« Je sais pas putain, Soltan, JE SAIS PAS! »
« Démerde-toi. »
« T’es pas cool, je te demande pas souvent de l’aide! … Euh, si en fait j’en demande souvent, c’est bon, fais pas cette gueule, je plaide coupable! Ça te va? Aides-moi maintenant! »
« Alex n’est pas difficile niveau cadeau si tu veux mon avis. Offre-lui un couteau en céramique il sera très content. En plus, je suis sûr qu’ils sont en promotion à la période des fêtes. »
« Ouaiiiiis, supeeeer…. ça fait vachement fête comme cadeau! Quelle putain de super idée, merci, gros tas! »
« Tu peux te brosser pour que je t’aide à lui trouver un cadeau de noël, en employant ce ton. »
« Ouais bah… T’as pas de meilleures idées que moi, en attendant »
« J’ai des idées, moi, au moins. Et y’a pas le feu au lac, on est en novembre. »
« Tu vas lui offrir quoi? »
« Moi? »
« Non, le pape… »
« Qu’est-ce que le pape vient faire dans cette- »
« C’est à toi que je demande pas au Pape! »
« … Hm. Pour répondre à ta question, non, je n’ai rien à lui offrir. »
« T’es con, c’est Noël, c’est l’occase. »
« .. j’ai pas envie de faire un cadeau à un autre mec. »
« T’es sérieux, là? Entre nous, quand avec Alex vous vous isolez derrière la maison pour vos petits entrainements et vos bagarres je trouve ça vachement plus louche et gay que de vous faire des cadeaux à Noël. »
« … »
« Bah alors quoi? »
« J’aime pas Noël. »
« Arrêtes de faire ton vieux con, tout le monde aime Noël! »
« Non. »
« J’suis sûre que tu dis ça parce que ça te ficherais la honte de passer Noël pour une fois avec Alex et moi, et que tu serais foutrement trop gêné d’offrir des cadeaux et d’en recevoir. Avoue! »
« … Tu dis n’importe quoi. »
« Avouuuuuuuue. »
« Certes. »
« En attendant… Noël, ça veut dire bien bouffer. Tu vois ou je veux en venir? »
« … Tu veux que j’emmène JackDaniels a l’abattoir juste pour vous servir un repas en l’honneur d’un mec qui est né d’une immaculée conception de mes deux? »
« Non, mais le petit Jésus, l’âne gris, le bœuf, on s’est fout, Soltan. C’est pas la question! »
« On ne se fout pas du bœuf. »
« Mais je parlais pas de TON bœuf, andouille! Celui à côté duquel… Fucking shit, mais on arrive à rien avec toi! Tu veux pas venir avec moi à Amanil pour trouver quoi acheter à Alex? »
« Je n’ai pas envie de porter tes sacs de shopping. »
« Shit. Spotted. »
« Prévisible. »
« Maiiiiiiiis… Pleaaaaaaaaase Soltanouneeeeeeeet! Viens m’aideeeeer! Please please please please please please please pleeeeeeeeeease… »

Héhé. J’ai bien fait de faire semblant de pleurer, ça marche à tous les coups. Et après c’est moi qui suis prévisible. Ahaha! D’ailleurs, j’ai eu l’idée de mettre du piment pour cette excursion, dans les rues d’Amanil (qui ne sert absolument pas a aller trouver un cadeau de noël anticipé pour Alex, mais ça tu dois l’avoir deviné) !  Me voila vêtue de ma tenue de Miss Anarchy avec bonus sunglasses, avec mon faux garde du corps pour faire les magasins. Et le mieux, dans tout ça, c’est que Alex qui a pour une fois répondu au téléphone a accepté de se joindre à nous… habillé en Irina. Je commence a avoir ma petite popularité, et la première victoire de Alex a fait du bruit auprès de ceux qui suivent la compétition, et un certain nombre de personnes se retournent sur notre passage. J’ai même signé un autographe à une petite punkette qui passait par là. Bordel… I feel fucking fabulous. Et Alex qui m’a imité dans mon trip de sunglasses ricane tous seul dans son coin sans cacher qu’il kiffe aussi la situation. Le freak c’est chic baby. Vous savez, dans les films, quand y’a des ralentis sur des scènes de ce genre avec des basses derrière, bah là, j’ai l’impression de passer au ralenti dans le regard des gens. Et quand on passe dans une rue marchande de la capitale et que de la pop sort d’un haut parleur, nous avons la sensation que ce ne sont pas nos pas qui se calent sur le rythme de la musique, mais la musique qui se cale sur nos pas. Oh, fuck, c’est beau ce que je viens de penser. Je me sens tellement flamboyante cet aprèm que je claque des doigts pour réclamer l’attention de mon faux garde du corps, Soltan, puis lui ordonne « Cigarette! ». Et le pire, c’est qu’il s’exécute presque docilement et me met la cloque dans la bouche puis me l’allume même. J’en suis la première surprise, mais cette scène fait son effet sur la foule qui nous observe. Et à la vue de mon jeu, Alex jubile sans s’arrêter.

« Hééé mais on dirait que ça t’amuse aussi, de jouer à la sexy bitch, monsieur le garde du corps! »
« Alex, je te mets dans la catégorie « bitch » sans hésiter, mais il va falloir repasser pour le sexy. »
« Ooooooooooooh, y’a eu tacle, là! »
« Nan mais tu t’es vu la pétasse du Faubourg  Saint-fesse-de-pizza avec des cheveux longs? Eh, les passants! Pour 3 Opals, notre garde du corps il su… »
« Bordel, mais vous pouvez pas être plus discrets?!»

