Exercice poussé en dialogue familial

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« J'en ai rien à carrer. Fous-moi la paix, tu nous feras gagner du temps à tous les deux. »

Six juillet. Depuis décembre, c'est la première fois qu'il revoit sa sœur, par un hasard des choses qui l'intrigue beaucoup ; comment diable, dans toute cette foutue île, aurait-elle bien pu tomber sur lui ? Il garda ses suspicions pour lui, mais la voir aujourd'hui alors qu'il avait tout bêtement voulu se rendre dans la jungle pour se changer les idées, ce n'était pas quelque chose qui lui plaisait, du tout. Après l'avoir assassinée du regard, il fit signe à son Ninjask de guider Yamamoto vers l'avant, ne voulant pas que l'Insécateur, vu sa jeunesse, témoigne trop de cela. À ses côtés, Hideki, le Banshitrouye,  observait d'un air inquiet. Il était vrai que leur dresseur, malgré ses crises de colère de temps en temps et son tempérament susceptible, n'était jamais aussi froid et désagréable, et même si depuis quelques temps il exprimait plus son mécontentement pas des sarcasmes et des regards noirs que  par des cris, il ne l'avait jamais vu si sec. Il avait presque l'impression qu'il allait se mettre à mordre d'un instant à l'autre.
Nagisa, même si elle a l'air aussi imperturbable et méprisante qu'avant, toujours sur ce perchoir invisible dont elle regarde tout le monde de haut, n'a en rien la main ici. Il est évident qu'elle est la seule à désirer à parler, et Natsume ne le lui en laisse aucune occasion, faisant tout pour à chaque fois raccourcir le temps de réponse qu'il lui offre, l'ignorant avec ce qu'on pourrait presque appeler du talent si ce n'était pas un peu cynique sur les bords. L'adolescent s'immobilise lorsqu'elle saisit son bras avec force, y mettant toute sa poigne pour l'empêcher de partir. Vu la pression qu'elle y met, elle laissera peut-être des traces, et Zakuro et lui, d'un regard, se tiennent prêt à intervenir si jamais il le faut. Mais l'éleveur ne sursaute même pas, et si il a mal, il n'en montre rien, toisant sa sœur aînée avec tout le mépris du monde.

« Je ne te demande pas la lune bordel de merde, mais de m'écouter.
- Tu avais trois ans pour venir me parler. Ça ne t'a pas tant dérangé que ça de me faire attendre, il me semble. »

Le venin dans sa voix aurait presque rendu Byakuran jaloux. Durant une seule seconde, les yeux de Nagisa s'abaissent ; cette attaque n'a rien d'injuste, et c'est bien pour ça qu'elle fait si mal. Et même si elle reprend sa contenance immédiatement après pour répliquer, c'est trop tard. Natsume l'a vu, et ça ne fait que confirmer cette impression qu'il est en position de force ici.

« Tout n'est pas aussi simple que tu aimerais le croire, morveux.
- Ça m'avait l'air très simple, quand je me suis retrouvé seul avec un père qui espérait tous les jours que je reviendrais dans une boîte. »

La rancune est quelque chose qui n'est jamais léger chez le plus jeune. Sûrement est-ce là son pire défaut, mais alors qu'il la regarde avec une insensibilité totale, il tait tout potentiel remord, se persuadant lui-même qu'il n'est pas du tout en tord non plus.

Exercice poussé en dialogue familial

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Il n'est pas dans sa nature de souhaiter du malheur à quiconque ; c'est quelque chose qui le répugne profondément, pour il ne savait quelle raison, et même lorsqu'il était la cible d'attaques, il n'était pas de son genre de souhaiter se venger stupidement. Mais il se défendait, tout de même, gentil mais pas trop con non plus. Au Japon, si il lui était arrivé plus d'une fois de se retrouver dans des bagarres de rue au final plutôt 'innocentes', si elles pouvaient être qualifiées ainsi, il n'avait toutefois jamais donné le premier coup. Oh, provoquer pour obtenir le résultat escompté, ça par contre... Chercher la merde avait sa spécialité, à une période ; Nagisa l'avait bien vu, à force de le récupérer avec des hématomes bien foncés. Néanmoins, il n'avait jamais ressenti la moindre satisfaction en frappant quelqu'un, et encore moins de sadisme, si bien que ces bagarres n'avaient été qu'un moyen de se défouler et de se débarrasser de sa frustration et de son agressivité, résultats des conditions dans lesquelles il vivait. Mais après coup, hormis de la honte et une culpabilité qu'il enterrait sous des couches de déni et de fuite, il ne s'était jamais dit 'bien fait pour eux'.
Nagisa n'était pas une exception. Mais il voulait lui en vouloir. Il voulait avoir la force de la haïr comme il aurait aimé haïr son père, peut-être pas autant car les comparer aurait été injuste pour la jeune femme, mais juste assez pour pouvoir ne pas ressentir un gramme de culpabilité alors qu'il la fusillait du regard et l'envoyait promptement chier comme la dernière des merdes. Toutefois, il fait comme lors de ces embrouilles dans son pays d'origine ; il se défoule. Ce n'est pas tant elle qu'il attaque que la situation et la rancune qu'il ressent toujours, cette frustration insupportable de savoir que son enfance et la majeure partie de son adolescence avaient été gâchés à cause des souhaits égoïstes de ceux qui étaient supposés l'aider à se former et pas l'enterrer dès que possible. La rage de ne pas avoir vécu une vie normale, l'injustice même de la chose, il la redirigeait maintenant entièrement vers Nagisa. Complètement stupide, oui.

