J’offre un petit sourire intéressé à Victoria, curieux de voir la réponse qu’elle me sortira. Je prends à mon tour une grande gorgée de vin, attendant ses propres explications. Elle ne peut pas me sortir l’excuse d’être trop occupée, je l’ai déjà fait. Ce ne serait absolument pas crédible. Je ne dis pas que ce ne soit pas possible, bien au contraire. Je sais que les jeunes compétiteurs travaillent plus fort que n’importe qui. Moi, je n’ai plus besoin de prouver ma force à qui que ce soit pour être reconnu, mais eux… Eux, c’est une autre histoire. Eux, ils doivent s’entraîner dur pour tenter de se rendre au sommet. Mais malgré tout, elle ne peut pas utiliser ça comme excuse, et elle le sait bien.

J’aime bien le début de sa phrase. J’ai envie de rigoler alors qu’elle me traite de menteur. Certes, je ne dis pas la vérité ce soir, mais c’est parce que je ne connais pas la vérité, et que je n’ai pas envi de m’embrouiller. J’ai bu une dose raisonnable d’alcool, déjà. Tenter d’expliquer quelque chose qu’on ne comprend pas avec de l’alcool dans le corps, c’est comme se tirer une balle dans le pied. M’enfin. Je la laisse continuer pour apprendre ce que je veux entendre. Personne à ma hauteur? Flatteur, je fois avouer. Je suis plutôt satisfait d’entendre ce genre de compliment, ne m’attardant pas à ce que cela pourrait sous-entendre. Surtout lorsqu’elle tente de se rattraper en blâmant la compétition. Bien sur, ma jolie, bien sur. Et dire qu’elle me traite de menteur. Elle a beau jouer son jeu à merveille, je sais bien que la compétition n’est pas la seule à blâmer. La pauvre, elle n’a tout simplement pas pu sortir mon magnifique corps de son esprit. Je lui adresse un sourire malicieux, détachant un ou deux boutons de ma chemise au passage pour lui faire comprendre que je sais tout. Oh oui, Victoria, tes sentiments, je les connais. Cette fille est clairement en amour avec mon corps, surtout sa partie du bas. Surtout celle se trouvant dans mon pantalon. D’ailleurs, elle se vend complètement en parlant de mes talents cachés. D’accord, tu n’a plus aucune couverture, ma belle.

Je pose ma coupe sur la table basse avant de m’approcher d’elle avec très peu de subtilité. Je ne sais pas si ses paroles tentaient de me communiquer une envie quelconque, mais moi, je l’interprète ainsi. C’est donc avec confiance que je passe une main sur sa taille avant de joindre mes lèvres aux siennes afin d’y déposer une baiser enflammé. Avec ça, elle devrait comprendre mes intentions. Je m’impose sur elle, collant mon corps chaud contre le sien, l’incitant à enfin retirer les boutons de ma chemise. Le repas était bon, mais maintenant, je veux le dessert. Mais je veux que ce dessert soit unique. Le plus intense que j’ai jamais dégusté. Et j’ai l’ingrédient parfait pour ça. Quelque chose qui nous fera à tous les deux prendre un max de plaisir… Je me retire, avant de me diriger vers la salle de bain, sans lui demander la permission. Ne t’en fais pas, beauté, tu ne regretteras rien.

-Attends, je reviens!

