Voila quelques jours que Cesar était parti de l’arène de Zazambes pour retourner quelques temps à sa vie sauvage. La forêt lui manquait, dormir à la belle étoile, reconnaitre les lieux qu’il a découvert en sortant de l’asile. Alors qu’il remonte une pente raide et rocailleuse, il repense à ce qui s’est passé ces derniers mois. Depuis combien de temps a-t-il retrouvé sa liberté ? Depuis est-il de nouveau vivant. Bientôt dix mois. Dix mois qu’il arpente l’île, après être sorti de la mort, pour entrer dans la vie. Découvrir enfin ce monde a l’extérieur des murs froids dans lesquels on l’a injustement fait prisonnier. Arrivé en haut de sa grande montée, il scrute l’horizon, contemplant aux côtés de Lisa le magnifique panorama qui s’offre à eux. Ils n’ont pas toute l’île à leur pied, bien loin de là, mais les milliers de cimes d’arbres orangées, brillant au coucher du soleil valent bien des trésors. En baissant les yeux, en revanche, ils peuvent distinguer en contrebas, a travers les branches, une lourde bâtisse grisonnante, a l’air morbide. L’asile n’est pas loin, mais Cesar le voit de haut, désormais, il n’a plus peur. Il connait cette forêt par cœur, et ce n’est pas pour dire bonjour a ses anciens gardiens qu’il est venu ici. La Rhinocorne frotte sa grosse tête contre la jambe de son grand frère, et lève les yeux vers lui, interrogative. Le reste de leurs compagnons sont restés à l’Arène. Le garçons aux cheveux d’argent savait qu’il ferait ce voyage en compagnie de sa petite sœur un jour. Il avait bien prit garde à rassurer Charlie, lui promettre de ne pas mettre trop de temps pour revenir. La vie sauvage fait partie de lui. Quelque part, même aux côtés de son amie en qui il a totalement confiance, Cesar craindra toujours d’être privé de sa liberté, une peur qui risque de toujours lui peser après ce qu’il a vécu. Pendant vingt ans, avant de sortir enfin dans le grand dehors. Avec un sourire calme, il caresse la corne de sa plus si petite sœur. Maintenant, il voit bien qu’elle a atteint sa taille d’adulte, qu’elle est capable de défaire de nombreux ennemis avec sa grande puissance. Lisa s’inquiétait presque de voir son frère aussi calme, il n’avait pas la langue bien pendue comme d’habitude, il ne s’inventait pas d’histoires à dormir debout comme à son habitude, faisant marcher son imagination a plein régime pour s’amuser, ou encore soumettre des idées fumeuses à la Rhinocorne, pour chercher son approbation. Elle fut encore prise de court quand Cesar s’adressa à elle sur un ton très solennel, et que la sincérité et le sérieux débordait de son regard bleu-vert.

« Lisa, allons voir Grand-mère. »

La Rhinocorne écarquilla les yeux, elle avait tant entendu parler de cette fameuse Grand-mère, donc Cesar lui parlait si souvent. Elle était à la fois sincèrement heureuse et aussi anxieuse de pouvoir enfin la rencontrer. Elle suivi docilement son ainé, sans bruit ni hésitation. Les sentiers rocailleurs rejoignirent bientôt un torrent de montagne, ou ils se désaltérèrent un moment avant de repartir. Cesar prit le temps d’inspirer à fond cet air qui lui était si familier, cet air qui est un peu celui de la maison de son « enfance ». Et en effet, même à Lisa qui n’était jamais venue ici, du moins, pas avant de voir le jour, ce lieu semblait familier et hospitalier. Il ressemblait à un sanctuaire, les oiseaux et les Pokémon les laissaient a paix dans cet espace ou ils semblaient être les maitres. A quelques dizaines de mètre apparu une haute falaise rocheuse escarpée, , et droit devant, ils purent voir une  large cavité creusée à même la roche. Cesar amena Lisa jusque dans la grotte, puis, ils retinrent leur souffle quand l’ombre massive devant eux se dévoila, éclairée par les quelques rayons de soleils qui filtraient vers l’intérieur de la grotte.

Devant eux trônait fièrement une grande carcasse, l’armure d’une ancienne Rhinocorne, qui a rendu son dernier souffle en ces lieux. De la mousse verdoyante et quelques fleurs avaient poussé sur cette forteresse minéral, lui donnant un air presque radieux, un lieu de recueillement, un peu comme un mausolée. Lisa eut un mouvement de recul en fixant les orbites vides de l’ancienne Rhinocorne, puis se rassura un peu en entendant les paroles de Cesar.

« Grand-mère, voici Lisa. Tu te souviens, j’ai promis de veiller sur elle. Regarde comme elle a grandit, comme elle est belle, pas vrai?! Mais, tu sais, je n’y suis pas pour grand-chose, Lisa est devenue magnifique surtout car elle a travaillé dur, c’est toujours elle qui m’a protégé! Lisa… Tu veux dire quelques mots à Grand-mère? Elle avait vraiment hâte de te rencontrer, tu sais! »

Lentement, la jeune Rhinocorne se rapprocha, et fixa la forte carapace vide. Elle ferma les yeux et semble lui adresser une prière silencieuse. Cesar sourit et sortit pour laisser Lisa se recueillir un moment, et sortit se rincer le visage dans le rousseau coulant depuis le sommet de la falaise. Soudainement, il fut alerté par le bruit des sabots contre le sol, rapides, lourds, puis Lisa surgit de la grotte pour courir vers l’horizon, vers une destination inconnue. Cesar appela le prénom de sa sœur, inquiet de la voir réagir ainsi. Il s’apprêta a lui courir après, mais un rugissement de la part de la Rhinocorne lui fit comprendre de rester ou il était. Alarmé par la situation, il n’osa pas bouger pour autant, et resta planté là, l’air angoissé de cette disparition soudaine. Pourtant, quelques secondes plus tard, le bruit de la course de Lisa revint, mais ils venaient d’autre part… D’au dessus de sa tête. Cesar couru pour se trouver face à la falaise, et il leva les yeux vers son sommet, ou une ombre majestueuse se dressait. Alors que le soleil allait bientôt disparaitre, le Pokémon qui se montrait fièrement et rugissait encore en haut de la falaise, il ne pouvait que la reconnaitre, bien qu’elle ait changé de visage, et qu’elle se tienne désormais sur ses deux pattes, bombant  avec hardiesse son abdomen, tout en scandant qu’elle devenait ce soir-là la nouvelle reine de ce territoire, succédant à sa grand-mère.

De toutes ses forces, Cesar donna de sa propre voix pour accompagner les cris de la Rhinoféros, des larmes de joie coulant le long de ses joues, alors qu’il rugissait à son tout en faisant de grands signes à sa petite sœur qu’il aime tant. Leur concert continua jusqu’à ce que l’astre du jour se fasse manger par l’horizon. Cesar était certain que là ou elle se trouvait, Grand-mère était surement très heureuse.