Sa sœur ne dit pas grand chose, d'ailleurs, pour quelqu'un qui a la langue si bien pendue d'ordinaire. L'éleveur ressent comme une certaine fierté à la voir ainsi, raffermissant ainsi sa certitude qu'il a tout le droit de réagir ainsi, ce qui  n'était pas totalement faux d'un côté, mais pas absolument non plus. Les pokémon continuent de les observer, inquiets mais conscients qu'ils ne devaient pas intervenir dans cette histoire strictement personnelle.
L'aînée prit quelques secondes avant de répondre, et quand elle le fit, elle prit de saisir une poké ball à sa ceinture et d'en faire sortir une Prismillon. En l'apercevant, le plus jeune eut l'air soudainement un peu plus mal à l'aise, mais pas moins sévère envers la jeune femme.

« Rogue voulait te voir. À toi de voir si tu veux l'envoyer chier aussi. »

Connasse, pensa-t-il en serrant les dents alors qu'il baissait un peu les yeux, un peu honteux devant le regard innocent et plein d'affection de l'insecte. Il fallait qu'elle la ramène, elle. La Prismillon qui lui avait donné tout son goût pour les pokémon insecte. Le Fantominus qui passait n'aidait pas à améliorer l'ambiance, en effet.

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Lorsque Nagisa avait capturé Rogue, elle n'avait pas vraiment réfléchi. Pour tout dire, elle l'avait fait à cause d'une seule raison : Natsume. Elle ne pouvait pas toujours être là avec lui quand il le fallait, et le fut encore moins après la mort de leur mère, puisque pour qu'ils aient quelque chose à se mettre sous la dent, elle fut forcée de travailler en plus de ses études. Mais disons que lorsqu'elle l'avait trouvé, le gamin avait tant adoré la Lépidonille qu'elle n'avait pas pu se résoudre à l'abandonner, et elle l'avait donc capturé pour lui faire plaisir, en se disant qu'elle ferait une bonne compagne de jeu pour son petit frère. Et au final, elle avait eu plus que raison ; Rogue était devenue la favorite du jeune garçon, et vice-versa. Tout petit déjà, ses yeux s'illuminaient quand la chenille arrivait devant son champ de vision, et lorsqu'il venait de subir les cris et hurlements de son père, rien de tel pour lui que d'aller jouer avec elle pour le calmer. Nagisa avait jalousé l'insecte, il est vrai, d'émerveiller autant le petit garçon, mais elle avait déjà tant sur l'esprit qu'elle pouvait au moins profiter d'un peu de repos lorsque son frère était occupé avec Rogue.
Même en évoluant, la Prismillon n'avait pas démordu de son affection débordante pour le plus jeune des Shimomuras, faisant même office de nounou attentionnée et affectueuse, parfois même diablement protectrice. De là était venu son goût pour les insectes ; avec Rogue, Natsume avait découvert tout ce que ces créatures pouvaient bien faire, et il avait commencé à étudier, encore et encore, toujours plus curieux. Il était arrivé un point où Nagisa s'était demandée si Rogue n'était pas plus son pokémon à lui que le sien, mais elle en avait conclu que peu importe, au final ; tant que la présence de la Prismillon pouvait faire du bien à son petit frère, cela ne la dérangeait pas de la garder avec elle.

Alors oui, c'était un coup bas de la libérer devant le plus jeune, mais elle devait employer toutes les cartes qu'elle avait en main pour le forcer à l'écouter. Et elle savait plus que bien que devant Rogue, la volonté de partir de Natsume s'en trouverait considérablement diminuée : il n'en aurait tout simplement pas le cœur. Le manipuler ainsi était risqué, très risqué, quand on prenait compte à quel point cela pouvait énerver le cadet ; la seule fois où il l'avait frappé, c'était à cause de ce genre de comportement. De toute façon, à cause de Kazuo, il serait toujours aussi sensible sur ce point, c'était prévisible. Combien de fois avait-il joué de leurs émotions pour servir ses intérêts... ? Elle en avait la nausée rien qu'a y penser.

