In the Middle of the Night (OS)

In the Middle of the Night

I've been walking this road of desire,
I've been begging for blood on the wall.
I don't care if I'm playing with fire,
I'm aware that I'm frozen inside.
I have known all along.

« Irina? »

Pas de réponse. Ma jumelle me tourne le dos, j’ai cette impression de déjà-vu qui me taraude l’esprit et je suis exaspéré de ne jamais la sentir partir de moi. Ma sœur ne me répond pas. Je sais très bien ce qu’elle regarde, ou plutôt qui elle regarde.

« Irina! »

Je veux que ce soit moi qu’elle regarde, même elle a préféré m’ignore au final. Même elle… Pourquoi fallait-il qu’il fasse d’Irina aussi son pantin. Combien de temps me suis-je bercé de l’illusion que les parents devaient toujours croire en leur enfant, être fier de lui, l’aider a grandir, à atteindre ses rêves. Je n’ai pas cru longtemps à ces conneries, j’ai vite compris, mais Irina a continué d’espérer. Cette énergie qu’elle avait dans le désespoir était presque belle, mais en fait… Elle savait déjà. Depuis le début. Depuis le début elle savait qu’elle deviendrait le jouet de notre cher papa. Qu’il finirait par la contrôler, par nous contrôler.

« Irina! »

J’avais voulu nous sauver. C’était quoi son problème à la fin?

« Irina, grouille-toi, on s’en va! Vite! Il va nous rattraper si tu ne viens pas! Irina viens avec moi, je t’en supplie, me laisse pas seul…! »

Me laisse pas seul putain. Pourquoi elle n’a pas voulu partir avec moi? Qu’est-ce qu’il y avait de tellement mieux dans la maison qui nous a vu nous briser au fil des années, dans cette famille ou personne n’a jamais voulu voir qu’on existait? Ma voix d’enfant retentit dans le couloir, mes jambes s’emmêlent dans une mélasse obscure, je me débats, je cours, mais je sombre. Je vois Irina happée par des bras d’ombre. Sa voix me dit adieu. Bordel. Je la hais. Parfois je la hais de m’avoir fait ça. Pourquoi pas moi à la fin? Je voulais juste nous protéger, je voulais juste qu’on soit enfin heureux.

In the middle of the night,
I don't understand what's going on
It's a world gone astray.
In the middle of the night,
I can't let it out.
Someone keeps searching
And shatters your life
It will never be afraid
In the middle of the night

Je me réveille dans mon salon. Toutes les lumières sont éteintes, l’obscurité glaciale de mon propre logis me donne froid dans le dos. Je ne sais pas pourquoi la peur le tord l’estomac. J’appelle encore Irina, j’espère qu’elle va venir me voir, qu’elle va me prendre dans ses bras et me dire que ce n’est pas grave, que ce n’était qu’un rêve, qu’elle sera toujours là avec moi, qu’elle ne s’en ira plus jamais. Mais à la place, le téléphone sonne et la sonnerie me perce les tympans. Le combiné est déjà à mon oreille et mon sang se glace dès la première syllabe que prononce la voix venant de l’autre bout.

« Alexander. Cela va faire 5 ans. Comment vas-tu? Que penses-tu que tu as accompli jusqu’à maintenant? Es-tu fier de toi? Tu penses vraiment que tu parviendrais à te faire oublier avec la disgrâce que tu as infligée à notre famille? Oh, et je suppose que tu as bien reconnu ma voix. »
« Pap… Helmut… »
« Donc, tu ne m’as pas oublié. Tu penses vraiment que tu es en sécurité, que personne ne t’a trouvé sur ta petite île, avec ton petit nom de faux dieu qui se pavane dans son Bloc R2 comme si il était le roi du monde? Tu ne sais même pas ce qu’est le pouvoir, plutôt donner une couronne à un insecte que te la donner à toi. Tu ne seras jamais roi du pauvre Royaume dont tu rêves chaque nuit. Tu n’es plus rien depuis des années. »
« … Tais-toi… Continue de m’ignorer… Depuis toujours tu… »
« Oh, non, si j’ai des chances de te faire subir au centuple l’affront d’avoir trahi toute la famille, crois-tu que j’y résisterais? Mais de toute façon, tu le sais hein? Si je te trouve, tu sais très bien ce qui t’attend. Et tu crois que tu es encore trop jeune pour ça, mais ou est le mal de mettre fin à tes jours comme tu n’es plus personne de toute façon? »

Je ne veux plus rien entendre, mon visage blotti dans mes mains, le portable tombe à terre mais l’autre ne se tait pas.

