« C'est toi ou moi, l'un de nous est de trop! »

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 Les maux du cœur II ; L'incertitude est comme un cancer, plus grave que la douleur franche de la vérité. [OS]

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Solène E. Weber-Ikeda
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Solène E. Weber-Ikeda
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MessageSujet: Les maux du cœur II ; L'incertitude est comme un cancer, plus grave que la douleur franche de la vérité. [OS]   Les maux du cœur II ; L'incertitude est comme un cancer, plus grave que la douleur franche de la vérité. [OS] EmptyVen 18 Sep 2015 - 18:53

Série d'OS - Les maux du cœur :


L'incertitude est comme un cancer, plus grave que la douleur franche de la vérité.
Pension de Baguin puis hôpital de Vanawi, 11 septembre 2015.


- ... Captain Hook, venue ouvrir officiellement son Arène au public pour cette nouvelle année de Compétition, s'est faite tirer dessus juste devant les portes de la bâtisse, il y a quelques minutes à peine. Nous n'avons toujours aucune information sur son état ou celui du bébé, mais..

Une violente quinte de toux me prit au moment où ces paroles, relayées par la télévision de la maison partagée avec mon époux sur les terres de sa Pension, parvinrent à mes oreilles ; m'étranglant à moitié avec le verre de jus d'orange que j'étais en train de boire. Je n'écoutais alors pas particulièrement les infos, qui tournaient en tache de fond en attendant l'heure d'une émission sur les Pokémons Oiseaux que Crystal voulait voir & que je lui avais promis de mettre en différé ; mais le pseudonyme de ma sœur évoqué pour un "flash info spécial" avait alors attiré mon attention. & l'information allant avec.. Il m'avait fallu quelques secondes pour réaliser la portée des mots prononcés & les assimiler, mais c'est à peine si je ne m'étais pas aussitôt étouffée ; & un instant à peine plus tard, sans écouter un mot de plus, je réagissais déjà. Me levant du canapé sans perdre un instant, suivie de près par Louna tandis que Cathy & Riad allaient chercher Ryan & Galia sans perdre une seconde, je me jetais à la cuisine où mon téléphone se trouvait en charge pour appeler tout d'abord mon amie sage-femme & pédiatre qui suivait la grossesse de ma benjamine & qui me répondit qu'elle se rendait aussitôt sur place, puis mon autre sœur, Maelys. Cette dernière ne tarda pas à répondre, sachant fort bien que je ne composais son numéro en journée -moment où elle travaillait au Centre- qu'en cas d'urgence, & il s'avéra assez vite que comme je me doutais, elle n'avait pas cette info. & que oui, Eugène était avec Judith pour la ré-ouverture de l'Arène. & qu'elle me rejoignait à la Pension de Baguin sitôt qu'elle aurait prévenu ses pokémons & Dylane pour la remplacer, afin qu'on se rende à l'hôpital de Vanawi ensemble.

Alors, rongeant mon frein du mieux que possible afin de ne pas m'y précipiter immédiatement, je m'occupais des derniers éléments à gérer pour partir posément : retrouver mon mari sur les terres de sa Pension pour l'informer succinctement & lui promettre de le tenir au courant, lui confiant de garder nos trois enfants à la maison -m'évitant ainsi un détour pour les déposer à ma grand-mère-, puis regagner le salon où ma sœur cadette m'attendait déjà, & où Cathy & Riad avaient guidés Galia & Ryan. Le second gagna aussitôt sa pokéball pour nous accompagner, tandis que la première, réunissant ses pouvoirs à ceux du Kaorine de Lys, nous téléporta sans attendre aux urgences de Vanawi.