« Hey. »

Natsume peut bien persister à maintenir sa poker face, mais Nagisa voit bien que la présence de Rogue a rendu cela bien plus dur. Elle ne devrait pas se réjouir d'un coup si bas, mais le micro-sourire tendre et désolé qui apparaît sur les lèvres du Shimomura alors qu'il caresse doucement les ailes de la Prismillon lui fait dire que ce n'était peut-être pas si mal. Le Vvaldaim en arrière-plan n'aidait pas l'adorabilité de la scène.
Quand Rogue se précipita pour se serrer contre lui et qu'il réciproqua le geste avec toute la douceur du monde, Nagisa eut durant un instant l'impression de revoir ce gamin naïf et innocent au grand cœur, qui mettait dans le moindre de ses gestes une délicatesse infinie. Avant que Kazuo ne le brise chaque jour un peu plus.

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En y repensant, Nagisa avait toujours été jalouse de lui. Plus intelligent, brillant, davantage aimé par leur mère malgré toutes les fois où elle l'avait nié, Natsume lui avait longtemps été au moins un peu détestable. Une petite voix dans sa tête s'opposait à chaque fois à l'amour débordant qu'elle avait pour ce gosse aux grands yeux noisettes pleins de curiosité et d'envie d'en savoir plus. Parfois, elle était donc moins douce, trouvant même plaisir à le martyriser un peu, toutefois lorsqu'il se mettait à pleurer elle ressentait toujours de profonds regrets. Mais elle recommençait : combien de fois l'avait-elle traité d'imbécile insupportable, ou avait-elle claqué la porte de sa chambre en sortant après une énième dispute, ou même déposé un de ses jouets en hauteur pour la simple satisfaction de voir qu'il ne pourrait pas l'attraper ? Oh, le gamin n'avait pas été sans torts non plus ; plus d'une fois il avait, pour se venger, fait passer certaines de ses bêtises pour celles de Nagisa, plus souvent pour se venger qu'autre chose. Toutefois, lorsque Kazuo s'en prenait à l'un d'entre eux, ils oubliaient vite toute rivalité stupide pour s'aider l'un l'autre, et la jalousie de la plus âgée fondait alors comme neige au soleil. Oui, ce qu'elle aimait oublier quand elle était plus jeune, c'était que leur mère était plus proche de Natsume pour la raison que leur père le détestait bien plus qu'il ne méprisait Nagisa.
Mais jalouse de la relation qu'avait Natsume avec Rogue ? Non, jamais. Au contraire, c'était peut-être la facilité qu'avait la Prismillon à atteindre son petit-frère qu'elle enviait, et sûrement la grandeur de l'affection qu'elle voyait dans son regard quand il serrait l'insecte contre lui. De son côté, cela faisait trois ans qu'elle n'avait pas pu le toucher sans que ce ne soit pour l'empêcher de partir. De toute façon, elle ne s'attendait pas à ce qu'il lui pardonne. Natsume était comme ça ; incroyablement dur à convaincre qu'on était quelqu'un de confiance, et tellement rancunier quand cette confiance sacrée était brisée.
Peut-être qu'elle aurait dû la lui dire, toute la vérité. Mais il ne l'avait pas demandé, et il y a fort à parier que cela ne suffira pas à réduire sa rancune vers elle. Il n'était après tout pas un fervent adorateur des excuses, elle le savait plus que bien. En un sens, et même si ça le tuait de devoir avouer ça, elle était presque reconnaissante au morveux qui servait de copain à son frère de ne rien lui avoir révélé, puisque si c'était le cas il serait depuis longtemps venu le voir. En repensant à ce moment, elle ne peut empêcher un rictus un peu triste de s'étirer sur son visage.
J'avais raison, en fin de compte.

Peut-être était-ce dans la façon dont il était si froid, presque semblable à cet adolescent de quatorze ans qui envoyait tout voler pour que personne ne puisse l'approcher, qui lui mettait ainsi la puce à l'oreille. La brusquerie dans ses gestes, le venin dans son ton.
Il n'aura pas fallu un an avant qu'il ne se rende compte que quelque chose cloche.
Elle n'aurait pas dû être satisfaite de le constater. Mais c'était le cas.
Elle sursauta toutefois en sentant une bourrasque de vent brutale la faire tanguer, et grimaça en voyant que Rogue, enragée par un Emolga qui devait avoir fait une quelconque bêtise, était actuellement en train de faire tous les efforts du monde pour lui ratatiner la face. Parlez donc d'un changement d'ambiance en trois secondes.