Le bruit des pattes de doduo cognant sur le sentier de terre me berçait presque. Je m'étais achetée une petite selle de cuir rouge, et aussi une bride. Apparemment, j'étais assez menue et légère pour que l'oiseau me porte. Et pour tout vous dire, Gersimi était une monture formidable. Agile, rapide, elle se comportait avec calme et douceur, à tel point que moi, jeune cavalière débutante, je ne m'en sortais pas trop mal. Je resserrais les mollets sur son corps duveteux, et lui indiquais où aller : une belle maison de pierres blanches, où de la vigne poussait. Nous atterrîmes donc sur le chemin menant à la maison, et je sentis mon coeur battre plus vite.

Par réflexe, ma main se leva jusqu'à ma joue. Il ne restait de l'ecchymose qu'une trace sombre près de ma bouche, et même si la douleur était oubliée, le geste non. Le régime ... Je n'étais pas venue là pour me plaindre, et j'hésitais quant au fait de lui avouer qu'à présent, le régime en avait après mes recherches. Cela risquait d'inquiéter mon nouvel ami. Autour de nous, champs et paturages donnaient envie de s'y promener en courant. Gersimi attrapa au vol un petit insecte et l'avala, et je sortis de leurs pokéballs mes petits pokémons.

« Thor, je t'interdis d'aller embêter les pokémons de la pension d'accord ? Freyja, essaye de ne pas te cacher partout, ni te de perdre. Hati ... Ne mets le feu nulle part, merci. »

Comme un seul être, le Luxio, la Malosse et la Nidoran hochèrent leurs chefs. Et c'est presque docilement qu'ils me suivirent sur le sentier. Près de ma salle, un sac de toile kaki se balançait au rythme des mouvements. Dedans ? Des vaccins contre un rhume qui courrait la plupart du temps à l'automne. Mieux valait prévenir que guérir, comme disait l'adage. Enfin, j'arrivais entre quelques bâtiments. Descendant de ma selle, caressant d'une main les deux têtes de Gersimi, je criais :

« Emilio ? C'est Yuna !  »

J'espérais qu'il soit là. J'avais fait le chemin depuis le centre, en prenant mon après-midi. J'avais débuté chez quelques éleveurs, ce qui expliquait qu'il fut trois heures de l'après-midi passé. Mais j'avais aussi ma soirée, et je pourrais rester autant de temps que cela plairait à mon hôte. Thor reniflait l'air, n'osant cependant bouger de là. Hati la malosse détonnait avec son pelage bleu, et je ne revenais toujours pas que notre amitié fut aussi récente. Elle n'était pas prête à être domptée, mais elle avait acceptée ma demande. J'aurais besoin de sa force, et pour elle, mes intentions étaient bonnes. Freyja, quant à elle, était tranquillement assise. Je voyais bien qu'elle se retenait de venir se frotter à moi. Maintenant qu'elle avait évolué, son gabarit n'était plus le même ... Je fis un geste et lui grattais les oreilles. Je l'aimais. Je les aimais, tous. Ils se prêtaient à mes expériences et à mes combats avec bon coeur, et je ne les aimais que plus fort.

« Je le répète une fois encore, nous ne sommes pas chez nous. Nous sommes des invités ici. Je vous interdit de faire le bazar, d'accord ? Je compte sur vous. »

Hati alla renifler les herbes plus loin avec Thor, tandis que Freyja et Gersimi préféraient mes caresses et ma présence. J'espérais ne pas déranger Emilio. Mais je dois avouer que j'espérais qu'il me donnerait des nouvelles du Lion. En si peu de temps, j'espérais sûrement pour rien. Je soupirais et continuais de caresser mon oiseau et ma Nidorina, pensive.