Je me dirige presque en courant vers les toilettes avant de refermer la porte et me diriger vers le bol de toilette. Je ne prends pas le temps d’admirer les lieux. J’ai autre chose à faire. Tout excité, je sors de ma poche un petit quelque chose que je sens contre ma cuisse depuis que je suis parti de chez moi. Quelque chose que je convoite depuis un petit moment. Une petite tradition à moi, pour le temps de noël. Une tradition que je n’ai jusqu’alors jamais partagé avec personne. Un petit sachet de plastique renfermant une magnifique petite farine, semblable à du sucre en poudre, mais bien plus savoureux. Oh, combien plus efficace sur moi. Pressé d’en ressentir les effets, j’ouvre le sachet avant d’en verser une petite quantité sur mon poignet. Je ne réfléchis pas avant d’en aspirer chaque flocon. L’effet est instantané. Je sens une vague d’énergie nouvelle s’emparer de moi. Mes sens s’aiguisent. Mes pupilles se dilatent. Mon ouïe s’amplifie. Une vague de bonheur s’empare de moi. Je suis bien. Je reste quelques secondes sur la toilette, attendant que l’effet s’amplifie. Et lorsqu’il atteint une force assez puissante, je me lève d’un bond. J’ai l’impression que tout se passe au ralenti. J’ai l’impression de contrôler le monde, de posséder une force spéciale, incomparable. Dans cet état nouveau, je ressors de la salle de bain après m’avoir essuyé le nez afin de faire disparaître toute tache blanche de mon visage. Je ne veux pas lui expliquer ce que j’ai fait. Je ne veux pas devoir partager. Pas parce que je suis avar de mes possessions, mais simplement parce que je sais l’effet que ces choses ont sur les gens. Je n’ai qu’à me regarder pour savoir que j’ai un problème de consommation, et je ne veux en aucun cas recréer ça chez Victoria. Et puis, je ne sais pas comment elle réagira. Je ne la connais pas encore assez pour savoir son opinion quant à ce genre de consommation. Alors je ne lui dis rien. Je me contente de m’approcher d’elle avec énergie. Je reprends ma place à ses côtés avant de m’insérer sur elle et de reprendre mes caresses avec encore plus de vigueur. À présent, j’ai vraiment envie d’elle. Je ne contrôle plus mes envies. Ce dessert sucré, je le veux. Je lui adresse un sourire rempli de désir.

-Je sais pas si t’a prévu un gâteau, mais moi j’ai pris la peine d’apporter un petit quelque chose au cas où t’aurais encore faim.

Ouais, quelque chose qui se porte sous la ceinture...

Je suis enflammé. Je la désir de tout mon être, et je pense fortement que je le montre de manière appropriée. Je redouble les caresses, qu’elle me rend aussitôt. On dirait bien qu’elle a compris mes intentions. À chaque fois qu’elle effleure mon corps, je le sens de manière multipliée, voire exponentielle. Des frissons ne cessent de me traverser le corps. Tout ce passe avec une telle clareté, je n’en manque pas un seul morceau. Mes sens sont aiguisés à tel point que je peux cartographier chacun de ses touchés. Je sais exactement qu’est-ce qui touche quoi. Ce que je vie, en ce moment, c’est le rêve. Ces simples caresses sont si intenses, seigneur que j’ai hâte de goûter la suite. Ses lèvres se mêlent aux miennes en réponses à le premier baiser que j’ai déposé un peu plus tôt. Une sensation puissante s’empare de moi. J’ai l’impression de flotter. Je ne veux que cette sensation ne cesse jamais. Je ferais tout pour la préserver. Mais bientôt, mon attention se porte sur la main de la jeune femme, qui descend dangereusement vers mon pantalon. Elle passe subtilement par mes fesses, pour se diriger vers l’avant. Je crois savoir où elle veut en venir… Ou du moins, c’est ce que je pensais. À ma grande surprise, la main exploratrice arrête sa traversée sur ma poche, pour en retirer violement mon petit sachet de bonheur.

Avant même que je puisse comprendre ce qui se passe, Victoria se précipite vers la fenêtre pour jeter ma possession au dehors! Je reste tétanisé devant ce spectacle. Mais… Mais pourquoi elle a fait ça! Ce truc-là m’a couté une petite fortune! Et puis, y a pas que ça, aussi. J’en ai besoin moi bordel! J’offre à la jeune femme un regard horrifié. Je la regarde avec de grands yeux alors qu’elle se retourne vers moi, tremblante. Je veux me lever, courir dehors, et chercher mon bien. Mais je n’en fais rien. Je suis planté là, à la regarder droit dans les yeux. Malgré la poussée d’énergie envahissant mon corps, je n’arrive pas à connecter, à comprendre la situation. Pourquoi elle a fait ça? Et pourquoi ça la met dans un tel état? Je veux crier de rage. J’ai presque envie de la gifler pour ce qu’elle vient de faire, mais ces émotions fortes s’envolent au moment où elle ouvre la bouche. Où elle prononce ces mots brisés. Des mots bien ordinaires, mais portant une telle émotion. Une vague froide, d’énergie négative, m’envahi. Triplée d’ampleur par les effets de la coke. Je baisse les yeux, honteux. Honteux d’avoir agis ainsi. Honteux d’avoir consommé sous le toit de la jeune femme. Je me couche la tête contre l’appui-bras du canapé avant de me recroqueviller en petite boule. Mes yeux sont perdus dans le vide. Je n’ose plus la regarder en face. Suis-je rendu terrible à ce point? Ne puis-je pas m’empêcher de consommer pendant une nuit? Pendant la nuit de noël?