Ainsi nous débarquâmes en plein milieu du service, faisant sursauter quelques uns des patients ou soignants présents ; il faut dire que notre groupe n'était pas minimaliste. Deux jeunes femmes avec leurs Téléporteurs, ainsi qu'une Lockpin, une Capidextre, un Rattata & une Pashmilla. Une infirmière tenta de nous dire que tant de pokémons ne pouvaient être acceptés après que Kaeri & Galia aient regagné leurs balls en attendant, mais elle se prit un tel regard noir de nous six.. Qu'elle se contenta de ne rien ajouter & de faire comme si elle avait rien vu, tandis que je me dirigeais à l'accueil pour interroger sur Judith Weber ; car je me doutais bien, connaissant ses pokémons & Eugène, qu'ils avaient dû veiller à la ramener sous son apparence normale -genre ôter à la va-vite cape, cache-œil & tricorne, & user des pouvoirs de son jeune Zorua pour faire passer sa tenue de combat pour une tenue plus passe-partout-. Il me fallut quelque chose comme vingt minutes pour tirer une toute petite information de la secrétaire médicale, & paie l'info ; "Euuuuh.. Je crois qu'ils l'ont emmenée au bloc, mais j'en sais pas plus. Non non j'sais pas non plus ce qu'ils ont fait du père." Il me fallut faire appel à tout mon sang-froid pour ne pas l'emplâtrer dans le mur juste derrière elle, & me contenter de partir à la recherche de mon beau-frère. Une demi-heure fut nécessaire, en nous y mettant à six, pour fouiller la moitié de l'hôpital & le dénicher dans un couloir près d'un des trois différents groupes de blocs opératoires de la bâtisse. & il nous suffit d'une seule, une unique question, pour le faire exploser & nous faire comprendre que cet hôpital avait décidément un grave problème.

- Les médecins ne veulent rien dire, ils se taisent, je sais pas comment elle va, j'sais pas comment ils vont!

Il était à la limite de l'hystérie, fou d'inquiétude, terrifié. & je fronçais les sourcils devant les informations qu'il donnait ainsi presque fébrilement, le regardant faire les cent pas dans le couloir tel un lion en cage. Oh, je comprenais parfaitement ce qu'il pouvait ressentir, ce sentiment d'impuissance, la panique qui l'animait, l'incertitude. Mon regard se durcit alors &, laissant à ma sœur le soin de soutenir son élève, je me détournais, retournant vivement d'un pas assuré vers l'accueil de ce service. & sitôt arrivée, j'y piquais cette fois un véritable scandale, sans plus chercher à me contenir, hurlant sur ces médecins qui nous laissaient bien trop dans l'ombre, les traitant de tous les noms pour garder secret l'état de ma petite sœur & de son bébé arrivés plusieurs heures plus tôt déjà. Aucun "mais enfin calmez-vous madame" ne sut m'apaiser, & je crois que mes cris devaient s'entendre à l'autre bout du service mais peu m'importait. Ils n'avaient pas le droit de laisser tant d'incertitude, pas le droit de considérer que les familles ne devaient pas être tenues un minimum au courant. Un sourire de victoire m'échappa, quand entre les tentatives désespérées des infirmiers pour me calmer, me faire taire, retentit plus fort que les autres une voix bien connue.

- Comment ça, les familles ne sont pas au courant?
- Tu as bien entendu, Camélia. Nous ne savons strictement rien. Mon beau-frère est en train de devenir fou à imaginer tous les scénarios sans savoir la vérité.

Le silence qui suivit, pesant, tendu, fit se recroqueviller les employés sur eux-mêmes. Si je les avais inquiétés, furie que je pouvais être, la perspective d'avoir en plus de la sœur d'une patiente, un médecin sur le dos, ne leur plaisait guère. & ils n'y couperaient pas, cela se voyait sur le visage de la jeune femme invitée à l'hôpital par moi-même pour s'occuper de ma sœur dont elle suivait la grossesse ; son expression devint dure, son regard noir. & bien vite elle les invectiva elle aussi, soutenant mes arguments autant que j'intervenais souvent pour la soutenir. Elle hurla particulièrement sur ceux qu'elle avait envoyés nous tenir au courant, qui se défendirent en couinant piteusement que telle était la politique de l'hôpital ; & alors nous promîmes de monter au créneau, réellement. Même le médecin qui s'occupait de ma sœur pendant que Camélia était présente pour le bébé ne pût nous "ramener à la raison", ni l'une ni l'autre, car c'étaient eux qui avaient perdu la raison.