J'eus durant quelques minutes la crainte qu'il ne soit pas là et de devoir rentrer. Mais non ! Je le vis débouler d'une des serres, un venipatte minuscule entre ses mains. Le petit avait déjà cette tête un peu effrayante, et je grimaçais. Les pokémons insectes n'étaient pas mon fort. Enfin, je les préférais à l'état de bébé qu'à l'état d'évolution, en tant que Scobolide ou Brutapode. Ce dernier stade me filait des frousses pas possible. Mais devant l'enthousiasme de mon ami, je hochais la tête, souriante. Tant qu'il ne me mettait pas l'insecte au visage, ça devrait aller. Et puis, à tricoter comme ça dans l'air avec ses petites pattes ... Non, non. Désolée. Même comme ça je ne le trouvais pas mignon. Un larveyette, pourquoi pas, mais les venipattes ... Non.

« Bonjour Emilio. Allons les voir, oui. »

Thor eut un petit bruit de gorge qui ressemblait à un ronronnement, mais alors que nous nous dirigions vers la serre, je m'arrêtais à l'entrée. Doduo, Luxio, Nidorina et surtout la Malosse bleue m'avaient suivie, très intéressés, mais je dressais le doigt pour avoir leur attention et leur obéissance.

« Restez là. Emilio vient d'avoir des bébés venipattes, et je vous connais, vous allez faire le bazar. Si vous êtes sages, je vous offrirais des friandises. Vous avez le droit d'aller vous promener, mais restez dans les parages, et jouez entre vous, n'embêtez pas les pokémons de l'élevage, d'accord ? »

Thor s'en alla immédiatement chasser les papillons, tandis que Doduo et Nidorina allaient s'allonger au soleil pour faire la sieste. Restait Hati, qui m'observait, son museau frissonnant. Puis, dans un aboiement, elle me mit le feu à ma blouse, comme elle adorait le faire. J'eus un petit cri et retirait la veste pour la secouer à terre, tandis que la chienne bleue s'en allait en aboyant de rire pour rejoindre Thor. J'eus un soupir, lâchais un « Quelle turbulente, celle-là » et pénétrais enfin dans la serre.

Je rejoignis Emilio, avec une couche de vêtements en moins. Du coup, sans blouse, j'avais soudain l'air plus normale, et ça n'était peut-être pas plus mal. J'eus soudain une idée et sifflais. J'allais à l'entrée de la serre, pris les vaccins du sac sur la selle de Gersimi, et elle repartit rejoindre Freyja alors que j'approchais des bébés, mes seringues et mes flacons à la main. Je souriais à Emilio, des mèches roses devant les yeux.

« Tu veux que je les vaccine tout de suite ? » Je n'osais pas approcher mes mains des petites bêtes, mais elles n'avaient pas l'ai si dangereuses que cela, finalement. Puis, prise dans le feu de l'action, je demandais à Emilio : « Quoi de neuf depuis la dernière fois ? Moi, j'ai tellement de choses à te raconter, c'est incroyable.»

J'eus un petit rire, et voyant approcher un Venipatte, j'inspirais et tendis une main, à ma grande surprise, le bébé semblait un peu mou, assez froid, et il apprécia la caresse que je lui fis sur le sommet du crâne. Héhé, au fond ce n'était qu'un bébé comme un autre, après tout.

Je fus contente quand Emilio proposa à ses pokémons d'aller s'occuper un peu de mes propres pokémons. Bon, j'espérais qu'ils n'allaient pas se battre. Mais leur gourmandise à tous était trop forte pour qu'ils risquent de rater un goûter ou des friandises. Je suivis donc le conseil d'Emilio, et piquais avec beaucoup de délicatesse pour vacciner les petits pokémons. Finalement, ils étaient plutôt dociles. Ma peur était passée, à présent que je les entendais bourdonner de bien-être dans les mains de leur éleveur. Si ce n'était leurs gros yeux, je pense que je pourrais en câliner un.

Tout en vaccinant les insectes, j'écoutais donc mon ami me parler de sa vie. Il avait donc été voir un .. Ami ? J'eus un petit sourire sans oser rien dire. Il m'avait bien dit, la dernière fois qu'il aimait les hommes non ? Bah, si il n'avait pas envie de m'en dire plus, il avait le droit, après tout. Hélas, mon sourire s'évanouit un instant quand il évoqua de bonnes nouvelles. Devais-je tout lui dire ? Je n'avais pas pour habitude de cacher des choses, et j'avais un fond tellement honnête ... Bah je pouvais commencer par les bonnes nouvelles après tout ! J'allais commencer mes petites histoires, quand je sentis une présence : je levais la tête, et je remarquais le scarhino de Emilio. Il avait sa belle carapace bleue toute luisante, preuve de bonne santé, et il roulait des mécaniques. J'eus un petit rire, et rougis comme une adolescente quand il me mit une fleur dans les cheveux. Je clignais des paupières, avec un air un peu bête et surpris, puis je me relevais et vins embrasser son front.  

