La soirée s'annonçait palpitante pour la rouquine. Nala finissait de lui brosser les cheveux, pendant qu'elle faisait sécher son vernis sur ses ongles. Ce soir, le gala de la ville avait comme invité une certaine championne coordinatrice. Oui, Althéa était l'invité de marque. Elle était connue, autant pour son talent que pour sa beauté - il y avait de gênant là-dedans qu'elle ne savait jamais si les gens l'aimaient vraiment ou si ils en avaient juste après son physique ou sa gloire. Elle s'avança jusque dans sa chambre, se vêtit de sa magnifique robe achetée pour l'occasion. Vaporeuse, faite de voiles légers et d'un corsage, elle semblait à la fois élégante, et digne d'une princesse tzigane. D'écarlate et d'or, le vêtement faisait ressortir la couleur de feu de sa longue chevelure opulente, et rehaussait sa peau pâle délicatement rosée.

Être belle était tout un travail, mais elle bossait là-dessus depuis toute petite. Faire ressortir la beauté des choses, c'était devenu une seconde nature. Pratique, quand on était une fille aussi féminine et désireuse de plaire qu'elle.



Le fantôme voilé s'éclipsa dans un tintement de rires, et disparut. Althéa attendait un garde du corps. Quelle idée ! Mais avec l'activité due au régime et à la résistance, on avait décidé de la garder en sûreté et de lui offrir un homme pour la garder. MOu bien la surveiller ? Qu'importe. Le corset lacé sur sa tunique, les épaules découvertes, la gorge comme offerte, ornée d'un collier d'argent, Althéa était prête. Et comme dernière touche, Sarabi vint se placer contre la naissance de sa poitrine mise en avant par son corsage. Comme un grain de beauté, l'araignée contrastait avec la peau laiteuse par sa couleur d'or pâle, jaune comme le soleil. Althéa sentait le chatouillis de ses minuscules pattes sur sa peau.

Ayant rangé ses pokéballs et quelques affaires dans une pochette, elle descendit pour attendre qu'Esmée lui envoie un signal. Elle finissait de ranger quelques vêtements, paresseusement, quand la fantôme apparut, faisant résonner son rire. Althéa remis de l'ordre dans ses cheveux, un réflexe purement paranoïaque, et ouvrit avant que l'inconnu ne puisse frapper. Un grand sourire flotta sur ses lèvres, comme si ce simple fait la rendait victorieuse.



Aussitôt dit, aussitôt fait. Manteau de blanc bordé d'or couvrant ses épaules, elle finit par fermer la porte. Amusée et taquine, Esmée apparut derrière elle, éclata d'un rire habituel aux oreilles de la rousse, et disparut. Althéa savait que ses pokémons ne seraient jamais loin, tout du long de la soirée. Esmée veillerait, tout comme Sarabi. Quant aux autres, ils resteraient sagement dans leurs pokéballs, sauf si on lui demandait à les voir.



Souriante, la rouquine avait donc posé son regard aux cils empesés de mascara sur le jeune homme face à elle. Ses prunelles pâles l'observaient avec curiosité. C'est au moment où le garçon avait tout le loisir de la regarder que Sarabi, taquine elle aussi, décida de bouger et vint se loger dans le creux de son cou. Althéa frissonna sous sa caresse, mais ne broncha pas ; d'autres femmes qu'elle auraient eu peur, mais elle connaissait son pokémon. Sarabi la prenait pour sa mère, et mourrait pour elle, comme la plupart de ses pokémons. Althéa attendit donc que le jeune homme se présente, puis s'avança vers la voiture. Allait-il la conduire, ou serait-ce un chauffeur ? La salle n'était qu'à une dizaine de minutes de chez elle. Elle n'aurait pas longtemps à attendre, mais peut-être que discuter un peu avec le jeune homme serait distrayant.

Althéa songeait qu'il devait la connaître. En ville, son visage était un peu partout. Elle était un peu la figure de la ville. Si ils savaient ! La sirène et Red Fox ne faisaient qu'une ; une sirène voleuse, une cambrioleuse connue elle aussi. Personne n'avait encore fait le rapprochement. Cependant, son secret avait été découvert, et elle détestait cette idée. Elle avait perdu, elle avait été humiliée, et il n'y avait pas de sentiment plus fort chez elle que la fierté. Repoussant ces émotions, elle préféra se concentrer sur la soirée à venir : elle serait agréable, elle recevrait sûrement des babioles de ses fans, elle serait remercié, on la complimenterait. Encore et toujours la même routine. Sauf que d'habitude, elle n'avait pas de garde du corps. Peut-être que ce serait amusant ? Mais encore fallait-il savoir de quel bois il était fait, celui-là ... Elle lança un regard amusé au jeune homme, sans mot dire.

Il se présente, avec un air embarrassé plutôt visible. Althéa tente de ne pas montrer d'amusement ; après tout, des hommes timides, elle en a déjà vu. Logan, hm ? Elle hoche la tête, appréciant qu'il se présente également à Esmé. Cette dernière disparait dans un petit rire ; Althéa sait qu'elle les suivra à son rythme. Le fantôme a toujours été un peu décalé par rapport à la réalité, mais mine de rien, elle doit être ravie que le jeune homme se soit présenté à elle spontanément. Un bon point pour lui. L'amour que porte la rousse à ses compagnes est aussi fusionnel que possible. Elles sont son rempart contre les agressions, ses complices de ses vols et de ses combats de coordination, ses confidentes, ses amies.