-Excuses-moi, Victoria. Je voulais pas te faire du mal, tu sais. Je croyais pas que ça te dérangerait tant. Je fais pas exprès. Mais… j’en ai besoin. Je peux plus m’en passer. Ce truc-là domine ma vie.

J’ai honte. Je parais si faible, à parler ainsi. Si faible d’avouer ma dépendance. De m’ouvrir. Je ne veux pas en parler. Pourtant, c’est exactement ce que je fais en prononçant ces mots. Je lui avoue que je suis accro. Que je ne peux m’empêcher d’en prendre. Je n’avais jamais réalisé à quel point ces choses pouvaient me dominer. Pourtant, c’est le cas. Et moi qui m’étais toujours dit que j’avais le plein contrôle. Mais je ne l’ai pas. Sinon, j’arrêterais. J’arrêterais de dépenser tout mon argent là-dessus. Comment en suis-je arrivé là? Comment suis-je tombé aussi bas? Au départ, ce n’était que pour échapper à la dure réalité. Oublier, l’espace d’un instant, qui j’étais. Mes vices. Oublier la réalité. Mais maintenant… Maintenant je ne suis plus que l’esclave de ces horreurs. Maintenant, je ne vis pratiquement plus que pour ça. Je suis coincé. J’en dépends. Et voilà où ça me mène. Je blesse les gens. Je blesse ceux que j’aime. Je ne l’avais jamais réalisé. Mais en voyant Victoria réagir ainsi, maintenant je le réalise. Je réalise à quel point je détruis les autres avec mes vices. Si j’avais pu me retenir, je n’aurais pas gâché la soirée. Et dire que je pensais nous fournir une soirée mémorable, comme ça… Mémorable, ça elle le sera!

J’ose relever les yeux vers Victoria, qui est à présent accotée contre la fenêtre, tremblant de tout son corps. J’aurais préféré ne pas me trouver dans cet état d’éveil en de pareilles circonstances. Je tapote légèrement le sofa de ma main, invitant la jeune femme à venir prendre place à mes côtés.

-Viens Victoria. Je suis vraiment désolé. Je te jure que je ne ferai plus ça avec toi. Promis. Promis… Viens t’asseoir…

C’est la première fois que ma bonne amie la poudre me fait ce genre d’effet. Ce surplus d’énergie ressenti quelques instants plus tôt s’est transformé en énergie noire. En énergie négative se rabattant sur moi, me coinçant entre ses dents. J’ai l’impression d’avoir mis les pieds dans un piège à ours. La voir ainsi, tremblante, frêle, brisée… Rien pour améliorer mon sort. Je me dis que j’aurais mieux fait de ne pas venir. De toute manière, en quoi cette soirée est si différente des années précédentes? D’accord, j’ai mangé un bon repas au lieu d’un plat congelé, mais sinon? Je me suis drogué, j’ai tout raté. Je continue de foutre ma vie en l’air. Et celle des autres au passage, il semble. Je ne sais pas ce qui me prend. Suis-je malheureux au point de devoir dépendre de ces choses pour continuer? Au point de ne pas pouvoir passer une soirée pourtant bien partie sans aller me foutre des saloperies dans les narines? Je ne sais pas pourquoi je fais ça. Pourquoi je continue d’en prendre alors que ça ne fait que me détruire. Cette soirée en compagnie de Victoria aurait dû me suffire. J’aurais dû m’en contenter. J’aurais dû. Mais pourtant, j’ai cru tout bonnement que ce que je faisais était correct, même bien. Quel imbécile.