« Hé bien, merci beaucoup, Nono. Je suis contente de voir que tu vas mieux.  »

Je souris, et me remis à vacciner les petits. Ca allait assez vite, mais je bouillonnais d'envie de parler à mon ami. Allez, Yuna, décide-toi à dire quelque chose.

« Tout d'abord, je peux t'annoncer que mon Luxio et ma Nidorina ont évolués. Dans des circonstances très différentes, mais j'y reviendrais après ... Et j'ai capturé une malosse ... Chromatique ! Exactement ce dont je rêvais pour mes recherches ! Par contre, elle a un sacré caractère, et adore mettre le feu à mes blouses.  » Je tirais un peu la langue, puis mon air heureux disparut. Je me devais de dire la vérité à Emilio. Peut-être que le régime allait chercher à le brutaliser, lui aussi ... « Le ... Le régime est venu au centre pokémon, la dernière fois. Ils sont venus pour moi. Mes recherches les intriguent, et ils veulent que je mette mes résultats à leur service. J'ai refusé. L'un d'eux m'a même frappé. » J'indiquais l'ombre sombre près de ma lèvre. Ca ne se voyait plus trop, ça ne faisait plus mal ... Mais je savais que c'était là. « C'est là que Lixy a évolué. Pour me protéger. Emilio, fais attention à toi s'il te plaît. Il se peut qu'ils veuillent te prendre tes pokémons, ou je ne sais quoi.  »

Ma peur n'était peut-être pas justifiée, mais je préférais le prévenir. Bien, j'avais fini de vacciner les petits. Je rangeais les seringues vides dans la pochette, et une fois enfilée sur mon épaule, je me relevais. Je me forçais à sourire un peu, à prendre les choses comme elles venaient.

« J'ai rencontré un gentil policier, du coup, vu que j'ai porté plainte. Frederick Carmine. Il est adorable, on était aussi gênés l'un que l'autre, c'était assez drôle. Même Isabelle appréciait sa présence, alors qu'elle a peur de tout ce qui bouge d'habitude ... Et je n'ai toujours aucune nouvelle du Lion. J'espère de toute coeur qu'il va bien.»

Je finis par hausser les épaules et caressais le haut de la tête de Nono, qui s'était posé près de nous. Globalement, j'étais heureuse. Une fois, l'on m'avait dit que si je pouvais encore me poser la question de si j'étais malheureuse, c'est que je ne l'étais pas tant que ça. J'avais des amis, des pokémons. Je n'étais pas malheureuse, non. Alors je souris. Il m'était arrivé des bricoles, oui, mais c'était passé. J'avoue que ma patience était à bout, avec mes recherches qui semblaient stagner. Mais cela n'intéresserait pas le pauvre Emilio ; j'avais déjà pris part bien trop longtemps à la discussion. Je n'allais pas en plus l'ennuyer avec des histoires d'ADN et tout.

Je ne m'étais pas attendue à ce qu'il dise ce genre de choses. Mes joues prirent une teinte rouge, et je secouais la tête. Il se trompait. Ce n'était pas du courage. Je n'avais fait cela que par conviction. J'avais eu peur. Tellement peur ! Je n'avais pas pu bouger quand il m'avait frappé, cet homme, et je les aurais suivi si ils m'y avaient forcé. Je ne m'étais pas enfuie, je ne les avais pas tué non plus. Alors je n'avais fait que repousser l'inévitable. Ce n'était pas du courage mais de la bêtise. Mais je hochais la tête quant à ses propos : je n'avais pas douté de lui. J'avais juste voulu le prévenir. Au moins, il savait. Il pourrait se protéger mieux que s'il n'avait pas su. J'étais contente au moins de cela. Je me reculais d'un pas, pour lui enlever la vue des restes de mon bleu, et sourit doucement.

