherchait une réponse au sol. Vraiment, la déclaration de Yuna ne pouvait pas tomber à un pire moment : comment était-il supposé réagir alors qu'il y a quelques semaines à peine, il doutait encore du mouvement ? Le conseiller se voyait devant un problème épineux : devait-il l'encourager à rejoindre leurs rangs, ou devait-il tenter de s'assurer qu'elle resterait loin du conflit ? Dans les deux cas, de toute façon, il ne pensait pas que ses paroles auraient une influence réelle, mais le simple fait de réfléchir à cela le mettait mal à l'aise. Après tout, on ne parlait pas de ça sans avoir la certitude que la personne en face de soi était digne de confiance. En ces sombres, même un homme à l'apparence angélique pouvait être un démon déguisé. Certains étaient plus discrets que d'autres, mais la dénonciation étaient la première peur des résistants, qui adoptaient donc une identité et une apparence différente pour se protéger, en quelque sorte.
Ou pour protéger les autres. Cela variait.

« … Tu... Tu es sûre ? » demanda-t-il finalement en balbutiant, rencontrant enfin les yeux de Yuna.

Son regard se planta dans celui de son interlocutrice, inflexible et infaillible, comme s'il avait retrouvé sa concentration et son calme. Il se souvenait. Il se souvenait de ce qu'il avait ressenti, quand il avait rejoint la résistance. Il se souvenait de ce qu'il avait ressenti, quand il avait cherché et cherché pendant des semaines un moyen de rejoindre la résistance, malgré les risques, tout ça pour étouffer sa soif de vengeance. Il avait été idiot, mais sa chance l'avait accompagné et il s'en était sorti sans une balle dans la tête.
Il avait peur pour Yuna. Parce qu'il savait, maintenant.

« Je veux dire... Si tu fais ça, il n'y aura pas de retour en arrière possible. Tu... »

Il savait qu'un pareil choix ne se faisait pas à la légère. Qu'un choix aussi massif se réfléchissait, qu'après, la porte pour s'échapper disparaissait.

« Tu vas risquer ta vie. Tu vas voir des choses qui vont te.. Que tu n'arriveras plus à oublier. »

Et peut-être parlait-il de lui-même, maintenant. Peut-être avait-il l'impression de dire à Yuna ce qu'il aurait voulu savoir lorsqu'il était plus jeune, mais là n'était pas la question. Ou en tous cas il se répétait avec une insistante qui aurait pu faire penser le contraire. Il espérait que la décision de son amie n'avait pas été prise d'un coup de tête, qu'elle n'avait pas décidé de rejoindre les rangs de la résistance par utopisme, comme il l'avait fait.
Il veut lui dire que tout ça, c'est juste un rêve, qu'ils n'arriveront qu'à diminuer lentement la douleur mais qu'elle surgira toujours plus forte et plus résistante. Il veut dire que même les plus honorables des héros commettent des actes abominables au nom d'une justice qui est la leur, mais il se tait.

« Je ne veux pas influencer ton choix. Ce n'est pas à moi de décider si tu prends la bonne ou la mauvaise décision, je ne suis vraiment pas doué pour ça. »

Il se mordit les lèvres.
Il veut lui dire la vérité, mais il ne peut pas. Il ne peut pas donner son nom à tout le monde, et il ne peut définitivement pas se permettre de le faire. Il se contente d'avaler toutes les paroles qu'il veut laisser s'échapper.

« … Mais si jamais tu te décides... Cherche Noctis. Il me doit un service. »

Toute l'ironie de sa phrase était une blague qu'il se faisait à lui-même, et ce semi-mensonge avait un goût amer sur ses lèvres. Néanmoins, son visage ne trahit pas ses pensées, et ce fut à cet instant que Faust fut heureux d'avoir un certain contrôle sur ses émotions. On ne devenait pas voleur ou espion si l'on avait pas la possibilité de contrôler ses muscles faciaux.

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Feat Yuna Utako

Il y a des fois où Faust pensait qu'il détestait être aussi sensible.
Non pas qu'il allait se mettre à pleurer, loin de là. Disons surtout qu'il se sentait très con, une fois que Yuna eut fini de lui assurer sa volonté, une fois que son discours se termina et ne le laisse silencieux, incapable de former un mot sans qu'il ne lui semble qu'il ressemblait à un idiot. Il se sentit très petit, avec sa méfiance et sa vision pessimiste des choses, alors que la jeune femme ne baissait pas les bras malgré le danger et l'horreur des choses qu'elle risquait de voir. C'était un peu comme une claque, pour lui qui se retrouvait souvent à voir tout du mauvais côté, à hésiter sur chacune de ses actions. Il aurait pu rire, vraiment, mais il ne doutait pas que cela aurait été mal interprété, et ainsi, avait choisi de rester stoïque.
Un sourire amusé étira ses lèvres à la mention de son autre nom. Combien en avait-il, déjà ? Il était à quatre, pour l'instant, ce qui était assez impressionnant pour quelqu'un de son âge. Il n'était pas important, mais il se cachait derrière tant de noms qu'on aurait pu croire qu'il cachait quelque chose de très important. Peut-être qu'il s'agissait de lui-même, tout simplement, mais Faust supposait que la réponse était loin d'être aussi simple. Tout était toujours trop compliqué, à son grand malheur. Il n'y avait jamais de réponse facile, malgré ses folles espérances.

« Tu le trouveras assez facilement, ne t'inquiètes pas. Tu comprendras. » dit-il, baissant le regard quelques secondes.

Il pensa. Il se souvint. Il y avait tant de souvenirs qui remontaient dans son esprit qu'il aurait été incapable de dire exactement lequel d'entre eux était le plus important, ou même de dire qu'ils étaient tous liés à cette conversation qui avait pris un tournant bien trop dramatique à ses yeux. Il n'aimait pas vraiment parler de pareils sujets, principalement parce qu'il se retrouvait très souvent au dépourvu. Il n'était pas très doué pour gérer ses émotions, à vrai dire, qu'ils gardaient enfermées dans un petit coffre jusqu'à ce que tout explose, le laissant comme victime et cause de nombreux accidents. Il releva la tête et offrit à la scientifique un véritable sourire, plein de gentillesse et de douceur ; sourire qu'il ne réservait qu'à quelques heureux élus.

« Je... Je te souhaite d'être heureuse de ton choix, Yuna. Vraiment. »

Alors qu'il s'apprêtait à lancer un nouveau sujet de conversation, son téléphone vibra et il pesta, reconnaissant la sonnerie. Mince. Qu'est-ce que Isaac voulait, encore ? Ses yeux se fixèrent sur le message et il cligna des yeux, éberlué.
S'il avait pu se facepalmer à l'instant il l'aurait fait, très sincèrement.

J'ai fait exploser le micro-ondes. Je savais pas pour les fourchettes.
Thalie arrive dans cinq minutes pour te chercher.
Ne me tue pas.

Ça, il allait le faire dès qu'il serait de retour chez lui. Il jeta un regard de chien battu à Yuna et se mordit les lèvres, gêné quant à ce qu'il allait demander.

« Excuse-moi de t'embêter, Yuna, mais... Est-ce que tu peux porter l'oeuf jusqu'en bas ? La Gardevoir d'un ami vient me chercher, elle pourra le prendre, mais là, j'ai les mains pleines. »

Il prit ses béquilles dans ses mains et se prépara à descendre,  l'air désolé et un sourire bancal sur ses lèvres.