Je relève les yeux pour apercevoir une larme salée couler le long de la joue de la jeune femme. Elle prend la parole après avoir pris place à mes côtés, et commence à m’avouer quelque chose, mais cesse subitement. Elle ne peut le dire. Je ne tente pas de la pousser à parler. Je me contente de l’observer en silence, lui adressant mon regard désolé le plus sincère. Parfois, il est préférable de ne pas partager certaines choses. On dit souvent qu’on se sentira mieux après avoir parlé, mais ce n’est pas toujours le cas. Des fois, parler ne fait que rouvrir des plaies. Retourner le couteau dans la plaie, comme on dit. Alors je ne lui demande pas de détailler les faits. Je respecte son secret. Même si je me doute un peu du reste, d’après ses paroles. De ce que je comprends, il est mieux qu’elle ne poursuive pas. C’est mieux ainsi. J’ai tellement honte de lui infliger ça. Je suis celui qui tourne le couteau dans la plaie. Avec mes vices, je la blesse. Si j’avais su… Mais en fin de compte, même si j’avais su, m’en serais-je passé? Aurais-je terminé cette soirée clean? Me serais-je retenu pour elle? J’en doute. Pendant un instant, avant de rentrer dans cette salle de bain, j’ai ressenti un profond besoin. Je me suis senti obligé. La résistance aurait été futile. Alors, non, même si j’avais su, rien n’aurait changé. Je ne peux donc pas excuser mon geste en me servant de mon ignorance. Je ne peux pas me l’excuser. Je suis coupable sous tous les angles. Je suis horrible. Je m’en veux.

Alors que je regarde toujours dans le vide, je sens son corps encore tremblant se poser contre mon épaule, partageant avec moi un peu de sa chaleur corporelle. J’ai presque envie de la repousser tellement je me sens coupable de lui infliger tout ceci. Mais bien sûr, je ne le fais pas. Jamais je ne pourrais. Je ne serais qu’un monstre, si je l’empêchais d’aller chercher le peu de réconfort que je suis encore en mesure de lui donner. Alors je la serre. Je la serre de manière rassurante. Je ferme les yeux, couchant à mon tour ma tête contre la sienne. Je ferme les yeux, tenant de chasser cette énergie sombre entourant mon corps. Je veux dissiper les effets mal sains de la poudre. Je veux les faire disparaître comme ils sont venus, bien que je sache qu’il soit impossible de le faire. Et pourtant, j’y crois. Je crois que j’en suis capable, et ça m’apaise. Ça m’apaise de savoir que j’ai peut-être encore un petit contrôle sur mon propre corps. Et cet espoir, aussi mince soit-il, m’encourage à rester aux côtés de la jeune femme, à la bercer légèrement. J’ai l’impression, comme ça, de ne pas être un monstre fini. Mais malgré tout, je ne comprends absolument pas comment elle peut avoir confiance en moi ainsi. Elle non plus, d’ailleurs. Elle ne devrait peut-être pas. Faire confiance à un droguer, ce n’est pas tellement la meilleure chose à faire. J’ai envie de lui dire d’arrêter de se confier à moi. Ce sera mieux pour elle, non? Et pourtant, je ne le ferai pas. Je ne veux pas qu’elle cesse, au fond de moi. Intérieurement, j’ai envie qu’elle se confie, qu’elle me fasse confiance. Alors au lieu de l’avertir, je me contente de lui caresser les cheveux avec douceur. J’ai l’impression que tout nous éloigne, et pourtant, nous ne cessons de nous rapprocher. J’aurais franchement pu partir, frustré, lorsqu’elle a jeté mon bien par la fenêtre. Et elle, elle aurait pu me mettre dehors avec raison, mais elle n’en a rien fait. À la place, nous sommes tout simplement là, sur ce même canapé qui a failli assister à de charnels ébats. On est là, collés l’un à l’autre. Comme un vrai petit c… Comme des amis. Des amis. Voilà le mot que je cherchais. Amis. Enfin, amis avec un petit plus, mais bon, bref!