« Je te demande juste de faire attention à toi. Je serais triste s'il t'arrivait quoi que ce soit, d'accord ?» fis-je d'une petite voix timide.

Nous avions fini de vacciner les petits, et je rangeais avec douceur les seringues vides dans ma poche. Oui, c'est vrai. Frederick et moi nous ressemblions. C'avait été assez drôle.

« Non, je pense que tu as raison. Isabelle n'aime pas ce qui peut paraître viril, mais Frederick ... C'est un homme, mais il ne paraissait pas menaçant. Il a été très gentil avec moi. Je pense que Isabelle a senti qu'il n'était pas comme les autres, et a accepté de rester avec nous. J'étais très surprise ! » fis-je avec un petit éclat de rire. « Quant au Lion ... Je suis sûre qu'il va bien. Je prie pour ça, au moins, chaque soir.»

Je suivis Emilio, le regardais donner à manger aux venipattes, et je vis arriver toute la troupe au galop quand nous parlâmes de goûter. Nous allâmes nous asseoir dans le canapé. Doduo était restée dehors, préférant happer les insectes, mais Luxio, Nidorina et Malosse étaient avec moi, installés à mes pieds, sagement. Je les rassurais et leur dis que comme ils avaient été sages, ils auraient droit de goûter. Je sortis même, en attendant, une baie pour chacun et la leur donnait. Freyja la prit délicatement et la grignota comme une dame ; Thor la dévora en mettant du jus partout sur son pelage ; Hati la prit entre ses crocs et s'éloigna pour la mastiquer.

Emilio revint avec le plateau, et j'avançais les mains pour prendre une tasse quand je frôlais un papier. Une lettre. Malgré moi des mots me sautèrent aux yeux et je rougis en détournant le regard. Ce n'était pas à moi, je n'avais pas le droit de lire. J'avais détourné les yeux pudiquement, mais Emilio semblait vraiment choqué. Je ne pus m'empêcher de demander, alors qu'il bafouillait :

« C'est un mot de ton ami, dont tu m'as parlé la dernière fois ? » dis-je en appuyant sur le mot ami.

Je n'étais pas bête. Il m'avait bien dit la dernière fois au centre qu'il aimait les hommes - pas aussi franchement, mais dans ses paroles, il avait parlé d'un petit ami, non ? Mais ça ne me faisait rien. Je m'en fichais, de qui il aimait - l'amour était universel après tout. Luxio était revenu et s'allongea sur le canapé à côté de moi, reniflant avec envie les gâteaux.

« Emilio, tu es tout pâle, ça va aller ? » m'inquiétais-je en le voyant blême. Je n'avais pas voulu regarder ce qui ne me regardais pas, et je me sentais coupable et désolée.

Maladroitement, je me mis à secouer les mains et la tête. Non, non, qu'il ne soit pas désolé ! Il avait tout à fait le droit de ne rien me dire ! C'était même normal ! C'était moi qui était bizarre à lui raconter tout de moi, après tout. Il faisait ce qu'il voulait. Je me sentais coupable d'avoir vu la lettre, et je me sentais idiote de secouer les mains. J'arrêtais de bouger, baissais les yeux. Emilio avait l'air tout gêné, mais il n'avait pas à l'être.

« Ne t'excuse pas, tu as le droit d'avoir ton jardin secret, c'est tout à fait normal, je ne suis pas fâché ou quelque chose comme ça. »

Je le regardais servir le thé, et pris ma tasse pour y boire un peu, silencieuse. Nous semblions gênés tous les deux. Emilio me dit soudain quelque chose, et j'eus un petit rire. Effectivement, il semblait une évidence que nous adorions nous mettre dans les ennuis. Et encore, il ne m'avait jamais vu me casser la figure dans des escaliers ou me couper avec une banane. Ce pauvre Emilio ne connaissait pas encore l'étendue de ma maladresse, de ma naïveté et de mon côté tête en l'air. Les questions soudaines d'Emilio me firent relever la tête, me sortant de mes pensées.