* * *

Camélia m'avait accompagnée dans le couloir retrouver Eugène & Maelys. Elle s'était excusée très platement pour le comportement indigne de ses confrères, avant de nous indiquer de la suivre lorsque le jeune homme demanda des nouvelles. En chemin, elle expliqua l'état de Judith, elle expliqua que la jeune femme s'en remettrait, que ce n'était pas grand chose ; pour se taire finalement devant une porte de chambre. Son regard se durcit de nouveau, à entendre parler un médecin à l'intérieur, & elle ouvrit brutalement la porte, espérant l'arrêter probablement ; mais il était trop tard, & nous pûmes tous entendre l'homme asséner sans pommade les mots les plus violents que puisse entendre un parent.

- Le fœtus ne peut y survivre, en aucun cas.

Tout d'abord, ce fut comme si Jude n'avait pas compris. Elle resta immobile, figée, comme hébétée. Puis, petit à petit, la douleur envahit ses traits, déforma peu à peu son expression. Dans ses yeux, naquirent lentement des larmes qui refusaient de couler, refusaient, comme elle refusait la réalité. Puis un cri. Un cri enfla progressivement dans sa gorge, un cri du cœur qui lui échappa soudain, alors qu'elle s'animait de nouveau, se débattait dans ses draps. De douleur, elle hurlait. Tentait de s'échapper, d'échapper à cette terrible vérité. Du coin de l'œil, je vis Eugène s'effondrer, muet, à l'entrée de la pièce. Il tomba à genoux, déchiré, le visage baigné de larmes silencieuses, incapable de bouger. & pour eux deux, Judith hurlait cette souffrance commune. Vivement, sans réfléchir, j'allais vers elle, l'entourais de mes bras ; & malgré le fait qu'elle se débattait de toutes ses forces, je ne cédais pas. D'une main, j'attirais sa tête contre mon épaule, de l'autre j'entourais les siennes pour la serrer contre moi, murmurant simplement des "chht" un peu frêles, douloureux, mais je ne pouvais faire mieux. Je tâchais de rester assurée, réconfortante, mais j'étais bien placée pour savoir que je ne pouvais rien à sa douleur. Je ne pouvais qu'être là, mais l'apaiser, j'en étais incapable.

& peu à peu, elle se calma, sembla le faire plutôt. Ou du moins cessa de s'agiter, pour s'effondrer, vidée de toute énergie. Telle une poupée de chiffon, pleurant toutes les larmes de son corps sur mon épaule, continuant de gémir sa souffrance après s'être trop brisé la voix pour émettre encore le moindre cri. Vaguement, j'entendais Camy engueuler le médecin de murmure acides, lui reprocher de n'avoir pas appelé la famille d'abord, de ne pas avoir veillé à ce qu'ils soient là pour la soutenir, d'avoir voulu l'obliger elle à les prévenir, à prévenir le père du bébé surtout, "une chance que je les ai amenés ici & que nous étions derrière la porte, hein". Elle siffla aussi qu'il y avait des manières d'annoncer telle nouvelle, & le traita de tant de noms que je ne saurais tous les redonner, pourtant je les pensais autant qu'elle, "c'est un bébé par Arceus, un bébé, nommez-le comme tel!". Doucement, je berçais ma petite sœur en larmes, devinant que Maelys en faisait autant de son élève. Je ne la lâchais que lorsque ce dernier vint poser une main sur mon épaule, pour serrer sa compagne contre lui dès que je me fus écartée. M'appuyant contre un mur, vite rejointe par Lys, je les regardais blottis l'un contre l'autre, pleurant ensemble l'enfant qu'ils allaient apparemment perdre d'un instant à l'autre. Le silence était retombé sur la chambre depuis que le médecin était parti, nous laissant seuls tous les quatre avec Camélia, qui se taisait, respectueuse de ce silence troublé uniquement par les sanglots de ces jeunes parents à qui l'on venait d'annoncer la pire chose qui soit. Plusieurs minutes s'étirèrent ainsi, muettes, avant qu'un véritable silence tombait cette fois sur la pièce, pesant & douloureux. Alors seulement, croisant le regard de la femme-médecin, je pris la parole pour formuler cette requête qui me travaillait depuis notre arrivée dans la pièce, & qui intéresserait forcément tout le monde ici présent.

- Camy.. Dis-nous la réalité, avec tes mots. S'il-te-plait.