Fis-je en me retournant vers eux et en les attrapant tous deux par le col, les sommant de se calmer immédiatement, assez peu convaincant car je ricane à leurs idioties. Ils continuent de se traiter mutuellement par les noms d’oiseaux les plus inventifs du siècle, et je les laisse dans leur délire pour me tourner vers Marilyn, mon Stalgamin, qui marche a mes côté tout en tentant d’imiter la démarche de star que je me donne depuis tout à l’heure. Je souris, ce petit Pokémon glace est un marrant, toujours a faire le clown. J’avoue ne pas le connaître tant que ça, il est un peu renfermé dans son monde, à s’amuser tout seul et se donner des airs auprès des autres. Mais je l’ai souvent observé dans ses jeux de scène hors-scène pour savoir qu’il est capable de beaucoup d’inventivité. Je l’observe continuer de s’amuser a marcher dans mes pas sans dire mots, il semble totalement absorbé et peu averti de ce qui se passe autour de lui. Je préfère le laisser dans ce qui le captive tant. Je relève la tête à temps pour voir deux énergumènes armés d’un appareil photo qui s’avancent sans hésiter pour nous bombarder Alex et moi. Puis, ils commencent à s’égarer dans une multitude de questions sans queue ni tête, chose qui nous tire un sourire à mon cousin et à moi-même. Nous finissons par jouer le jeu et à poser comme deux stars devant les objectifs. On est douées pour jouer aux bitches, ma parole, c’en serait presque inquiétant. Et Marilyn qui sautille à nos côtés tout en tentant d’en faire de même. Finalement, nouvelle avalanche de question.

« Miss Anarchy, quel est votre lien avec Irina? »
« Anarchy, beaucoup se demandent si le jeune homme blond que vous enlaciez après votre victoire contre Monsieur Image est votre petit ami? »
« Irina, êtes vous un homme ou une femme? »
« Miss Anarchy, il y a des rumeurs qui courent selon lesquelles vous auriez eu des relations avec l’ancien visage du Régime, est-ce vrai? »

… Et  des tas d’autres bullshit du genre. C’est fou l’imagination des gens. C’est Alex qui réclame le silence, en posant deux doigts de sa main gantée sur la bouche d’un des journalistes, en lui envoyant un clin d’œil digne de la pire des allumeuses. Soltan, derrière, contient avec peine d’éclater de rire en voyant l’attitude d’Alex. Jouant le jeu à mon tour, je prends Alex, enfin, Irina par le bras, posant avec affection ma tête sur son épaule.

« Irina et moi, on se connait depuis le jardin d’enfants! On s’est retrouvés il y a quelques mois sur Enola, total hasard! Awesome, nan? »

Avec ça, je crois qu’ils en ont pour leur argent, ils posent encore des tonnes de questions auxquelles je réponds en riant l’air narquois ou alors Alex leur fait un numéro de vamp pour faire passer l’interrogation, et après avoir pris quelques nouveaux clichés, ils nous foutent enfin la paix. Soulagée, je prends mon Stalgamin dans mes bras, car avec ces gens intrusifs, il avait été quelque peu impressionné et coupé dans ses délires, pensant certainement que ces paparazzi m’auraient voulu du mal. Marilyn se calme et nous avançons en direction d’une esplanade ou nous pouvons nous poser sur un banc, dans un coin ou les gens ne viennent plus nous dévisager. C’est que c’est crevant à force! Je m’étire de tout mon long et m’avachit plus encore sur le  banc en bâillant. Marilyn choisit ce moment pour descendre de mes genoux et commence à se donner en spectacle devant nous. Avec une démarche très rythmée de défilé de mode, il commence a enchainer des figures acrobatiques, soulevé par des vents gelés qui lui confèrent une certaine grâce. A sa démarche s’ajoute des déguisements de glace qu’il se façonne, au début des robes, gracieuses, qui deviennent de plus en plus rigides, qui se transforment en véritables drapés de froid, flottant tout autour de Marilyn qui virevolte sur ces pistes de tissus ondulants. Puis, ces rideaux souples se précipitent tout d’un coup sur lui, l’enferment et le poursuivent, tel des serpents plats jusqu’à ce qu’il disparaisse dans une sculpture somptueuse de neige flottante. Après quelques secondes, une énergie sombre semble éclore du conglomérat de rubans enneigés et glacés, les faisant se consumer par de minuscules assaillants sombres, qui volent en nuages de fumée agressifs tout autour de lui. Au fur et à me sure que le cocon de glace est consumé, je vois deux orbes brillants apparaitre au milieu du tumulte. Les derniers rubans de froid s’écartent tels les pétales d’un fleur tranchantes pour laisser se montrer un magnifique Oniglali, ce que vient de devenir Marilyn, qui finalise sa courte performance d’évolution, en absorbant les derniers cristaux gelés et les dernières fumées sombres à lui, pour se former une auras de saphir et d’améthyste. Émue par cette performance inattendue et superbe, je me précipite vers mon Pokémon pour le couvrir de câlins et de félicitations. Finalement, on devine facilement qui était la vraie star du jour, hein?