« Mes ... Mes recherches ? Oh. Je n'avance pas autant que j'aimerais. J'y passe beaucoup de temps, et Isabelle me gronde souvent gentiment parce que j'oublie de dormir ou de manger. Mais observer les gênes et hélices ADN est absolument incroyable. Surtout depuis que j'ai Hati. Son petit corps chromatique va sûrement pouvoir me permettre d'en apprendre plus sur la différence de pelage, de couleurs. Elle a accepté de bon coeur, mais elle continue de se montrer têtue. »

Comme pour montrer qu'elle savait ce qu'elle faisait, la chienne bleue s'approcha de moi, s'assit sur mes genoux et lapa dans ma tasse. Je lui offris un biscuit pour faire la paix, et elle s'installa confortablement, en nous observant Emilio et moi.

« Et toi, tout va bien ? Tu as des nouvelles de ton frère ? Tout va bien à l'élevage ? »

Je n'avais pas pu m'empêcher de glisser une question quant à son frère. Mais qu'espérais-je ? Il n'allait pas me dire qu'il l'avait revu, sinon je suis sûre qu'il l'aurait dit avant. Le lion ... C'était un homme étrange, à qui je m'étais attaché bien malgré moi. Pourquoi lui ? Il n'avait rien de spécial, mais je continuais à sentir sous mes doigts la sensation de sa peau rêche, ou de sentir son odeur presque animale. Je rêvais même de lui. Je secouais doucement la tête. Je devais arrêter de rêver de tout cela, et revenir dans la réalité. Si il n'était pas venu vers moi, c'est que je ne l'intéressais pas. Je devais me faire une raison. De toute façon, je n'avais pas besoin de lui, non ? C'était moi qui faisait tourner le centre, moi qui devait me protéger, aidée de mes pokémons. Je souris à Emilio, essayant de repousser mes pensées assez tristes.

Sa remarque fit naître un petit rire dans ma gorge. Pauvre Isabelle, qui nous avait surpris dans une situation étrange : Emilio torse nu, et moi devant lui. Je caressais la tête de Hati qui nous observait, à présent, de ses yeux sombres. Elle bavait un peu sur mon pantalon, après avoir mangé son biscuit. Mon attention s'aviva soudain quand Emilio parla de son frère. Ce n'était pas ce que j'avais espéré, mais après tout, le Lion était vivant, c'était déjà ça, non ? Et puis, était-il si connu que cela ? Malgré moi, une petite flamme s'était rallumée, traîtresse, insidieuse. Ainsi, les résistants avaient décidé de faire une opération ? Allaient-ils risquer leurs vies ? J'eus peur, soudain, pour eux tous. Pour tous ceux qui vivaient contre le régime, et qui osaient assumer leurs choix.

Je me tournais vers le pokémon du blond, et clignais des yeux devant le makuhita jouflu. Je n'y connaissais rien dans la catégorie des pokémons combats, mais celui là avait l'air très gentil. Je souris : oui il avait l'air très mignon. Les paroles d'Emilio mirent quelques secondes à se graver en moi, et je repris enfin la parole, d'une voix un peu fêlée :

« Un ami disparu ? Je suis désolée pour toi, Emilio. Je ne trouve ps ça bête du tout, au contraire. Si tu y crois, je suis sûre que c'était réellement un signe. Et je suis fière de toi que tu te sois décidé. Moi je ... Je cherche encore ce que je pourrais faire pour eux. Mais je vais les aider, moi aussi. »

Je n'avais pas dit que je les rejoignais, cependant. Malgré que mon ami se fusse lancé pour de bon, je continuais d'avoir peur. Je ne savais pas qui contacter, et puis, qui me disait que je serais bien accueillie ? Néanmoins, je n'allais pas avoir trop le choix : quand on n'était pas pour le régime, on avait pas forcément beaucoup d'autre alternative. Je haussais les épaules, fataliste.