Mes doigts se promènent dans sa chevelure, jouant après quelques mèches. Un silence s’est installé depuis sa dernière phrase. Je ne sais pas trop quoi répondre, pourtant, je sais que je devrais probablement dire un truc. Un truc de rassurant. Un truc qui changera l’air morose qui s’est installé dans la pièce. Pourtant, je ne trouve rien. Niet. Aucune paroles ne me viennent en tête autre qu’un truc idiot du genre «tu veux toujours du dessert?» ou une connerie du genre. Mais ce ne serait probablement pas approprié. Je doute que la jeune femme ait envie du gâteau aux carottes de la pâtisserie du coin. Je pousse un petit soupire. Décidemment, la vie était probablement plus facile lorsque je suivais mes règles comme du monde. Ne pas s’attacher, ne pas s’investir. Regardez où ça m’a mené… Et pourtant, je n’ai pas la moindre envie de me retirer. Alors je dois m’en sortir comme un grand. Je dois réparer les pots cassés.

-Si tu préfères, Victoria, je peux aller faire un tour et revenir quand les effets se seront dissipés. Si t’es pas à l’aise, je veux dire… Je vais comprendre hein. Mais je veux pas gâcher cette soirée comme ça. Je veux qu’on s’amuse, qu’on oublie tout. Je veux vraiment revenir. Mais si tu veux pas, ben je vais comprendre…

Bien que je n’aie absolument pas envie de sortir, je suis prêt à le faire, si c’est son désir. C’est la moindre des choses, après tout. J’ai l’impression d’avoir brisé quelque chose en elle, alors c’est mon devoir de me plier à ses souhaits. Alors, retenant un soupire, je me lève lourdement alors qu’elle accepte ma proposition. Je regarde avec une grimace le ciel qui s’est assombri depuis que nous avons terminé de manger. Les étoiles le couvrent, à présent, éclairant quelque peu les rues plongées dans la pénombre. Avec les nuages qui se dessinent sur le ciel, celles-ci sont rares. Mais elles sont suffisantes pour que je puisse apercevoir les rues, ce qui me rassure. Je sais que cet endroit de la ville n’est pas des plus sécuritaires la nuit, mais je n’ai pas peur. On ne s’attaque pas souvent à plus fort que soi, et sans vouloir me venter, je suis plutôt bien foutu, côté muscles. On ne m’a jamais encore attaqué, et j’espère fortement que mon initiation ne se fera pas ce soir, le soir de noël. Malgré tout, Victoria insiste pour que je prenne avec moi un de ses Pokémon. Il s’agit de la Luxray, que j’ai déjà croisé dans mon arène, après notre fameux petit déjeuner. J’hésite quelques instants à la prendre avec moi, ne sachant pas trop à quoi m’attendre. Après avoir vu l’attitude du gros Aligatueur, je ne suis pas certain que de me balader avec un des Pokémon de la jeune femme soit la meilleure manière de rester en sécurité. Enfin, je n’ai pas vraiment le choix… Toujours hésitant, je fini par accepter et j’attrape la Pokéball que me tend la jeune femme.

J’adresse un dernier regard à Victoria avant de me diriger vers la porte. J’ai l’impression d’être un soldat quittant pour la guerre, laissant derrière lui sa femme et ses enfants. Sauf que moi, je vais faire un petit jogging pour passer les effets de la coke, alors qu’une amie profite de cet instant pour se ressaisir. Bon, d’accord, c’est complètement différent, mais c’est tout de même l’impression que j’ai. Je souris une dernière fois à mon hôte, puis je sors, pour me retrouver seul, dans ce couloir blanc, terne, vide. Il est tellement vide que je peux entendre le bruit des néons. Rien de plus joyeux. En haussant les épaules, je me dirige lentement vers l’extérieur avant de libérer le Pokémon électrique. Par précautions, je prends la peine de m’éloigner de quelques mètres, de peur que le lion ne me saute à la gorge. S’il faut, Victoria lui a ordonnée de me tuer, ni vu ni connu. Je réalise rapidement que cette idée est complètement idiote, en apercevant les yeux doux de la Luxray. Malgré sa taille imposante, on dirait un petit chaton. Je m’approche, toujours sur mes gardes, et tend une main, cherchant à la caresser. Le résultat dépasse mes attentes. Le Pokémon se met à ronronner tout en se frottant avec vigueur sur moi. J’échappe un petit rire, surpris de la voir ainsi. Disons que c’est un peu différent de l’Aligatueur. Rassuré par les comportements affectueux de ma compagne, je lui indique de marcher à mes côtés. Elle obéit sans rouspéter.