« Regarde-moi quand je te parle. »

Mon cœur s’arrête et mon souffle se coupe. Le téléphone s’est tu pour laisser place à une voix très claire, proche. Trop proche. Quand je lève les yeux, il est là, ses yeux bleux perçants trop semblables aux miens me fixent.

« Ça fait quoi de tuer sa propre soeur? »

Je ne l’ai pas tuée.

« Alex, ça fait quoi de m'avoir tuée? »

Irina. Elle me jauge du même regard que mon père qui est toujours face à moi. Je veux pas de ça. Pas lui, pas elle. Il a pas le droit de-

Only vengeance will make me feel better.
There's no rest till I know that it's done.

You've been playing my mind through my wishes
You can feel that we're haunting the truth
Don't know - I can't hold on - always losing control

Cette fois, je me réveille réellement, couvert de sueur dans mon lit. Le souffle court, je me recroqueville sur moi-même en tremblotant. Un jour. Un jour, il me trouvera. Un jour il me trouvera et me tuera. Il me tuera avant que je puisse le faire, il m’empêchera de faire ce que j’ai toujours voulu faire. Irina… Même elle… Même elle, elle m’a abandonné. Parfois, je me dis que j’ai peut-être eu de bonnes raisons de lever ce flingue vers elle. Plutôt mourir tous les deux que retourner là-bas, m’étais-je dit. Et au final, je suis en vie. Seul dans l’obscurité de ma chambre, come un enfant qui voit des monstres sortir de sous son lit, je crains tout d’un coup que mon père me trouve réellement et qu’il m’anéantisse. J’ai vraiment peur et mon portable se retrouve dans ma main. Pourquoi l’ai-je appelée? J’ai besoin d’entendre sa voix, jamais eu besoin d’entre plus une voix que la sienne, je crois. Plus encore que celle d’Irina, c’est cette voix criarde d’idiote que je voulais entendre. Réponds. Réponds. Réponds Riku!

« Alex? »
« …Je… »
« Allo? Alex, ça va? »
« Riku… je- »
« Alex… Tu pleures? »

C’est vrai qu’en entendant sa voix, les sons sortant de ma gorge ont commencé à se briser. Le soulagement me fait perdre le contrôle et j’essuie quelques larmes avant de continuer.

« Riku... J’ai peur de... »
« Qu- Qu’est-ce qu’il y a? Dis, tu veux que je passe te voir? »
« Non, bouge pas… Dis-moi juste un truc… Tu sais, quand on s’est retrouvé sur Enola… Tu… T’en a parlé à personne, hein? Je veux dire… Si lui… Si le gros con… Si pap- Helmut savait, il… »
« Calme-toi Alex. Helmut saura jamais que t'es là. Plus jamais il t’approchera. Plus jamais. Je lui dirais jamais, et ni Liza ni Klaus ne lui diront. Aies un peu confiance en nous. »
« Un jour… Un jour… Un jour je retournerais là-bas, je le tuerais… J’le tuerais, t’entends?! Je lui arracherais les trippes! Je lui arracherais les ongles un par un! Je le ferais souffrir autant qu’il m’a… Autant qu’il nous a tous fait souffrir! Je suis sérieux, je le ferais vraiment! Tu te rends pas compte de quoi je suis capable. Je… Je… Je l’ai déjà fait… »
« Alex… Pense pas à- »
« … Je… Et s’il te fait du mal à toi… »
« Alex, il peut pas nous atteindre. C’est comme si il existait plus… Sérieux, Helmut est pas un dieu, même si il aimerait bien. Tu t’es bien démerdé, jamais il te trouvera sur Enola. »

Je respire enfin. Je me visualise le sourire de Riku et j’ai l’impression que tout est plus lumineux, d’un coup, même dans ce noir presque complet. Je crois qu’un sourire s’est étiré sur mes lèvres bien malgré moi.

« Alex, t’es toujours là? Tu fais pas de connerie, hein?! »
« Me foutre en l’air? »
« Fais jamais ça. C’est pour les faibles. »
« Je sais. Mais jamais je… Riku? »
« Me remercie pas... Sérieux, c'est normal je voulais juste- »
« T’es vraiment la chose la plus précieuse que j’ai. »

So much more going on, no denying,
But I know I'm not standing alone

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