« Je finirais par les rejoindre, un jour. » fis-je, puis, changeant de sujet : « Dis, tu me ferais visiter un peu ton élevage ? J'ai envie de me balader un peu, et j'en connais quelques uns qui seront très contents de te revoir et de se balader. »

Je ne savais pas où ils étaient tous fourrés : ils avaient disparu après avoir engloutis leurs goûter. J'espérais qu'ils n'étaient pas partis faire des bêtises. Me souvenant de ce que j'avais également apporté, je sortis de mon sac des paquets de bonbons et un paquet de cartes que je posais sur la table, un peu gênée, les joues rouges.

« Je me suis permis aussi d'amener des bonbons et des cartes. Pour passer la soirée ici. Enfin je ne voudrais ps m'imposer, tu vois ? Mais j'avais hâte de te revoir. Je suis contente d'être avec toi. »

C'était idiot dit comme ça. J'avais espéré que l'on fasse une espèce de soirée pyjama. Qu'on se coiffe et qu'on se fasse des tresses en se goinfrant de bonbons et en parlant potins, en regardant une comédie romantique qui nous tirerait des larmes. Le gros cliché, mais je n'avais jamais vécu ce genre de choses, et ça me faisait envie. Je me mordillais la lèvre, triturant les paquets de bonbons non pour les ouvrir mais pour me calmer.

Sincèrement, oui, il aurait pu ne pas apprécier que je m'impose comme ça, avec mes cliques et mes claques. Mais son rire, sa gaieté me firent chaud au coeur, et bien plus encore sa façon de m'accepter, comme ça. Alors, j'allais passer la soirée chez lui ? J'étais contente. Je hochais la tête et me levais pour le suivre ; j'étais curieuse de voir un peu son élevage, tiens. Je sortis la première, Emilio tenant la porte avec galanterie, et je frissonnais doucement dans l'air du début de soirée qui rafraîchissait. Mais il faisait encore bon, et surtout, le paysage baigné de la couleur orange du soleil donnait une impression de féérie merveilleuse. Je rêvais d'habiter dans un endroit pareil, plus tard, quand j'aurais trouvé quelqu'un pour partager mes vieux jours. Si tant est que je trouvais quelqu'un ...

La question d'Emilio me prit au dépourvu, puis m'enchanta au plus haut point. Quelle bonne idée il avait eu ! Je sifflais, et tous mes pokémons s'approchèrent, venant de divers coins de là. Thor et Hati arrivèrent, en se grognant dessus pour jouer, puis se fut à Freyja et Gersimi d'arriver. Je penchais la tête, puis mes yeux se mirent à pétiller. Emilio s'était penché pour observer Hati, et la malosse chromatique, flattée de tant d'attention, se laissa faire, venant jusqu'à lui aboyer dessus pour montrer sa sympathie. La flatterie marchait bien, avec elle et Thor, au vu de le fierté mal placée à tout les deux. Gersimi, ma doduo, portait toujours ma selle, et au vu de l'idée de Emilio, j'en avais eu une seconde.

« Est-ce que cela te tenterais de monter Gersimi, un peu à la manière des bergers avec leurs wattouat ? Tu pourrais suivre Hati, et l'aider dans sa tâche ? »  

Même si Emilio devait peser plus lourd, j'avais habitué Gersimi à porter des charges plus lourdes que moi, et la doduo semblait ravie de pouvoir aider. Thor et Freyja nous observaient, entre jalousie et curiosité. Le félin électrique, par contre, semblait faire émaner de lui l'envie de participer. Freyja, elle, je savais qu'elle ferais comme je dirais.

« Thor pourrait aider aussi. Attendre à l'entrée de leur abri et leur indiquer d'entrer, ou quelque chose de ce genre ? »  

Thor eut un petit bruit de gorge, reconnaissant que je pense à lui. Je caressais le poitrail duveteux de l'oiseau bicéphal ; j'avais lu des magazines sur les différentes montures pokémons, et la plupart du temps, les dresseurs montaient des pokémons gigantesques ou chevalin : Galopa ou Ponyta, Zébibron et son évolution, ou encore Arcanin ... Doduo était également un pokémon apprécié, et j'étais contente d'être tombée sur Gersimi. Douce et docile, elle faisait une monture d'autant plus précieuse qu'elle faisait réellement attention à son cavalier en alliant sa vitesse et une démarche vaguement berçante. Je me tournais vers Emilio, mes yeux roses pétillants de bonheur : l'idée d'assister à un tel rodéo me mettait du baume au coeur, et mes pokémons semblaient aussi contents que moi. Freyja vint se frotter à mes jambes, pour ne pas être en reste. On devait former un beau tableau, tous ensemble, tiens.

