Un problème de plus dans ce monde de brutes.

OS

Sten regardait la pluie qui tombait par la fenêtre. Il soupira. Quel temps ! Il aurait bien aimé sortir, s'occuper un peu de ses Pokemon. Le suédois était du genre à avoir besoin de grand air, d'où le fait qu'il ait choisi de vivre à l'orée d'une forêt. Il ferma les yeux, espérant peut-être que quand il allait les rouvrir, la pluie allait s'arrêter ? Mais ce ne fut pas le cas, bien sûr. L'éleveur alluma sa télé, avant de se souvenir que sa box ne fonctionnait pas. Nouveau soupir. Pas de télé, ni d'internet, et il pleuvait. Fort heureusement, la présence de ses Pokemon l'empêchait de s'ennuyer ferme. Même si d'un autre côté, il devait rester à l'intérieur, ce qui n'était pas vraiment du goût de Mökto. Cependant, il était évident que le zèbre ne pouvait pas tenir sous une pluie aussi dru. Aussi préférait-il se réfugier dans sa Pokeball. Au moins, il y était tranquille, et il y faisait beau.
Le reste du petit groupe avait donc décidé de jouer à divers jeux de société. Mine de rien, cela les occupa jusqu'à ce que le téléphone de Sten ne sœur. Il ne se fit pas prier et décrocha directement quand il reconnu le numéro de sa sœur.

« Hey, salut sœurette ! » dit-il, en suédois, bien évidemment.
« Sten ? »

Son ton surpris le jeune homme. Sa sœur avait parlé avec une certaine angoisse dans la voix, ce ton dur ne lui ressemblait pas. L'éleveur craint soudainement qu'elle ne lui annonce une mauvaise nouvelle, et il avala sa salive avant de répondre.

« Qu'est-ce qu'il se passe ? »

Silence à l'autre bout de fil. Il sembla à Sten d'entendre la télévision en fond, même s'il ne savait pas ce qui s'y déroulait. Cependant, il lui sembla entendre des coups de feu. Qu'est-ce que sa sœur pouvait bien être en train de regarder encore ?

« Alors quoi, ton personnage préféré est mort ? Tu regarde encore cette série ? Va falloir arrêter de m'appeler pour ça hein, parce que je pourrais pas te soutenir à chaque fois que... »
« STEN, MERDE ! Je suis sérieuse ! »

Le jeune homme sursauta. Blenda avait vraiment l'air de ne pas rigoler, et le ton agressif qu'elle avait utilisé ne fit qu'augmenter l'inquiétude du jeune homme, qui croisa les doigts pour espérer qu'il ne lui était rien arrivé de grave. Différentes idées défilèrent dans sa tête, mais tout de suite, sa sœur enchaîna.

« Tu es toujours sur Enola ? »
« Euh... bien sûr, pourquoi ? »
« Je regarde les infos Sten. Je sais ce qu'il s'est passé le 10 juillet. J'ai appris beaucoup de choses sur cette île ces derniers jours. »

Sten avala difficilement sa salive. Depuis qu'il était arrivé ici, il faisait tout son possible pour préserver sa famille des événements de l'île. Mais c'était devenu de moins en moins facile, car plus le temps passait, plus les médias étrangers en parlait.

« Sten. Tu n'est pas en sécurité là-bas. Ces histoires de Régime et de Résistance. C'est dangereux. »
« Je sais. »
« Alors pourquoi tu ne m'a rien dit ? Tu crois quoi, que c'est parce que je suis loin que j'ai pas le droit de savoir ? »
« Non, je voulais juste... »
« Je sais Sten, tu ne dis jamais rien. Tu veux protéger les autres. Mais j'ai pas besoin que tu me protège, je suis ta grande sœur ! »
« Blenda, c'est plus compliqué que ça... Ce conflit... c'est vraiment plus compliqué. »
« Je m'en fout Sten. Tu comptes rester sur l'île ? »

Moment d'hésitation. Sa sœur allait-elle lui demander de quitter l'île ? Il allait lui refuser bien sûr, mais sa sœur semblait si inquiète, et même en colère... il avait toujours eu du mal à lui refuser quoi que ce soit, mais les enjeux étaient bien trop importants pour qu'il quitte l'île.

« Oui. J'y reste. »
« Très bien. Je viens alors. »
« Que... Quoi ? »

Pris au dépourvu, le jeune éleveur avait faillit tomber à la renverse. Est-ce qu'il avait bien entendu ? Ça faisait longtemps qu'il n'avait pas pratiquer le suédois abondamment, mais il connaissait encore parfaitement sa langue natale. Est-ce Blenda avait bien dit ça ?

« Tu as bien entendu, Sten. Je viens. Je quitte la Suède, fallait que ça arrive un jour de toute façon. »
« Mais... et tes études ? Et Papa ? »
« Je compte trouver un boulot. Quant à Papa... depuis quand est-ce que tu te soucie de lui ? Je croyais que tu ne voulais plus jamais le revoir. »
« C'est toujours vrai... »
« Alors pourquoi tu pose la question ? »
« Je... Pour rien...Je voulais juste m'assurer que tu ne prenais pas cette décision sur un coup de tête. »
« Non, c'est tout réfléchi. Depuis plusieurs jours déjà. »
« On parle français là-bas... tu sais, c'est pas toujours simple, de se faire à la langue de... »
« Non. Arrête d'essayer de me faire changer d'avis, ça ne marcheras pas. Pour la langue, je me débrouillerais, je ne suis pas si nulle que tu le penses. Je viens Sten, on a besoin de discuter. Et je ne peux pas te laisser seul là-bas. »

Sten lança un regard paniqué autour de lui. Ses Pokemon le regardait. Il avait mis le haut-parleur et eux aussi avait tout compris. Impossible de faire changer Blenda d'avis. Elle avait pris sa décision. Elle viendrait. Coûte que coûte, et aucun argument que son frère pourrait sortir ne la ferait changer d'avis.

« Tu... as prévenu Maman ? »
« Pas encore. On sait tout les deux comment elle est. Je n'ai pas envie qu'elle vienne non plus, on s'arrangera pour ne pas l'attirer ici. »

Sa sœur avait repris son ton posé habituel. Au moins, leur mère n'en savait rien, ce qui n'aurait pu que créer plus de problèmes.

« Ok. Viens alors. Je ne voit pas comment t'en empêcher de toute façon. Tu peux habiter chez moi, y'a de la place. Mais comme tu l'as dit, c'est très dangereux. Je t'expliquerais tout, mais il faudra être prudents là-bas. C'est... différent d'ailleurs. Le Régime se méfie de tout le monde, même des habitants. Ils te surveilleront de prêt si tu fais pas gaffe. »

Il avait lâché tout cela d'un bloc, désespéré. Sa sœur allait arriver de toute façon, il devait s'y préparer. Et la préparer à ce qui l'attendait.

« Très bien Sten. Je suis prête. Ça ne me fait pas peur. »
« Tu... arriveras...quand ? »
« Dans quelques mois, je pense. »
« Oh... Okay. »
« Au revoir Sten, je te retiens au courant. »
« Sa...salut, Blenda. »

Il raccrocha le téléphone et s'effondra sur le canapé. Ironie du sort, la pluie s'était arrêtée. Son cœur battait à tout rompre, et il avait mal à la tête. Les jours suivants, il allait devoir s'organiser. L'arrivée de sa sœur promettait un grand tournant dans sa vie. Il tourna un regard plein d'inquiétude vers ses Pokemon.

« Les amis, on a du pain sur la planche. »