Je me relevais, et allais m'adosser à la tête de lit en bois. Je continuais de regarder Alex, alors que ses mots étaient comme des poignards. Qu'est-ce que j'avais fait pour mériter autant de colère ? Je secouais la tête, doucement, incapable de l'interrompre, de lui dire stop, de lui dire qu'il me blessait à chaque parole. De toute évidence, il le savait et il s'en fichait. Je serrais les poings, entre colère et tristesse. Et quelque chose de plus amer. De la déception. Qu'est-ce que j'avais cru, hein ? Il avait bien raison sur une chose : j'étais trop naïf.

« T'as raison. On a aucun avenir. C'est pas ça qu'on cherchait, de toute façon, hein ? On voulait juste se faire du bien. Y'avait aucune émotion à venir. Tss, t'as raison, j'suis trop naïf. J'avais cru que tu cachais quelque chose de bon en toi, que t'étais capable d'éprouver des émotions, mais j'ai dû me tromper. Quelle naïveté de croire en quelque chose d'aussi ridicule que l'amour hein ? J'aurais déjà dû le savoir. »

J'étais amer, en colère aussi. Je crachais mes mots, venimeux, et je le regardais se préparer pour s'en aller. J'avais envie de le retenir, mais d'un autre côté, je n'en avais pas envie. Qu'il s'en aille, je m'en fichais totalement. Je ne voulais plus le voir. Si je ne pouvais pas l'avoir, je ne voulais plus l'avoir sous mes yeux. J'aurais dû savoir que, après avoir perdu Emilio, je ne pouvais plus faire confiance en personne. Du moins pas en amour. Soudain, son téléphone sonna et je détournais le regard, comme si ça pouvait permettre de lui donner de l'intimité. Quand il annonça qu'il devait s'en aller, je le regardais, comme pour le voir une dernière fois, et son sourire me glaça. Me donna envie de le frapper, parce qu'il avait raison. Son sourire n'avait rien d'humain. Je le laissais finir, puis me levais et ouvris la porte de la chambre :

« Va t'en, t'as du sale boulot sur la planche, hein.»

Mon regard était un mélange de plaie ouverte et de colère. De toute façon, j'avais autre chose à faire, moi aussi. Ce n'est pas comme si je pouvais rester avec lui. Je n'avais plus ce luxe. Je n'avais plus le luxe de l'aimer. Je le regardais partir, puis allais m'allonger sur le lit, et frappais violemment le matelas.

« Fais chier, bordel ! »

Je grommelais et me tournais sur le ventre. Je dûs m'endormir, car je fûs soudain réveillé par une téléphone. Je répondis, encore dans le coltard, mais mon sommeil s'évanouit comme brume au soleil. J'avais du pain sur la planche, moi aussi. Je me levais, revêtis ma tunique de combat, et m'en allais de la maison comme une ombre. Naïf. Je l'étais oui. Il fallait que je mette un terme à mes espoirs, voilà tout.