Elle soupira. Longuement. Massant ses tempes lentement, comme plongée en pleine réflexion ; le montrant pour la première fois tout du moins, car je savais qu'elle n'avait pas cessé un seul instant d'y réfléchir depuis qu'elle était entrée au bloc pour prendre en charge ma sœur & son bébé. Je savais qu'à cet instant, elle devait chercher ses mots avant tout, peser exactement ce qu'elle avait à faire & à dire. Au bout de plusieurs longues secondes, ses yeux brun-doré vinrent se poser sur Judith, puis sur Eugène. Elle sourit faiblement, puis reprit son air sérieux, lâchant enfin le discours qu'elle préparait depuis quelques minutes déjà, j'en étais convaincue.

- Miraculeusement, la balle a évité aussi bien les organes vitaux de maman, que bébé en lui-même ; le concernant, le problème est autre. Il s'agit d'une malformation cardiaque qui n'aurait pu être détectée avant la naissance, puisqu'elle intervient au niveau de la veine pulmonaires. Ce cas-ci est très aigu, si bien que le bébé ne peut survivre sans respirateur, ni faire le moindre effort ; je suppose que la valve est complètement obstruée, & que le sang passe à peine. Sur une malformation aussi importante & un si petit corps -en général le patient survit sans soucis plusieurs mois, & on intervient quand il a un peu grandi-.. Les chances sont faibles. Très faibles. Mais pas inexistantes. Cet hôpital n'y fera rien, ils sont obtus & stupides ; qui plus est ils n'ont pas assez de moyens pour être efficaces. Mais moi, je peux essayer. & la Clinique Connors, qui appartient à mon mentor, acceptera sans problème de vous accueillir & de me fournir tous les outils nécessaires. Je sais comment traiter ça, même si les risques sont grands..

Elle marqua une pause, regardant tristement ma sœur qui sanglotait de nouveau, troublée d'espoir & de terreur, & Eugène qui la serrait d'un bras contre lui, droit malgré les larmes silencieuses qui coulaient encore sur son visage. Un frêle soulagement m'animait également ; contrairement aux dires de l'autre abruti de médecin, tout n'était pas encore perdu alors. Il restait encore quelque chose à tenter, même si mieux valait ne pas trop s'y raccrocher.. Il restait quelque chose à tenter. Soupirant encore, la sage-femme se décida à continuer, après avoir laissé quelques fractions de seconde s'échapper.

- Alors si vous le voulez, si vous vous sentez d'endurer ça, je peux encore essayer de sauver votre bébé. Mais gardez à l'esprit que je ne peux rien vous promettre.

Un hoquet douloureux échappa à la plus jeune de notre fratrie, qui porta une main à son ventre. Elle n'hésitait pas, la connaissant je savais qu'elle ne pouvait avoir aucune hésitation. Elle tentait plutôt d'assimiler, après avoir appris la mort inévitable de son bébé quelques dizaines de minutes plus tôt, que l'espoir évoqué & animé par Camélia n'était peut-être pas vain, qu'il y avait bel & bien un plan possible même s'il risquait beaucoup d'échouer.

- Essayez.. S'il-vous-plait.. S'il-vous-plait..

Supplique brisée. Elle n'avait pas consulté Eugène du regard, mais leurs mains liées s'étaient resserrées, accord tacite & décision muette commune. Elle ne pût aller plus loin, sa voix déchirée par les larmes précédentes, par la douleur & la peur, ses épaules toujours secouées de sanglots silencieux. Sans rien ajouter, elle se tourna vers son compagnon pour aussitôt se blottir contre son épaule, & il resserra son étreinte doucement, en levant un regard troublé mais assuré vers la sage-femme. Sa voix à lui ne trembla pas, même si sa souffrance inquiète y restait perceptible.

- Nous sommes conscients des risques, mais.. Faites votre possible, qu'au moins.. Qu'au moins, on ait tout tenté..

Il parlait pour eux deux, au nom de leur couple, & si ma sœur ne surenchérit pas, trop mal en point pour le faire, je savais qu'elle n'en pensait pas moins. Qu'elle voulait autant que lui se battre jusqu'au bout pour avoir une chance de voir cet enfant vivre & grandir.

- On sera là, quoiqu'il advienne.. Toute la famille sera derrière vous, & à vos côtés. On vous soutiendra, vous le savez.




fiche by Nighty Jaegan, alias Rayquaza.
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