L'instant présent IV ; Le bonheur est la seule chose qui se double si on le partage. [OS]

Série d'OS - L'instant présent :

Le bonheur est la seule chose qui se double si on le partage.
OS flashback, 18 mai 2015.

- Au fait.. Abby, c'est ton vrai nom, ou un pseudonyme comme "Lily"?

Un bref soupir échappa à la jeune femme, qui savait évidemment qu'elle ne pourrait passer à côté de cette question & des explications allant avec bien longtemps. Une petite semaine avait passé, depuis cette discussion qui avait apaisé le climat douloureux entre les deux rousses, conduisant au début de leur relation amoureuse tendre & complice. Une petite semaine que la Coordinatrice avait quitté l'Auberge d'Edelweiss pour aller dormir dans les bras de sa chère Scientifique ; en toute innocence cependant, préférant ne pas se précipiter & se donner le temps de se connaître, malgré la puissance des sentiments les liant & augmentant chaque jour un peu plus. Ce matin-là, une fois éveillée, Maelys avait levé un regard interrogateur vers son amoureuse qui, appuyée sur un coude avec un sourire doux, la regardait dormir depuis plusieurs minutes, ou une heure elle n'aurait su le dire. & la jeune Médecin avait posé cette question, qu'elle appréhendait depuis que leur relation avait enfin pris ce tournant qu'elle espérait, & à laquelle elle n'avait eu de cesse de chercher comment répondre ; en vain. Hors là, il était trop tard pour chercher ses mots.

- Oui.. Non? Pas vraiment. Enfin, c'est un diminutif. Je déteste mon prénom, alors je me suis toujours présentée ainsi.

Un petit rire tendre fut la réaction première de Lys devant cette réponse relativement incertaine, un rire doux sur lequel son interlocutrice ne manqua pas de se méprendre ; & elle se fana quelques peu, perdant le vague sourire hésitant qui avait fleuri sur ses lèvres pendant qu'elle tentait de formuler cette réponse.

- Tu trouves ça bizarre, c'est ça?

Le ton était vaguement blessé, pourtant le sourire de la jeune Weber ne s'amoindrit pas pour autant ; au contraire, il se fit plus doux, apaisant. Calme, elle se redressa pour s'asseoir sur le lit, tendant une main vers la joue de son amoureuse en une caresse sincère & rassurante.

- Non. La sœur de cœur de mon père fait pareil, je n'ai appris son vrai nom que trois mois après l'avoir rencontrée. C'est juste ton hésitation.. C'était trop mignon.

Ces quelques mots détendirent aussitôt la concernée sur ce sujet, qui pourtant au lieu de retrouver sa légèreté poussa un nouveau soupir, légèrement blasé celui-ci. Un peu triste, aussi, interpelant & alertant aussitôt sa compagne qui enlaça ses épaules d'un bras, l'attirant contre elle.

- Si tu en savais les raisons, tu trouverais ça moins mignon..
- Raconte-moi? Au pire, j'en jugerai ensuite.

La suggestion était douce, murmure léger & encourageant qui apaisa & rassura un petit peu la concernée. Après tout, Maelys lui avait confié certains de ses plus rudes moments, ses blessures sentimentales du moins, au premier jour de leur relation ; & depuis qu'elle la connaissait, la Scientifique ne s'était jamais démontrée prompte aux jugements ou aux faux-semblants, ni même aux moindres préjugés. Alors comme elle quelques jours plus tôt, elle se confia. & lui raconta à peu près toute son histoire. Son enfance dans cette cage dorée qui l'oppressait & qu'elle avait vite appris à haïr, le formatage auquel on avait voulu la soumettre dès son plus jeune âge, ses premières étincelles de rébellion pour juste un ami qui l'avaient faite fuguer une première fois & trouver Astrid, les fugues suivantes qui lui avaient appris à s'ouvrir au monde ainsi qu'elle le souhaitait tant, sa grand-mère paternelle qui voulait la former pour prendre les rênes de la famille plus tard, le Régime arrivé au pouvoir qui l'avait dégoûtée alors que "les siens" applaudissaient, les punitions alors qu'elle résistait encore & toujours, de plus en plus.. & puis finalement le mariage arrangé, qui avait entrainé sa fugue définitive un mois avant sa majorité & la cérémonie qui allait suivre. Sa voix était restée égale tout du long, sans tremblements, sans émotions, mais Maelys y devinait très bien la souffrance atroce, la plainte lancinante de son cœur blessé d'avoir grandi dans une solitude injuste, privée de l'épanouissement qu'elle avait dû chercher par elle-même à force de fugues dès sa tendre enfance. Le cœur serré à cette pensée, elle n'avait pu qu'étreindre un peu plus fort son amoureuse, sans mot dire, muette par respect pour l'effort que cela représentait de tout raconter. & enfin.. Enfin, après avoir brièvement relaté cette ultime fugue qui l'avait menée loin d'Amanil, cachée dans le Nord pour vivre sa vie librement, la jeune femme mit fin à ce poignant monologue.

- .. Enfin bref. Pour répondre à ta question de base, mon vrai nom c'est Abigaïl Torrès. & comme je te disais, tu connais peut-être déjà le nom de f..
- .. Torrès?!