N’ayant pas vraiment de route déterminée à l’avance, nous nous contentons de marcher, pour finalement nous arrêter trois ou quatre minutes plus tard dans un petit parc. Je vais tout bonnement prendre place sur une balançoire un peu humide, et commence à me bercer devant la Luxray qui prend place devant moi. La balançoire grince légèrement, comblant le silence qui s’est installé. J’observe la lionne électrique dans les yeux. Elle m’offre un regard doux, elle m’inspire confiance. Elle me fait un peu penser à Stella, ma confidente. Stella, qui prend toujours soin de moi. Elle qui s’assure toujours que je respire encore, quand je me retrouve dans un état végétatif, après une consommation particulière. Elle qui s’assure que j’ai de l’allure lorsque je sors. Elle qui remplace parfois mes verres d’alcool par des verres d’eau. Shadaya me fait drôlement penser à elle. C’est sûrement cette confiance qu’elle inspire. J’ai presque envie de m’ouvrir à elle. Lui exprimer mes émotions. Lui parler de ce qui trame entre sa dresseuse et moi. Mais je n’en fais rien, car il est bientôt temps de rentrer. Je resterais volontiers ici, sur ce banc humide, en compagnie de la Luxray, mais je ne veux pas non plus que Victoria s’inquiète. Alors je me lève, et fais signe à Shadaya, qui s’est maintenant couché sur l’herbe, de me suivre. Encore une fois, elle m’écoute passivement. Elle vient se frotter de nouveau contre moi, afin que je lui offre une nouvelle caresse. D’accord, elle me fait penser à Stella, mais je dois avouer qu’elle est bien plus câline.

Une fois devant l’immeuble de Victoria, je m’arrête devant la porte. J’hésite à prendre une cigarette. J’en ai grandement envie, mais en même temps, après ce qui vient d’arriver, je ne suis pas sûr. Ce serait bête de devoir tout recommencer. Mais, juste une petite cigarette, rien de bien grave. Rien de bien mauvais. Juste une petite. Ça ne prendra que quelques minutes. Une ou deux bouffées. Un regard à la Luxray suffit à me convaincre. Non, ce n’est pas nécessaire. Je n’en ai pas besoin. Même si j’en ai vraiment envie. Vraiment, vraiment envie. Mais je ne le fais pas. En prenant une grande respiration afin de me donner du courage, je m’insère dans la bâtisse, et cours presque jusqu’à l’ascenseur, pour ne pas changer d’avis. Trop tard, maintenant. La porte de l’ascenseur vient de se refermer, emportant avec elle mes seules chances de fumer. Malgré l’envie profonde de cigarette, je suis tout de même fier d’avoir résisté. Fier d’avoir contrôlé mes pulsions. Bon, ça ne veut pas dire que j’arrête de fumer ce soir, mais c’est un bon départ pour reprendre le dessus sur mes addictions.

D’un pas stressé, je me dirige vers l’appartement, la Luxray sur les talons. Je m’empresse d’ouvrir la porte, sans même prendre la peine de cogner. Je suis de nouveau habité par une puissante énergie, mais cette fois, ce n’est rien d’artificiel. C’est une énergie pure, naturelle. Et peut-être aussi un peu due à cette envie de cigarette toujours présente. Mais je ne succombe pas. Et ça me remplit encore plus d’énergie. Alors que Victoria s’approche de moi, j’ai vraiment envie de lui raconter ma prouesse. J’ai envie qu’elle me félicite, qu’elle soit fière de moi. Mais la jeune femme est plus rapide que moi. Avant que je n’aie le temps de lui exprimer mon expérience, elle me propose un marché intéressant. Un marché que je ne peux refuser, et d’ailleurs, que je n’ai nullement envie de refuser. Je lui souris en guise de réponse, avant de la laisser poser un baiser sur mes lèvres. Je retiens ce contact encore quelques instants, désirant faire durer la magie encore un peu. Mes mains s’égarent sur sa taille, avant de remonter jusqu’à son cou et sa nuque. Je fini par retirer mes lèvres, afin de lui murmurer quelques mots à l’oreille.

-Et si on allait officialiser ce marché dans ta chambre? Cette fois, c’est sans drogue…