Althéa monte dans l'arrière de la voiture et regarde le jeune homme disparaître devant. Ainsi,c'est lui qui la conduira. Bien. La voiture démarre, en route pour le gala. La rousse hésite, puis se lance dans une conversation, ou plutôt un monologue. Elle préfère éclaircir les choses. Pour éviter que Logan ne soit trop zélé sur son rôle de garde du corps. Il a beau être mignon, cela n'arrête pas Althéa. Elle aime contrôler les choses, et les gens, et être humiliée en public, hors de question. Elle ne lui pardonnerait pas.



Althéa a un petit sourire amusé, et regarde derrière la vitre de la voiture. La nuit est tombée depuis longtemps, et l'hiver refroidit l'air. Les lumières de la ville forment un halo doré. La rousse ne dit rien, un peu bercée par le mouvement et le ronronnement du moteur. Finalement, ils arrivent. Ils sortent, et elle marche doucement, autant par besoin à cause de ses chaussures à talons que parce qu'elle sait qu'une marche rapide donne l'air d'une dinde à une femme. Presque langoureusement, elle pénètre dans la salle des fêtes. Aussitôt entrée, aussitôt alpaguée. Le majordome, sûrement s'approche d'eux, mais non. Elle reconnaît en lui un des gros bonnets de la ville. Elle ne se souvient plus de son nom, alors elle sourit, l'air de rien.



Le regard de l'homme se pose sur Logan, et Althéa se retient de rire. Elle hausse les épaules. Elle ne s'expliquera pas. Ils n'ont pas à savoir. L'homme comprend, rejette ses questions puis prenant le bras de Althéa, ils avancent dans la salle bondée. Décors blancs et or, rouge et bleu, couleurs chaudes, tapisseries, une grande table au milieu où sont posés des plats de nourriture et des verres de boissons diverses.



Chouette. Althéa le suit docilement, à petits pas élégants. Elle serre des mains, embrasse des joues de femmes ridées et enfarinées de poudre, de maquillage. Elle sourit, alors qu'elle n'en a pas forcément envie. Elle s'excuse, prétexte avoir soif, puis rejoint la table de banquet pour se servir un verre frais. Du ponch. Ca ira. Elle boit une gorgée, grimace, et regarde l'araignée d'or venir se poser sur le dos de sa main. Une femme approche, se présente, puis voit la statitik et pousse un petit cri, attirant les regards, avant de s'éloigner. Althéa étouffe un rire, et rejoint discrètement Logan. La soirée se passe comme prévu, quoi que lentement.



Oui, elle râle un peu. Et elle profite aussi pour faire signe à Logan qu'il peut se servir au banquet, si il veut. Il n'a pas à rester planté à la surveiller toute la soirée, si en plus il n'a pas le droit de boire un coup. Soudain, la silhouette d'un homme apparaît devant elle ; il porte sur son épaule un pichu avec une cicatrice sur l'oeil. Il se penche, lui baise la main et lui offre un sourire. De ces sourires qui semblent plutôt émis par des requins que des hommes. Althéa ne dit rien, son visage reste un masque impassible et poli, mais elle devine chez cet homme un intérêt autre que celui d'un homme sincère.



Son regard d'acier se pose sur Logan, en même temps que le sien. Puis il hausse les sourcils, comme si c'était imprévu, comme si c'était une surprise. Allons-bon, n'a t-elle plus le droit de venir avec qui elle veut ? Logan n'est certes pas son compagnon, mais si elle le voulait, elle aurait pu ! Althéa déteste qu'on lui dise quoi faire. Alors, elle s'approche de Logan et lui prends le bras, d'un air de défi. Elle sait que l'homme ira raconter tout ça, mais tant pis. La rousse en a marre que l'on médite sur chacun de ses gestes ; son attitude peut sembler puérile, mais elle s'en fiche.



Elle minaude près de Logan, puis l'entraîne plus loin. Elle sent le regard de l'homme sur eux ; elle s'arrange pour aller dans un coin abrité et loin de la foule, puis la coordinatrice s'adosse au mur et rit tout bas.



Sarabi vient frotter sa toute petite tête contre la joue de sa maîtresse, et Althéa en profite pour soupirer tout bas, sa poitrine montant et descendant au rythme de son souffle. Elle sait qu'elle devra retourner dans la valse sociale, bientôt. Mais pour le moment, elle reprends respiration. Elle souffle. Althéa pose son regard clair, puis rit tout bas.



Ce ne sont pas de vraies excuses, mais c'est à ses yeux ce qui y ressemble le plus. Trop de fierté pour prononcer ces mots. Elle se redresse et s'étire. Elle a bien vu l'embarras du jeune homme. Et la coordinatrice devine qu'elle lui plaît. Il est mignon, après tout. Peut-être qu'il pourrait la divertir un peu ? Pour un peu, elle jouerait bien un petit jeu ... Althéa n'a pas peur de faire scandale. Au contraire. Ca l'amuse.