Abby sursauta brusquement, devant cette réaction inattendue de son amoureuse l'ayant ainsi coupée pour reprendre ce mot dans une exclamation surprise. Elle-même ébahie, elle leva vers la Scientifique un regard égaré, cherchant à comprendre le comment du pourquoi de cet éclat de voix soudain. La jeune femme semblait réfléchir à vive allure, & c'était bien le cas ; faisant moult liens, comme comprenant soudain bien mieux certains points de détails qui lui avaient semblés bien familiers dans l'histoire de sa compagne. & puis elle esquissa un sourire doux, passant une main dans ses cheveux avant de venir effleurer la joue de l'autre rouquine d'un baiser léger & volatile.

- Bon sang.. Je sais qu'on avait dit qu'on ne se précipitait pas avec nos proches, mais.. Il y a quelqu'un que je dois absolument te présenter, cœur.

* * *

- Mamie.. Désolée de débarquer comme ça à l'improviste.
- Oh ne t'excuse pas, tu sais bien que voir mes petits-enfants ne me dérange nullement, qu'importe le moment! & puis, je vois que tu n'es pas venue seule.. Serais-tu en train de me faire cet honneur?

La jeune femme éclate d'un rire carillonnant face à la question malicieuse de sa grand-mère, ainsi qu'à voir le clin d'oeil qui l'agrémente. Relâchant la jardinière qui était venue les accueillir lorsqu'elles avaient sonné au portail du Sunny Manor & qu'elle avait aussitôt étreinte avec affection, elle se tourne vers sa compagne tétanisée pour lui tendre la main avec un sourire tendre & encourageant. Elle sait parfaitement ce qui a ainsi figé son amoureuse, évidemment, surtout qu'en la menant ici à peine une heure après qu'elles se soient levées, elle n'avait pas un seul instant précisé qui elles venaient voir. Abby avait évolué depuis son explication sur son identité dans l'interrogation & le mystère que laissait planer la Scientifique, ne répondant que de vagues "tu verras.." à ses questions. & actuellement, la voyant ainsi immobile, fixant la femme d'âge mûr avec une surprise non dissimulée, elle sait très bien ce qui se passe sous son crâne ; tout comme elle devine les questions que sa grand-mère doit se poser en voyant telle réaction chez celle qu'elle a déjà deviné être la petite amie de sa petite-fille -n'ayant jamais ignoré la bisexualité de celle-ci, toute perspicace qu'elle a toujours été-.
& la raison de cette immobilisme est bien simple : Maelys sait très peu de choses sur la famille de sa grand-mère, qui n'a jamais caché à sa descendance son rude passé d'avant de leur claquer la porte au nez mais qui n'en parle pour autant n'en parle pas beaucoup, n'aimant pas ressasser ces souvenirs.. Mais s'il est une chose qu'elle a parfaitement compris & retenu, c'est que lorsqu'il y a une paire de jumeaux dans une famille il y en a souvent d'autres, par une forme de "prédisposition".. & que dans son cas, cela s'explique deux générations au-dessus d'elle, par une paire de vraies jumelles qui se sont vite dévoilées très différentes l'une de l'autre. Il n'est donc en aucun point surprenant qu'en découvrant face à elle le sosie de Yolande Torrès, Abby reste un moment hébétée. Tendrement, la jeune femme saisit la main de son amoureuse pour l'attirer vers elle, passant un bras autour de sa taille en un geste doux. Elle sait que la Coordinatrice est plus intimidée & émue de cet instant qu'autre chose ; après tout, avec ses explications ce matin, elle lui a avoué clairement souhaiter retrouver sa grand-tante ayant réussi comme elle à fuir la famille les étouffant, & la voilà devant elle.. Finalement, un sourire s'esquisse timidement sur les lèvres, alors qu'elle se reprend peu à peu pour oser croire qu'elle est bien face à celle qui a toujours été son modèle.

- Béatrice..
- Mamie, je te présente donc Abby Torrès, mon amoureuse. Yolande ne l'a pas reniée apparemment, mais elle a quitté ce monde de barges, elle aussi.
- Oh.. Je vois, d'où cet étonnement. On se ressemble toujours autant, n'est-ce pas?
- Non, pas du tout!

Le sourire doux de sa grand-mère se réduit légèrement sous la surprise de cette réaction brusque & impulsive, alors que sa compagne rougit violemment pour son exclamation de protestation, mal à l'aise soudain. De crainte d'être jugée pour cet emportement? Maelys songe un instant à esquisser un geste pour l'apaiser ; resserrer son étreinte, lui passer discrètement une main rassurante dans le dos.. Elle y pense oui, mais a à peine le temps de cela que déjà, la Coordinatrice a repris la parole, troublée mais déterminée à expliquer sa réaction.

- Euh, pardon.. Je.. Je veux dire que, en soit physiquement, oui, mais.. Mais les traits changent tout, & les vôtres sont bien plus doux.. & elle a toujours été super rigide, &.. Bref, le physique ne fait pas tout, & on ne peut clairement pas vous confondre.

Un rire léger échappe à la plus âgée du trio, agréablement surprise de cette analyse probablement, alors qu'elle s'écarte du portail pour les inviter à entrer chaleureusement, son humeur toujours aussi légère & l'air fort curieuse de faire la connaissance d'Abigaïl. Soulagée de cette réaction & de l'avenance claire qui lui font face, cette dernière se détend aussitôt avant de suivre son amoureuse qui l'entraîne derrière elle dans le jardin de Sunny Manor, souriante & d'excellente humeur, elle aussi.

fiche by Nighty Jaegan, alias Rayquaza.

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