Allongés sur le lit, tête à tête, nous nous faisons face et ne nous quittons pas des yeux. Elle semble déterminée et elle ne lâche rien, malgré les encouragements que j'exhorte afin de l'inciter à prendre son temps pour réfléchir. Cependant, elle semble y avoir déjà songé longtemps auparavant, depuis quelques semaines, elle essaye de me le faire comprendre, elle le veut.

" Tu dois être sûre, je ne veux pas te forcer. Je l'ai mais je ne veux pas que tu te précipites pour me faire plaisir, je t'aime comme tu es Wisp. "

En effet, la petite Goupix me regarde, décidée à enfin changer de forme. Sauf qu'il n'y aura pas de retour en arrière possible, pas de possibilité de changer à nouveau. J'essaye de le lui faire comprendre, de l'inciter à cogiter un peu sa décision mais elle secoue vigoureusement la tête signe que pour elle, il n'y a plus à méditer. Je souris et la caresse délicatement derrière l'oreille.

" Tu m'en auras donné du fil à retordre. "

Ce que Wisp a vécu a su m'atteindre je suppose, plus que je ne le pensais. Ce jour là, quand sa dresseuse est tombée devant moi, abattue de sang froid, je suppose que je n'ai pas réfléchi une seule seconde en attrapant la petite renarde qui accablée par la peine s'était glissée en boule au creux du cou de la jeune fille allongée sur le sol. Elle était dérangée, vraiment dérangée. La douleur morale l'avait rendue folle, un peu comme moi. C'est pourquoi j'ai su l'aider à se reconstruire je suppose, à renaître, à croquer sa nouvelle vie à pleines dents. Ca ne s'est pas fait du jour au lendemain, il m'a fallu de nombreux mois pour qu'elle me fasse confiance, moi qu'elle voyait comme l'homme qui avait abandonné son amie. Elle en voulait au monde entier de lui avoir pris ce qu'elle avait de plus cher et je pleurais tellement ses sentiments m'étaient familiers. Je partageais sa peine, ses mauvais jours et ses nuits difficiles et en quelque sorte, elle en faisait de même avec moi. Se préoccuper des problèmes d'un autre nous force à oublier un peu les siens.

" Si c'est ce que tu souhaites, je ne peux que l'accepter. "

Je souris et je dépose entre ses pattes avant la pierre feu synonyme pour elle de changement, d'évolution. Je m'écarte un peu et je la regarde faire. Elle pose délicatement son nez sur la roche froide et clos ses paupières. Aussitôt une lumière éblouissante me force à ferme les yeux et quand je les rouvre, ce n'est plus la petite renarde au pelage roux que j'ai connu qui se tient à côté de moi mais une grande et belle Feunard qui se redresse sur ses quatre pattes et qui s'ébroue afin de décoller son pelage épais. Comme pour m'assurer que c'est bien la Wisp que j'ai connu, elle s'approche de moi et vient du bout du museau effleurer ma joue.

" Oui ma grande, tu es belle. "

Ja la caresse en la félicitant. Heureuse, elle se jette sur moi, oubliant que maintenant elle mesure plus d'un mètre. Mais peu importe, je la serre fort contre moi.

" Je suis là, je serais toujours là. "