Je retins un petit sourire devant l'air assez peu sûr de lui de Emilio. Pourtant Gersimi avait plutôt une bonne vitesse de croisière. Caressant les deux têtes de l'oiseau, je songeais que j'appréciais peut-être ma douce Gersimi car j'y étais habituée. Je souris, et hochais la tête ; ce n'était pas grave. J'avais proposé cela, plus par jeu qu'autre chose. Freyja me suivit, alors que je suivais Emilio, Thor et Hati sur mes talons. On avait tous à peu près compris ce qu'il fallait faire. Emilio s'occupait de l'un, nous de l'autre ; Thor était parti les attendre à leur étable.

« Je monte sur Gersimi, oui, et Hati et Freyja vont me suivre. On est prêts, Emilio ! On peut y aller ! »  

Je m'étais approchée de l'enclos du Carabing, et observais la bestiole qui n'avait pas l'air spécialement amicale. Enfin, je montais sur la selle de la Doduo, mon assiette de cavalière se mettant en place tout de suite. Hati grondait déjà, tournant sur elle-même, impatiente devant ce nouveau jeu. Enfin, Emilio donna le départ, et j'ouvris l'enclos. L'insecte courut comme un malade, suivit de Hati qui, la gueule découvrant des flammes comme une fournaise, grognait dans sa direction. Un peu plus loin, Emilio suivait l'escargaume. Je talonnais ma doduo, et elle partit au trop ; je serrais les rênes, Freyja à mes côtés, courant, et je me mis à rire, alors que Thor, plus loin, envoyait des éclairs au ciel pour montrer où il fallait aller. La chienne bleue faisait mine de mordiller les pokémons, car un regard et ils tentaient de s'approcher, de se battre. Je suivais, les empêchais parfois de tourner, pendant que Hati était occupée plus loin avec l'autre.

Ils avaient un sacré caractère ! Je dépassais Emilio en riant, mes cheveux voltigeant dans mon dos, et Freyja en profita pour rester à la vitesse de l'éleveur, ne pouvant rivaliser avec la vitesse de la doduo. Hati continuait de guider les pokémons vers l'enclos, et à présent que nous approchions, j'entendais les feulements de Thor - il était de toute façon impossible de manquer ses éclairs gigantesques, fourches d'un jaune pâle et électrique qui fendaient le ciel. Gersimi accéléra encore, et enfin, nous fûmes proches de l'étable. Thor et Hati se firent gardiens des deux entrées, et enfin, les deux pokémons entrèrent, non sans s'être lancé un regard de défi. Durant la course, ils n'avaient pas pu s'approcher à moins de trois mètres l'un de l'autre. Je descendis de selle, aussi esouflée que si j'avais couru comme Hati, et tombais à genoux pour serrer la chienne et le fauve dans mes bras. Je m'étais amusée comme une petite folle. Je me relevais et me tournais vers Emilio, un large sourire au visage, alors que Freyja revenait se coller à mes jambes.

« C'était ... C'était fantastique !   »  m'exclamais-je, le souffle court, comme une gamine à Noël. J'étais toute ébouriffée à cause du vent et de la course, et ma veste retombait négligemment de mon épaule. Alors, je repris mon souffle et serrais Gersimi contre moi ; l'oiseau émit un petit bruit de gorge et frotta ses deux têtes contre moi. « Ca ne doit pas être de la tarte, habituellement, non ? » demandais-je, essayant de reprendre mon sérieux, la gorge serrée, un rire au bord des lèvres. Je me sentais plus libre et plus pleinement heureuse que depuis des lustres, et ça faisait juste un bien fou.